SexAmor

SexAmor, projet de Pierre Meunier, fabrication collective, texte et jeu de Pierre Meunier et Nadège Prugnard.

sexmor.jpgDans un décor hétéroclite, fait de métaux et de matériaux, un homme trompe son ennui en jouant de la musique. On dirait du Georges Aperghis : à l’aide d’une baguette ou de ses doigts, il fait vibrer des fils métalliques à l’extrémité desquels pendent des blocs de béton ou des poids.

  D’emblée, nous nous situons dans l’univers du sensible : le visuel, le tactile et l’auditif. Cet homme se met à raconter une histoire, celle d’un capitaine de navire pris un jour dans une tempête. De fait, une partie du décor évoque une ambiance portuaire, maritime : une hélice de bateau est accrochée au mur, un moulin à eau repose sur des tréteaux.
Une femme apparaît, prise au piège dans une poche en plastique qui ressemble à un cerf-volant, où elle baigne dans un liquide, à moitié nue. Est-elle un alien en mutation, un fœtus dans le ventre de sa mère, un poisson dans un filet ? Elle tente de s’extraire du sac mais retombe toujours au fond. Jusqu’au moment où elle voit l’homme, qui la voit à son tour. Regards croisés, échangés puis rencontre. Les mains se touchent à travers cette membrane et l’homme aide la femme à en sortir. La voici qui surgit,  telle Eve, naissante. Bien qu’elle soit  choquée, elle pose  aussitôt ses exigences : elle veut mourir d’amour mais veut aussi  de la violence dans l’amour…

  Et cet homme et cette femme sans nom, archétypes de leur sexe, vont jouer à une course poursuite et/ou à un chassé-croisé: ils passent ensemble ou séparément, dessus, dessous ou à travers d’ anneaux suspendus. Un jeu dangereux, celui du chat et de la souris. Leur interrogation fondamentale porte sur l’amour, la mort, le sexe, le rapport à l’autre, le désir. Mais les mots comme les mouvements semblent insuffisants. À question existentielle, réponse vertigineuse: le couple traverse  plusieurs épreuves, où  s’affirment leurs différences : la femme s’imagine en mère d’adorables chérubins, tandis que lui , se voit cerf ou élan tout-puissant ( il en revêtira d’ailleurs le masque et les bois).
Parfois, ils dansent ensemble un slow  ou  la femme, seule, essaie de bouger au rythme de la guerre ou de la nature.Il y a plus de gestes et de mouvements que de paroles dans ce  spectacle, qui oscille entre implicite et explicite, premier et second degré, et qui  renvoie surtout aux symboles et à la rêverie. Le ton est , tour à tour,  grave, ou provocant et plein d’humour, quand , dans le jeu de la séduction, l’homme fait le coq ; ou, quand  la femme  revêt un harnais et  s’élève dans les airs. Machinerie et jeux de lumière se déchaînent. La force de la nature s’exprime dans un port imaginaire, où l’on entend les mouettes, les cornes de brume, le souffle du vent et le bruit des vagues qui s’écrasent contre les rochers.
Erotisme et trivialité, poésie et vulgarité, abandon et séduction, attraction et répulsion,: les sexes se livrent bataille et se cherchent jusqu’à l’épuisement. Le couple formé par Nadège Prugnard, vorace, charnelle, assoiffée, et par Pierre Meunier, clownesque, fonctionne bien et le spectacle a de bons moments, malgré quelques longueurs qui nuisent à sa dynamique.

Barbara Petit

 

Théâtre de la Bastille jusqu’au 28 novembre


Archive pour 4 novembre, 2009

Que d’espoir, cocktail theatro-musical corrosif

Que d’espoir, cocktail theatro-musical corrosif, textes d’Hanokh Levin regroupés en recueil par Laurence Sendrowicz, mise en scène de Serge Lipszic.

