NUIT DE LA MARIONNETTE

NUIT DE LA MARIONNETTE MARTO 

marionnette.jpgDepuis plusieurs années, cinq théâtres des Hauts de Seine conjuguent leurs efforts pour organiser MARTO, festival de marionnettes et théâtre d’objets pour adultes. Du 19 novembre au 16 décembre, c’est Antony, Chatenay-Malabry, Bagneux, Clamart, Fontenay aux Roses et Malakoff que l’on peut découvrir ou revoir des compagnies insolites.
Le Théâtre Jean Arp de Clamart a organisé une Nuit de la marionnette, avec une dizaine de compagnies qui présentaient de courts extraits de spectacles en devenir. Plusieurs parcours étaient organisés dans les différents lieux du théâtre, on nous remettait un bracelet pour suivre un guide.
Les histoires sans paroles de la compagnie Alinéa, puis Power of Love de Gare Centrale mettaient en scène un contrebassiste et de minuscules marionnettes au dessus d’un castelet quadrangulaire, n’avaient rien de bouleversant.
Par contre, Le Plaisir d’offrir de la S.O.U.P.E. compagnie qui présentait un magasin de dessous érotiques du début du siècle dernier, maniait un humour ambigu et des accessoires habilement conçus avec une belle présence du bonimenteur. Enfin Les grands classiques à domicile du Laboratoire itinérant Conte et objets, interprétés par un bon comédien, qui repassait et manipulait des objets de la vie quotidienne en mettant à sa sauce les contes de Perrault parvenait à capter son auditoire. Il y avait encore six spectacles annoncés jusqu’à 5 h 15 du matin la nuit était trop longue pour qui devait travailler le lendemain…

Edith Rappoport

Théâtre Jean Arp de Clamart

M.A.R.T.O jusqu’au 16 décembre www.festivalmarto.com

 


Archive pour novembre, 2010

PETITES HISTOIRES DE LA FOLIE ORDINAIRE

PETITES HISTOIRES DE LA FOLIE ORDINAIRE de Petr Zelenka , mise en scène du collectif DRAO.

     h2023128281290364039.jpgPetr Zelenka est  est né à Prague en 1967. Il a connu la contrainte et la liberté., liberté ne rend pas forcément la vie facile. Les personnages de ses petites histoires sont lâchés dans une vie à laquelle ils n’étaient pas préparés, eux qui avaient vécu sous des regards inquisiteurs. L’inquiétude a changé de nature puisqu’il s’agit de savoir qui on est et que personne ne vous le dit.
Au cœur de cette folle comédie noire, deux jeunes gens, Pierre et son copain La mouche. L’un, Pierre, n’arrive pas à retenir les femmes qu’il aime, l’autre, La mouche a décidé de se passer des femmes que, pourtant, il collectionnait. La mouche donne des conseils à Pierre comme de couper les cheveux de son amoureuse, de les faire bouillir puis brûler et de répandre les cendres à l’endroit de leur première rencontre, lui se console avec un tuyau d’aspirateur, la conduite d’eau du lavabo ou un mannequin de cire.
Autour de Pierre, des parents et des voisins qui ajoutent à la folie ambiante. Son père fut autrefois une voix célèbre de la radio officielle qui commentait les grands évènements, il occupe maintenant son temps à des expériences étranges avec des ampoules électriques, sa mère inonde Pierre de coupures de presse concernant les évènements dans le monde et se désole d’avoir un fils aussi peu performant.
Ses voisins, Alice et Georges passent le temps entre insultes et scènes d’amour torrides pour lesquelles ils ont besoin d’un témoin. Pierre a aussi un patron qui lui avoue son amour pour les petits garçons. Et il connaît Sylvia la sculptrice qui réalisera le buste de son père. Les objets aussi participent à ce dérèglement, sa couverture s’anime, le mannequin de cire que lui a confié La mouche part se promener. Tout s’accélère, son père s’est remis à dire ses commentaires d’autrefois, sa mère est à l’hôpital psychiatrique et Pierre décide de se consacrer à la poésie avant de s’envoyer lui-même en Tchétchénie dans un grand carton. Fin de cette galerie de portraits de solitaires en mal de regards. Et une interrogation de l’auteur lui-même: la folie ne serait-elle pas plus séduisante que le génie. Un dispositif astucieux, un cercle de voilages qui s’ouvre et se ferme pour nous faire passer d’un espace à l’autre,  et il y a surtout une énergie de troupe autour de Stéphane Facco qui est un Pierre remarquable de poésie loufoque.Le collectif DRAO depuis quelques années, a mis toute son énergie à faire entendre et voir le répertoire contemporain, de Jean-Luc Lagarce à Fausto Paradivino. En nous faisant découvrir Petr Zelenka dont la pièce a fait date dans son pays, il nous donne une image forte et vivante du théâtre qui s’écrit aujourd’hui et qui raconte le monde.

