Denis Podalydès en une de Théâtral magazine (n°25, juillet-août 2010)

Théâtral magazine : A la Une du n°25 :
Denis Podalydès joue La tragédie de Richard II dans la Cour d’Honneur à Avignon, mise en scène par Jean-Baptiste Sastre. Ce numéro présente les festivals d’été :
Denis Lavant à Grignan dans Le roi s’amuse de Victor Hugo, Romane Bohringer à Avignon dans Un privé à Babylone, Pierre Cardin créateur du festival de Lacoste, Sarah et William Mesguich mis en scène par leur père dans Agatha à Avignon, Claire Chazalcontinue les lectures au festival de la Correspondance de Grignan, Frédéric Potymonte Les enfants du Paradis à Villeneuve en scène, Olivier Sitruk joue le Che à Avignon, Bernard Menez fait de la mise en scène à Bussang…
A Paris, François Marthouret à la Madeleine dans Le Solitaire mis en scène parJean-Louis Martinelli, Guillaume Gallienne, Alain Françon, Marcel Bozonnet, Daniel Colas, Stéphane Cottin, Pierre-Olivier Scotto… et aussi : Daniel Pennac, Jérôme Savary, Jean-Hervé Appéré, Benjamin Lazar, Alexis Michalik, Bruno Schnebelin, Jean-Paul Tribout.
Il y a aussi un dossier sur le  In d’Avignon : Olivier Cadiot et Ludovic Lagarde, Laurent Poitrenaux, Valérie Dashwood, Clotilde Hesme mise en scène par François Orsoni, Stanislas Nordey et Laurent Sauvage, Valérie Dréville, Boris Charmatz, Massimo Furlan, et Hortense Archambault.


Archive pour 15 juillet, 2010

LE SOLITAIRE

LE SOLITAIRE d’ EUGENE IONESCO Mise en scène: Jean-Louis Martinelli.

Avec François Marthouret.

 

arton2395350x232.jpgNe pas agir, ne pas penser, ne pas se lier d’amitié ou d’amour, c’est le luxe que se permet le personnage de Ionesco dans « Le Solitaire », son unique roman.
L’homme a fait un héritage inattendu, il est riche, il quitte sa chambre d’hôtel et son travail qui ne lui apportent aucune satisfaction, il peut vivre comme il veut. Et lui, l’homme sans désirs, s’achète un appartement dans une banlieue proche de Paris, entre une avenue bruyante et une ruelle provinciale. Il peut choisir, tantôt l’agitation de l’une ou le calme de l’autre. Il a ses habitudes au petit restaurant le plus proche. Sinon, il reste là, dans sa chambre, à moitié habillé. Il se dit que s’il pouvait philosopher, il saurait beaucoup de choses. Mais il vaut mieux s’abstenir de philosopher si on n’est pas un grand philosophe. Alors il s’abstient.
La serveuse du restaurant fait un passage dans sa vie , elle le quitte vite, car comment vivre avec quelqu’un qui ne vous parle pas. Il sera donc seul. Et il revient à sa non vie .Il n’a même pas peur de la mort puis qu’il ne sait pas ce que c’est. L’alcool parfois fait s’entrouvrir le ciel pesant qui borne sa vie. Après quelques verres il entend et voit des choses étonnantes. La petite banlieue calme devient un territoire d’émeute et de révolution. Parfois il voudrait y prendre part, mais personne ne l’écoute. Mieux vaut alors rentrer chez lui, retrouver cette chambre et attendre le jour où le ciel s’ouvrira enfin et lui donnera envie d’aller vers cette lumière inconnue qui ressemble peut-être au matin du monde ou à l’innocence de l’enfance.Un très beau texte. Ce solitaire, frère de l’homme du Terrier de Kafka ou de l’homme du sous-sol de Dostoïevski, ces hommes qui se refusent à la vie mais attendent un signe qui les ferait croire, nous fait découvrir une autre facette de Ionesco.
L’adaptation , la mise en scène, l’interprétation nous font entendre cette si totale solitude . François Marthouret n’a pas l’âge du personnage de Ionesco dont le renoncement au monde alors qu’il a à peine 40 ans est beaucoup plus troublant. Mais son corps, ses étonnements, ses colères, nous disent autre chose sur l’homme qui n’en finit pas de s’interroger sur l’agitation vaine des autres hommes.

