Puck La marionnette et les autres arts

Puck
La marionnette et les autres arts

revue de l’Institut International de la Marionnette

Le numéro 15, monographique, de la revue est consacré entièrement à la relation et aux diverses formes d’alliance de la marionnette et du cinéma depuis plus d’un siècle. Un historique retrace l’évolution de cette relation depuis les mécanismes du pré – cinéma : machines, lanternes magiques, etc. en passant par les expériences des avant-gardes du XXe s. et les inventions du cinéma d’animation contemporain aux multiples facettes.
De nombreux articles et entretiens abordent les formes de présence de la marionnette au cinéma à travers les analyses des techniques et des démarches de créateurs spécifiques. Un vaste tour d’horizon qui va des maîtres tchèques du cinéma d’animation à la marionnette dans le cinéma africain, en passant par la marionnette selon Stanislavski, la tradition de la marionnette chez Ingmar Bergman, l’usage qu’en fait John Malkovich, sa présence dans le cinéma occidental et au Canada, la relation entre le théâtre d’ombres et le cinéma en Chine, les poupées animées au Japon.
De nombreuses photos illustrent cet essai de réunir les divers aspects du mariage fécond entre la marionnette et le cinéma qui ne cesse d’engendrer de nouvelles et très percutantes formes d’approche du réel.

Irène Sadowska guillon

Numéro 15 de la revue Puck

La marionnette et les autres arts
Publiée par l’Institut International de la Marionnette et les Éditions Entretemps
156 pages, 22 €


Archive pour mai, 2009

Arlequin

Arlequin
Vie et aventures de Tristano Martinelli, acteur
de Siro Ferrone
traduit de l’italien par Françoise Siguret

image12.jpgNous connaissons tous la figure d’Arlequin, personnage emblématique de la commedia dell’arte, mais nous ignorons son origine : qui, quand et où l’a créé, l’a incarné et l’a immortalisé au point que ce malicieux et insolent personnage a été érigé en icône d’art théâtral depuis quatre siècles ?
S’appuyant sur des documents d’archives, correspondances, sources littéraires et iconographiques, actes des notaires, lettres de prince et de comédiens de l’époque, Siro Ferrone, professeur d’histoire du théâtre à l’Université de Florence, reconstruit la biographie de l’acteur Tristano Martinelli inventeur et premier Arlequin de l’histoire. Cet ouvrage sur la vie, l’art, les inventions et les techniques de Tristano Martinelli, acteur, acrobate, funambule, improvisateur, né à Mantoue en 1557 et mort en 1630, se lit comme un roman d’aventures.
Il n’y a pas de textes littéraires permettant de dater précisément l’apparition d’Arlequin du fait que l’art de Tristano Martinelli, consistant en actions, gestes et paroles improvisés, créés sur la scène, n’a pas été transféré sur une page écrite.
Arlequin tire son origine des Zanni, personnages très anciens transmis par la tradition médiévale, créatures grossières, bouffons balourds, protagonistes des spectacles populaires improvisés sur les places et les scènes de théâtre éphémères. Contrairement aux personnages supérieurs s’exprimant, dans le spectacle, en florentin littéraire, les Zanni baragouinent en bergamasque. On retrouve cet antagonisme linguistique et social dans la commedia dell’arte.
À partir de ces archétypes populaires Tristano Martinelli construit son personnage d’Arlequin qu’il fait découvrir et impose avec succès en Europe lors des voyages de sa troupe à Francfort, Londres, Madrid, Orléans, Paris où elle arrive en 1584.
Siro Ferrone replace la carrière de Tristano Martinelli, alias Arlequin, dans le contexte des événements politiques, guerres civiles, alliances princières etc. en citant de nombreux documents et les registres, brossant ainsi un tableau passionnant de la situation du théâtre à l’époque, de la condition des comédiens et de leurs rapports avec le pouvoir politique et religieux.
Un important cahier d’illustrations inséré dans l’ouvrage apporte des précisions sur la diffusion de l’art d’Arlequin et sur la représentation du personnage, protagoniste de la commedia dell’arte. Ainsi des cartes représentant les haut-lieux d’Arlequin dans la ville et dans la région de Mantoue, à Paris (Hôtel de Bourgogne, place de grève, palais du Louvre, Pont-Neuf, quartier des comiques italiens, foire Saint-Germain…). De nombreuses planches représentent Arlequin amoureux, Arlequin à cheval, Zanni, Horacio, Pantalone, le Capitaine Matamoros, des scènes de spectacles, des estampes des œuvres, etc..
Depuis sa création par Tristano Martinelli Arlequin ne cesse de se réincarner sur scène. Siro Ferrone dresse la généalogie théâtrale des Arlequins célèbres depuis le XVIIe s. jusqu’aux plus récents : Marcello Moretti (1910 – 1961) et Ferrucio Soleri, Arlequin fétiche de Strehler.
En annexes : bibliographie, index des noms et chronologie comparée, complètent cette histoire passionnée d’un acteur immortalisé dans son personnage.

