Oncle Vania à la campagne

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Voici les prochaines dates d’un spectacle  créé il y a déjà quatre ans que nous avions beaucoup aimé et revu depuis à Villeneuve-lès-Avignon: Oncle Vania à la Campagne,  mis en scène par  le Théâtre de l’Unité et qui  doit aller maintenant sur ses 80 représentations… Pour un spectacle en plein air avec quelque vingt comédiens, ce n’est pas rien… Comme disait Hervée de Lafond,  co-auteur du spectacle avec Jacques Livchine:  » On s’est planté , c’est trop lourd et cela ne marchera jamais!
Mais on sait bien que les meilleures et les meilleurs des gens de théâtre ne sont pas de bons prophètes…

Philippe du Vignal

 

Lundi 3 et mardi 4 mai : Oncle Vania à la campagne à Bayonne (64)
Vendredi 7 et samedi 8 mai : Oncle Vania à la campagne à Gradignan (33)
Dimanche 9 mai : Gourmandisiaque à Paris Xème
Vendredi 14 et samedi 15 mai : Oncle Vania à la campagne à Vienne (38)
Vendredi 21 mai : Oncle Vania à la campagne à Saint Genis Laval(69)
Samedi 22 mai : Oncle Vania à la campagne à Saint Priest (69)
Lundi 24, mardi 25 et mercredi 26 mai : Oncle Vania à la campagne à Grasse (06)
Vendredi 28 et samedi 29 mai : Oncle Vania à la campagne à Chalette-sur-Loing (45)
Samedi 5 juin : Oncle Vania à la campagne à Saint Quentin (02)
Mardi 8 juin : Oncle Vania à la campagne à Montbéliard (25)
Vendredi 11 et samedi 12 juin : Oncle Vania à la campagne à Fos-sur-Mer (13)

 


Archive pour avril, 2010

Héros-limite

Héros-limite de Ghérasim Luca, mise en scène de Laurent Vacher.

hros.jpgGherasim Luca était né en 1913 à Bucarest, apprit jeune le français mais aussi l’allemand et se mit à fréquenter les surréalistes français , notamment le  peintre Victor Brauner et eut une correspondance avec André Breton qu’il renonça pourtant à rencontrer. Il vécut pendant la guerre en Roumanie où il créa un lieu d’exposition , tout en écrivant de nombreux recueils de poèmes en langue française.
 Puis en 1952, il vint s’installer à Paris, continuant à écrire des poèmes, à faire de nombreux dessins et collages . Il aimait beaucoup réciter ses poèmes en public lors de festivals de poésie.
 Mais comme son ami Paul Celan , sans doute dégoûté par l’antisémitisme et le racisme qui menaçaient une fois de plus, il se jeta dans la Seine en janvier 94. Fin de l’histoire personnelle de Gherasim Luca mais  pas fin de cette histoire poétique de cet auteur d’origine roumaine mais qui avait choisi la langue française pour s’exprimer. Et avec un sens merveilleux du langage, absolument unique dans la poésie de notre pays. Comme l’a écrit Gilles Deleuze, il est un grand poète parmi les plus grands: il a inventé un prodigieux bégaiement: le sien. Et de fait, Luca sait  comme personne s’emparer des mots, les faire valser, créer des juxtapositions, les malaxe jusqu’à en extirper toute la substance poétique.Il y a à la fois de l’humour, souvent assez noir, mais aussi de la tendresse dans cette entreprise de dislocation et de fragmentation du sens chez cet homme qu’on devine possédé d’une sensibilité à fleur de peau. C’est parfois comme une sorte de cri poétique qui vous atteint au plus profond de vous-même, et d’où naît une formidable poésie vraiment unique dans notre littérature…
hl.jpg Et c’est vrai qu’il y a bien là  une belle échappée possible vers un lieu scénique; Claude Merlin ne s’y était pas trompé et s’ y était lancé l’an passé ; avec quelques jeunes comédiens, il y faisait preuve d’ un sens remarquable de la poésie oralement proférée..
 Laurent Vacher a pris le relais avec un autre texte de  Luca: Héros-Limite. Plateau dépouillé: juste cinq  chaises , une table, un perroquet avec quelques costumes.  et un seul comédien, Alain Fromager accompagné parfois de Johan Riche à l’accordéon, que l’on avait notamment vue au cinéma  dans Mesrine. Il y a de beaux moments où la poésie de Luca est flamboyante et d’autres où l’on ne sait pourquoi Laurent Vacher le fait crier, ce qui n’est  pas vraiment utile et casse la profération de cette guirlande de phrases merveilleusement mise au point par  Ghérasim Luca. Et  sur la fin, ce travestissement, ce maquillage rapide des paupières en bleu vert et des lèvres avec un rouge agressif n’apportent pas grand chose à la mise en scène.
  En fait, Claude Merlin s’était superbement tiré de cet exercice difficile: transposer le verbe poétique sur un plateau en répartissant la voix de Luca entre plusieurs jeunes comédiens. Ici, on  l’impression qu’Alain Fromager, pas vraiment à l’aise, mène un trop rude combat, quand il est seul en scène ;  le spectacle très inégal parait bien long, même s’il ne dure qu’une heure vingt…
 Alors à voir? Pas si sûr; on ressort de la Maison de la Poésie à la fois heureux d’avoir retrouvé la poésie de Luca mais déçu qu’elle n’ait pas été mieux servie.

