Jeux de scène de Victor Haïm, mise en scène de l’auteur.
La pièce de Victor Haïm fut créée il y a quelques dix ans; c’est du théâtre dans le théâtre, une fois de plus! Mais bon… On assiste donc à la première répétition de la nouvelle pièce d’une auteure très connue (qui joue aussi le personnage de l’auteure) avec une jeune star. Elles ont eu autrefois une histoire d’amour et se connaissent donc très bien. Cela se passe sur une scène un peu encombrée par les accessoires de la pièce de Shakespeare qui précède ( ce qui n’est pas très crédible) ; il y a juste une table ronde et deux chaises, dont les deux personnages ne décollent guère, ce qui donne un côté statique à la mise en scène.
Il y a donc sur le plateau ces deux actrices mais pas de metteur en scène, et un technicien lumière invisible auquel l’auteure s’adresse. sans que l’on puisse y croire une seconde. De leurs amours d’autrefois, ne reste plus qu’une certaine connivence et l’obligation de travailler ensemble. Et très vite, on s’en serait douté, les tensions vont s’exacerber entre l’écrivain , plus âgée et plus sûre d’elle, et la jeune femme qui ne demande qu’ une chose: être vue et admirée. Jusqu’à la brouille finale, vite suivie par une réconciliation obligatoire., assez peu crédible.
La pièce de Victor Haïm a du mal à démarrer et est souvent bavarde, jusqu’au moment où, enfin, la confrontation entre les deux femmes devient impitoyable: perfidies, vacheries sournoises, plaisir sadique à voir l’autre souffrir: le dialogue est alors tout à fait remarquable. Malheureusement, Victor Haïm a voulu prendre les choses en main et assurer la mise en scène. Qu’il sache ce que dit la pièce, comme il l’écrit lui-même, est une chose dont on ne doute heureusement pas, mais il patauge, et dans sa mise en place, et dans sa direction d’acteurs, et dans la scénographie ( non signée) , ce qui fait quand même beaucoup, et mieux vaut ne pas s’étendre sur le surlignage des apartés par un coup de projecteur: ce genre de trouvailles frise l’amateurisme distingué!
Katherine Mary rame en vain pour jouer l’auteur: elle n’ a pas du tout l’expérience nécessaire pour affronter ce genre de rôles. Quant à Valérie Zarouk, c’est une jeune actrice qui possède une belle personnalité, et a un jeu précis et intelligent, mais, comme ici, elle n’est pas dirigée, elle ne semble pas très à l’aise, et essaye de s’en sortir tant bien que mal. Donc, dans ces conditions, comment croire à ce règlement de comptes entre les deux femmes ?
Tout se passe en fait, comme si l’auteur avait regardé les choses se faire au lieu d’imposer une ligne directrice solide, et ce n’est pas à Victor Haïm, vieux routier du théâtre que l’on va apprendre qu’une mise en scène se construit et que ce n’est pas aux comédiens de le faire.. Comme chacune des deux actrices joue de son côté, la pièce déjà longuette, malgré toute la force de son dialogue, n’en finit pas de finir… Jeux de scène se joue depuis une semaine mais on ne voit pas bien comment les choses pourraient s’améliorer . Peut-être d’abord avec quelques coupes au début, un recadrage drastique du jeu et de la mise en scène; mais en général, on sait que c’est c’est bien difficile. Dommage !
Alors à voir ? Non, même si le théâtre du Ranelagh ne manque pas de charme.
Philippe du Vignal
Théâtre du Ranelagh jusqu’au 20 novembre.