Irène Sadowska Guillon

Arlequin
vie et aventures de Tristano Martinelli, acteur
de Siro Ferrone
collection « Les voies de l’acteur » Éditions Entretemps, 2008
250 pages, 25 €

Artaud, pièce courte – Identité

Artaud, pièce courte

Cet Artaud-là n’est le prophète ni le martyr de rien. Il est juste le grand interrogateur, dont les questions deviennent d’autant plus en plus laconiques qu’elles sont plus graves : alors elles rencontrent celles des grands poètes du XXème siècle et de tous les temps. Le sens n’appartient à personne, il se constitue de tout ce qui nous traverse, la poésie est perméable et contgieuse… La compagnie Les corps secrets cherche le corps secret de ces poètes dans l’écart entre le texte, la vérité du lieu (l’une des splendides caves de la Maison de la Poésie), les projections documentaires et une bande son très élaborée. Les spectateurs sont face au mur, appelés à leur gauche par la voix du diseur ( Marie-Jeanne Laurent ou Eugène Durif) et par l’écran haché où défilent des hordes lentes de soldats défaits ou la cohue d’une sortie d’usine à casquettes, à sa droite par le son, en haut par quelque accident délicatement provoqué. Tout est dans l’écart et l’interstice, toute la résonance du travail poétique et du travail du spectateur.
Cela semble très intellectuel, et cela nous ramène sans cesse au réel, réel des sensations, réel de la “vraie vie“, de la souffrance des hommes. À quoi la seule réponse est le respect.
Christine Friedel


Artaud, pièce courte
, composition pour voix et espace, se trouve constituer le premier volet d’une trilogie. À suivre : Nietzche (travaillé en partie en public au 104), puis La Mâchoire vous parle ( a tribute to Heiner Müller).

Conception Diane Scott. Maison de la Poésie jusqu’au 22 mai

***

Identité

Cette fois, ça se jouait dans un atelier voué à la démolition, faubourg du temple, la verrière laissait passer une lumière de crépuscule. Les deux acteurs se trouvaient dans une fosse “en couloir“, à nos pieds, sous nos regards penchés. Un beau piège, un bel espace pour le malaise. Ailleurs, la scénographie de Michel Gueldry trouvera un autre mode d’oppression.
Un homme, une femme. Ils sont jeunes, ils sont d’aujourd’hui, c’est-à-dire à peu près toujours en mouvement, précaires. Lui lit l’étiquette d’une bouteille, elle un manuel de la grève de la faim. Deux façons de “s’en sortir“. Il l’emmène dans un banal jeu publicitaire : « voulez-vous gagner de l’argent ? ». Oui, bien sûr, le téléphone fixe est coupé, et le portable n’a plus de forfait.  Numéro vert : il suffit de répondre à une question, de remplir un formulaire. Facile. La question : « vos parents sont-ils vraiment vos parents ? ». C’est ainsi que ça commence, et que se construit le piège. Les organisateurs invisibles envoient des cadeaux, des lettres glissées sous la porte sans adresse ni de destinataire ni d’expéditeur. Ça avance, ils sont “réglo“, et ne lâchent pas leur question. Le jeu, le défi pour les cobayes : se procurer des échantillons d’ADN des géniteurs. Ça ne va pas sans turbulences. Inutile de dire la fin : les deux jeunes gens s’appellent Marion et André Klein.
La pièce avance masquée, en douceur, en un mouvement de spirale qui plonge à chaque tour un peu plus dans l’inquiétude et l’angoisse : on rit, on sourit, et puis de moins en moins. La trouvaille du metteur en scène – de sa propre pièce – est d’avoir enchaîné les six scènes en un seul déroulement continu, sans “noirs“ ni sorties : on n’échappe pas à l’enroulement du serpent. Les acteurs, chacun dans sa fonction, tiennent l’affaire avec une magnifique présence.
Gérard Watkins a écrit Identité au moment du débat sur le fichage ADN. C’est une belle pièce, importante. Elle sera reprise à l’automne. À ne pas manquer.