Françoise du Chaxel

Théâtre de La Tempête, Cartoucherie de Vincennes.
Jusqu’au 12 Décembre.T: 01 43 28 36 36.

 Tournée : les 14, 15 et 16 décembre au Théâtre 95 de Cergy-Pontoise.

 

 

 

 

Hommage à Alain Crombecque.

Hommage à Alain Crombecque.

mercialain.jpg France Culture, le Festival d’Automne à Paris et le théâtre des Bouffes du Nord ont rendu hommage ce dimanche 28 novembre à Alain Crombecque, disparu en 2009. Cette émission, animée par Laure Adler et Jean-Pierre Thibaudat, pour France -Culture, fait suite au premier volet enregistré cet été au festival d’Avignon. Elle relate ses débuts dans le syndicat étudiant UNEF, et ses premières fonctions d’attaché de presse pour Jérôme Savary, ou pour le théâtre Antoine. Puis elle évoque son parcours au festival d’Automne, tout d’abord en 1972 comme attaché de presse de Michel Guy, puis, dès 1974 comme directeur artistique, et enfin comme emblématique directeur général depuis 1992 jusqu’à sa mort. Durant trois heures,  se sont succédé des témoignages en direct ( Jack Ralite, Jack Lang, Michel Piccoli, Serge Toubiana, Charles Gonzalès etc..) ou enregistrés, comme cette  lettre sonore exceptionnelle de Bob Wilson.

Intervention courte mais marquante de Valère Novarina, qui a parlé du « sens de la présence muette », d’Alain Crombecque, un sens qui se perd actuellement dans un monde où tout est communication… . Valère Novarina a dénoncé les « ingénieurs culturels » que sont devenus nos directeurs de structures artistiques. Mais on a aussi  souligné aussi le goût pour le rire et les facéties d’Alain Crombecque, comme en témoigne cette photo prise en 2003 au musée d’Orsay.  Les témoignages étaient entrecoupés de passages musicaux enregistrés ou en direct.  Cet homme  peu bavard,  avait consacré  sa vie à créer les conditions de rencontres artistiques en France et dans le monde. La fin de cette émission restera symbolique: l’image projetée d’Alain Crombecque  dans le cadre de scène du théâtre des Bouffes du Nord, comme pour mieux souligner son silence définitif.

Jean Couturier

Théâtre des Bouffes du Nord ce dimanche 28 novembre. Cet hommage sera diffusé sur France Culture le dimanche 19 décembre à 20h.

La Chienne dans les orties

La Chienne dans les orties, texte et mise en scène de Marc-Michel Georges.