Philippe du Vignal

Maison de la Poésie jusqu’au 23 mai.

Morphine

Morphine de Mikhaïl Boulgakov, adaptation et mise en scène de Thierry Atlan.

 Du célèbre écrivain russe ( 1981-1940), on connaît surtout son grand roman., Le Maître et Marguerite.  Médecin pendant le Révolution d’Octobre, il se tourna ensuite vers le journalisme et la littérature. Mais il garda ses distances avec le régime révolutionnaire, même si c’est   Staline qui lui procura un travail alimentaire.
Dramaturge reconnu, il écrivit notamment La Vie de Molière qui parut longtemps censuré. Très apprécié par Stanislawski, Il n’avait pas que des amis, et le moins  que l’on puisse dire, est que  Meyerhold,  Maïakowski et Taïrov, ne furent pas tendres avec lui…
Il a écrit aussi nombre de nouvelles dont Morphine qu’il écrivit dix ans après qu’il ait été envoyé- en 1917- diriger un petit hôpital de campagne loin de Moscou. Et pendant ces deux années d’isolement, il était bien placé pour se droguer facilement à la morphine. Son épouse réussit à le délivrer de son addiction.  La nouvelle relate à la fois l’ addiction à cette drogue puis sa  libération. Trois personnages: le docteur Bomgard lit le journal de Poliakov en proie à un mal-être -solitude, obsession de la mort- dont il est une sorte de double, et la jeune femme de Poliakov, l’ange protecteur qui le sauvera de la déchéance.. Le tout sur fond de révolution russe.
Oui, mais voilà, comment faire passer le climat de la nouvelle et les obsessions de Boulgakov au moment où il l’écrivit- à la fin des années vingt- sur un plateau de théâtre. Au début, il y a toute l’intimité de l’intérieur d’un pauvre médecin russe , avec son bureau, une autre table avec les médicaments et un lit en fer. Donc côté scénographie, c’estdonc plutôt bien bien vu et parfaitement crédible.
Mais la dramaturgie, la  mise en scène comme la direction d’acteurs de Thierry Atlan sont  trop conventionnelles pour que l’on s’intéresse un instant à ces personnages assez pâles… On n’échappe pas à la petite vidéo de service- en noir et blanc, comme un vieux film-pas si mal faite,  mais dont on se demande vraiment ce qu’elle vient faire là.
Thierry Atlan essaye maladroitement de rythmer le spectacle par de nombreux noirs, ce qui  n’arrange pas les choses et finit -même en une heure dix- par distiller  un ennui irréversible, d’autant plus que le scène est faiblement éclairée et que les comédiens ne semblent eux-même pas vraiment croire à ce qu’ils font.
Résultat: un spectacle sans doute propre, mais tristounet et  sans grand intérêt, même et surtout pour les amoureux de Boulgakov, et  qui ne mérite vraiment  pas le détour!

