Terre océane

Terre océane de Daniel Danis mise en scène de Véronique Bellegarde.

terreoceane1.jpgOn connaît bien maintenant en France le théâtre de l’écrivain québécois Daniel Danis, et Cendres de cailloux, Le langue-à-langue, Le Chant du dire-dire. Ces textes sont écrits dans une langue à la fois puissante et charnelle  où, comme le dit Danis, les images s’imposent toutes seules, de même que les syncopes, les ellipses et les trous qui les séparent. » Ma main , dit-il, va tellement vite qu’elle saute par-dessus les mots et les associations d’images ».  « Et l’écriture aboutissante n’est que le prolongement de l’expérience vécue, rêvée imaginée… prendre racines… la bouche remplie de terres et de lacs, suis-je un rêvé de mondes habités, loin des grandes villes ».  A lire ces quelques lignes, on comprend mieux cet volonté permanente qu’ a l’écrivain de questionner le corps  dans ses pièces, et plus particulièrement dans Terre océane.
En effet, il s’agit ici d’une sorte de conte : Antoine, un homme jeune encore,  voit un jour arriver chez lui, un petit gamin de dix ans, son fils adoptif que sa mère lui envoie comme un drôle de paquet cadeau. Elle a quitté Antoine quelques mois après qu’ils aient adopté Gabriel , et Antoine ne les a jamais revus. Et  les choses se compliquent, puisque le petit Gabriel est atteint d’un cancer d’une gravité extrême  : il a encore six à neuf mois à vivre…
Antoine prend alors la décision de quitter la ville où il travaille dans le cinéma et s’en va avec Gabriel dans la campagne, chez de son oncle Dave, pour que l’enfant puisse avoir une fin d’existence paisible. Trois âges de la vie, trois personnages qui  s’interrogent sur le futur de leur existence.
Antoine débarque dans un milieu qui n’est pas le sien, Gabriel sait bien , au moins pour une part de lui-même, qu’il va  devoir bientôt s’éteindre ,comme Dave  qui a la plus grande partie de sa vie derrière lui. Et le vieil homme , comme un chaman, bien enraciné dans la nature et dans les bols, n’hésitera même pas à apaiser les souffrances de Gabriel avec de la mescaline. il y a aussi Charlotte  l’infirmière, secrètement amoureuse d’Antoine, qui renonce à ses vacances au loin pour être auprès de Gabriel.
L’histoire se passe évidemment au Québec mais, comme le souligne Danis, pourrait très bien  se passer dans une campagne neigeuse et isolée quelque part en Franche-Comté ou dans les hauteurs de l’Aveyron. Reste à mettre en scène ce huis-clos  et la lente dégradation physique du petit Gabriel , bourré de médicaments et finalement relié à un goutte-à-goutte permanent. Sans tomber dans le pathos et la noirceur permanente…
Mais la mise en scène manque singulièrement de force et de rythme.La direction de Véronique Bellegarde est pourtant impeccable et ses quatre acteurs Michel Bauman, Cécile Bournay , Gérard Watkins font ici un travail de tout premier ordre mais Géraldine Martineau qui joue Gabriel est impressionnante de vérité et d’intelligence . Mais Véronique Bellegarde a  choisi le parti pris d’une scénographie peu inventive et chichiteuse: cubes blancs sur sol blanc avec voiles  dans le fond du plateau où sont projetées par rafales des photos et des images vidéo d’une rare banalité. Et cela casse tout! On comprend bien qu’elle ait voulu rompre avec le pittoresque et le réalisme, mais  l’écriture de Danis – on a pu le voir à plusieurs reprises, notamment dans une très belle mise en scène de Muriel Sapinho pour Le Chant du dire-dire avec de jeunes comédiens-n ‘a pas besoin de toute cette imagerie facile et banale qui dessert un  langage poétique de grande qualité .
Ce recours systématique aux images fixes et à la vidéo est devenu une des plaies du théâtre contemporain.Et on n’échappe même pas ,quand Gabriel vit ses derniers instant veillé par Antoine et Dave, à la projection de son corps et de son visage, auréolé de couleurs un peu flash. Tous aux abris…
Alors à voir? Peut-être et à la rigueur , (mais on vous aura prévenu) si vous réussissez à faire abstraction de toute  cette pollution visuelle et sonore qui démolit le texte. Dommage, parce la pièce est de grande qualité et  les quatre acteurs  remarquables. Mieux vaut sans doute relire le texte de Terre océane!

Philippe du Vignal

Théâtre de la Ville/ les Abbesses, jusqu’au 10 avril.

Les pièces de Daniel Danis sont publiées chez l’Arche Editeur ( Paris).