lachiennedanslesortiesphotomichelbocage101d64.jpgHenriette est seule, accompagnée seulement par sa chienne et ses « petits ». Elle parle de façon crue et sans complaisance, elle se raconte. On ne comprend tout d’abord pas par quel bout prendre son monologue et le lieu dans lequel elle se situe est aussi imprécis. Plusieurs canisses tracent des sentiers et deux escaliers, l’un contre le mur en avant-scène, l’autre étalé par terre dans un coin, complètent le décor.
Pourtant, la solide présence de l’actrice Chantal Péninon happe le spectateur, qui comprend peu à peu, à force de répétitions et de recoupements qu’Henriette se trouve juste à côté de son épicerie, maintenant presque à l’abandon – l’image des jambons envahis par les mouches l’obsède. Son mari est mort, ce qui n’est pas une grosse perte vu le calvaire qu’il lui faisait vivre.
En face, il y a la maison de Madame Clabert, l’amante de son mari. C’est à elle que s’adresse la plupart du temps Henriette, rejetant sur ce personnage imaginaire toutes les imprécations et la haine qu’elle semble avoir contenu . Dans le dénuement le plus total, il ne lui reste plus que sa chienne auprès d’elle. Dans un langage brut de décoffrage, elle est tour à tour drôle et tragique.
Elle s’adresse parfois à nous, ou alors est-ce à Madame Clabert qu’elle parle, et par des gestes simples et évocateurs elle se dévoile, comme lorsqu’elle se rapproche de sa chienne, représentée par une chaine qu’elle manipule bruyamment derrière une canisse ; ou encore lorsqu’elle monte dans le bus qui va l’emmener à la plage : elle grimpe sur l’escalier dans le coin de la scène et aidée par la musique, elle évoque la route cahotante.
Il y a quelques longueurs dans ce texte dense, et on regrette qu’il n’y ait pas davantage de rythme dans la mise en scène, mais la performance de Chantal Péninon, avec son phrasé clair et juste , mérite d’être remarquée.

 

Davi Juca

Théâtre Aire Falguière, les vendredis et samedis à 20h45, les dimanches à 15h30, jusqu’au 19 décembre.

Klaxon, trompette et pétarades

 Klaxon, trompette et pétarades, texte de Dario Fô, traduction de Marie-France Sidet, adaptation et mise en scène de Marc Prin.

On connaît bien en France depuis quelque quarante ans Dario Fô  (notamment son  fameux Mistero Buffo, Couple ouvert à deux battants, Faut pas payer; cette dernière pièce  avait obtenu un beau succès l’an passé dans ce même théâtre etc..) . Quant à cette pièce, elle  fut mise en scène et  jouée par Dariô Fô en 1981…  » C’est une pièce ancrée dans une actualité spécifique: l’ Italie des  » années de plomb » 1970 avec ses luttes sociales violentes, les séquestrations comme et l’assassinat d’Aldo Moro, nous dit Marc Prin. Quand, nous découvrions tous horrifiés les photos de son corps dans le coffre arrière d’une voiture, dans un pays très proche aux liens séculaires avec le nôtre…
Cette époque , se demande le metteur en scène, a-t-elle quelque chose à voir avec la nôtre. Oui, dit-il dans la mesure où elle annonce l’avènement d la prédominance et de l’omnipotence du pouvoir économico-financier sur la « chose politique ».  Et il ne craint pas de parler de théâtralité joyeuse et irrévérencieuse, véritablement populaire, en quête ce rire acéré qui aiguise la lucidité du spectateur »…
Bon,bon mais que voit-on sur le plateau? En vérité pas grand chose!  Une comédie à l’argument des plus minces, qu’il dit avoir adaptée et resserrée ( qu’en serait-il été si elle n’avait  été resserrée!) mais où l’on s’ennuie ferme pendant une heure quarante. Le thème: Antonio, l’un des ouvriers d’ Agnelli le tout puissant patron de la FIAT ; il roule avec sa  132 dans les faubourgs  de Turin quand il assiste à un horrible accident: une voiture, celle justement d’Agnelli percute un bas-côté de la route et a pris feu. N’écoutant que son courage, il cherche à sauver ses occupants bloqués à l’intérieur de la voiture; il en enveloppe un dans sa veste; l’homme- évidemment c’est Agnelli !- a le visage brûlé et  est dirigé d’urgence à l’hôpital où les chirurgiens vont lu refaire un visage correspondant à la photo qui est dans la veste que l’on croit la sienne. Sa femme et sa petite amie viennent rendre visite à cet Antonio qui n’est pas le bon.
Sur cette improbable confusion d’identité,quiproquos en rafales, gags usés jusqu’à la corde, etc… Ce qui pourrait à l’extrême rigueur faire l’objet d’une petite farce vite expédiée, étirée sur une heure quarante devient très vite quelque chose d’à peine supportable. D’autant plus que la mise  en scène, sans parler de ce qui fait office de scénographie  et  la direction d’acteurs sont misérables: cabotinage, criailleries permanentes, courses dans la salle. Dix minutes après le début, on a compris qu’il n’y avait plus rien à espérer, et la pièce se traîne lamentablement jusqu’à une fin qui n’en est pas une. Rien à sauver , tous aux abris. Pathétique… Aussi pathétique qu’un des petits textes du programme dont nous ne voudrions pas  priver nos lecteurs:  » La voix de la dissidence, une fois débondée, interdit-elle la dissension? (…) Entre le comédien et le personnage, entre la salle et la scène, entre la représentation et le réel, la farce remet du jeu, transforme en jeu la dénonciation elle-même. La destruction a ainsi son pendant positif de recomposition: ce que la dissidence farcesque défait du corps social qu’elle démembre en le représentant, elle le recompose dans l’ici et le maintenant de la représentation. Elle construit en direct l’utopie concrète d’une pratique lucide du spectacle qui vaut saisie lucide du réel ». ( sic)
Deux questions: Que pouvait être cette pièce de Dario Fô, à l’origine et non adaptée en 81? Comment et pourquoi Jean-Louis Martinelli , qui a d’habitude des choix plus rigoureux, a-t-il programmé ce  texte indigent et qui n’aurait sans doute pas attiré grand monde, s’il n’avait  été signé Dario Fô? On ne lui fera pas l’injure de croire qu’il ne l’avait pas lu? Le mystère reste entier.

