Le festival off en Avignon.

pont.jpgLa question que l’on nous pose souvent mais nous n’avons pas vraiment les clés avant d’être sur place: comment s’y retrouver dans cette jungle de plusieurs centaines de spectacles où le meilleur côtoie souvent le pire, et où toutes les jeunes compagnies considèrent souvent, et malheureusement à tort, qu’Avignon est un précieux sésame et une chance inespérée de trouver la structure qui les accueilleront et.. qui les feront vivre.
  Alors,  déjà quelques pistes: commençons par les lieux connus depuis longtemps:  à la Chapelle du Verbe Incarné, dirigée par Greg Germain et Marie-Pierre Bousquet le 15 juillet à 10 h 30, le film de Manthia Diawara qui a suivi le grand poète Edouard Glissant sur le Queen Mary II pour une traversée de l’Atlantique; Edouard Glissant sera « présent »,  en liaison depuis la Martinique, et c’est un homme aussi passionné que passionnant. Inutile de vous dire que vous avez intérêt à réserver… D’autant plus que l’entrée est libre!
  Il y a aussi deux jeunes femmes remarquables;  chacune dans un genre différent: au Théâtre du Chêne noir dirigé par Gérard Gélas, celui qui, en 68, mit le feu aux poudres avec un spectacle écrit et mis en scène par luiLa Paillasse aux seins nus qui fut aussitôt interdite par le préfet du Gard pour « risque de trouble à l’ordre public et atteinte à la personne du chef de l’Etat » sans crainte du ridicule!
L’acteur principal un inconnu ( Daniel Auteuil, si, si c’est vrai) tomba malade et Gélas dut le remplacer mais très peu de gens purent voir la pièce ce  qui, paradoxalement, l’aida beaucoup en le plaçant  tout de suite sur orbite. Donc chez Gélas, vous pourrez voir Alice Belaïd qui vient de remporter un Molière pour Confidences à Allah qu’il a mis en scène .
laylametssitanecolor.jpgIl y a aussi Layla Metssitane, une autre jeune femme à la fois intrépide et talentueuse, à l’énergie sans défaut qui monte et qui joue  des extraits de Stupeurs et tremblements d’Amélie Nothomb; c’est à Présence Pasteur à 12 heures 15;
  Gélas crée cette année dans son Théâtre du Chêne noir: Ernesto Che Guevara, La dernière nuit de José Pablo Feinman. Et il a invité  Jérôme Savary- inoxydable et généralement haï par une bonne partie de la profession… Après avoir dirigé Chaillot et l’Opéra- Comique, il continue à faire des mises en scène un peu partout à l’étranger; et il a mis en scène Paris Frou Frou avec son vieux copain Michel Dussarat, excellent comédien mais aussi costumier;  c’est encore on s’en doute du théâtre dans le théâtre mais aussi une occasion de voir Dussarat et  les costumes du Magic Circus qui lança Savary, il y a… plus de quarante ans.
  Pas très loin au Théâtre des Carmes, d’André Benedetto qui crut bon de  s’envoler l’an passé à la même époque, on pourra voir Urgent crier, avec des textes et des poèmes de lui,  par ses amis acteurs, musiciens et performeurs. Une occasion aussi pour beaucoup de découvrir un homme attachant qui fit partie du paysage théâtral avignonnais.
  Philippe Avron qui fut autrefois  comédien chez Vilar et qui vient souvent au Festival, monte cette année Montaigne , Shakespeare , mon père et moi avec la collaboration  d’Alain Timar, le directeur du Théâtre des Halles qui l’accueille à 19 h 30. L’humour et l’impertinence du grand comédien au service de Montaigne, cela donne très envie d’aller voir. Dans ce même Théâtre des Halles, Timar met en scène une adaptation de Simples mortels du roman bien connu de Philippe de la Génardière.
  Vous pourrez aussi avoir une bonne occasion de voir cette pièce incroyablement violente et la plus jouée de l’Autrichien Werner Schwab Les Présidentes qu’avait magnifiquement joué la regrettée Christine Fersen: c’est à Présence Pasteur à 16 heures, mise en scène par Françoise  Delrue.
Edith Rappoport vous recommande: KING KONG THÉORIE  (voir son article)  Du 7 au 27 juillet à 21 h 05, la manufacture Avignon www.lamanufacture.org

 

  Signalons aussi,  loin du bruit ,de la fureur et de la chaleur d’Avignon, la 37 ème édition des  Rencontres d’été de la Chartreuse de l’autre côté du Rhône,  avec tout un programme de spectacles comme La Mort d’Adam de Jean Lambert-wild, ( voir Le Théâtre du Blog)  et sur une  thématique associant des gens  de théâtre et des scientifiques l’opération: Théâtres du Globe avec nombre de performances, spectacles installations, lectures, conférences ,dont celles de Frédéric Ferrer à l’origine, géographe devenu metteur en scène ,sur l’importance de la glace dans la compréhension du monde.
  La suite du programme après demain….

Philippe du Vignal
 


Archive pour juin, 2010

The Giant Match

The Giant Match, création de la compagnie « Les grandes Personnes » en Afrique du Sud.

article1.jpgLa compagnie Les grandes personnes  ont débarqué en Afrique du Sud, afin de réaliser The Giant Match. Leurs marionnettes géantes ont participé à l’inauguration de la coupe du monde de football et vont la clôturer. Mais ce spectacle n’est pas lié au football. A l’initiative de Laurent Clavel, directeur de l’Institut culturel Français de Johannesburg, de la province du Gauteng, et du responsable de la compagnie, Christophe Evette, ce parcours spectacle a été découvert par un vaste public, dans différents lieux symboliques comme : les townships de Soweto, la Johannesburg Art gallery du centre de la capitale ou le National Arts festival de Grahamstown.