 

Françoise du Chaxel

Spectacle créé au Théâtre de la Madeleine.

 

 

 

Théâtre de La Madeleine,19 rue de Surène, 75008, 01 42 65 07 09, jusqu’au 31 juillet.

 

 

Papperlapapp

Papperlapapp , texte de Christof Marthaler, Malte Ubenauf, Olivier Cadiot et les acteurs d’après Herbert Aschternbusch, Don Gabriel Amorth, Olivier Cadiot, E.M. Cioran, Dario Fo, Seren Kirkiegard, Professeur Madya, Henri Michaux, Julien Torma, Malte Ubernauf, mise en scène de Christoph Marthaler et scénogaphie d’Anne Viebrock, collaboration à la dramaturgie d’Olivier Cadiot. Musique originale de Martin Schütz, Jean-Sébastien Bach, etc…

1278759909.jpgSur le célèbre plateau de la Cour d’Honneur, un matelas défoncé et brûlé, un haut confessionnal en bois à deux places et quelques rangs de bancs d’église sur un parquet en chevrons,  cinq tombeaux en pierre, dont certains avec matelas, des chaises en bois soigneusement alignées, quelques pots de géraniums sur des surfaces de carrelages anciens, un orgue électronique sous la voûte, et encore des frigos et machines à laver tout blancs bien rangés en ligne, un camion militaire bâché; dans la chapelle en haut, on aperçoit un pianiste.
Le dispositif  scénique d’Anne Viebrok , avec ce qu’il induit d’archéologie au second degré et d’humour, de  dérapage temporel entre papauté et modernité,  ne manque ni d’allure ni de sens dans ce palais médiéval. Et le public ne cesse d’en regarder les moindres détails. Disons qu’il vit les derniers bons moments d’un spectacle qui n’a pas encore commencé … avant un ratage historique tel que le Festival n’en avait jamais connu dans ce lieu mythique où c’est une grande chance pour un metteur en scène d’y réaliser  un spectacle…
Un aveugle avec une  canne blanche télescopique descend seul (????) du camion militaire:  l’affaire parait mal engagée mais bon… Il s’agit d’un guide qui fait visiter le Palais à un groupe de touristes: ils sont tous habillés tristement en marron, gris; les femmes portent des robes très 1950 à la Pina Bausch. Ils marchent souvent  deux par deux, puis vont s’agenouiller sur les bancs, pendant que, dans le confessionnal, un ouvrier meule une pièce de métal en faisant jaillir des gerbes d’étincelles. à travers la grille en bois de la porte.
Peu après une sirène d’ alarme retentit: tout le monde va se cacher, et un homme,  probablement un curé, tout habillé de gris va courageusement retirer d’un caddie suspect…. une petite baguette de pain. Le curé prononce quelques mots. Tous les personnages chantent en chœur plutôt bien. Les hommes s’allongent par terre, les femmes,  disparues un moment, jettent du haut du Palais des Papes des ballots de vêtements sacerdotaux que les hommes vont revêtir quelques minutes avant de les mettre dans la grosse machine à laver à l’avant-scène. Et ensuite de les retirer!
Première et sévère hémorragie de spectateurs; premier et sévère basculement  de  tête de Daniel Cohn-Bendit. Le pianiste, dans un grand silence, joue du Bach, on commence à sentir de sérieux mouvements de contestation dans le public qui va connaître une seconde hémorragie moins discrète que la première : des spectateurs descendent les gradins en faisant du bruit pendant que d’autres font ironiquement: Chut! Chut! Fou rire généralisé à part quelques fans de Marthaler; Daniel Cohn Bendit visiblement peu intéressé ,repique du nez.  Les comédiens marchent en file indienne du côté jardin au côté cour en silence. Quelques spectateurs qui avaient sans doute prémédité leur coup, les imitent en sortant: re-fou rire généralisé; dans cet océan de vacuité et de prétention, ce fut l’un des rares bons moments. On aperçoit un contrebassiste qui joue à l’un des fenêtres du Palais.   Puis il ne se passe strictement rien sur scène: cela doit être pour Marthaler la plus épouvantable des provocations… Comme cette brutale invasion de basses qui font mal  aux oreilles… Désolé, M. Marthaler, on a déjà donné, et vos petites provocations ont un goût nauséeux de réchauffé :  il y a quarante ans  le Living Theater entre autres, avec des moyens plus simples , était beaucoup plus efficace!
