L’Envolée de Gilles Granouillet, mise en scène de Jean-Claude Berutti.
Il faut souligner et saluer ce qui réjouit dans cette Envolée : d’abord, la présence de douze comédiens sur le plateau, une belle équipe, une belle production, une mise en scène que l’on sent attentive, inspirée, des décors et costumes soignés, au service d’une pièce écrite par un auteur français vivant, Gilles Granouillet. On a pu voir de lui, à la rentrée, le très beau Zoom mise en scène de François Rancillac. Cet auteur d’origine stéphanoise qui a déjà beaucoup écrit, a été aussi beaucoup joué, mais peu à Paris. Et on a envie de partager le parcours.
Ensuite, le sujet, une course-poursuite dans une ville de province. Frère et sœurs, cousins et cousines, courant après leur identité, cherchant leur place dans l’histoire familiale. Le prétexte ? La sœur cadette, sortie de l’hôpital psychiatrique pour une visite et n’ayant aucune intention d’y retourner, s’évapore dans les rues de la petite ville. Tous partent à sa recherche. La topographie se superpose habilement à celle des relations.
Et ce genre de comédie n’est pas si fréquent sur nos plateaux. Seul sans doute, Rémi de Vos, avec, entre autres, Le Ravissement d’Adèle, créé à Bussang, s’était attelé résolument à l’écriture d’un « vaudeville contemporain » pour une quinzaine d’acteurs. Gilles Granouillet, lui, parle de « vivisection d’un petit coin de province », de l’appel du printemps, d’un joyeux désespoir.
Nous allions donc voir ce spectacle avec appétit et bienveillance mais rire et jubilation n’étaient au rendez-vous… La salle réagissait peu. Trop souvent sans doute les acteurs emmenaient leurs personnages vers un jeu tellement clownesque qu’ils en perdaient toute sincérité. A trop vouloir souligner le ridicule,ait il y avait une sorte de désengagement des comédiens et des spectateurs. Et ici curieusement le comique des situations, pourtant présent dans le texte, disparaissait. Gilles Granouillet semble aussi difficile à interpréter que le grand maître du genre, Labiche, auquel il se réfère !
Au final, ce sont les moments calmés et adoucis, les moments d’émotion simple, de découverte du désir chez les jeunes gens, réflexion sur soi-même, retrouvailles du frère et de la sœur, qui passent le mieux. Une belle tentative mais pas entièrement convaincante.
Evelyne Loew
Jusqu’au 10 avril.Théâtre de l’Est Parisien, Paris ( XX ème).
Le texte de la pièce est édité chez Actes-Sud papiers.