Christine Friedel

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La cantatrice chauve

La Cantatrice chauve, opéra de Jean-Philippe Calvin d’après l’œuvre d’Eugène Ionesco
mise en scène de François Berreur, direction musicale Vincent Renaud
image11.jpg

Qui ne connaît La cantatrice chauve, pièce prototype de l’anti-théâtre de Ionesco, créée en 1950 et toujours à l’affiche, depuis 1957, du Théâtre de la Huchette à Paris ?
Elle fut inspirée à Ionesco par la lecture d’un manuel de conversation anglaise, une sorte de méthode Assimil,
accumulation de stéréotypes et de clichés offrant une image figée, caricaturale, d’une société dont il démonte l’absurdité.
Londres, domicile bourgeois banal des Smith, pourvus d’une bonne insolente, et qui reçoivent la visite des Martin, puis d’un capitaine des pompiers cherchant un incendie à éteindre. Une situation banale à laquelle Ionesco confère une dimension métaphysique d’un vide insondable.

Pas d’événements particuliers ici mais des personnages stylisés sans aucune psychologie, et pas de réalité temporelle : la pendule sonne des heures fantasques, pas non plus de cantatrice dont l’évocation produit un silence outré, un trou dans le délire verbal des protagonistes qui relève de la logique du non-sens.
Après plus de cinquante ans de carrière théâtrale, la pièce, icône absolue de l’absurde, entame une carrière lyrique. Cet opéra, une commande faite à Jean-Philippe Calvin par la Genesis Foundation et le Covent Garden  après sa création en 2006 à Londres,  vient d’être créé en France. « Mon souhait, explique Jean-Philippe Calvin, était de créer, à l’instar de l’anti-pièce de théâtre, une forme contemporaine d’anti-opéra bouffe en 1 acte. »

Dans une superbe transposition musicale  il réussit, avec un sens remarquable de la scène, de la dramaturgie, à transcrire l’esprit d’Eugène Ionesco,  avec une combinaison de comédie, satire, drôlerie et… chaos, inventant une forme contemporaine, inédite et insolite d’opéra bouffe. Il innove en intégrant dans sa partition pour orchestre de chambre et six chanteurs, un dispositif électro-acoustique sur scène de Stéphane Tiedje, l’enrichissant ainsi de sonorités et d’effets dramatiques surprenants. Comme en écho aux clichés des dialogues des personnages, quelques clichés musicaux, des clins d’œil furtifs aux airs archiconnus d’opéras traditionnels (Rigoletto, Carmen...) à peine esquissés, se glissent par moments dans la partition.
Totalement au diapason avec la structure et la substance de la matière musicale et dramatique de l’œuvre, la mise en scène de François Berreur  est d’une simplicité et d’une efficacité exemplaire, dans un espace dépouillé avec juste, un grand canapé blanc, une table basse, un poste de radio et en fond de scène, un jeu de rideaux s’entrouvrant ou descendant. Costumes de David Belugou, de style anglais : vestes bleue à bandes blanches pour M. Martin et Mme Smith, vestes à carreaux rouille pour M. Smith et Mme Martin, blouse grise pour Mary, la bonne, casque et uniforme de pompier pour le Capitaine.

