Œdipe de Sophocle
Œdipe de Sophocle par la Compagnie du 3° Œil
mise en scène Philippe Adrien
Après Le malade imaginaire, Le procès d’après Kafka et Don Quichotte Philippe Adrien poursuit son travail avec la compagnie du 3° Œil dirigée par Bruno Netter, acteur aveugle, et composée en partie d’acteurs handicapés, en montant Œdipe de Sophocle. Une approche intelligente et réussie du mythe. Un parti pris dramaturgique tenu avec cohérence de raconter l’histoire d’Œdipe comme un conte ou une légende à travers une mise en abyme d’Œdipe roi, inscrit sur le mode du flash back, dans le corps d’Œdipe à Colone qui constitue ainsi le prologue et l’épilogue de l’histoire. Le spectacle commence par l’arrivée d’Œdipe, vieillard aveugle, banni de Thèbes, guidé par Antigone, à Colone où il raconte son histoire tragique : l’oracle, le parricide, l’inceste. Puis on bascule dans Œdipe roi où dans Thèbes ravagée par la peste Œdipe mènera une enquête pour découvrir la vérité sur son abandon par ses parents, son meurtre de Laïos, son père, son mariage avec Jocaste, sa mère, qui amènera son auto mutilation et son bannissement. On retourne de nouveau à Colone où s’achève le cheminement d’Œdipe vers sa mort. Le texte, nouvelle traduction de Bertrand Chauvet qui a adapté avec Philippe Adrien et Vladimir Ant les deux pièces en les imbriquant l’une dans l’autre, élaguant les références inutiles, fait entendre avec une remarquable clarté et acuité, dans un langage à la fois poétique et usant d’expressions contemporaines, accessible à tout public, la tragédie d’Œdipe et les propos de ses protagonistes. Les pointes d’humour dans le texte et dans le jeu, produisant un décalage, une distanciation, confèrent à l’histoire d’Œdipe une dimension de conte.
En parfaite adéquation avec la dramaturgie scénique la scénographie de Gérard Didier prend en charge l’imbrication des deux pièces en construisant une perspective du destin d’Œdipe. Au fond du plateau, un grand œil avec un trou rond au centre dans lequel sont projetées parfois des images de paysages et où Œdipe disparaît à la fin.
Une belle dramaturgie d’éclairages : en clair obscur pour les parties d’Œdipe aveugle à Colone et des lumières vives pour Œdipe roi.
Le rythme impeccable, la tension dramatique parfaitement tenue, la fluidité des enchaînements des scènes, enfin le jeu des acteurs d’une bonne maîtrise, (quelques uns jouant deux personnages, Bruno Netter et Bruno Ouzeau se partageant le rôle d’Œdipe vieux et jeune) contribuent à la réussite de ce spectacle.
Irène Sadowska Guillon
Œdipe de Sophocle mise en scène de Philippe Adrien
au Théâtre de la Tempête à Paris du 13 janvier au 15 février 2009
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