Il s’agit d’un spectacle déambulatoire joué, chanté, et dansé par 30 marionnettes géantes, autour d’une adaptation sud africaine de « Roméo et Juliette ». La magie du travail de la compagnie est de donner une mobilité incroyable à ces marionnettes, manipulées chacune par un seul acteur; elles sont faites d’une structure légère, de montage et de manipulation aisée. Une première parade effectuée par quelques marionnettes, avec des distributions de journaux relatant l’événement, prépare le public.

Puis selon une scénographie de rue, définie à l’avance en fonction du lieu , les marionnettes viennent attirer les spectateurs, dans une histoire familiale opposant la famille Mkhize et la famille Majakathat. Le plus remarquable dans cette création est le résultat, depuis plusieurs mois, d’un échange et d’un partage, entre un collectif d’artistes français, et une centaine d’artistes Sud-Africains, danseurs, musiciens, artisans, provenant de différentes communautés en particulier des townships de la périphérie de la capitale. Chacun de ces partenaires, ayant apporté son savoir-faire d’univers très différents. Une fois de plus, le théâtre de rue s’est inscrit au cœur de la vie de la cité, pour le plus grand plaisir d’un public non formaté; cela n’avait évidemment rien à voir avec nos habitudes de sorties culturelles occidentales…  

Jean Couturier

Le 3 et 4 juillet National Arts Festival : Grahamstown

Du 5 au 11 juillet Publics Viewing Areas and Fans Parks : Gauteng

Le 11 juillet Soccer city : Soweto, Clôture de la Coupe du monde de football de la FIFA 2010

 

  www.lesgrandespersonnes.org

 

 

 

 

Entretien avec Jean Lambert-wild.

Entretien avec Jean Lambert-wild.

 jean.jpg Jean Lambert-wild, qui passa les dix sept premières années de sa vie à La Réunion,  fut d’abord acteur, puis metteur en scène et fut un jour nommé  à la tête de la Comédie de Caen à 34 ans où il succéda à Michel Dubois; il a monté cette année Le Recours aux forêts sur un texte du philosophe Michel Onfray, et une libre adaptation de La Chèvre de Monsieur Seguin d’Alphonse Daudet, spectacle qui sera aussi présenté en Avignon.
Exigeant avec lui-même, créateur hors normes , s’il ne craint pas d’arborer sa casquette de directeur de centre dramatique avec les responsabilités que cela suppose,il a surtout , chevillée au corps, la volonté d’accomplir une œuvre personnelle, autant sur le plan du texte que sur scène.Mais  il n’est bien, dit-il qu’entouré de ses partenaires, que ce soit pour la musique, la vidéo, la scénographie, l’art de la magie, et bien entendu, l’équipe technique et administrative son théâtre: Comédie de Caen et Théâtre d’Hérouville. L’homme, simple et direct,
sait de quoi il parle…

- Il y a beaucoup de gens dans le milieu du théâtre contemporain qui vous prennent comme une sorte d’électron et qui ont un peu de mal à vous situer…

-  Ce n’est pas étonnant. J’ai toujours revendiqué,et ce n’est pas d’hier, un travail personnel d’écriture et un travail d’équipe, en particulier avec mon compositeur Jean-Luc Therminarias qui m’accompagne dans mes projets depuis douze ans mais aussi, l’an passé,  avec des artistes comme avec Carolyn Carlson pour Le Recours aux forêts. J’aime bien, ou plutôt  je ressens profondément la nécessité de bouleverser les codes de la narration.
Pour  La Mort d’Adam, j’ai demandé à  François Royet, scénographe et chef constructeur une machine à jouer exceptionnelle et avec Thierry Collet, magicien et comédien qui fut élève au Conservatoire,  des effets que j’ai intégrés au spectacle. Ce  sont des gens qui ont une grande culture théâtrale qu’ils savent mettre au service d’une création, humblement mais avec un grand savoir-faire et  beaucoup d’efficacité.

   En fait,  ce que j’aime dans le théâtre, c’est que les gens puissent y  trouver leur autonomie; d’accord, c’est moi qui dirige et  qui ai le regard final, parce que c’est indispensable et , croyez-moi, j’ai une mémoire éléphantesque mais je leur fais totalement confiance. Parce que je suis certain d’être entouré de gens ultra-compétents qui arrivent toujours à trouver la solution dont j’ai besoin et qui, surtout, savent accompagner un projet.
 François Royet possède  à la fois une formation  de menuisier-charpentier, de machiniste,mais a aussi été chef-opérateur de cinéma…et cinéaste: c’est lui qui a tourné ce beau documentaire sur le monde des exclus et vous l’avez vue: la scène qu’il a construite ressemble beaucoup aux magnifiques scènes en bois du 18 ème siècle;  quant à Thierry Collet, il sait tout de la magie traditionnelle, je le connais depuis quinze ans  mais il se sert aussi  de moyens électroniques  sophistiqués. pour moi, la magie participe d’une réflexion profonde sur le théâtre et j’ai une obsession : retrouver le savoir-faire et les techniques du théâtre à l’italienne pour faire pénétrer le spectateur dans une espèce de fantasmagorie. Il y aura, je pense une relation très particulière avec le public quand il verra le mouchoir voler au-dessus de la scène, faire un tour dans la salle puis revenir à son point de départ.
   Thierry Collet, lui, a toujours eu une réflexion dramaturgique, et il cherche à lier magie et perception/quête de sens; ce n’est pas pour rien qu’il a travaillé avec des gens comme Kokkos ou Laurent Laffargue, et qu’il enseigne aussi au Conservatoire. Tous sont comme des « traducteurs » de ce que je veux scéniquement parlant: ils me sont d’une aide très précieuse.