En guise de prologue, telle une parodie des formules-modèles d’un manuel de langue, une voix off décrit en anglais le lieu, les meubles, les objets et la tenue de M. Smith, etc. comme typiques et conformes à la décence anglaise. Les brefs dialogues interviennent de temps à autre dans la partition vocale. Banalités, clichés, anecdotes dérisoires, les plus absurdes, s’échangent sur le ton emprunté d’une politesse très british.
La musique, tout comme le registre du chant et le jeu des chanteurs, mais aussi excellents acteurs, produisent comique humour absurde, subversif, et rires irrésistibles. Les effets sonores, le mixage des sons et des voix réverbérés dans la salle, le jeu d’éclairages, les effets visuels stroboscopiques troublent, dramatisent la situation, et la font exploser.

Comme son prototype dramatique, l’opéra de Jean-Philippe Calvin s’achève sur le mode de  da capo al fine », avec une image finale évoquant celle du début: l’explosion de la radio qu’écoute M. Smith. Il faut saluer l’initiative de Patrice Martinet qui a programmé pour quatre représentations, ce joyau de création musicale dans un superbe écrin scénique ciselé sur mesure. Quelques directeurs de salles parisiennes auront-ils la bonne idée de programmer cette œuvre accessible à un large public, pour les saisons à venir ?

 Irène Sadowska Guillon

 Théâtre de l’Athénée, Paris VIIIème,  du 30 avril au 3 mai.

 

Le Mariage secret

  Le Mariage secret de Domenico Cimarosa, (Il matrimonio segreto) melodramma giocoso en deux actes , livret de Giovani Bertati, direction musicale: Antony Hermus, avec l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris; mise en scène: Marc Paquien, en italien , surtitré en français).

image1.jpg    Du célèbre compositeur vénitien (1748-1801), au nom aussi merveilleux que sa musique, on sait qu’il fut l’auteur  de nombreuses cantates et sonates pour clavecin redécouvertes il y a peine un siècle, d’un très beau Requiem et de quelque 70 opéras dont l’un des plus connus est ce  Mariage secret. L’intrigue pourrait être celle d’une pièce de Goldoni; c’est aussi compliqué que brillant: Paolino, commis de Geronimo, riche commerçant et Carolina sa  fille, ont eu l’idée pour forcer le cours des choses, de se marier secrètement. Ce qui était déjà interdit depuis le 16 ème siècle, mais encore pratiqué à l’époque et qui, évidemment a été la base de nombreuses comédies…

Donc, le jeune et beau Paolino, pressentant la colère de celui qui est devenu son beau-papa mais qui reste son employeur, ( c’est un peu comme chez Marivaux, il y a toujours des histoires d’argent qui interfèrent avec les sentiments) a l’idée de faire épouser sa jeune belle- soeur Elisetta par le comte  Robinson.  Ainsi , le mariage d’Elisetta avec un noble et riche aristocrate anglais compensera  en quelque sorte celui d’un pauvre commis comme lui,  avec Carolina. Mais la belle idée fait évidemment psschit,  comme disait autrefois Chichi., sinon il n’y aurait pas de scénario  digne de ce nom..On vous épargnera la suite d’intrigues , de rebondissements, le tout se réalisant dans la confusion. Mais Paolino, suspecté d’infidélité par Carolina, aura le plus grand mal à la convaincre de son innocence, et, puisque leur mariage ne peut être  rendu public , il proposera à son épouse de fuir le soir même chez une parente.