 

Philippe du Vignal

Théâtre Nanterre-Amandiers jusqu’au 18 décembre.

http://www.dailymotion.com/video/xfkb75

LA DERNIÈRE INTERVIEW

LA DERNIÈRE INTERVIEW  dialogue imaginaire entre Dieudonné Niangouna et Jean Genet, conception et mise en scène de  Catherine Boskowitz

Catherine Boskowitz, après avoir découvert la dernière interview de Jean Genet donnée à la BBC en 1985, a proposé à Dieudonné Niangouna, comédien, auteur, metteur en scène de Brazzaville d’inventer avec elle un dialogue avec le poète disparu dont on fête le centenaire de la naissance. Depuis une dizaine d’années, l’écrivain congolais s’est imposé en France, notamment avec Les Inepties volantes au Festival d’Avignon 2009.
Gageure  séduisante pour Catherine Boskowitz, engagée dans une vraie recherche de théâtre populaire, et, par ailleurs, très bonne connaisseuse de l’Afrique où elle va souvent et où elle a des attaches familiales. Mais la metteuse en scène n’a pas ,du moins en ce soir de première, atteint son but. Quelques  panneaux blancs posés au hasard, un fond sonore continu de bruitages télévisés,: un dialogue lent, entrecoupé de silences,  s’établit entre une  journaliste à peine audible et l’artiste, tour à tour Jean Genet et Niangouna. Le ton monte par moments, il quitte le plateau pendant plusieurs minutes, etl’on pourrait croire que le spectacle est fini, mais Niangouna revient pour fracasser une table dont les morceaux s’éparpillent au risque de blesser les spectateurs ! La déception en ce soir de première était à la mesure de l’attente.

 

Edith Rappoport

 

 Confluences jusqu’au 11 décembre.

resa@confluences.net

Cadmus et Hermione

Cadmus et Hermione, tragédie de Jean-Baptiste Lully, mise en scène Benjamin Lazar

