Le Cid de Corneille, mise en scène Thomas Le Douarec
Le Cid de Corneille, mise en scène Thomas Le Douarec
Il l’avait déjà mis en scène en 98 et remet cette fois la pièce emblématique de Corneille dans son Andalousie d’origine, Séville, terre des combats de taureaux, du flamenco, du métissage culturel arabo-andalou. Et il essaye de restituer l’esprit baroque du théâtre de Guillen de Castro à qui revient la paternité du Cid.
Il s’appuie pour la dramaturgie de son spectacle sur la première version de 1637, beaucoup plus libre et flamboyante que celle de référence de 1682, révisée conformément aux règles du théâtre classique.
Il a coupé certaines scènes et supprimé les personnages de l’Infante, de sa gouvernante, du page, de Don Alonse et renforcé l’intrigue sur Rodrigue et Chimène avec une action plus rapide et passionnée. Le tout immergé dans la substance même de la culture populaire andalouse avec sa musique, les sonorités déchirantes de la guitare et des chants flamenco, la sensualité brutale de ses danses.
Claude Plet a imaginé une cour d’un château en arrondi style arabe, évoquant en même temps un espace tauromachique. Un dispositif exploité dans le jeu: les musiciens et certains personnages se trouvent parfois en haut du mur du château, et le roi descend des cintres sur une chaise.
Des costumes stylisés à la fois arabo-andalous, gitans, avec parfois des touches assez outrées, comme entre autres le costume du roi : une parodie de l’habit de torero… Et le jeu est souvent fondé sur des gags, notamment chez le roi (Florent Guyot) et Don Arias (Jean-Paul Pitolin), démonstratif dans la violence des passions exacerbées, pathétiques mais surjouées chez Rodrigue (Olivier Bernard) et Chimène (Clio van de Valle).
Comme un «texte bis », en contrepoint à l’alexandrin, la partition musicale de Luis de la Carrasca (guitare et cajon), vocale (un chanteur) et le couple de danseurs flamenco, se superpose au jeu ou s’y intègre comme une sorte de chœur. Le « taconeado » qui rythme la pièce, repris parfois par certains personnages, s’impose parfois avec trop d’insistance. Et ce mariage entre alexandrin et flamenco n’est pas toujours convaincant.
Un Cid iconoclaste ? Même pas. C’est parfois drôle mais très inégal. Mais peu cohérent, Thomas Le Douarec a transféré le tragique sur la partie flamenco et sa mise en scène oscille entre un pathétique appuyé, la parodie et le comique. Dommage…
Irène Sadowska-Guillon
Théâtre Comedia, Paris (VIII ème).