Philippe du Vignal

Théâtre du Lucernaire jusqu’au 12 juin.

ANNA POLITOVKAÏA : NON RÉÉDUCABLE

 

Anna Politkovskaia : non rééducable, d’après le texte de Stefano Massini, adaptation de Mireille Perrier.

 

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  À l’heure où la liberté de la presse est chaque jour davantage menacée −deux reporters de France 3 sont retenus en otage depuis décembre 2009 en Afghanistan pour avoir voulu y mener une enquête −, exhiber sur scène le combat d’une journaliste assassinée pour avoir fait son métier était presque une nécessité.
Pratiquer son métier, pour Anna Politkovskaia, c’était dire la vérité dans un pays où le mensonge est roi, où tous ceux qui ne se font pas les serviteurs zélés de la règle étatique, constituant une menace pour l’ordre établi, sont éliminés.
C’est ainsi que pendant une heure quinze, Mireille Perrier se glisse dans la peau de cette femme courageuse et déterminée, guidée par son seul désir de savoir et de faire savoir, et relate les crimes militaires et les mystifications du Kremlin envers la Tchétchénie. Mais, Tchétchénie ou Russie, nul vainqueur : partout, c’est la même monstruosité, la même barbarie, le même mépris pour la vie humaine.
Bien plus qu’une enquête composée de témoignages de soldats ou d’habitants en terrain miné, ou du récit d’expériences vécues comme la prise d’otages de Beslan ou le bombardement de Grozny, la pièce se fait la chronique des années Poutine et de sa négation des droits de l’homme.
Pour servir un théâtre du désastre, une scénographie minimaliste : aucun décor ou mobilier. Seuls les jeux de lumières et les bruitages évoquent les déflagrations des bombes. Quant à Mireille Perrier, elle porte, comme certainement Anna, un simple pardessus et un foulard. Malgré l’opportune idée de porter sur scène la lutte pour la liberté d’une femme qui lui a sacrifié sa vie,  le spectacle n’est pas à la hauteur de nos attentes : est-ce dû à un défaut de mise en scène ?
Malgré la bonne volonté de Mireille Perrier, l’émotion peine à passer. On garde ses distances, sans parvenir à être capté par ces aventures hors du commun et révoltantes. Certes, un monologue de cette durée demande non seulement de l’énergie, du rythme, mais encore un renouvellement constant des propositions dramaturgiques, que ce spectacle ne possède pas vraiment. Dommage!
Un spectacle bien faible en comparaison avec la pièce sur Svetlana Alexievitch, très persuasive, que nous avions vue récemment à Montreuil (voir article dans Le Théâtre du  Blog).Toutefois, pour ceux que la liberté d’expression, la liberté de la presse et du théâtre engagé intéressent, notez que les représentations sont suivies de rencontres qui prolongent le débat, avec des invités : journalistes, écrivains, metteurs en scène, cinéastes… 

 

Barbara Petit

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  Nous avions noté depuis longtemps ce spectacle dans notre agenda, après avoir dévoré Le Journal d’Anna Politovkaïa acheté à Nanterre à la sortie d’un spectacle de Lars Noren mais  qui ne parlait pas directement de cette journaliste hors du commun qui enquêtait  sur la répression coloniale féroce imposée en Tchétchénie par le Kremlin.   Mireille Perrier seule sur un plateau nu, est frêle, probablement comme Anna acharnée à dénoncer des crimes monstrueux.
Mais sa voix ne porte pas bien dans cette grande salle, notre  attente est déçue et on  décroche.  Cela dit, il y a de belles images, comme cette lumière rouge sur son manteau et son écharpe jetés à terre,  quand elle évoque les menaces terribles dont elle a fait l’objet, l’attentat “raté” qui a tué une femme lui ressemblant, l’évocation de ses enfants….Mais l’on reste un peu sur sa faim.

Edith Rappoport

 

Du 23 avril au 12 mai 2010 à la Maison des Métallos.

