LA DOULEUR

LA DOULEUR  Théâtre des Amandiers Nanterre, par Edith Rappoport

 

De Marguerite Duras, interprété par Dominique Blanc, mise en scène Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang

Dominique Blanc, seule en scène sur le grand plateau est assise devant une dominiqueblanc.jpgtable pleine de papiers et d’un relief de repas. Elle a perdu la mémoire du carnet qu’elle avait écrit pendant le mois d’épouvantable angoisse dans l’attente du retour des camps de concentration, de son mari Robert Antelme. Elle classe nerveusement ses papiers, enfile son manteau, sort de chez elle pour rejoindre une rangée de chaises, où elle attend, elle attend, ne le trouve pas parmi les déportés. Et puis c’est François Morland (Mitterand) qui l’appelle pour lui dire qu’on a retrouvé Robert mourant à Dachau, qu’il faut très vite partir sauver de la mort. On le ramène, elle ne le reconnaît  plus, il faut l’empêcher de manger, lui donner pendant 17 jours, six cuillerées de bouillie, six fois par jours. L’extraordinaire sensibilité de Dominique Blanc donne une vie nouvelle à ce texte, sur lequel j’avais versé des larmes.

 

Edith Rappoport


Archive pour décembre, 2008

TICKET

TICKET  Premiers pas Théâtre du Soleil par Edith Rappoport

Conception et mise en scène de Jack Souvant, Collectif du Bonheur intérieur brut

 

Ce spectacle documentaire nous emmène  dans un  inquiétant voyage, celui  des migrants clandestins, sous la conduite d’un passeur louche et déluré qui nous guide jusqu à un immense camion où nous nous entassons sous des couvertures. Pendant ce voyage immobile, on voit les brutalités insoutenables ordinaires qu’on préfère oublier, une jeune noire assoiffée qui doit subir la pire violence pour obtenir une gorgée, le passage à tabac d’un jeune chinois… Nous sommes débarqués dans une lumière éblouissante sans avoir touché la terre promise. Un étrange voyage qu’il faut absolument parcourir. Puissent les festivals de rue s’en emparer !

Fragments d’un hiver

  Fragments d’un hiver, texte et direction d’acteurs d’Elisa Ghertmann par Philippe du Vignal

  Il s’agit d’une simple lecture donnée dans une brasserie très années 50.. Avec stratifié mural imitation bois et plafonnier carrés en plastique blanc un peu sale. Aucun décor évidemment que celui-là, cinquante spectateurs installés tant bien que mal devant le bar où sont  juchées trois des jeunes comédiennes, les quatre autres étant parmi le public.Le texte, sans doute en partie autobiographique,  d’Elisa Ghertmann est à, la fois sobre et d’une belle efficacité. Il y a dans ce café un silence étonnant dès que les comédiennes se mettent à dire ce texte d’une cinquantaine de minutes à peine, soit en solo soit parfois à trois ou quatre. C’est  assez magnifiquement dit pour être signalé; il y a en particulier Marion Amiaud qui a proposé ce cycle de lectures, qu’on a pu voir notamment dans L’Avare avec Michel Bouquet.
  Si vous habitez le coin, cela vaut le coup d’y aller voir en janvier, vous y découvrirez une belle équipe qui sait dire donner du sens à une fiction avec beaucoup de modestie… et d’intelligence.Par les temps qui courent, cela fait toujours du bien, même si, comme nous tous, vous êtes allergique aux lectures, surtout dans un café.

 Brasserie des Buttes Chaumont 84 avenue Secrétan. Prochain cycle de lectures chaque lundi de janvier à 21 heures à partir du 5; Informations: 06-08-58-99-72

   Philippe du Vignal

Les Diablogues

  Les Diablogues de Roland Dubillard, mise en scène par Anne Bourgeois par Philippe du Vignal 

