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De Jean-Luc Raharimanana

D’après Madagascar 1947

   Après son déchirant et désarmant Épilogue d’une trottoire proposé l’an dernier à la Ménagerie de Verre lors du festival Étrange Cargo, Thierry Bédard et sa compagnie notospe631.jpgire récidivent sur la question malgache avec 47. Ce spectacle, qui s’inscrit dans le festival Vi(ll)es du TGP, apparaît, en plein débat sur la question d’une (hypothétique) identité nationale, comme une grenade dégoupillée qui fait mouche. Pour la petite histoire, apprenez qu’en 2009, le ministère des Affaires Étrangères avait interdit la diffusion de cette pièce dans les centres culturels français en Afrique et dans l’Océan Indien. Mais, heureusement pour nous, Thierry Bédard est aussi engagé que tenace. Apparemment donc, la pièce dérangerait. De fait, elle traite de l’insurrection malgache contre la colonisation française, un souvenir plutôt absent de l’histoire officielle nationale, voire relégué, aux dires de l’un des personnages, au rang de « fantasme ». On l’ignore peut-être mais la pièce est là pour nous l’apprendre : en 1947, les Malgaches se sont soulevés pour obtenir leur indépendance face aux colons qui pillaient leurs terres pour en exploiter pierres précieuses, pétrole et autres richesses. Pour contrer cette jacquerie, la « pacification » orchestrée sera à l’origine de milliers de massacres, sans compter les tortures, les villages incendiés… On comprend que le sujet embarrasse. En France, si les journaux de l’époque ont évoqué le soulèvement, ils n’ont rien dit de la répression. Quant aux Malgaches eux-mêmes, ils sont mal à l’aise avec le sujet : une partie d’entre eux, supplétifs des forces métropolitaines, a en effet combattu ses propres frères qui eux luttaient pour l’indépendance. Bref, tout un pan de la mémoire collective effacé d’un coup d’éponge et qui ressurgit sur le plateau…

La pièce est ainsi composée de différents témoignages, interprétés par deux comédiens, Romain Lagarde et Sylvian Tilahimena. Or leurs souvenirs anecdotiques se fédèrent autour d’enjeux majeurs : faut-il parler d’agression ou de protectorat ? de mort ou d’extermination ? de soumission ou d’intégration ? D’ailleurs, on l’a oublié ou on ne l’a jamais su, mais au nom du progrès, les « indigènes » ont abandonné leur « langue de primate ». Aussi Sylvian Tilahimena s’exprime-t-il à plusieurs reprises en malgache pour raconter une famine, un carnage, ou d’autres visions du passé qui hantent ses personnages.

Comme à l’accoutumée, Thierry Bédard s’est entouré d’interprètes exceptionnels : leur jeu, fort et saisissant, transmet les émotions les plus intenses. La scénographie, remarquable de simplicité, est aussi à souligner : si nul décor, une tenture blanche au fond laisse toutefois apparaître des ombres de feuilles de palmiers ou des photographies poignantes du fonds Charles Ravoajanahary. À cet égard, le jeu de lumière de Jean-Louis Aichhorn est excellent. La création sonore, signée Jean-Pascal Lamand, n’est pas non plus en reste : de vieux bulletins de la TSF alternent avec des chants et des bruits de jungle : pas sur feuilles sèches, pluie, tam-tam, vent…
Un spectacle à voir absolument, ne serait-ce que pour accueillir ce personnage honteux de devoir aujourd’hui se « justifier », ou pour rendre hommage à ceux qui ont été volontairement oubliés.

Barbara Petit
Du 24 au 29 mars au TGP de Saint-Denis
Dans le cadre du festival Vi(lles) du 24 mars au 18 avril. En tournée à L’Échangeur de Bagnolet du 31 mars au 3 avril.

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47  Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis  de Jean-Luc Raharimanana, mise en scène Thierry Bédard

Thierry Bédard qui a séjourné à Madagascar à plusieurs reprises avait monté Épilogue d’une trottoire avec Marie-Charlotte Biais après de longs entretiens avec des prostituées. Il avait entamé une collaboration avec Jean-Luc Raharimanana avec Les cauchemars du Gecko présenté récemment au Théâtre des quartiers d’Ivry(voir ce blog). Il avait travaillé aussi autour de l’une de ses oeuvres publiées en France Madagascar 1947, récit de la sanglante insurrection malgache contre le colonisateur français. Conté par Sylvain Tilahimena acteur malgache très présent dans l’évocation d’indicibles souffrances comme dans les quelques moments de joie, accompagné par un double blanc massif Romain Lagarde, l’évocation de ce massacre de plusieurs centaines de milliers de résistants aux”bienfaits de la colonisation” est terrifiante. “…des morts qui circulent dans les veines de la terre…et viennent se briser parfois la tête contre les murs de nos oreilles…(Aimé Césaire). 47 devait être présenté dans nombre de Centres culturels français en Afrique et en Océanie qui l’avaient programmé, la tournée a été interdite sous de faux prétextes par les plus hautes autorités ! Un débat suivait la représentation entre Jean-Luc, Thierry et de jeunes lycéennes de toutes les couleurs, l’une d’elle était voilée, leur maturité était impressionnante.