La 24 ème nuit des Molières

 La 24 ème nuit des Molières à la Maison des Arts de Créteil.

  molieres.jpg  D’abord soulignons l’organisation impeccable de la soirée: navettes depuis Paris à l’aller comme au retour en pleine nuit, accueil rigoureux malgré le millier d’invités, places marqués à chaque  nom, etc…La soirée a commencé avec , petite innovation, en ouverture de la retransmission télévisée par France 2,  de Feu la mère de madame, de Feydeau, mise en scène pour la circonstance par Jean-Luc Moreau. Avec Emmanuelle Devos, Patrick Chesnais, Chrstine Murillo et Sébastien Thiéry. Cette courte pièce, un peu légère, qui repose essentiellement sur la chute avec le décor de colonnes blanches légèrement transformé de la remise des Trophées,  semblait perdue sur ce grand plateau. Et le jeu, presque intimiste et sans beaucoup de rythme, semblait davantage destiné au petit écran, puisque destinée à être retransmises dans toutes les chaumières du Cantal Nord comme du cantal Sud, sans oublier l’Aveyron et la Lozère.Bref, pas de la grande mise en scène.
  Puis la soirée , animée par l’inoxydable Michel Drucker et sa nièce Marie, commença avec quelques phrases de Line Renaud, présidente d’honneur, qui rappela,  avec l’humour et la générosité qu’on lui connaît, comment elle passa du music-hall au théâtre, la cinquantaine passée. Ovation debout immédiate de la salle toute entière.
   Puis,  ce fut la remise des trophées qui s’égrena avec, cette fois et sur un rythme un peu plus maîtrisé, tout au long de la soirée. On ne va pas vous les énumérer tous, d’autant que l’on s’y perd parfois dans les catégories forcément un peu artificielles de ces prix et cette distinction qui n’en finit pas de perdurer  entre théâtre public et théâtre privé, avec chacun leur Molière. Le commentaire en serait trop long à faire mais nous y reviendrons.
  Il y eut un formidable moment un peu inattendu: celui où Michel Galabru, Molère 2008 , est venu évoquer, avec beaucoup d’intelligence et d’humour,  Jean Anouilh décédé en 87… En revanche, rien -et c’est plus ennuyeux-sur Vitez mort il y a déjà vingt ans et sans lequel le théâtre contemporain ne serait pas celui qu’il est actuellement.
La page du
programme qui évoque celles et ceux qui nous ont quitté  cette année- dont le metteur en scène Roger Planchon, Jean-Paul Roussillon, l’émouvant  vieux Firs de la Cerisaie dont on se  disait que l’on ne le verrait plus jamais sur scène. Raymonde Temkine qui était la doyenne des critiques et qui continua à aller au théâtre jusqu’à quelques années avant sa disparition. André Benedetto, écrivain et metteur en scène avignonnais, l’un des créateurs du off.
  52860.jpgMais, sans doute une maudite faute de frappe dans le programme !!!! La grande Madeleine Marion, décédée il y a un mois,  est devenue Martine Marion, sosie de Claude François et qui passe régulièrement à la télévision. Aïe!
  En gros, chaque récompense était sans aucun doute méritée, même si,  dans chaque cas de figure, on ne voit pas bien la différence de qualité de jeu entre les quatre, cinq ou six nommés, et que la différence  de voix  a  dû être infime. Mais c’est bien que Laurent Terzieff ( photo plus haut) ait été remarqué pour L’Habilleur et Philoctète,  que la jeune Alice Belaïdi ait été distinguée, tout comme  comme Dominique Blanc; il est bien aussi qu’Alain Françon, visiblement très ému,  ait eu un prix pour sa Cerisaie, comme Joël Pommerat pour Cercles/ Fictions ( voir Le Théâtre du Blog ).
  En revanche, Guillaume Gallienne, acteur confirmé et bien connu de la Comédie-Française, Révélation théâtrale masculine pour son très remarquable solo dans  Guillaume et les garçons à table? Sans doute aurait-il mieux valu décerner le prix à  quelqu’un de moins connu comme Maxime d’Aboville ou  Alexandre Zambeaux. Pourquoi dans certains cas- vu le foisonnement des spectacles et le nombre de très bons acteurs qui les servent, ne pas dédoubler certains prix?
Mais ainsi va la vie d’une remise de trophées que ce soit dans un domaine artistique ou un autre… Forcément pas très équitable!  Michel Fagadau, directeur de la Comédie des Champs-Elysées, s’est plaint d’un manque de transparence quant à l’attribution des prix qui selon lui, n’est pas régie par des règles tout à fait exemplaires, du fait du trop faible nombre de membres du jury qui aient vu un spectacle . Sans doute n’a-t-il pas entièrement tort quand il dénonce cet état des choses.
Mais comment établir une juste répartition quand il y a tellement de productions chaque année. Irène Ajer, la Présidente  a déjà pas mal fait progresser ce qui est devenu, en un quart de siècle, une institution qui reste , malgré toutes les critiques, un formidable soutien de l’Etat et de la profession  toutes catégories confondues,  au théâtre, et au théâtre bien vivant, celui qui se fait parfois difficilement, et pas toujours dans les institutions reconnues…
Le Molière du Théâtre Public, ainsi  que celui du Créateur costumes, a été attribué aux Naufragés du Fol espoir, spectacle du Théâtre du Soleil, ( et sur lequel nos avions émis beaucoup de réserves)- en l’absence d’Ariane Mnouchkine, les dieux pourquoi mais quelques uns des comédiens étaient là.
Par ailleurs, Nicolas Bouchaud , comédiens, a dénoncé, avec juste raison, la mise à mal des droits sociaux dans la profession du spectacle, en partie à cause de la réforme des collectivités territoriales et de la suppression de la taxe professionnelle. Sa prise de parole intelligente et précise fut l’objet de nombreux applaudissements mais n’eut pas l’heur de plaire à Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture  qui n’apprécia pas du tout ce rappel aux réalités. Monsieur le ministre,  visiblement furieux, se leva , demanda un micro et dit qu’il ne pouvait pas être d’accord avec ce qui venait d’être dit et que les portes de son bureau étaient toujours ouvertes, puis se rassit parmi les huées. Celui qu’on entend assez peu d’habitude, avait perdu  ici une belle occasion de se taire, et sa petite leçon de morale a été ressentie comme une claque par les comédiens et metteurs en scène présents.