Les spectateurs ne sont pas dupes et , devant cette plaisanterie des plus médiocres,ne se gênent pas pour manifester leur désapprobation! Un homme seul sur les bancs d’église se lance dans un monologue mais le public continue à s’ennuyer ferme, à part une petite partie du public qui se réjouit; certes, tout est impeccablement réglé: la mécanique suisse fonctionne mais pour dire quoi? Vraiment pas grand chose!  Il y a aussi quelques allusions aux capotes et à Benoît XVI. Mon voisin allemand me demande où, à mon avis, on peut se faire rembourser; nous lui conseillons de s’adresser à la direction du Festival et lui souhaitons bon courage. Daniel Cohn Bendit repique du nez et l’hémorragie de public se fait cette fois plus sévère mais le spectacle continue, toujours aussi propret, toujours aussi peu passionnant!
Les comédiens, et non des moindres, comme entre autres l’excellent Marc Bodnar et  Evelyne Didi, très humbles, font leur boulot avec beaucoup d’humilité malgré tout, alors que la grogne des spectateurs s’amplifie. Il y a une grande de pièce de tissu  projetée sur le mur du Palais. Les hommes à un moment s’allongeront sur les tombeaux dont l’un montera et redescendra plusieurs fois avec changement de partenaire à chaque fois,  puis ce sera au tour des femmes d’y prendre leur place en faisant leur lit . Là aussi Marthaler et son complice Olivier Cadiot  doivent trouver que c’est du dernier chic. Mais, quand autant de spectateurs désertent un spectacle, c’est qu’il doit y avoir quand même un petit ennui, même, répétons-le , quand tout est impeccablement réglé. Il y aura à la fin quelques timides rappels et les comédiens ont préféré-on les comprend- s’éclipser rapidement devant les huées du public où il y avait quelques inconditionnels ravis de ce qui n’ a même pas l’allure d’ une bonne farce de potache.   L’humour de Marthaler est du genre pesant, et, à part quelques déplacements en groupe de comédiens, l’ensemble, sans invention, sans parti pri , sans véritable provocation théâtrale, n’a pas du tout la force de certains happenings. Que sauver de ce ratage? uelques chants en choeur, quelques gags mais même les extraits de texte éparpillés, sans unité  ne peuvent pas faire  sens dans toute cette vacuité. Le salut final était des plus houleux -même si, soyons justes,  il y a eu quelques applaudissements- mais les pauvres comédiens ne devaient pas  se sentir très à l’aise. On veut bien que Marthaler, d’habitude plus inspiré, soit, comme l’annonce fièrement le programme » un observateur du monde et un poète inspiré » et qu’il reste » animé d’une volonté d’établir un dialogue avec ses contemporains, en étant toujours « ici et maintenant ». ( sic!).   Mais on se demande comment une pareille création a pu voir le jour et il aurait sans doute mieux valu arrêter les dégâts avant. Le ministre de la Culture, venu le soir de la première,  était furieux, et on le comprend. A quelque chose,  malheur est bon et la leçon est claire: le festival s’il continue dans cette lancée faussement avant-gardiste et d’une rare prétention, est en train de se tirer une balle dans le pied, et ce qui aurait pu être une pochade sympathique d’une heure sur l’histoire des papes ou quelque chose de similaire, devient d’un ennui profond en deux heures et demi dans un haut  lieu théâtral qui ne méritait franchement pas ce genre de ratage… dont vous pouvez avoir une idée en regardant Arte.
Quelques minutes vous suffiront sans doute pour mesurer l’étendue des dégâts. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que ce genre de choses ne fera pas date dans l’histoire du théâtre contemporain.

 

Philippe du Vignal

Palais des Papes jusqu’au 17 juillet. Retransmission en direct le 17 sur Arte

 

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