  C’est admirablement joué par l’orchestre  que dirige avec une joie communicative Antony Hermus ) et chanté- ce jour-là- par Nahuel di Pierro ( Geronimo), Julie Mathevet ( Elisetta), Elisa Cenni (Carolinaa, Letita Sigleton ( Fidelma et soeur de Geronimo), Aimery Lefevre ( Le Comte anglais  Robinson) et Lanuel Nunnez Camelio ( Paolino), et plutôt bien joué, notamment par Letitia Singleton qui possède une gestuelle remarquable de drôlerie et par  Elisa Cenni. Vraiment,  c’est un grand plaisir musical… et cela fait beaucoup de bien.
  Reste la mise en scène de Marc Paquien; il sait diriger des acteurs- aucun doute là-dessus- et Dominique Reymond dans Le Baladin du monde occidental de Synge qu’il avait  réalisé, il y a quelques années à Chaillot,  était absolument remarquable. Mais la conception d’ensemble, que ce soit pour  Witkiewicz, Synge, ou pour  Crimp dont il avait monté cette saison La Ville au Théâtres des Abesses, et cette fois-ci pour ce Mariage secret,  a toujours quelque chose de compliqué et d’un peu m’as-tu vu assez exaspérants, surtout quand il s’agit de créer des images, comme s’il se laissait piéger par des idées  qui auraient dû ne jamais quitter l’écran d’ordinateur où elles ont été conçues..
  Imaginez, pour cet opéra de Cimarosa, sur un tulle transparent , une sorte de gare maritime 1950 dans la baie de Naples avec, dans le fond, le Vésuve, puis quelques caisses en bois copiées des caisses à munitions militaires, et d’autres caisses à claire-voie contenant des moulages en plâtre de nus masculins et féminins romains. qui, à la fi,n pivotent pour laisser apparaître, devinez quoi, un beau soleil à figure humaine…On retrouvera ces mêmes statues en plâtre blanc parmi des bosquets de faux lierre. Et , pour faire sans doute plus kitch, ou plus second degré, les pauvres personnages descendent du Vésuve par un escalier…Il y a aussi, inspirés du fameux modèle conçu à l’origine par Salvador Dali en forme de lèvres féminines pulpeuses, deux canapés, un premier rouge et un second plus tard,  tout noir dont sortiront des flammes par derrière. On ne  sait pas ce que Marc Paquien a pu demander à Gérard Didier, au demeurant, excellent scénographe, mais c’est d’une laideur assez accablante!
  On ne saurait trop conseiller au metteur en scène d’aller voir des expos  (cela instruit toujours le regard), mais aussi de regarder le DVD des Brigands d’Offenbach, monté il y a quelque dix ans par Jérôme Deschamps, et costumé par  Macha Makeieff , à l’Opéra-bastille, ou le fabuleux Chantecler, mis en scène par Jérôme Savary à Chaillot avec les costumes de Michel Dussarat… Il verra alors ce que l’on peut réussir sans doute de mieux , comme mise en scène de travail musical, bourré de savoir-faire et de métier scénique mais aussi de délire et d’humour intelligents  : cela lui donnera l’occasion de réfléchir sur une possible dramaturgie et d’éviter ainsi d’infliger une telle médiocrité au public.

Quant aux costumes, ma chère consoeur Edith Rappoport vous en avait déjà dit  ici le mal qu’elle en pensait,  et elle avait tout à fait  raison! Les  robes bleu ou orange en tissu vaporeux, aux couleurs sans unité entre elles, sans unité non plus avec le décor, dont on peut penser qu’elles ont dû être conçues avec du second degré dans l’air, doivent absolument être offertes au  Musée du costume de Moulins, de façon à instruire les jeunes générations de stylistes sur les aberrations  produites pour l’opéra en  2009. Cela veut être novateur et  ne réussit en fait qu’ à être une mauvaise citation des années 50 d’une impitoyable sottise. Comme de plus , la lumière n’est pas très inventive et relève plutôt du genre chichiteux… 

  C’est vraiment dommage pour les personnages de Cimarosa et pour les excellents chanteurs qui les incarnent. Quitte à se répéter, on ne saurait trop conseiller à  Marc Paquien, de lire les pages consacrées au costume de théâtre par le grand Roland Barthes : cela lui évitera peut-être d’être aussi peu rigoureux quant à la gestion des décors, des costumes et des lumières , et, ainsi, de ne pas plomber son prochain spectacle. Le plaisir d’entendre un opéra passe aussi par le plaisir visuel, et l’étymologie du mot est bien là pour nous le rappeler.
  Alors,  à voir? A entendre surtout… Pour le reste, vous aurez compris tout le bien que l’on en pensait.