   Les portes d’un ministre toujours ouvertes? On peut se permettre d’en douter; de toute façon, l’on vous tiendra au courant. Bilan de cette remise des trophées: c’est bien que la cérémonie ait quitté le centre de Paris pour Créteil, même si l’on a l’impression, à part la présence significative du député-maire, que cela se soit passé en dehors de la population locale…
   C’est bien aussi que la soirée ait été plus brève, et globalement, un peu moins compassée que les années précédentes-on aurait très bien pu se passer de ce  Feydeau conventionnel  qui  donnait une image assez vieillotte du théâtre- même si la pièce était jouée en costumes contemporains . Rappelons que l’auteur est mort il y a presque cent ans…
  Et quitte à décentraliser les choses, pourquoi ne pas organiser la cérémonie dans une grande ville ,capitale de région? Ce serait rappeler que le théâtre existe aussi ailleurs qu’à Paris, avec des créateurs et des comédiens remarquables…Enfin, c’est déjà un premier pas, le prix du  Spectacle Jeune Public a été remis à Villeneuve-les-Magulonne à Oh! Boy mise en scène d’Olivier Letellier. Donc affaire à suivre….

 

Philippe du Vignal

Danse contemporaine mode d’emploi

Danse contemporaine mode d’emploi, par Philippe Noisette

couv.jpgAvec une couverture rose électrique et une photographie des « quatre saisons » d’Angelin Preljocaj, Philippe Noisette décide de nous faire découvrir la danse contemporaine. Ce qui surprend, dès les premières pages de l’ouvrage avant le sommaire, c’est une très riche iconographie dépourvue de texte.La danse contemporaine art visuel par excellence est illustrée ici par 218 photos couleur et 19 en  noir et blanc. La plupart sont de Laurent Philippe, et chacune appelle à la découverte d’un spectacle.  Cet ouvrage analyse les origines de la danse contemporaine et les questions que le spectateur peut se poser devant elle. Dans  les derniers chapitres, l’auteur se livre à une étude passionnante des événements majeurs qui ont marqué son évolution, (du Sacre du printemps de Nijinski en 1913 à la dernière création de Merce Cunningham en 2009) et des liens que la danse contemporaine entretient avec les autres arts de la scène. Le livre se termine par la présentation de trente danseurs et chorégraphes qui en ont fait  un art majeur d’aujourd’hui.
La seule réserve tient à l’intitulé simplifié des différents chapitres, ( ça change du classique, ça reflète notre époque, etc ). Ce style  « accrocheur »  donne à l’ouvrage un parfum de «  danse contemporaine pour les nuls », qui ne correspond pas à la valeur du sujet traité. Malgré cette remarque, loin de l’aspect austère de nombreux livres sur la danse, qui possèdent leurs propres qualités d’analyse, quasi-scientifique, ce livre est destiné à un grand public curieux et il réussit son pari : attirer de nouveaux spectateurs et entretenir la mémoire des passionnés de cet art. Un bel hommage dédié à la danse contemporaine qui bouleverse les scènes nationales et internationales depuis 30 ans. 

Jean Couturier

Editions Flammarion, collection Mode d’emploi, 254 p, Paris,  Mars 2010, 24,90E

SOUS LES VISAGES

SOUS LES VISAGES Scénario, dramaturgie et mise en scène de Julie Bérès.