-  Et cette Mort d’Adam, c’est un voyage de retour vers l’enfance disparue avec votre fils  comme guide, comme une sorte d’Hermès…

  Oui, je dirais que c’est comme une  mélopée qui est un des éléments de cette grande fresque personnelle que je peins depuis pas mal d’années: L’hypogée avec trois Mélopées, trois confessions: Crise de nerfs-Parlez moi d’amour  que je n’avais pas pu présenter au Festival, en 2003.
   Autour précisément de cette île de mon enfance où j’essaye de raconter , à travers la vie d’un taureau appelé Adam, qui est mort et que j’ai mangé avec ma famille, et c’est le sacrifice de cette bête qui me rend particulièrement attachante l’histoire fameuse du Minotaure qui me fascinait quand j’étais enfant. Et  cette  autobiographie un peu fantasmée, c’est celle de mes racines,toute la part un peu sauvage qui a construit mon identité. C’est la fable  qui m’intéresse dans  cette quête incroyable du passé et de l’enfance, dont on sait pas trop , dans le cas de cette Mort d’Adam, ce qu’elle comporte de réalité ou d’imaginaire d’imaginaire; beaucoup de choses enfouies  étaient encore présentes ( les parfums de la nature, l’odeur de la terre mouillée, etc..), quand je suis retourné il y a quelques mois à la Réunion pour filmer certains paysages qui font partie de ce spectacle. C’est impossible mentalement pour moi  de m’échapper de cette île…
   Pour en revenir à l’enfance, j’avais emmené là-bas Camille mon fils et ce thème des relations père/fils et de l’enfance est aussi celui qui est,  bien sûr, au cœur de cet autre spectacle qu’est cette adaptation de La chèvre de M. Seguin. L’enfance , c’est surtout la continuité de l’enfance qui ne cesse de me surprendre, même arrivé à l’âge adulte et   père de deux jeunes enfants. C’est ce que j’ai voulu montrer dans les images de ce film, avec cette relation si particulière entre un père et son fils.
   Vous avez parlé tout à l’ heure d’exorcisme: oui, c’est cela, j’ai vécu dix sept ans à la Réunion et seul, le théâtre, me semble-t-il, me permet d’accomplir cet exorcisme des dieux  et de mes peurs. Pas le cinéma.
Ce qui est irremplaçable au théâtre, c’est cet  espace de vie et de mort à la fois, cet espace hors normes:  comment imaginer un théâtre sans public? Une représentation participe de  tout un rituel et je crois que je travaille sur des ellipses et surtout sur un échange de signes entre la salle et la scène, grâce aussi à la narration de la fable que je fais dire par Bénédicte Debilly.
Le spectateur verra les images du film de François Royet et entendra le texte sans  qu’il ait nécessairement un lien entre les deux, et ce sera au spectateur de relier cette fable à son histoire personnelle à lui.

- Pouvez-vous nous parler de Jeremiah McDonald, seul acteur mais silencieux  qui est sur scène?

 - C’est en surfant sur You Tube que je l’ai découvert, grâce à une incroyable ressemblance avec moi qui m’a aussitôt frappé. Comme une sorte de sosie… Et ensuite,  j’ai découvert  son personnage de clown et la série de courts métrages assez étonnants qu’il a réalisés, alors qu’il gagnait sa vie comme contrôleur de parking… Et, à son étonnement, je l’ai fait venir des Etats-Unis : il a accepté, et je l’ai engagé comme artiste associé à la Comédie de Caen. Il ne parle que quelques mots de français mais  je communique avec lui en anglais et il est d’une rigueur tout à fait remarquable dans le travail sur scène.

 - Comment voyez vous votre avenir théâtral?

 - Bonne question! Ce qui compte pour moi, c’est de parvenir à boucler mon  projet d’écriture et de le mettre en scène; ensuite,  j’irai vendre des crêpes en Bretagne!  Ou bien  je ferais du théâtre mais  tout à fait autrement!  Après tout, j’ai commencé le théâtre à 20 ans à partir de zéro, j’ai été à l’ école de la marine marchande, j’ai joué de petits rôles  chez  Langhoff, et puis enfin, j’ai travaillé avec Michel Dubois… Donc je verrai bien,  mais,  en ces temps difficiles, une chose  dont je suis sûr, c’est  que le théâtre peut être un lieu de rassemblement des énergies  qui appartient à tous, un véritable bien collectif, un lieu où peuvent œuvrer des artistes engagés dans des processus de création différents. Et je reste convaincu qu’il n’y a que le théâtre pour accomplir cette mission…