Edith Rappoport

 


Archive pour 30 mars, 2010

Paradis tzigane

Paradis tzigane par le Cirque Romanès, direction Alexandre Romanès.

    3cirqueromanesov5.jpgAlexandre Romanès dédicaçait son dernier recueil de poèmes Sur l’Epaule de l’ange et c’était une bonne occasion de revoir son Paradis tzigane. Un petit chapiteau de 400 places. A l’entrée, un plateau avec plein de bougies et un orchestre formidable ( contrebasse, accordéon, clarinette,et violon) qui accueille le public et qui, avec une jeune chanteuse, va accompagner chacun des numéros.. Pas d’effets spéciaux à grands coups de rafales lumineuses mais quelques projecteurs, un grand tapis , un rideau de fond fait de grande pièces de coton et quelques chaises. Pas de musique de films racoleuses ou de numéros tape-à-l’oeil. Alexandre Romanès, né Bouglione,  a rompu depuis longtemps avec ces super-productions circassiennes.. qui ne rendent pas vraiment la monnaie  de la pièce- chère- et tous ses spectacles ont une sorte d’humilité et de savoir-faire qui les a- et ce n’est que justice- rendus  célèbres. Et puis il y cette joie contagieuse  qui illumine chacun des intervenants et cela c’est irremplaçable. Il y a toujours la famille au grand complet avec les plus jeunes des enfants aussi à l’aise dans les airs que sur terre, et quelques invités: une chanteuse russe au début et un couple d’acrobates qui, à la fin du spectacle, exécutent un numéro brillantissime et très érotique avec une grâce et une fluidité impressionnante.
Entre temps des numéros de jonglage, comme celui de jeune homme avec cinq boules blanches  ou avec trois chapeaux qui semblent obéir au doigt et à l’oeil de leur patron. Ou bien encore  cette  merveilleuse cette fil-de-ferriste. Et à la fin, un autre jongleur qui réussit à faire tourner un ballon sur un petit axe, puis en mettre un second( qui tourne aussi) sur le premier puis un troisième sur le second. Il y a là un savoir faire de tout premier ordre remarquablement orchestré par le maître de maison.
Et encore une fois, cela n’a rien à voir avec les prestations souvent très décevantes des grands cirques comme la dernière  de Pinder. Pas d’animaux, sauf une chèvre que l’on fait monter le temps de quelques secondes sur une petite boîte, comme un clin d’oeil, pour dire ce que l’on ne veut surtout pas faire. Certains numéros sont un peu longs mais les deux heures que durent le spectacle sont bien rythmées et passent t vite. sans aucune esbrouffe et avec un grand respect pour le public.
Alors y aller? Oui, bien sûr, sans aucune hésitation possible, et le bonheur des enfants faisait plaisir à voir; et , de plus, c’est  très facile à trouver.

Philippe du Vignal

Cirque Romanès, 42 boulevard de Reims 75017 Paris. A deux cent mètres du Métro Porte Champerret. Places de 10 à 20 euros. T: 01-40-09-24-20

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AU PARADIS TOUTES LES FEMMES SONT GITANES  CIRQUE ROMANÈS

Mise en piste Alexandre Romanès
Pour fêter la publication de son deuxième livre par les éditions Gallimard Sur l’épaule de l’ange, préfacé par Christian Bobin, Alexandre Romanès nous a invités à une fête superbe, qui s’ouvre bien entendu sur son spectacle de cirque, mené à un rythme endiablé par un ensemble de musiques tziganes, , avec de très beaux numéros d’acrobatie pour la plupart accomplis par ses enfants- (ô l’adorable petite Rose Reine, sa préférée-)emportés par la voix de leur mère Délia infatigable et merveilleuse chanteuse. Il y a comme d’habitude des invités, en particulier une belle chanteuse qui ouvre le spectacle, une extraordinaire danseuse de corde rousse, un jongleur de chapeaux et de balles avec une belle présence comique, un virtuose de ballons et de belles suspensions érotiques d’un couple enlacé tout en haut du chapiteau…. Le public lui fait un triomphe, et Dominique Blanc accompagnée d’un autre acteur lit quelques poèmes et nous faisons la queue pour les dédicaces avant de participer au fastueux barbecue servi généreusement par ce “peuple de promeneurs” (premier livre d’Alexandre).
Edith Rappoport

 

 

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