  Nous avions  découvert Julie Bérès en 2001, avec Poudre au Théâtre national de Chaillot, spectacle plastiquement très soigné, dont nous gardons le souvenir d’un spectacle sans paroles.
Sous les visages est un voyage onirique autour d’une Agnès licenciée de son entreprise médiatique, qui affronte les sarcasmes, l’indifférence et le mépris de sa supérieure hiérarchique et de ses collègues. Le spectacle s’ouvre sur un rêve de dédoublement, de souffrance physique, on voit un corps qui enfle, qui se vautre et s’étire, un autre au fond qui devient filiforme. On est constamment tenu en haleine par une utilisation très fine de nouvelles technologies, du décor étonnant de Goury, la scène du licenciement d’Agnès avec une « fête » où un personnage s’envole sur lampadaire, où la nappe du buffet s’élève jusqu’aux cintres est  étonnante.
Il a aussi les recommandations horticoles pour garder la forme, de la patronne qui cultive un jardin d’où émergent des bras, des têtes et même un derrière ! Servi par sept bons comédiens  dont le remarquable Gilles Ostrowsky, ce spectacle insolite, drôle et très contemporain sera présenté au Théâtre des Abbesses à Paris à la fin de la saison.

 

Edith Rappoport

 

Spectacle vu au Granit de Belfort

 

 

 

BARRICADE

BARRICADE   création collective de la compagnie Jolie Môme

La compagnie Jolie Môme est installée depuis plusieurs années à la Belle Etoile, lieu chaleureux niché à la Plaine Saint Denis, à quelques encablures de la Porte de la Chapelle. On peut y déguster des soupes en lisant Le Môme, leur journal artistique politique en attendant de rentrer dans la salle toujours pleine d’un public attentif très mélangé, enfants, parents et grands parents qui apprécient cette troupe généreuse qui lutte en musique pour ses idées.
Barricad
e retrace la lutte douloureuse des insurgés de la Commune de Paris en Mars 1871, le spectacle a été créé voilà plusieurs années, et on a pu en voir des extraits toniques au hasard des grandes manifestations populaires de ces dernières années.
Au pied d’une grande pile de caisses qui constitue souvent le décor d’autres spectacles de Jolie Môme, les bourgeois de Paris se gobergent chez Brébant un grand restaurant tandis que le peuple crève de faim. Ils ironisent avec un cynisme effrayant sur les malheurs de la “populace”, leurs propos sont tirés de phrases proférées par d’illustres auteurs, dont le public doit deviner les noms, Théophile Gautier, Edmond de Goncourt,  Ernest Renan…
Ils s’enfuient à Versailles au moment où de courageux ouvriers parisiens qui  ne se laissent pas abattre, prennent les armes, créent la Commune de Paris qui dirigera la ville pendant quelques semaines. Mais l’insurrection sera noyée dans le sang, et la répression sera ans pitié. Les treize comédiens ( sont-ils treize, on a l’impression d’une foule ?) endossent avec agilité les différents rôles, passant du bourgeois méprisant à l’insurgé le plus exalté, brandissant le drapeau rouge, empoignant leurs instruments de musique, entonnant des chants révolutionnaires avec une réjouissante vigueur.
Cette épopée caricaturale, souvent drôle et émouvante est tirée de Jules Vallès, d’Adamov, de Bertolt Brecht, Karl Marx, Jean-Pierre Chabrol, Louise Michel et Armand Lanoux. C’était la dernière représentation de cette série, mais vous pourrez voir Basta Ya et Faut pas payer en mai et juin.