Philippe du Vignal

 A Caen, mai 2010

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Festival d’Avignon 2010

  Festival d’Avignon 2010

    pont.jpgDans à peine quinze jours, cette soixante quatrième édition  aura déjà commencé, avec,  pour aider à la préparer, deux artistes associés: l’écrivain Olivier Cadiot et le metteur en scène  Cristof Marthaler pour qui le Palais des papes et sa grande Cour seront le point de départ d’une nouvelle création musicale et théâtrale: Schutz vor der zukunft ( Se protéger de l’avenir). Marthaler a voulu attirer notre attention sur les pratiques de l’euthanasie et de la  sélection biologique à partir d’écrits politiques, d’essais théoriques et de biographies de patients. Ce sera sans doute l’un des moments forts de ce festival.
La grande Cour, immense-et parfois dangereux- cadeau fait aux créateurs, a aussi été confiée à Jean-Baptiste Sastre pour La Tragédie du Roi Richard II ,avec un une distribution haut de gamme dont Axel Bogousslavski, Pascal Bongard, Pierre Michon (si, si!), Denis Podalydès, Nathalie Richard: affaire à suivre.
Ludovic Lagarde mettra en scène Un nid pour quoi faire d’Olivier Cadiot  avec, entre autres, ce formidable acteur qu’est Laurent Poitrenaux, qui sera seul en scène dans Un mage en été du même auteur. Dirigé par le philosophe, musicien et chanteur Rodolphe Burger sur le plan artistique, il y aura aussi l’inoxydable bal du 14 juillet avec des tubes et des invités-surprise, et évidemment son feu d’artifice, seul soir où il n’y a pas de représentations dans le in, et unique événement gratuit et populaire de ce festival où les prix ne connaissent pas la crise , (on attend la visite de Carlita et de son cher mari qui veut à tout prix, dit-on, faire comme Mitterand et aller en Avignon prendre un bain de foule)…
Le bal aura lieu au bord du Rhône devant le pont Saint- Benezet.(conseil d’ami: comme vous ne serez pas seul, vous DEVEZ arriver tôt pour essayer de stationner votre carrosse sur le parc de stationnement de l’île de la Barthelasse (gratuit mais déjà complet vers midi).  Quoi d’autre en théâtre ? Le toujours passionnant flamand Guy Cassiers avec une adaptation par Filip Vanluchene de L’Homme sans qualités, le grand journal intime de Robert Musil, premier d’un cycle théâtral en trois volets et surtout ne ratez pas Le Procès mis en scène par le metteur en scène allemand Andreas Kriengenburg. Ces  deux spectacles , rassurez-vous sont sous-titrés.
Avec sa troupe de comédiens/chanteurs,  le Corse François Orsoni présentera Baal, la fameuse et première pièce de Brecht avec une musique de Tomas Heur ex- membre de Bérurier noir. Mais aussi Jean la chance du même auteur au Rond Point de la Barthelasse, cadeau du CCAS: profitez-en c’est gratuit, alors que les prix d’entrée en tarif normal au Festival in sont quand même aux environ de trente euros… Il y aura aussi La Mort d’Adam de l’auteur-metteur en scène Jean Lambert-wild, accompagné par son musicien Jean-Luc Therminarias, les images de François Royet et  les effets de magie de Thierry Collet.
Si l’on en juge d’après les répétitions, ce court spectacle  où nous est contée toute une aventure poétique  qui a pour cadre l’Ile de la Réunion devrait être  intéressant. Du même Jean Lambert-wild, Comment ai-je pu tenir là-dedans, d’après La chèvre de M. Seguin d’Alphonse Daudet , partir de sept ans ( voir Le Théâtre du Blog). Côté espagnol: La Casa de la Fuerza ( La Maison de la Force), texte et mise en scène d’Angelica  Liddel  sur le thème de la difficulté d’être femme au Mexique (attention: cinq heures entractes compris). Et toujours d’Angelica Liddel, El Ano del ricardo (L’Année de Richard), inspiré de Richard III. Signalons aussi le projet de l’écrivain et metteur en scène allemand Falk Richter et de Stanislas Nordey; la nouvelle création de Philippe Quesne  (voir Le Théâtre du Blog) , Big band et 1973 où Massimo Furlani va essayer de  reconstituer le concours d’Eurovision à la télévision.. Il y a aura aussi -et ses spectacles ne nous sont jamais indifférents, le Gardenia d’Alain Platel avec neuf interprètes, pour la plupart âgés de plus de 60 ans, et dédié  à la grande Pina Bausch  Out of context.
Il y a aussi généralement des bonnes surprises des petites formes comme disait Vitez; d’abord, du côté de La Vingt cinquième heure à l’Ecole d’art à 23 heures et au Gymnase du lycée Saint-Joseph à 15 ou 21 heures: en particulier une lecture de Dors toi de Sacha Rau avec Marc Bodnar, Charlotte Clamens, et La leçon du Loup par Silke Mansholt, performeuse allemande qui joue par ailleurs dans Comment ai-je pu tenir là-dedans. Enfin, dans la série Sujets à vif, en coproduction avec la SACD, Agnès Sourdillon, la formidable actrice, s’emparera de La Relève des dieux par les pitres du jeune auteur Arno Bettina dont lui avait parlé Lucien Attoun.
Voilà: on ne peut pas tout vous raconter, ce serait trop long et de toute façon,vous ne pourrez pas tout voir, et nous non plus mais ce sont quelques pistes ; il y aura forcément quelques grands bonheurs et sans doute bon nombre de choses, disons, plus approximatives. Nous vous en rendrons compte le plus régulièrement possible accompagné d’Edith Rappoport, Christine Friedel, Françoise du Chaxel et Béatrice Picon-Valin… A cinq,  c’est bien le diable si on ne vous rapporte pas des choses intéressantes dans nos filets, dans le in comme dans le off qui nous intéresse tout autant.  Ensuite, Le Théâtre du Blog prendra un peu  de vacances jusqu’aux festivals de Bussang et d’Aurillac que nous suivrons avec Edith Rappoport et Barbara Petit. Demain, on vous parlera du off officiel, du off non officiel (voir du off-off-off) qui ressemble parfois  à s’y méprendre au in, et, où il y a dans le genre plus humble , moins imposant, moins prétentieux aussi de formidables petits spectacles. Le off affiche de plus en plus complet, et c’est justice: les choses ont bien changé en quelque cinq années: Jérôme Savary est dans le off (enfin quand même au Théâtre du Chêne noir et le grand comédien Philippe Avron y fait sa dernière création.
Bon été paisible, ensoleillé et fructueux, chers lecteurs, et surtout merci de votre confiance et de votre fidélité; nous allons atteindre  grâce à vous, les 1.000 articles parus depuis octobre 2008; et  la courbe de fréquentation ( 34.000 en juin 2010) n’a cessé de progresser…

 Philippe du Vignal

Chez les nôtres, d’après La Mère

Chez les nôtres, d’après La Mère de Maxime Gorki, des paroles documentaires, des textes du comité invisible, mise en scène d’Olivier Coulon-Jablonka


chezlesnotres2.jpgUne compagnie d’Ile de France, le Moukden-théâtre, présentait, cette pièce créée au Théâtre de l’Echangeur en février. Un travail théâtral intelligemment composé par Eve Gollac et Olivier Coulon-Jablonka à partir de textes très divers.

