The Shipment

The Shipment par Young Jean Lee’s Theater Compagny de New-York

 

        image1.jpgNée en Corée en 1974, Young Jean Lee arrive en 1976 aux États-Unis et vit depuis 2002 à New York où elle devient dramaturge et crée sa propre compagnie Young Jean Lee’s Theater Compagny.
Elle se fait remarquer sur la scène expérimentale new-yorkaise par l’originalité, l’audace, « l’incorrection politique » de sa démarche et le regard critique qu’elle pose, avec un humour corrosif, sur la société américaine, ses composantes identitaires et les diverses formes de racisme toujours à l’œuvre.
Dans Songs of the Dragons flying to heaven , satire sur la communauté coréenne aux États-Unis, Young Jean Lee s’en prend à l’image et aux clichés identitaires.
Dans The Shipment, conçu avant l’arrivée au pouvoir d’Obama, elle s’attaque à la problématique du racisme vécu par les Noirs américains, différent de celui que subisssent les immigrants. Comment aborder ce sujet sans tomber dans l’écueil du discours politico-idéologique et sans s’ enfermer dans un théâtre identitaire ? Comment amener un vaste public vaste à s’impliquer dans le spectacle et à se poser autrement des questions, hors des stéréotypes et des clichés, sur le racisme ordinaire ? Le parti pris de Young Jean Lee était de se servir des stéréotypes du racisme ordinaire, quotidien, des idées reçues déterminant les comportements des Noirs américains, en les décalant, les poussant à la limite de l’étrangeté. De sorte que, tout en restant reconnaissables, ils ne soient pas identifiables. Cette tactique de décalage des stéréotypes devant opérer autant pour le contenu que pour la structure formelle du spectacle. Ainsi , dans la première partie revisite-t-elle, en le décalant, le menestrel show, « divertissement populaire du XIXe siècle, suite de sketches, de danses, de chansons qui étaient interprétés par des Blancs grimés en Noirs. »

La seconde partie est conçue dans le style de la comédie naturaliste. Contrairement à la tradition du genre, ici le menestrel show revisité est interprété par des acteurs noirs, la danse contemporaine stylisée sur les danses des Noirs, mais les chansons n’ont rien à voir avec la culture noire. Sur le plateau nu : au gré des sketches interprétés par des acteurs avec des micros s’égrène l’histoire du jeune Noir Omar qui décide d’être chanteur rapp et dont le parcours, de la rue au star-system, passe par l’univers de la drogue, de la prison, du viol, du sexe, la rencontre d’un évangéliste illuminé délirant sur Dieu, enfin l’ennui, le découragement et l’abandon du rapp. Parcours initiatique, une sorte de conte voltairien noir où les discours stéréotypés, agressifs des Noirs sur les Blancs poussés à bout dans l’exagération, se confrontent en même temps à une vue critique des Noirs.
Le tout est joué dans la convention d’un show, pas d’incarnation des personnages affichés comme figures stéréotypées, caricaturées. Cependant l’ambiguïté subsiste. Point faible de cette première partie : le rythme qui vacille, certains sketches joués sur un ton hurleur et monocorde semblent s’étirer.
Sans pause, une chanson de transition rappelant vaguement le gospel, chantée en chœur, introduit la seconde partie. On apporte un canapé, un tapis, une bibliothèque, des petites tables, un fauteuil, une chaise. On est dans un appartement bourgeois. Une soirée d’anniversaire. Autour de l’hôte, des connaissances. Discussions conventionnelles, banales, décousues; on brasse les clichés, on boit, on sniffe la coke, puis les ressentiments, les mauvaises blagues, les reproches surgissent, le ton monte, la party tourne mal. Les personnages portent costume cravate ou veste et gilet dans le style à la fois soigné et voyant des Noirs américains. Le jeu réaliste contraste avec l’artifice et le décalage de la première partie. Cinq acteurs excellents changent de rôles, passent avec aisance d’un personnage à un autre, d’un code de jeu à un autre. Si Young Jean Lee réussit en grande partie à déstabiliser notre regard, nos certitudes, les idées reçues et les images que les uns se forgent sur les autres, son spectacle manque, par moments, de rigueur et de concision.