Edith Rappoport

La Belle Etoile, Plaine Saint Denis

www.cie-joliemome.org

As you like it

As you like it de William Shakespeare, mis en scène de Sam Mendès

 

ayl.jpg  L’ histoire  de la construction de « The  Bridge Project » représente un pont entre deux continents, les Etats-Unis et l’Angleterre.
C’est le cinéaste Sam Mendès qui en est à l’origine. Diplômé de Cambridge, il se lance très tôt sur les planches. Engagé par la Royal Shakespeare Company, il travaille dans ce qui va devenir sa raison de vivre: le théâtre. Il devient le directeur du Donmar Warehouse Theater et rapidement ses productions ne se limitent plus alors à l’Angleterre.
Broadway lui ouvre ses portes et il met en scène quelques pièces comme: « The Blue Room » avec Nicole Kidman. Son adaptation de la célèbre comédie musicale: « Cabaret » attire l’attention de Steven Spielberg. Mendès lui propose alors le scénario « d’American Beauty » (film qui stigmatise les dérives de la société américaine et les fractures de la cellule familiale occidentale). Les Oscars du Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur Scénario et Meilleur acteur principal ( Kevin Spacey) récompensent ce premier film en 1999 et c’est le début de son amitié avec Spacey qui a débuté au théâtre en 1981; il passe par la télévision en 1986, c’est sa remarquable interprétation pour le rôle de Lester Burnhan, l’antihéros quadragénaire révolté contre « l’american way of life » qui le fera connaître de tous. De son propre aveu, « homme de théâtre avant tout », il est depuis 2003 le directeur artistique de L’Old Vic à Londres ( qui connu de grands jours sous Laurence Olivier et John Gielgud) où il interprètera avec succès le rôle éponyme de Richard II en 2005. Il donne en parallèle de nombreuses « master classes » et s’est fait l’ambassadeur du théâtre entre les deux rives. Il est depuis juin 2008, professeur d’art dramatique à l’Université d’Oxford.Désormais il vit entre Hollywood, New York et Londres et se partage entre sa passion pour le cinéma et le théâtre.Son militantisme pour la scène est impressionnant  et il entraîne alors Sam Mendès à bâtir « The Bridge Project« , ce pont entre les deux continents avec  un contrat:  deux pièces mise en scène par Mendès jouées à New York à la Broadway Academy of Music (BAM Harvey Theater) et coproduit par Kevin Spacey. La critique est unanime. La tournée mondiale a commencé en mars dernier en Asie.
Pierre Lescure, directeur du Théâtre Marigny, prend alors le  risque d’accueillir ce beau projet et nous offre en cadeau « As you like it » et « The Tempest » qui sont donc à l’affiche. Malgré le prix des places à 40, 60 et 90 euros qui est celui de Broadway!- la salle est comble.Tout d’abord, comédiens anglais et américains sont animés par cette même passion pour le jeu, et c’est un véritable travail de troupe que nous propose « As you like it »; cette comédie pastorale de Shakespeare devient alors un bonheur universel.
Les acteurs viennent des grandes scènes de Londres et de New York et ,sous la direction de Mendès, et ont une véritable présence, et leur  jeu fait preuve d’enthousiasme. Les costumes simples et intemporels. La poésie se ressent à travers le texte et les images: deux arbres, côté cour et côté jardin sont placés en avant-scène et contribuent à l’entrée du spectateur dans une nature omniprésente. Dès la première scène  dans un château, les arbres sont déjà là; puis on les retrouve comme élément constitutif de la forêt shakespearienne dans une réelle poésie visuelle (des poèmes y sont accrochés au début de la deuxième partie). Et les chants de cette troupe nous entraînent dans leur rêverie sur des mélodies inspirées de Paul Simon and Garfunkel au parfum musical des années soixante dix.
La compréhension du texte,  que ce soit en anglais ou en français (pour le surtitrage) est fidèle à la poésie de Shakespeare et paraît à la portée de tous. Un travail minutieux et précis de traduction révèle le texte; seul défaut:  le surtitrage détaillé est un peu rapide. De plus, à l’orchestre,  il est difficile de lire  le surtitrage placé au-dessus de la scène  qui est plus visible à la corbeille.Mais c’est tout de même une innovation pour une scène de théâtre privé parisienne.  La création lumière rend  ces images scéniques cinématographiques  qui sont d’une belle fluidité; la mise en scène de Sam Mendès fondée sur la philosophie de Shakespeare pour qui tout désordre de la nature a des conséquences sur l’humanité ,est un sujet plus que jamais d’actualité. »The Bridge Project » a été monté pour un public international, c’est un projet ambitieux à la hauteur de ses protagonistes, Sam Mendès et ses comédiens, pour notre plus grand plaisir.As you like it! 