Un point de départ simple et fort : Que faire?  comme disait Lénine. Vaste question qui se pose et se repose à chaque génération d’hommes et de femmes de bonne volonté révoltés par l’injustice. Est-ce très « scénique » ? Mais oui. Dans la version du Moukden-théâtre, ça l’est, vraiment. Il y a d’abord six excellents comédiens à la fois chanteurs, diseurs, et acteurs. Ensuite un bon fil conducteur : la rédaction d’un tract. Un plateau nu, parfait en salle de réunion, foyer ou cantine. Des chaises. Des tables. Des ustensiles de cuisine. C’est tout. Et un public de théâtre qui se pose exactement la même question en ouvrant son journal tous les matins et en tentant de surmonter moult absurdités et injustices dans la France d’aujourd’hui.
La pièce commence par une discussion entre syndicalistes. Des licenciements sont prévus. Un tract doit être rédigé et diffusé. A quoi cela sert, que dire, à qui, comment, pour quoi ? Le recueil et le montage des paroles -très bien fait-et les chants donnent du rythme. Cela accroche tout de suite. Et nous voici transportés chez Pélagie Vlassova, La Mère vue par Gorki, figure du peuple en 1905. On retrouve les interrogations autour de l’impression d’un tract clandestin. Pélagie – la comédienne est formidable – a transporté ses hésitations, son regard perplexe et chaleureux, de 2010 à 1905. C’est le privilège du théâtre…
La bascule d’un siècle à l’autre est totalement fluide et claire, avec juste le jeu des acteurs, et quelques éléments de costumes. On passe un manteau, on met un foulard. Ainsi signifié, l’aller et retour entre les deux époques fonctionne à plein pour laisser le public enregistrer échos, similitudes et différences. Les comédiens font preuve d’une grande aisance dans cette performance, très investis et crédibles dans les deux époques.
Après cette danse à deux temps, retour en 2010, pour une séance de remotivation, ou de coach, imposée autoritairement aux comédiens par un cadre volubile et autoritaire. Un Trissotin moderne qui parle à Très Grande Vitesse  dans une langue de bois absconse : mélange de psychologie à deux sous, de termes de marketing, d’anglais, de concepts philosophiques mal digérés, d’enfumage, de n’importe quoi. Comme Trissotin : emphase, verbiage, hypocrisie. Le comédien rend finement le double aspect, drôle et inquiétant, de ce genre de discours. Les ouvriers-employés essaient de suivre, s’amusent tant bien que mal, s’exercent au lancer à la catapulte (oui), pour finir par se battre nerveusement comme des enfants pris de folie.
Résiste dignement à cette hystérie une femme qui dit des textes qu’on imagine être ceux du comité invisible. On en entend juste des bribes au milieu de la cacophonie. Mais malgré quelques essais, le moderne Trissotin n’arrive pas à les faire entrer dans sa machine à laver la parole. Pas recyclables ! La femme qui les profère est loin pourtant de représenter un retour de l’humain sur le plateau. Froide, comme absente, elle laisse les mots sortir de sa bouche presque automatiquement. Ainsi, les deux discours qui devraient sembler opposés, celui du « coach » et celui de la femme solitaire du comité invisible, dégagent en fait une même violence.
A la fin, retour à Gorki, où la grève a pris forme, les ouvriers se sont regroupés. On les retrouve dans une manifestation de rue pour un face-à-face avec l’armée , où la mère se trouve au premier rang des grévistes. Et nous revoici, nous, face à nos questions d’aujourd’hui, ici et dans le monde.
Un spectacle bien composé, et bien joué, tout à fait passionnant dans une mise en scène rigoureuse. On sent un collectif qui a une vraie démarche, respectueuse du public, qui donne envie de la partager et de la suivre.


Evelyne Loew

Festival Impatience au Théâtre de l’Odéon les 26 et 27 juin puis  au Forum du Blanc-Mesnil, du 10 au 15 décembre.

Memorandum pour Anna Politkovskaïa (une femme non rééducable)

Memorandum pour Anna Politkovskaïa (une femme non rééducable), de Stefano Massini, mise en scène d’Anton Kouznetsov.


anna.jpgC’est une belle idée de François Rancillac, fédératrice et généreuse, qui a conduit les théâtres de la Cartoucherie à s’associer pour accueillir les travaux de fin d’année de plusieurs écoles supérieures de théâtre : Bordeaux, Cannes, Paris, Lausanne. Une opportunité pour le public de la région parisienne. Cela aura été également l’occasion pour les comédiens de se rencontrer et d’aller se découvrir d’un plateau à l’autre.

C’est le premier Festival des écoles du Théâtre public à la Cartoucherie, et nous avons pu voir à l’Aquarium, le travail des élèves de la séquence 6 de l’Académie, Ecole Supérieure Professionnelle de Théâtre du Limousin dirigé  par Pierre Pradinas, et dont le responsable pédagogique est Anton Kouznetsov). Spectacle impeccable, véritablement professionnel, que les jeunes comédiens ont créé et porté avec une ferveur qu’Anton Kouznetsov a su la transmettre aux acteurs, qui , eux-mêmes, la transmettent au public. Des spectateurs demandaient comme une évidence, où le spectacle allait se reprendre à la rentrée, afin de pouvoir envoyer des amis. Souhaitons donc un bel avenir à cette excellente équipe …
Anna Politkovskaïa, le visage même du courage: un courage simple qui consiste à faire son métier consciencieusement, là où on le doit, sans concession, sans arrangements de confort personnel, en toute intégrité et vérité, au début du XXIème siècle. Une femme russe parmi les nombreux journalistes, grands reporters, écrivains, qui risquent leur vie pour témoigner. Un journaliste italien , Roberto Saviano, en parlait aussi récemment au Théâtre de la Ville, (voir Le Théâtre du Blog)…
Le texte est juste et clair, et permet le jeu, alternant les moments intimes et les moments publics, les articles, les interviews, les notes personnelles. Grozny dévastée. Vienne, dans une chambre d’hôtel : le bonheur insensé d’avoir de l’eau courante au robinet. Le réveil dans un hôpital après une tentative d’empoisonnement. Les négociations avec les terroristes. Les menaces, encore les menaces, les menaces contre la famille, les enfants. Rentrer en Russie ou pas ? La responsabilité d’écrire, toujours …
Enthousiasmant, ce collectif de jeunes comédiens, tous excellents, qui défendent la partition chorale, alternant récit direct, scènes et chants. Captivants et beaux : on les voit et on les admire tous, parce qu’ils sont ensemble, même dans les solos. Ils ont appris à dépasser leur narcissisme et à se mettre au service de la scène, du texte et du public. Un esprit de groupe digne du théâtre public le plus noble. Bravo. Incroyable aussi cette force de la parole et de l’écrit. A travers la vie d’Anna Politkovskaïa, triomphante malgré tout par-delà sa mort, et grâce à cette forme théâtrale simple et directe, on a la preuve que la parole de témoignage, de protestation, n’est pas un « vain mot » ; juste et responsable, elle compte  et , dans une belle mise en scène, elle passe la rampe en beauté. Rappelons qu’en Russie, depuis mars 2000, 22 journalistes ont été tués en raison de leur activité professionnelle.
Aujourd’hui, les meurtriers d’Anna Politkovskaïa n’ont toujours pas été arrêtés : l’enquête stagne, mais le témoignage de cette journaliste est diffusée dans le monde entier et ce spectacle est à la hauteur pour y contribuer.