495c03cef65111df94c9ed5d2c545735.jpgÀ température hivernale, besoin de réconfort. Et l’on peut dire que Vincent Dumestre, le maître de la musique baroque, sait s’y prendre pour nous réchauffer le cœur et l’âme. Depuis un moment déjà, le directeur musical du Poème harmonique s’est associé avec Benjamin Lazar pour commettre de splendides mises en scène (comme ce Pyrame et Thisbé monté l’an dernier à l’Athénée, voir notre article dans Le Théâtre du blog).
Et pour une semaine, l’Opéra Comique a programmé une reprise de cette production créée en janvier 2008. Cette tragédie en un prologue et cinq actes (poème de Philippe Quinault d’après Les Métamorphoses d’Ovide), est le tout premier opéra français, et que Lully y pose les bases de l’art lyrique. Les danseurs, chœur et orchestre du Poème Harmonique se sont emparés avec talent de ce livret pour nous offrir un petit joyau, digne de la cour du roi Soleil.
Ce régal pour les yeux et l’esprit étant très prisé, à défaut de pouvoir y assister, nous ne saurions trop vous recommander de profiter des « rumeurs » que l’Opéra comique propose jusque fin décembre autour de ce spectacle, et qui, peu ou prou, sont élaborées avec les mêmes équipes. Ainsi, les 13 et 14 décembre, Benjamin Lazar proposera sa dernière création, Cachafaz, tragédie-barbare en deux actes de Copi (partition d’Oscar Strasnoy), sous la direction musicale de Geoffroy Jourdain, avec notamment l’ensemble 2E2M et les Cris de Paris. Les 22 et 23 décembre, Vincent Dumestre, Cécile Roussat et le Poème Harmonique invitent avec un spectacle :Arts du cirque, musiques et danses à Rome au XVIIe siècle , pour découvrir acrobates, mimes, chanteurs et musiciens dans l’esprit festif et masqué de la comedia dell’arte du traditionnel Carnaval romain. Les 14, 16 et 18 décembre, la compagnie Divertimenty offrira un spectacle didactique autour de la danse baroque, Belles lettres de danse. Et les 22 et 23 décembre, Louise Moaty, accompagnée de Bertrand Cuiller au clavecin, mettra en scène La Lanterne magique de M. Couperin, un concert optique, poétique et magique.
Il n’y a pas d’âge pour pénétrer l’univers baroque, comme en témoigne cette programmation riche et éclectique, et qui s’adresse à tous. Mais hâtez-vous, car le but d’un bruit, c’est de courir…

Barbara Petit

 

Festival Cadmus et Hermione jusqu’au 23 décembre.
Renseignements et programme www.opera-comique.com

Image de prévisualisation YouTube

 


Debout

Debout ! de Carole Thibaut d’après une idée et mise en scène d’ Agnès Desfosses en collaboration avec DKbel

   debout.jpg« Debout ! » nous dit Carole Thibaut (auteure engagée de théâtre contemporain travaillant aussi la mise en scène avec la Cie Sambre), traduisant l’intention initiale d’Agnès Desfosses qui porte ce projet artistique avec sa Compagnie Acta en collaboration avec DKbel, compagnie chorégraphique locale.