 

Nathalie Markovics

 

Théâtre Marigny, du 14 au 17 avril, « As you like it », et du 20 au 24 avril, « The Tempest » ,et en tournée internationale

 

www.theatremarigny.fr
www.oldvictheatre.com

 

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Don Giovanni

Don Giovanni, par les marionnettes de Prague

     Mille clochers, cent théâtres, des dizaines de marionnettes pendues dans les boutiques de souvenirs et plusieurs authentiques Don Giovanni par les marionnettes de Prague attendent le touriste dans l’une des plus belles villes d’Europe. Rançon de la beauté, de la richesse culturelle : ni voyageurs, ni visiteurs, il n’y a plus que des touristes, masse docile soumise aux impératifs de ce qu’il « faut voir ».
Nous avons donc vu, docilement, l’un des authentiques théâtres de marionnettes qui proposent aux touristes l’opéra de Mozart créé dans cette ville. 
Imaginez un petit théâtre, sombre, aux fauteuils de bois claquants, plein à craquer.
Un gracieux Mozart de 90cm de  haut prend la baguette, surgi de la fosse. Commence l’opéra, enregistré et diffusé sans grande subtilité, mais peu importe : le public chantonne les airs, et les mouvements des poupées. Celles que nous avons vues n’étaient pas toutes aussi jolies que le petit Mozart, mais parfois drôles et efficaces. Quelques gags, qui provoquent la joie d’une partie des spectateurs, comme l’intervention de plus en plus visible des manipulateurs. Que les mains gantées de noir des manipulateurs tombent « mortes » comme le père de Donna Anna, c’est une belle idée. Que la statue du commandeur prenne la forme du Golem que le même public a forcément vu dans son parcours touristique, bon… Qu’un manipulateur vienne sur scène – où il paraît un géant – montrer que la pièce s’éternise, qu’on a compris, que les vociférations du quatuor final sont de trop : c’est drôle un moment, mais  ça s’use vite. Timide coup de pied à la tradition : il y a là un peu de démagogie, et il y manque l’engagement de l’art. Hommage aux manipulateurs, habiles et même virtuoses.
Manque la grâce de la marionnette, faute d’exigence artistique, dans la réalisation des poupées, dans la conduite de la mise en scène. Mais ne nous plaignons pas, c’est assez bon pour des touristes…

Christine Friedel

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