 

Irène Sadowska Guillon

 

The Shimpent par Young Jean Lee Theater Compagny
en anglais surtitré en français
du 4 au 8 novembre 2009 au Théâtre de Gennevilliers
tél : 01 41 32 26 26
Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris

 

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Archive pour 7 novembre, 2009

The Shipment

The Shipment par Young Jean Lee’s Theater Compagny de New-York

 

        image1.jpgNée en Corée en 1974, Young Jean Lee arrive en 1976 aux États-Unis et vit depuis 2002 à New York où elle devient dramaturge et crée sa propre compagnie Young Jean Lee’s Theater Compagny.
Elle se fait remarquer sur la scène expérimentale new-yorkaise par l’originalité, l’audace, « l’incorrection politique » de sa démarche et le regard critique qu’elle pose, avec un humour corrosif, sur la société américaine, ses composantes identitaires et les diverses formes de racisme toujours à l’œuvre.
Dans Songs of the Dragons flying to heaven , satire sur la communauté coréenne aux États-Unis, Young Jean Lee s’en prend à l’image et aux clichés identitaires.
Dans The Shipment, conçu avant l’arrivée au pouvoir d’Obama, elle s’attaque à la problématique du racisme vécu par les Noirs américains, différent de celui que subisssent les immigrants. Comment aborder ce sujet sans tomber dans l’écueil du discours politico-idéologique et sans s’ enfermer dans un théâtre identitaire ? Comment amener un vaste public vaste à s’impliquer dans le spectacle et à se poser autrement des questions, hors des stéréotypes et des clichés, sur le racisme ordinaire ? Le parti pris de Young Jean Lee était de se servir des stéréotypes du racisme ordinaire, quotidien, des idées reçues déterminant les comportements des Noirs américains, en les décalant, les poussant à la limite de l’étrangeté. De sorte que, tout en restant reconnaissables, ils ne soient pas identifiables. Cette tactique de décalage des stéréotypes devant opérer autant pour le contenu que pour la structure formelle du spectacle. Ainsi , dans la première partie revisite-t-elle, en le décalant, le menestrel show, « divertissement populaire du XIXe siècle, suite de sketches, de danses, de chansons qui étaient interprétés par des Blancs grimés en Noirs. »

La seconde partie est conçue dans le style de la comédie naturaliste. Contrairement à la tradition du genre, ici le menestrel show revisité est interprété par des acteurs noirs, la danse contemporaine stylisée sur les danses des Noirs, mais les chansons n’ont rien à voir avec la culture noire. Sur le plateau nu : au gré des sketches interprétés par des acteurs avec des micros s’égrène l’histoire du jeune Noir Omar qui décide d’être chanteur rapp et dont le parcours, de la rue au star-system, passe par l’univers de la drogue, de la prison, du viol, du sexe, la rencontre d’un évangéliste illuminé délirant sur Dieu, enfin l’ennui, le découragement et l’abandon du rapp. Parcours initiatique, une sorte de conte voltairien noir où les discours stéréotypés, agressifs des Noirs sur les Blancs poussés à bout dans l’exagération, se confrontent en même temps à une vue critique des Noirs.
Le tout est joué dans la convention d’un show, pas d’incarnation des personnages affichés comme figures stéréotypées, caricaturées. Cependant l’ambiguïté subsiste. Point faible de cette première partie : le rythme qui vacille, certains sketches joués sur un ton hurleur et monocorde semblent s’étirer.
Sans pause, une chanson de transition rappelant vaguement le gospel, chantée en chœur, introduit la seconde partie. On apporte un canapé, un tapis, une bibliothèque, des petites tables, un fauteuil, une chaise. On est dans un appartement bourgeois. Une soirée d’anniversaire. Autour de l’hôte, des connaissances. Discussions conventionnelles, banales, décousues; on brasse les clichés, on boit, on sniffe la coke, puis les ressentiments, les mauvaises blagues, les reproches surgissent, le ton monte, la party tourne mal. Les personnages portent costume cravate ou veste et gilet dans le style à la fois soigné et voyant des Noirs américains. Le jeu réaliste contraste avec l’artifice et le décalage de la première partie. Cinq acteurs excellents changent de rôles, passent avec aisance d’un personnage à un autre, d’un code de jeu à un autre. Si Young Jean Lee réussit en grande partie à déstabiliser notre regard, nos certitudes, les idées reçues et les images que les uns se forgent sur les autres, son spectacle manque, par moments, de rigueur et de concision.

 

Irène Sadowska Guillon

 

The Shimpent par Young Jean Lee Theater Compagny
en anglais surtitré en français
du 4 au 8 novembre 2009 au Théâtre de Gennevilliers
tél : 01 41 32 26 26
Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris

 

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