 

Evelyne Loew



Memorandum, au Centre Culturel de Thorigny-sur-Marne du 9 au 16 juillet, puis, en région Limousin à l’automne : voir site du Théâtre du Limousin.
Le texte est édité par L’Arche, traduction Pietro Pizzuti.

Suite du festival des écoles à la Cartoucherie de Vincennes : Théâtre de l’Aquarium, Théâtre de la Tempête, Théâtre de l’Epée de bois, Théâtre du Chaudron, avec l’aide du Théâtre du Soleil, de l’ARTA, et de l’Atelier de Paris, jusqu’au 4 juillet.



Conservatoire;journées de juin: classe de Sandy Ouvrier:Platonov de Tchekov.

Conservatoire; Journées de juin, classe de Sandy Ouvrier : Platonov de Tchekov.

 

   consso.jpg Sandy Ouvrier a encore frappé; nous vous avions dit l’an passé à la même époque tout le bien que l’on pouvait penser de son travail pédagogique. Mais cette fois-ci, avec ces scènes de Platonov, elle a encore fait très fort. Et l’on entend, comme rarement, le fameux texte que Tchekov écrivit à vingt ans.
  La pièce , redécouverte vint ans après sa mort,  préfigure déjà les grands chefs-d’œuvre que ce soit Ivanov surtout, mais aussi la Cerisaie déjà. Défigurée par Pol Quentin, quand Vilar l’avait monté (on n’y comprenait rien), elle a depuis été souvent mise en scène en particulier par Georges Lavaudant,  puis par  Eric Lacascade avec beaucoup de bonheur.
  C’est l’histoire d’un jeune instituteur, ami d’une jeune veuve. Déjà engagé socialement, puisque marié et père d’un enfant, Platonov, malheureusement, ne boit pas que de l’eau et ce perdant qui a mal à sa vie, et qui perd son temps, semble cependant fasciner les femmes qui s’attachent vite à lui. Mais il se conduit de façon irresponsable, à la fois charmant  et inetlligent mais souvent odieux et cynique, et surtout incapable d’aimer vraiment quelqu’un.
   Comme si la vie était trop lourde, il semble déjà avoir renoncé au bonheur et éprouve un certain plaisir masochiste à se laisser posséder, quitte à tout faire pour ensuite se faire pardonner, quand il réalise lucidement tout le gâchis provoqué. autour de lui, chez ses amoureuses et dans sa famille. « Je ne voulais de mal à personne et j’en fais à tout le monde ». Et  les phrases courtes, dans la belle traduction de Françoise Morvan et André Marcovicz tapent sec:  » Ce que je veux, ce n’est pas la vie devant moi mais c’est la vie maintenant » . « Les bons amis, c’est bien, les bons comptes,  c’est mieux ». « Que nous reste-t-il à faire aujourd’hui? Enterrer les morts et réparer les vivants ».   . Comme le dit justement Eric Lacascade, c’est une pièce d’humanité, qui nous incite à chercher le vivant et  à exalter le vivant à travers l’acteur.
   C’est ce qu’a  vite compris Sandy Ouvrier  qui a bien choisi, et la pièce dont les personnages (comme son auteur) ont à peu près l’âge des élèves, et les scènes, mais en  ne cherchant pas à évacuer le style » travail d’élèves ». Il y a même les  formidables scène 3 et 4 qui sont jouées deux fois.
   so990.jpgC’est bien ainsi, puisqu’il s’agit en effet d’un travail présenté comme tel mais intelligemment mis en scène. On a droit à un très court film en couleurs, muet où on voit tous les élèves à la campagne, faisant du vélo ou courant dans l’herbe : c’est gentil et cela ne mange pas de pain mais les choses « sérieuses » commencent ensuite.
   Scène nue,  avec juste ce qu’il faut comme accessoires, banquette, table de nuit, chaises… et un long praticable qui traverse la salle. Les scènes se succèdent,  entre Platonov et Anna Petrovna, Sofia et  Maria, ou sa femme Sacha; bien entendu, les élèves filles et garçons jouent la plupart des mêmes rôles mais ce n’est jamais gênant. On remarque plus  les filles -brillantes comme d’habitude-et  surtout: Clara Mayer, Vanessa Fonte, Anna Lena Strasse , les garçons, eux,  semblent moins à l’aise, (à part Valentin de Carbonnières, dans le rôle difficile de Platonov qu’il ont à peine le temps d’endosser ):  il y quelques beaux intermèdes dansés et réalisés  avec beaucoup d’humour, très pinabauschiens,  sur la scène, sur le long praticable ou dans la salle  par tous ceux qui ne participent pas à la scène sur musique de fanfare, avec des lumières rasantes raffinées signées Lauriano de la Rosa..
   C’est à la fois précis et juste: l’unité est au rendez-vous, puisqu’il s’agit de scènes de la même pièce, avec ce qu’il faut d’humour et de second degré, tout en restant émouvant. La mise en scène de l’ acte IV est moins évidente, moins nette dans son approche à cause de la multiplication des rôles, et l’énergie un peu défaillante mais, pour le reste, quelle intelligence,quel bonheur de théâtre!
   On ne voudrait pas dire ; tant pis, on le dit quand même: nous n’avons pas pu tout voir  , en particulier les journées de Philippe Duclos et ceux de Daniel Mesguish mais c’est sans doute le meilleur des travaux du Conservatoire auxquels nous avons  assisté …

 

Philippe du Vignal

 

Séance du dimanche 27 juin à 20h 30.