 

Philippe du Vignal

 

Il MATRIMONIO SEGRETO

Il MATRIMONIO SEGRETO  MC 93 de Bobigny  de Domenico Cimarosa, direction musicale Antony Hermus, mise en scène Marc Paquien avec l’atelier lyrique de l’Opéra de Paris.

 


Cet opéra baroque campe des rapports amoureux compliqués dans une riche famille où le père conseillé par son commis Paolino, veut marier sa fille aînée à un riche comte ami du commis.
Or Paolino s’est marié secrètement avec la cadette Carolina dont le comte tombe immédiatement amoureux. Après une suite de quiproquos des plus invraisemblables, tout est bien qui finit bien, le comte tiendra sa parole, il épousera Elisetta l’aînée, Carolina se fera pardonner son mariage secret. Avec de belles voix et une interprétation solide, cet opéra souffre de partis pris esthétiques incompréhensibles, un tulle  transparent reflétant des docks encombrés de voitures, des statues de plâtre dans des caisses en bois devant des haies bien taillées, des costumes disparates plutôt laids qui affligent les acteurs de démarches hésitantes. On a du mal à comprendre les choix de ce jeune metteur en scène à la mode.

 Edith Rappoport

 


Les Turbulentes Vieux Condé

D O Q  Les Turbulentes Vieux Condé   Dynamique d’observation du quotidien par le Pudding Théâtre, mise en rue, mise en mots Christophe Chatelain et Sylvie Faivre.

C’est la 11e édition de ce festival des arts de la rue du Valenciennois organisé dans une petite ville chaleureuse et accueillante qui a créé le Boulon, pôle régional des arts de la rue et a su mobiliser des partenariats des collectivités publiques, d’une quinzaine d’entreprises et d’une dizaine de structures culturelles de la région. Le public y afflue, très jeune et familial- on y rencontre aussi les accros de la rue- déambule au gré des spectacles,  et une trentaine de compagnies se relaient sur les deux jours, certaines donnant six représentations par jour.

Le Pudding Théâtre de Franche Comté avait déjà été accueilli par le Festival avec Mémoires des chambres froides (autrement dit Les frigos) que j’avais vu à Chalon dans la rue. Cette Dynamique d’Observation du Quotidien nous rassemble après un voyage en car, sur un terrain de boules dans le quartier de la solitude, vaste espace aéré aux pelouses bien entretenues, avec de petits immeubles un peu décatis, et de petits pavillons en briques. Trois animateurs guides, Natacha, Nicolas et Corentin nous répartissent en trois groupes après nous avoir distribué des autocollants avec nos prénoms, et nous emmènent dans une exploration du quartier.

  Le guide très prolixe et tonique nous demande sans cesse de nous mettre à l’affût en nous accroupissant. On y rencontre une Zana Sedjou qui se rend à l’office de protection des immigrés pour y trouver du travail. On y suit un handicapé dans la chaise, on y voit l’explosion d’un immense camion (en Afganistan ?) d’où Zana parvient à s’échapper pour émigrer. On y voit  un couple se déchirer, se réconcilier, puis se marier dans une liesse explosive et multicolore. La dernière séquence, c’est l’explosion du panneau des Turbulentes, soigneusement préparée par un jeune technicien à la chemise bariolée. Cette déambulation qui nous fait remonter dans le temps demande encore un certain rodage, je n’ai cessé de me poser des questions sur le déroulement des scènes, mais affirme une démarche tonique et originale d’une véritable équipe d’acteurs citoyens.

ÇA TOURNE PAS ROND  Les Turbulentes Vieux Condé
Mise en scène Patrice Cuvelier, compagnie Babylone
Cette fable écologique de 30 minutes est un joli entre /sort présenté dans un bus par Sébastien Delpy, conteur interstellaire qui présente aux enfants petits et grands les mouvements des astres en folie, Mars tombé amoureux de la Lune qui quitte la gravitation de la terre. Celle-ci s’arrête de tourner. Quatre manipulateurs font vivre cette poétique épopée des étoiles qui a ravi le public. La Compagnie Babylone qui sort d’un long tunnel de deuil excelle dans la poésie foraine et dans les petites formes.