Le projet est ambitieux, à la hauteur de l’enjeu : pour Carole Thibaut recueillir la parole d’habitants de – la très médiatiquement stigmatisée – Villiers-le-Bel et la traduire de façon allégorique et non caricaturale en un grand poème théâtral pour comédiens amateurs et professionnels réunis autour de monologues, de dialogues et en chœur.
Pour Acta, il s’est agi d’animer des ateliers de théâtre par tranches d’âge (allant d’enfants à un groupe d’adultes) afin de s’assurer de la bonne représentativité de ce qui se jouerait sur le plateau, une microsociété tendant à représenter le plus fidèlement possible celle de la ville.
Ensuite, à partir du magnifique texte de Carole Thibaut, Acta et DKbel ont respectivement mis en scène et en chorégraphie les quarante artistes amateurs et professionnels qui ont fait vibrer le plateau de leur élan, de leur panache,  accompagnés par un remarquable travail de réglages d’entrées et sorties, des plus complexes dans un tel dispositif. Le plateau est un cercle dessiné au sol, à la manière d’une piste de cirque, et le public est placé dans une configuration tri-frontale. D’habiles découpes lumières ajoutées à un travail de projections d’images de la ville et de ses habitants (non décoratives, résolument signifiantes) viennent servir une scénographie qui oscille entre épure et foisonnement.
« Debout ! », nous disent-ils, avec leurs corps habiles – il en est de même pour la présence de plusieurs comédiens handicapés qui, jouant sur des fauteuils roulants – tout en portant le verbe haut. Ils nous racontent que cette ville est un melting pot, que la vie n’y est pas toujours rose, mais  pas toujours noire non plus, et appellent à ce qu’on pourrait qualifier d’un « sursaut citoyen » pour reprendre l’estime de soi et le faire vivre collectivement dans l’espace public. Ils nous disent aussi la violence de la stigmatisation, la honte parfois d’avoir été à ce point pris en otage par une représentation caricaturale de la situation locale par les medias, tout en fustigeant des formes de violence qui ne sont ps niée et qui existent dans la ville.
C’est bien un texte poético-politique exhortant à améliorer le cadre de vie – en l’illustrant aussi par de très jolis moments vécus par les habitants – qui nous est adressé. Trois destinataires en somme, les médias pour qu’ils arrêtent d’écrire n’importe quoi, les habitants, pour qu’ils soient pleinement acteurs d’une existence collective plus apaisée, et les publics étrangers à la ville, pour leur exposer une toute autre vision du vivre-ensemble dans cette cité, toute en nuance.
Ce projet  artistique, dont la forme, très visuelle (on reconnaît les talents de plasticienne et de photographe d’Agnès Desfosses) est bien servi par un texte poétique  qui fait varier sonnets (c’est à vérifier en lisant le texte, mais c’est l’impression dégagée), des formes plus incisives (presque des haïkus japonais) et des dialogues « plus théâtraux »; les comédiens amateurs et professionnels jouent des rôles, non leurs propres rôles dans cette société. Nous sommes dans la distanciation.
Le propos doit aussi être interprété comme une volonté d’artistes, inscrits depuis longtemps dans ce paysage local (tout en ayant une reconnaissance nationale et internationale, soulignons-le) d’utiliser leurs compétences propres pour agir comme acteurs du social (et pas comme travailleurs sociaux !). C’est aussi cela que parvient à nous dire cette association d’artistes, comme un hymne à un  théâtre politique non dogmatique.
Vous l’aurez compris, c’est fou ce que cela fait comme bien !

 Jérôme Robert

  Au centre Marcel Pagnol de Villiers-le-Bel Spectacle vu le 28 novembre 2010

Le Mariage

 Le Mariage de Nicolas Gogol, traduction d’André Markowitz, mise en scène de Lilo Baur.