PRIX DE LA CRITIQUE – Palmarès 2009/2010

 

Fondé en 1877, le Syndicat professionnel de la Critique de Théâtre, de Musique et de Danse a pour buts de resserrer les liens de confraternité entre ses membres, de défendre leurs intérêts moraux et matériels, d’assurer la liberté de la critique. Il regroupe aujourd’hui 140 journalistes de la presse écrite et audiovisuelle, française et étrangère. Il décerne chaque année des Prix pour le Théâtre, la Musique et la Danse, rendant ainsi hommage aux artistes qui ont marqué la saison.

GRAND PRIX (meilleur spectacle théâtral de l’année) : « ODE MARITIME » de Fernando Pessoa, mise en scène Claude Régy (Festival d’Avignon, Théâtre de la Ville)

 PRIX GEORGES-LERMINIER (meilleur spectacle théâtral créé en province) : « LES JUSTES » d’Albert Camus, mise en scène Stanislas Nordey (Théâtre national de Bretagne, Théâtre de la Colline)

 MEILLEURE CRÉATION D’UNE PIÈCE EN LANGUE FRANÇAISE :

« LES NAUFRAGÉS DU FOL ESPOIR » d’après Hélène Cixous et Jules Verne, mise en scène Ariane Mnouchkine (Théâtre du Soleil, Cartoucherie)

 MEILLEUR SPECTACLE ÉTRANGER : « RICHARD II » de Shakespeare, mise en scène Claus Peymann (Berliner Ensemble au Théâtre de la Ville)

 MEILLEURE COMÉDIENNE : Anouk GRINBERG pour « les Fausses Confidences » de Marivaux, mise en scène Didier Bezace (Théâtre de la Commune, Aubervilliers)

 MEILLEURS COMÉDIENS (ex-æquo) :

- Jean-Quentin CHÂTELAIN pour « Ode maritime » de Fernando Pessoa, mise en scène Claude Régy (Festival d’Avignon, Théâtre de la Ville)

- Serge MERLIN pour « Minetti » de Thomas Bernhard, mise en scène Gérold Schumann (Théâtre de l’Athénée) et « Extinction » de Thomas Bernhard, mise en scène Alain Françon et Blandine Masson (Théâtre de la Madeleine)

 MEILLEUR CRÉATEUR D’ÉLÉMENTS SCÉNIQUES (scénographe – décorateur, costumier, créateur de lumière) : Malgorzata SZCZESNIAK pour « (A)pollonia » (Festival d’Avignon, Chaillot) et « Un Tramway » d’après Tennessee Williams (Odéon). Mises en scène : Krzystof Warlikowski

MEILLEUR COMPOSITEUR DE MUSIQUE DE SCÈNE : Claire DITERZI pour « Rosa la Rouge », mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo (Théâtre du Rond-Point)

 RÉVÉLATION THÉÂTRALE DE L’ANNÉE : Agnès PONTIER pour « Yaacobi et Leidental » de Hanokh Levin, mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia (CDN Pays de Loire, Théâtre du Rond-Point)

 MEILLEUR LIVRE SUR LE THÉÂTRE : « ENCYCLOPÉDIE MONDIALE DES ARTS DE LA MARIONNETTE », ouvrage collectif dirigé par Thieri Foulc, publié en partenariat avec l’Union Internationale de la Marionnette (Editions l’Entretemps)

 


REMISE DES PRIX : LE 21 juin 2010

 

 

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Les souffrances de Job

Les souffrances de Job, de Hanoch Levin, texte françaisde Jacqueline Carnaud et Laurence Sendrowicz, mise en scène de Laurent Brethome.

job.jpgLa pièce est particulièrement sombre, dans l’œuvre de Hanoch Levin, avec seulement quelques étincelles de l’humour noir qu’on lui connaît, dans ses pièces les plus jouées en France et en Europe, Yacobi et Leidenthal et Kroum l’ectoplasme.Quelquefois, on rit de la naïveté de Job. Ça ne dure pas. L’auteur suit fidèlement, très longuement, le récit biblique, puis il continue l’escalade non pas du côté du silence de Dieu, mais du côté de la dialectique de l’horreur chez les hommes. Souffrance : la souffrance ne dit rien d’autre qu’elle-même, dit-il. Ni leçon, ni morale, ni sens, mais souffrance, souffrance, souffrance.
Le spectacle commence plutôt bien, avec les comédiens-musiciens produisant en un chœur savant les échos d’un banquet, derrière des rideaux clairs. Face à nous, une grande table vide et des centaines de bouteilles de plastique, les déchets de la richesse et de la satiété. À cette table, viendront les mendiants, des premiers qui mangent les restes , aux seconds qui rongent les os jusqu’à Jo,  plus bas de tous, qui se repaît de vomissures.
Puis les annonceurs de mauvaises nouvelles, catastrophes naturelles, ruines et banqueroutes, puis les huissiers venus dépouillent Job de tout bien terrestre –, puis la Mort qui lui apporte les cadavres de ses quatre enfants. Le sang est versé à flots, de pigments bleus, jaunes, orange. Ça fait un bel effet, et voilà. Le spectateur attend qu’il se passe vraiment quelque chose.
Mais ce qui manque, c’est un  vrai parti pris de jeu : le metteur en scène a dirigé les acteurs du côté d’une ironie qui précisément déjoue l’ironie fondamentale de l’auteur. Dans cette pièce, dans ce lieu – le Théâtre de l’Odéon -, il faut jouer grand, shakespearien, avec une énergie totale. Le montage de la pièce assurera l’ironie en effet nécessaire.
Le spectacle révèle du savoir faire, une trop grande confiance dans des effets plastiques qui n’atteignent pas à l’effroi, et aussi trop d’impatience : la compagnie Le Menteur volontaire a-t-elle pris le temps de la dramaturgie, le temps de nous prouver en marchant que Les souffrances de Job est vraiment une belle pièce ?