Edith Rappoport

LE BARBIER DE SÉVILLE

LE BARBIER DE SÉVILLE  Théâtre des Louvrais Pontoise de Rossini, mise en scène Gérald Chatelain, direction musicale Andrée-Claude Brayer, scénographie d’Yves Collet.

Depuis plusieurs années l’École nationale de musique de Cergy-Pontoise collabore avec l’Apostrophe pour produire un opéra présenté en petite série au Théâtre des Louvrais. Le Barbier de Séville campe les amours naissantes de Rosine et du comte Almaviva  sous la houlette de l’habile Figaro qui berne le vieux Bartholo, tuteur et prétendant de la jeune fille. Avec une distribution solide, un tonique Figaro, un étrange et immense Bartholo, une Rosine un peu décalée aux bizarres costumes, une scénographie dépouillée et efficace, de beaux éclairages, ce Barbier de Séville suscite l’enthousiasme du public. Un bémol, les cirés jaunes et les bottes dont sont revêtus les acteurs au dernier acte. Clin d’œil plein d’humour ou touche de modernité plaquée ? On peut toujours en rire.

Edith Rappoport

Le jour de l’italienne

Le jour de l’italienne ou les vraies confidences, création collective de la compagnie Eulalie , mise en scène de Sophie Lecarpentier

image2.jpg  Depuis qu’en Occident, le théâtre est théâtre ou presque , il s’est souvent pris lui-même pour sujet, en proposant aux spectateurs d’être voyeurs ou complices de sa «fabrication»  et en lui dévoilant les mécanismes de l’écriture et du travail scénique.

 On pourrait interroger les raisons de la tendance, croissante ces dernières années, qui poussent les gens de théâtre à exhiber leur travail, à s’auto-contempler sous diverses formes : théâtre en train de s’écrire, de se faire, théâtre avoué, se faisant à vue, sans compter le phénomène, très à la mode, des répétitions ouvertes au public.
Montrer au public l’envers du décor, la réalité quotidienne du processus de création théâtrale, les doutes, les errements, la quête des acteurs, la fabrication matérielle d’un spectacle est sans doute une initiative intéressante, à condition qu’elle ne débouche pas sur une simple démonstration pédagogique ou une vision caricaturale.
C’est le cas, hélas, dans Le jour de l’italienne, création collective de la compagnie Eulalie sous la direction de Sophie Lecarpentier.
« C’est un spectacle confidence, né de l’envie d’une équipe de faire partager sa passion et de dévoiler, avec humour, dérision et sincérité, les rouages du processus des répétitions. » nous explique-t-on dans le programme.
On assiste en effet aux répétitions de L’Epreuve de Marivaux par une compagnie de théâtre. Dans l’espace nu du plateau, on recrée la scène de répétitions avec, côté cour, un coin café, côté jardin, les loges derrière un tulle transparent, une table et des tabourets pour la lecture à la table, puis, à mesure que les répétitions progressent, quelques éléments du décor de L’épreuve : un fond de ciel, deux bancs, un arbre sans feuilles, se mettent en place.
On suit les répétitions du premier jour ,jusqu’à l’Italienne, à travers les étapes successives de la fabrication du spectacle : travail sur les scènes , arrivée des costumes et d’éléments du décor, réglage des lumières et du son.
Quelques belles trouvailles dans la mise en scène comme ,par exemple,  le marquage du temps qui passe, de la progression du travail : séquences flashs scandées par les noirs, effets de condensation et d’accélération. La dramaturgie scénique alterne les échanges entre les acteurs, leur questionnement de la pièce, des personnages, les interventions de la metteuse en scène, avec les scènes de répétitions de L’épreuve. Sur cette trame ,se greffent de brefs monologues des acteurs qui, hors du plateau, dans un rond de lumière, livrent au micro, chacun à son tour, la conception de leur personnage.
Un jeu réaliste avec des tentatives de dérision, voire d’autodérision, et d’humour, ratées, qui patauge dans les clichés. On caricature les tendances mode dans le décor et les costumes disparates, mélange de contemporain et d’éléments d’époque. Pour faire plus vrai, on truffe les échanges entre les acteurs et la metteuse en scène, de termes du « jargon » du métier : notes, gélatines, mise, bout à bout, jardin, cour…, dont on explique en même temps (dans un souci pédagogique ?) la signification.
Tout cela flotte entre la mauvaise parodie et la démonstration laborieuse. La mise en scène indécise, entre intentions de dérision et représentation maladroitement réaliste du travail de répétitions, manque d’idées fortes et de cohérence.