Roland Dubillard, autrefois élève de Gaston Bachelard et licencié de philo, avait écrit une série de quatorze dialogues, à la demande de Jean Tardieu diablogues.jpgpour la radio, qui avaient pour titre Grégoire et Amédée. C’était en 1953 … et cela faisait la joie des gamins dans les cours de lycées, qui les racontaient aux autres ( les transistors n’étaient pas encore apparus). Quelque vingt ans plus tard, Dubillard les adapta pour le théâtre. Jacques Seiler les mit en scène avec succès en 75, puis Dubillard et Piéplu les jouèrent ensuite. Puis Anne Bourgeois, suivie de beaucoup d’autres, les mit elle aussi en scène en 94 et a repris ces fameux Diablogues depuis un an un peu partout en France avec François Morel et Jacques Gamblin, et depuis quelques semaines au Théâtre du Rond-Point.
  Les douze sketches retenus par Anne Benoit constituent une sorte de feu d’artifice du langage qui se met à déraper le plus souvent à cause d’une logique poussée à l’extrême, alors que les deux personnages qui essayent en vain de se comprendre ,semblent être dans la norme sociale: costume gris, cravate, chaussures noires. L’un est un peu plus enveloppé ( François Morel) et sert souvent de souffre-douleur à l’autre, sec et raide, (Jacques Gamblin), volontiers donneur de leçons. Ils cherchent,cependant à se comprendre malgré cette faillite permanente du langage mais, malgré une bonne volonté désespérante, n’y arrivent jamais.
  Et Dubillard sait manier comme personne la logique poussée jusqu’à l’absurde, le quiproquo, le calembour, le non-sens, la phrase usée jusqu’à la corde: « Il faudrait vivre tout seul quand on est artiste » … Très vite- c’est la clé de cette incompréhension totale: les mots ne disent pas la même chose pour ces deux personnages le compte-gouttes- et la démonstration est impitoyable-devient en fait un pousse-gouttes, la seule méthode pour plonger de façon synchronisée est de se caler sur le O du mot plongeon, et l’apéritif dénué de tout alcool  conduit à ressentir toute la douleur de l’existence, et Deux, après les réflexions de Un, déduit logiquement que c’est à cause de la pluie qu’il a peur  de la police…Et la fameuse Paulette, dont leurs deux cousines portent ce prénom, restera à tout jamais une véritable énigme.
  Ces Diablogues sont sûrement ce que Dubillard aura écrit de plus fort et le passage de la radio au théâtre  semble s’être fait naturellement, comme si le texte y avait été prédestiné; il faut dire et répéter que les deux comédiens sont exceptionnels. Morel a toujours ce cet air de chien battu,résigné mais lucide, plongé dans une sorte d’ahurissement métaphysique, en proie à une sorte de mal-être qu’il n’arrivera jamais à comprendre, mais finalement pas si malheureux, même (Je le revois, tel une sorte de joyeux fantôme, remontant avec moi le grand escalier de Chaillot en chantonnant le célèbre  Go in the  wind de Joan Baez, sans que nous arrivions à retrouver ni l’un ni l’autre quel était cet air…) On ne dira jamais assez combien ce grand comédien a été à la base de la réussite des meilleurs spectacles des Deschamps.
  Gamblin est , lui aussi une grande figure poétique parmi les comédiens d’aujourd’hui; il est dans le spectacle comme empreint d’une sorte de folie logique qui le conduit aux pires suppositions,sans que cela ne le trouble vraiment mais il a l’air aussi désemparé que son compère devant les mystères et les failles du langage quotidien.
   Quant à la mise en scène d’Anne Bourgeois, elle ne fait, malheureusement, pas preuve de beaucoup d’imagination : la scénographie ( une carte du ciel avec des points lumineux pour figurer les étoiles-sans doute pour figurer le grand vide métaphysique est d’une naïveté désarmante, le spectacle est bien mal éclairé, et il y a de nombreuses ruptures de rythme! Et le dernier quart d’heure sans doute à cause des deux sketches moins solides parait bien long. C’est dommage quand on a la chance de pouvoir mettre en scène deux comédiens qui  jouent avec une telle harmonie.
  A voir? Oui, malgré tout, surtout pour le texte de Dubillard et encore une fois pour le numéro exceptionnel de ces deux comédiens.

Philippe du Vignal

Théâtre du Rond-Point, jusqu’au 7 décembre ( groupez vous à huit ce sera 20 euros), sinon les places sont à 33 euros!!!!!!!!!!
 

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