Festival d’Avignon 2010

  Festival d’Avignon 2010

    pont.jpgDans à peine quinze jours, cette soixante quatrième édition  aura déjà commencé, avec,  pour aider à la préparer, deux artistes associés: l’écrivain Olivier Cadiot et le metteur en scène  Cristof Marthaler pour qui le Palais des papes et sa grande Cour seront le point de départ d’une nouvelle création musicale et théâtrale: Schutz vor der zukunft ( Se protéger de l’avenir). Marthaler a voulu attirer notre attention sur les pratiques de l’euthanasie et de la  sélection biologique à partir d’écrits politiques, d’essais théoriques et de biographies de patients. Ce sera sans doute l’un des moments forts de ce festival.
La grande Cour, immense-et parfois dangereux- cadeau fait aux créateurs, a aussi été confiée à Jean-Baptiste Sastre pour La Tragédie du Roi Richard II ,avec un une distribution haut de gamme dont Axel Bogousslavski, Pascal Bongard, Pierre Michon (si, si!), Denis Podalydès, Nathalie Richard: affaire à suivre.
Ludovic Lagarde mettra en scène Un nid pour quoi faire d’Olivier Cadiot  avec, entre autres, ce formidable acteur qu’est Laurent Poitrenaux, qui sera seul en scène dans Un mage en été du même auteur. Dirigé par le philosophe, musicien et chanteur Rodolphe Burger sur le plan artistique, il y aura aussi l’inoxydable bal du 14 juillet avec des tubes et des invités-surprise, et évidemment son feu d’artifice, seul soir où il n’y a pas de représentations dans le in, et unique événement gratuit et populaire de ce festival où les prix ne connaissent pas la crise , (on attend la visite de Carlita et de son cher mari qui veut à tout prix, dit-on, faire comme Mitterand et aller en Avignon prendre un bain de foule)…
Le bal aura lieu au bord du Rhône devant le pont Saint- Benezet.(conseil d’ami: comme vous ne serez pas seul, vous DEVEZ arriver tôt pour essayer de stationner votre carrosse sur le parc de stationnement de l’île de la Barthelasse (gratuit mais déjà complet vers midi).  Quoi d’autre en théâtre ? Le toujours passionnant flamand Guy Cassiers avec une adaptation par Filip Vanluchene de L’Homme sans qualités, le grand journal intime de Robert Musil, premier d’un cycle théâtral en trois volets et surtout ne ratez pas Le Procès mis en scène par le metteur en scène allemand Andreas Kriengenburg. Ces  deux spectacles , rassurez-vous sont sous-titrés.
Avec sa troupe de comédiens/chanteurs,  le Corse François Orsoni présentera Baal, la fameuse et première pièce de Brecht avec une musique de Tomas Heur ex- membre de Bérurier noir. Mais aussi Jean la chance du même auteur au Rond Point de la Barthelasse, cadeau du CCAS: profitez-en c’est gratuit, alors que les prix d’entrée en tarif normal au Festival in sont quand même aux environ de trente euros… Il y aura aussi La Mort d’Adam de l’auteur-metteur en scène Jean Lambert-wild, accompagné par son musicien Jean-Luc Therminarias, les images de François Royet et  les effets de magie de Thierry Collet.
Si l’on en juge d’après les répétitions, ce court spectacle  où nous est contée toute une aventure poétique  qui a pour cadre l’Ile de la Réunion devrait être  intéressant. Du même Jean Lambert-wild, Comment ai-je pu tenir là-dedans, d’après La chèvre de M. Seguin d’Alphonse Daudet , partir de sept ans ( voir Le Théâtre du Blog). Côté espagnol: La Casa de la Fuerza ( La Maison de la Force), texte et mise en scène d’Angelica  Liddel  sur le thème de la difficulté d’être femme au Mexique (attention: cinq heures entractes compris). Et toujours d’Angelica Liddel, El Ano del ricardo (L’Année de Richard), inspiré de Richard III. Signalons aussi le projet de l’écrivain et metteur en scène allemand Falk Richter et de Stanislas Nordey; la nouvelle création de Philippe Quesne  (voir Le Théâtre du Blog) , Big band et 1973 où Massimo Furlani va essayer de  reconstituer le concours d’Eurovision à la télévision.. Il y a aura aussi -et ses spectacles ne nous sont jamais indifférents, le Gardenia d’Alain Platel avec neuf interprètes, pour la plupart âgés de plus de 60 ans, et dédié  à la grande Pina Bausch  Out of context.
Il y a aussi généralement des bonnes surprises des petites formes comme disait Vitez; d’abord, du côté de La Vingt cinquième heure à l’Ecole d’art à 23 heures et au Gymnase du lycée Saint-Joseph à 15 ou 21 heures: en particulier une lecture de Dors toi de Sacha Rau avec Marc Bodnar, Charlotte Clamens, et La leçon du Loup par Silke Mansholt, performeuse allemande qui joue par ailleurs dans Comment ai-je pu tenir là-dedans. Enfin, dans la série Sujets à vif, en coproduction avec la SACD, Agnès Sourdillon, la formidable actrice, s’emparera de La Relève des dieux par les pitres du jeune auteur Arno Bettina dont lui avait parlé Lucien Attoun.
Voilà: on ne peut pas tout vous raconter, ce serait trop long et de toute façon,vous ne pourrez pas tout voir, et nous non plus mais ce sont quelques pistes ; il y aura forcément quelques grands bonheurs et sans doute bon nombre de choses, disons, plus approximatives. Nous vous en rendrons compte le plus régulièrement possible accompagné d’Edith Rappoport, Christine Friedel, Françoise du Chaxel et Béatrice Picon-Valin… A cinq,  c’est bien le diable si on ne vous rapporte pas des choses intéressantes dans nos filets, dans le in comme dans le off qui nous intéresse tout autant.  Ensuite, Le Théâtre du Blog prendra un peu  de vacances jusqu’aux festivals de Bussang et d’Aurillac que nous suivrons avec Edith Rappoport et Barbara Petit. Demain, on vous parlera du off officiel, du off non officiel (voir du off-off-off) qui ressemble parfois  à s’y méprendre au in, et, où il y a dans le genre plus humble , moins imposant, moins prétentieux aussi de formidables petits spectacles. Le off affiche de plus en plus complet, et c’est justice: les choses ont bien changé en quelque cinq années: Jérôme Savary est dans le off (enfin quand même au Théâtre du Chêne noir et le grand comédien Philippe Avron y fait sa dernière création.
Bon été paisible, ensoleillé et fructueux, chers lecteurs, et surtout merci de votre confiance et de votre fidélité; nous allons atteindre  grâce à vous, les 1.000 articles parus depuis octobre 2008; et  la courbe de fréquentation ( 34.000 en juin 2010) n’a cessé de progresser…