Irène Sadowska Guillon
Théâtre 13 à Paris,du 28 avril au 7 juin 2009.

IIe. Festival Migractions

 Deuxième Festival Migractions au Théâtre de l’Opprimé à Paris du 6 au 27 mai 2009

mograction.jpg  Seconde édition d’un Festival transdisciplinaire qui réaffirme la rupture des frontières géographiques, politiques et artistiques, articulant théâtre, musique, danse, théâtre en forum, expositions, cinéma, lecture.

  Espace de métissage tout azimuts des cultures, des formes artistiques, où se croisent et dialoguent des artistes de continents et d’origines différents : depuis l’Inde à l’Amérique Latine en passant par l’Europe et l’Afrique. L’art peut-il changer leur monde et le nôtre ? Ils sont tous convaincus, qu’au-delà des valeurs esthétiques, l’art peut et doit être un lieu de réflexion éthique, politique, de dialogue et de reconnaissance réciproque. Ainsi, pendant toute la durée du Festival, le projet « Existences – Résistances », exposition de photographies « Palestine » de Rogerio Ferreri, est proposée au public. Vincent Fort proposera une  approche de la création plastique dans « Sculptures en scène ».

  Une programmation riche et diversifiée de musiques allant de diverses formes du jazz, des musiques et chansons latino-américaines et hispano – françaises, africaines, indiennes, à la carte blanche à Nenê et à sa Master Class sur les rythmes brésiliens, pour culminer,  pour la soirée de clôture, dans un feu d’artifice musical avec le Sénégalais Woz Caly. « Théâtre en forum » proposé par la troupe du Théâtre de l’Opprimé, abordera des questions de société brûlantes : sur l’emploi et le V. I. H. préparé avec des chefs d’entreprise et des salariés, des personnes séropositives, sur les femmes d’hier et d’aujourd’hui, sur « l’école : se disputer ou en discuter ? », sur « les bandes à part tenir ? », sur l’insertion professionnelle des femmes. Des problèmes sociaux seront aussi abordés dans les spectacles : Au fil du mur (art et handicap) de la compagnie « Les mines de rien », Le consentement de la femme amoureuse de la compagnie « Le jour se lève », Il aurait suffi (sur le viol et les tournantes), de la compagnie Jacques Kraemer, enfin dans Les nouvelles cruautés ,création de la compagnie du Théâtre de l’Opprimé.
Du théâtre d’auteurs femmes Nuit d’été loin des Andes, de et par la Franco uruguayenne Susana Lastreto et À ma douce, de et par la belgo-vietnamienne Michèle Nguyen, Crossing frontières de Caryl Churchill par Anne Casteret et Stella Maris du Théâtre Royal National de Londres.
Des formes scéniques métissées : théâtre, danse vidéo dans De Thèbes à Gaza, ou les frères ennemis, dialogue entre la danse indienne et les mots dans Inde : univers dansant et
dans  Somme en bulle de la compagnie Nuba, tissage de danse Buto,  et de mixage vidéo et de musique live. Un film documentaire Pas de révolution sans chanson (No abra revolucion sin canciones) retracera la culture chilienne de la chanson engagée , depuis le coup d’état et la mort d’Allende en 1973.

Irène Sadowska Guillon

Festival Migractions
du 6 au 27 mai 2009

au Théâtre de l’Opprimé
78 – 80 rue du charolais
75012 Paris
renseignements et réservations 01 43 40 44 44
site :
www.migractions.com

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