Christine Friedel


Théâtre de l’Odéon, le 26 juin à 19h Texte  publié aux Editions Théâtrales

 

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  Nous confirmons; malgré une belle rigueur dans le travail,  on ne comprend pas bien le parti pris de  mise  en scène de Laurent Bretome où il y a beaucoup d’effets plastiques très gratuits : jets de peinture aux couleurs primaires et de poudre dont s’inondent les personnages et dans laquelle ils se vautrent par terre,   colorant noir dont ils s’enduisent le corps. Enfin, en ces temps de chômage, cela fera toujours du boulot pour les accessoiristes et les habilleuses…
Certes il y a de  belles lumières concues par Steen Albro qui , avec un peu de fumigène  et quelques projecteurs, nous offre des images saisissantes mais ,malgré la présence de bons acteurs dont Philippe Sire (Job) et Anne Rauturier, il y a un manque de rythme évident et on aurait bien aimé qu’il y ait un peu moins de démonstration du genre: regardez ce que je sais faire,  un peu moins de sécheresse et un peu plus d’émotion. Mais là , on reste sur sa faim!
Mais était-il indispensable de mettre en scène cette pièce d’Hannokh Levin sur le thème de Job, qui n’est sans doute pas la meilleure de cet auteur décédé en 99 dont on supportait mal les satires politiques mais qui est devenu maintenant un classique dans son pays. Malgré quelques  répliques pleines d’humour sur Dieu où l’on retrouve toute la verve de Levin,  la pièce est bien bavarde .. et un peu ennuyeuse, même si elle ne dure qu’une heure quarante.
Alors y aller ou non; de toute façon, cela ne se  jouait que deux soirs à l’Odéon? Pas nécessairement , sinon pour découvrir une jeune compagnie que l’on aimerait bien voir avec un autre spectacle.

Philippe du Vignal

 

Toby ou le Saut du Chien

Toby ou le Saut du Chien, texte et mise en scène de Frédéric Sonntag.

toby.jpg  Frédéric Sonntag n’est pas inconnu au bataillon des jeunes auteurs-metteurs en scène, puisque Nous étions jeunes alors, a déjà été jouée à Théâtre Ouvert ( voir Le Théâtre du Blog/ Christine Friedel) et que ce Toby ou Le Saut du chien a déjà été jouée à plusieurs reprises.
   Plateau nu avec, de chaque côté, et dans le fond des sièges coques en plastique anonymes et gris comme on en voir dans n’importe quelle salle d’attente…
  Il s’agit des aventures d’un jeune homme, plutôt beau garçon, costume noir et chemise blanche, et du genre star internationale qui s’en va dans une sorte de quête identitaire d’abord dans un club de nuit, puis dans un hôpital et enfin sur un plateau de télévision. Mais ce qu’il vit ressemble à une fuite en avant, désespérée où il essaye d’échapper à son destin. Les rencontres avec de nombreuses jeunes femmes se soldent à chaque fois par un échec. Jusqu’à la rencontre avec son double- un assez beau moment dramatique -jusqu’à la mort de Toby.
 Frédéric Sonntag  dirige ses comédiens de façon très sûre mais on ne voit pas très bien où il veut nous emmener; il a l’art et la technique de réaliser de belles images avec peu de moyens, mais il tombe dans les stéréotypes à la mode: jet de fumigènes et, bien entendu, un petit coup de vidéo avec la retransmission en noir et blanc du visage de Toby, puis de sa loge, intervention d’une chorale de jeunes femmes pendant quelques minutes… Tout cela sent le déjà mille fois vu!
  Mais il y a une certain ton, une certaine envie de prendre le théâtre à bras le corps qui suscite curiosité et  sympathie, d’autant plus que les acteurs savent ce qu’est un plateau et s’en servent avec beaucoup d’ habileté. Et ce ballet presque permanent- soutenu par deux musiciens- de ces douze jeunes comédiens,  autour de Toby harcelé par son destin, ne laisse pas indifférent.
  Mais le spectacle qui tient à la fois du théâtre, du chant et de la musique dure deux heures! Et aurait mérité un sérieux élagage; en fait, tout se passe comme si l’auteur/ metteur en scène avait voulu d’abord se faire  plaisir à lui-même. Et l’éternité, c’est un peu long surtout vers la fin: il faudrait que Frédéric Sonntag ait davantage le sens de la mesure et de la dramaturgie, ce qu’on ne lui a peut-être pas suffisamment enseigné au Conservatoire: ce qu’il dit en deux heures, avec une-petite-cuiller de prétention, aurait pu l’être en soixante minutes sans difficulté.
   L’exemple de Made in Italy, qui a ouvert le festival Impatience suffirait à le prouver; cela éviterait aux jeunes comédiens de Sonntag de voir des spectateurs s’enfuir au bout d’une heure, ce qui n’est jamais bon signe… Alors à voir, oui par curiosité mais bon… C’est  dommage qu’un jeune metteur en scène doué comme l’est Sonntag ne maîtrise pas suffisamment les choses… Donc à suivre.

 

Philippe du Vignal

Ateliers Berthier, ce spectacle y  a encore lieu aujourd’hui vendredi seulement à 21 heures.
Ce soir et samedi à l’Odéon à 19 heures: Les Souffrances de Job; enfin aux Ateliers Berthier, Les Nôtres samedi à 21 heures et dimanche à 15 heures.

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