 Philippe du Vignal


Archive pour 29 juin, 2010

Chez les nôtres, d’après La Mère

Chez les nôtres, d’après La Mère de Maxime Gorki, des paroles documentaires, des textes du comité invisible, mise en scène d’Olivier Coulon-Jablonka


chezlesnotres2.jpgUne compagnie d’Ile de France, le Moukden-théâtre, présentait, cette pièce créée au Théâtre de l’Echangeur en février. Un travail théâtral intelligemment composé par Eve Gollac et Olivier Coulon-Jablonka à partir de textes très divers.

Un point de départ simple et fort : Que faire?  comme disait Lénine. Vaste question qui se pose et se repose à chaque génération d’hommes et de femmes de bonne volonté révoltés par l’injustice. Est-ce très « scénique » ? Mais oui. Dans la version du Moukden-théâtre, ça l’est, vraiment. Il y a d’abord six excellents comédiens à la fois chanteurs, diseurs, et acteurs. Ensuite un bon fil conducteur : la rédaction d’un tract. Un plateau nu, parfait en salle de réunion, foyer ou cantine. Des chaises. Des tables. Des ustensiles de cuisine. C’est tout. Et un public de théâtre qui se pose exactement la même question en ouvrant son journal tous les matins et en tentant de surmonter moult absurdités et injustices dans la France d’aujourd’hui.
La pièce commence par une discussion entre syndicalistes. Des licenciements sont prévus. Un tract doit être rédigé et diffusé. A quoi cela sert, que dire, à qui, comment, pour quoi ? Le recueil et le montage des paroles -très bien fait-et les chants donnent du rythme. Cela accroche tout de suite. Et nous voici transportés chez Pélagie Vlassova, La Mère vue par Gorki, figure du peuple en 1905. On retrouve les interrogations autour de l’impression d’un tract clandestin. Pélagie – la comédienne est formidable – a transporté ses hésitations, son regard perplexe et chaleureux, de 2010 à 1905. C’est le privilège du théâtre…
La bascule d’un siècle à l’autre est totalement fluide et claire, avec juste le jeu des acteurs, et quelques éléments de costumes. On passe un manteau, on met un foulard. Ainsi signifié, l’aller et retour entre les deux époques fonctionne à plein pour laisser le public enregistrer échos, similitudes et différences. Les comédiens font preuve d’une grande aisance dans cette performance, très investis et crédibles dans les deux époques.
Après cette danse à deux temps, retour en 2010, pour une séance de remotivation, ou de coach, imposée autoritairement aux comédiens par un cadre volubile et autoritaire. Un Trissotin moderne qui parle à Très Grande Vitesse  dans une langue de bois absconse : mélange de psychologie à deux sous, de termes de marketing, d’anglais, de concepts philosophiques mal digérés, d’enfumage, de n’importe quoi. Comme Trissotin : emphase, verbiage, hypocrisie. Le comédien rend finement le double aspect, drôle et inquiétant, de ce genre de discours. Les ouvriers-employés essaient de suivre, s’amusent tant bien que mal, s’exercent au lancer à la catapulte (oui), pour finir par se battre nerveusement comme des enfants pris de folie.
Résiste dignement à cette hystérie une femme qui dit des textes qu’on imagine être ceux du comité invisible. On en entend juste des bribes au milieu de la cacophonie. Mais malgré quelques essais, le moderne Trissotin n’arrive pas à les faire entrer dans sa machine à laver la parole. Pas recyclables ! La femme qui les profère est loin pourtant de représenter un retour de l’humain sur le plateau. Froide, comme absente, elle laisse les mots sortir de sa bouche presque automatiquement. Ainsi, les deux discours qui devraient sembler opposés, celui du « coach » et celui de la femme solitaire du comité invisible, dégagent en fait une même violence.
A la fin, retour à Gorki, où la grève a pris forme, les ouvriers se sont regroupés. On les retrouve dans une manifestation de rue pour un face-à-face avec l’armée , où la mère se trouve au premier rang des grévistes. Et nous revoici, nous, face à nos questions d’aujourd’hui, ici et dans le monde.
Un spectacle bien composé, et bien joué, tout à fait passionnant dans une mise en scène rigoureuse. On sent un collectif qui a une vraie démarche, respectueuse du public, qui donne envie de la partager et de la suivre.


Evelyne Loew

Festival Impatience au Théâtre de l’Odéon les 26 et 27 juin puis  au Forum du Blanc-Mesnil, du 10 au 15 décembre.

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