 

 f8864aded587523ac.jpg On connait depuis longtemps en France l’oeuvre d’Hanokh Levin, écrivain israélien décédé en 1999 qui est l’auteur de nombreuses pièces- de chansons et de recueils de poésie. Mais  surtout de Kroum, l’ectoplasme qui avait été brillament monté par Warlikowski en 2005 puis par Guy Freixes.
  Que d’espoir avait déjà été créé par Laurence Sendrowicz au Théâtre de la Tempête en 2005; ce sont des petits sketches mis bout à bout et parfois entrecoupés de chansons  qui parlent des petits riens qui constituent l’existence de personnages qui ont du mal avec leur vie comme avec celle des autres; on peut penser souvent à Tchekov, comme à Pirandello ( celui des nouvelles surtout),  parfois aussi à Beckett.

  L’humour est cinglant et Levin n’ hésite pas à appeler un chat un chat :  c’est lui qui, en 68, un  an après la victoire de 67 sur l’Egypte, n’hésitait pas,  en bon visionnaire,  à dénoncer , avec beaucoup de provocation, le danger que représentait l’occupation des terres conquises. .. L’un des ses spectacles avait d’ailleurs pour titre:  » Toi, moi et la prochaine guerre » ! et avait été vite interdit.
   Et c’est peu de dire que cet humour ravageur ne lui procurait pas que des amis. Mais, dans ce recueil de sketches,  c’est plutôt la vie des petites gens qui l’intéresse, avec tout ce qu’elle peut avoir de dérisoire , quand ils se trouvent confrontés à des situations qu’ils ne peuvent pas assumer,  que ce soit sur le plan familial ou politique, et qui seraient vite  tentés par la pire des solutions. Bien entendu, ce qui est très ancré dans la société  israëlienne, pourrait aussi l’être à Paris , ou à Naples dans une pièce de Filippo. C’est parfois d’une rare insolence  mais ce recueil de petits  textes  n’a pas du tout les qualités d’écriture de Kroum, et l’on s’ennuie un peu…
  Serge Lipszic  fait jouer sa  bande de  dix comédiens  sur une tournette munie d’un étage que l’un d’eux entraîne grâce à la force motrice de son  petit vélo: du côté plastique, c’est plutôt bien vu, d’autant plus que tout le monde s’entasse sur quelques mètres carrés , comme si cela allait de soi,  avec une gestuelle tout à fait convaincante. Ils parlent de tout: de Dieu, de guerre et de paix mais aussi d’amour et d’amitié. Et il y a de très beaux moments, comme celui où un ministre  dérape sans arrêt dans le discours qu’il prononce à un enterrement : malgré les circonstances, c’est d’une force comique inégalable. Mais l’ensemble de ces petits sketches mis bout à bout dans une mise en scène très statique- comment faire autrement sur un espace aussi petit ?- ne forcent pas l’admiration, d’autant plus que la lumière est  mesurée, souvent noyée dans la brume de fumigènes ( est-ce pour évoquer la fumée des cabarets d’autrefois?),  même si les comédiens font adroitement leur métier…
   Lipszic adopte une scénographie qui ne peut  pas fonctionner avec ce type de dramaturgie et il aurait du s’en apercevoir avant ; même si les scènes de cabaret ont la réputation d’être plutôt  de petite dimension, il est évident que cette tournette gadget, au début assez drôle, finit vite par lasser. On sourit parfois mais « le rire noir, métaphysique ou énorme selon l’occasion » que nous promet le metteur en scène,  n’est pas vraiment au rendez-vous. Alors, à voir? Pas si sûr! Lypszic prétend que le théâtre de Levin ne fait que répondre à la crise qui nous submerge. Peut-être ,mais ici nous avons affaire à une sorte de cabaret qui n’en est pas vraiment un et qui, de toute façon, n’est pas estampillé Levin.
   Alors, vous pouvez éviter d’aller jusqu’à la rue Georgette Agutte….peintre et sculpteur qui se suicida, en 1922,  après le décès brutal  de son époux Marcel Sembat en disant cette phrase non dénuée d’humour: « Voilà douze heures qu’il est parti, je suis en retard ». C’était déjà du Levin…..

 

Philippe du Vignal

 

Théâtre de l’Etoile du Nord jusqu’au 21 novembre à 21 heures et le samedi 7  à 16 heures; le 24 novembre au Théâtre du Vésinet et le 28 janvier à Saint-Germain en Laye

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