Archive pour 1 avril, 2010

Terre océane

Terre océane de Daniel Danis mise en scène de Véronique Bellegarde.

terreoceane1.jpgOn connaît bien maintenant en France le théâtre de l’écrivain québécois Daniel Danis, et Cendres de cailloux, Le langue-à-langue, Le Chant du dire-dire. Ces textes sont écrits dans une langue à la fois puissante et charnelle  où, comme le dit Danis, les images s’imposent toutes seules, de même que les syncopes, les ellipses et les trous qui les séparent. » Ma main , dit-il, va tellement vite qu’elle saute par-dessus les mots et les associations d’images ».  « Et l’écriture aboutissante n’est que le prolongement de l’expérience vécue, rêvée imaginée… prendre racines… la bouche remplie de terres et de lacs, suis-je un rêvé de mondes habités, loin des grandes villes ».  A lire ces quelques lignes, on comprend mieux cet volonté permanente qu’ a l’écrivain de questionner le corps  dans ses pièces, et plus particulièrement dans Terre océane.
En effet, il s’agit ici d’une sorte de conte : Antoine, un homme jeune encore,  voit un jour arriver chez lui, un petit gamin de dix ans, son fils adoptif que sa mère lui envoie comme un drôle de paquet cadeau. Elle a quitté Antoine quelques mois après qu’ils aient adopté Gabriel , et Antoine ne les a jamais revus. Et  les choses se compliquent, puisque le petit Gabriel est atteint d’un cancer d’une gravité extrême  : il a encore six à neuf mois à vivre…
Antoine prend alors la décision de quitter la ville où il travaille dans le cinéma et s’en va avec Gabriel dans la campagne, chez de son oncle Dave, pour que l’enfant puisse avoir une fin d’existence paisible. Trois âges de la vie, trois personnages qui  s’interrogent sur le futur de leur existence.
Antoine débarque dans un milieu qui n’est pas le sien, Gabriel sait bien , au moins pour une part de lui-même, qu’il va  devoir bientôt s’éteindre ,comme Dave  qui a la plus grande partie de sa vie derrière lui. Et le vieil homme , comme un chaman, bien enraciné dans la nature et dans les bols, n’hésitera même pas à apaiser les souffrances de Gabriel avec de la mescaline. il y a aussi Charlotte  l’infirmière, secrètement amoureuse d’Antoine, qui renonce à ses vacances au loin pour être auprès de Gabriel.
L’histoire se passe évidemment au Québec mais, comme le souligne Danis, pourrait très bien  se passer dans une campagne neigeuse et isolée quelque part en Franche-Comté ou dans les hauteurs de l’Aveyron. Reste à mettre en scène ce huis-clos  et la lente dégradation physique du petit Gabriel , bourré de médicaments et finalement relié à un goutte-à-goutte permanent. Sans tomber dans le pathos et la noirceur permanente…
Mais la mise en scène manque singulièrement de force et de rythme.La direction de Véronique Bellegarde est pourtant impeccable et ses quatre acteurs Michel Bauman, Cécile Bournay , Gérard Watkins font ici un travail de tout premier ordre mais Géraldine Martineau qui joue Gabriel est impressionnante de vérité et d’intelligence . Mais Véronique Bellegarde a  choisi le parti pris d’une scénographie peu inventive et chichiteuse: cubes blancs sur sol blanc avec voiles  dans le fond du plateau où sont projetées par rafales des photos et des images vidéo d’une rare banalité. Et cela casse tout! On comprend bien qu’elle ait voulu rompre avec le pittoresque et le réalisme, mais  l’écriture de Danis – on a pu le voir à plusieurs reprises, notamment dans une très belle mise en scène de Muriel Sapinho pour Le Chant du dire-dire avec de jeunes comédiens-n ‘a pas besoin de toute cette imagerie facile et banale qui dessert un  langage poétique de grande qualité .
Ce recours systématique aux images fixes et à la vidéo est devenu une des plaies du théâtre contemporain.Et on n’échappe même pas ,quand Gabriel vit ses derniers instant veillé par Antoine et Dave, à la projection de son corps et de son visage, auréolé de couleurs un peu flash. Tous aux abris…
Alors à voir? Peut-être et à la rigueur , (mais on vous aura prévenu) si vous réussissez à faire abstraction de toute  cette pollution visuelle et sonore qui démolit le texte. Dommage, parce la pièce est de grande qualité et  les quatre acteurs  remarquables. Mieux vaut sans doute relire le texte de Terre océane!

Philippe du Vignal

Théâtre de la Ville/ les Abbesses, jusqu’au 10 avril.

Les pièces de Daniel Danis sont publiées chez l’Arche Editeur ( Paris).

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