gprmariage1011.jpgCe Mariage , monté par Fokine en spetembre dernier au Théâtre de la Ville, est aujourd’hui monté par Lilo Bau,  ancienne assistante de Peter Brook avec les acteurs du Français.. La piécette n’a pas la dimension du Revizor, très bien monté par Jean-Louis Benoît il y a quelques années; même si Le Mariage a été créé juste après, en 1841 et  est un peu de la même veine, elle n’en pas les qualités dramatiques.
C’est un sorte de satire sociale aux accents de farce que  cette recherche d’un conjoint par une marieuse., femme expérimentée mais forcément roublarde et pas très nette en affaires, comme le sont les petites annonces matrimoniales actuelles dans les journaux ou sur Internet.
L’institution du  mariage qui repose toujours sur une base de petits malentendus et de négociations,  est  un bussiness lucratif pour cette marieuse, et, bien entendu,chez Gogol, les choses ne se passent pas comme prévu: la jeune file est un peu sosotte, les prétendants ont des allures de pieds nickelés, vantards et pas très malins, et bien entendu, tous plus ou moins alcooliques.
Et c’est une bonne occasion pour Gogol  de se livre à un je de massacre,  en  mettant en scène des personnages hauts en couleur comme un marchand, un  petits fonctionnaire , deux  officiers en retraite, ou encore Omelette un employé de collège,  tous plus âgés que la jeune fille à marier; il y a aussi , dans cette galerie de personnages, le meilleur ami du plus jeune des prétendants, aussi brave que maladroit et qui arrive presque à réaliser cette fameuse union de rêve qui échouera,  puisque son ami s’enfuira subitement.
Lilo Baur a imaginé un décor à deux facettes: l’une étant l’appartement du célibataire et l’autre face le salon de la jeune fille, avec sur le côté un antichambre où attendent ses prétendants qui veulent vérifier, comme des maquignons si le produit à vendre  correspond bien aux qualités annoncées par la marieuse. Et le langage est parfois cru et bien observé, puisque Gogol connaissait bien ce milieu, qui est aussi celui des Ames mortes et que l’on retrouve aussi dans ses Scènes de la vie mondaine. Il y déjà du Labiche chez Gogol mais aussi, comme le dit Lilo Baur, du Chaplin ou du Keaton avec ces portes qui claquent, ces personnages pris dans un engrenage auxquels ils ont bien du mal à s’échapper.
Reste à savoir comment l’on peut représenter aujourd’hui cette pièce pas vraiment passionnante à vrai dire et qui  dure quand même une heure quarante; Lilo Baur s’y emploie avec sérieux et savoir-faire. mais le compte n’y est pas tout à fait.Il y a un côté propret, bcbg , à la fois dans ce décor un peu chicos, et  ces costumes trop raffinés. Quant aux  acteurs, ils font le travail, rien à dire mais semblent un peu coincés, sauf Nicolas Lormeau , le prétentieux et ridicule employé de collège, et Laurent Natrella qui s’est composé une silhouette incroyable pour jour les bons copains. Mais ce qui manque à cette mise en scène , c’est surtout un véritable ton burlesque, et un rythme qui donnerait une véritable couleur farcesque à cette comédie un peu mince où  chaque personnage n’est qu’esquissé.
On s’ennuie? Oui, un peu; et l’ on a bien du mal à s’attacher à ces personnages d’une affaire qui ne nous ne concerne guère. Il y aurait fallu plus d’audace et de folie dans la mise en scène, comme dans cette incroyable Mariage de Tchekov , inspiré de celui de Gogol et mis en scène par Pnakov avec des comédiens russes et ukrainiens au Théâtre des Abbesses.

Alors à voir? Pas nécessairement: cette recherche de l’âme sœur dans un milieu petit bourgeois aurait pu être plus réjouissante…Encore une fois, il manque ici une véritable dramaturgie comique et burlesque, ce qui, on le sait, n’est pas si facile à appréhender.

Philippe du Vignal

Théâtre du Vieux-Colombier jusqu’au 2 janvier 2011.

Pinocchio

Pinocchio d‘après Carlo Collodi, texte et mise en scène de Joël Pommerat.

pinocchio.jpgNous  vous avions dit en janvier 2009 dans le Théâtre du Blog(1) beaucoup de bien de ce merveilleux Pinocchio ; depuis le spectacle a beaucoup été joué et s’est encore bonifié. Il nous a semblé que le rythme s’était   resserré, qu’on entend mieux le beau texte de Joël Pommerat dont les répliques coulent dans la bouche des ses comédiens avec une aisance  hors du commun, qui ont une présence fabuleuse.Ils font tous un travail comme on aimerait en voir plus souvent sur les scènes françaises.Pierre-Yves Chapalain, le présentateur, glaçant de vérité, parfois même très inquiétant… Jean-Pierre Costanzziello, Daniel Dubois, Anne Rotger, Maya Vignando: tous sont absolument crédibles et justes. Et il y a une unité de jeu absolue qui donne une vérité aux personnages et au conte, avec comme le dit Daniel Loyaza, « un éclairage qui n’appartient qu’à Joël Pommerat. » Et l’on sent parfaitement que ce Pinocchio, librement réinventé où l’imagination enfantine se mesure à la dureté des grandes personnes, part donc de la question de la paternité et de la pauvreté. Comme dans cette admirable scène tout à fait poignante où l ‘enfant comprend que son père a vendu son seul  manteau pour acheter un livre, véritable sésame pour aller à l’école, et que Pinocchio vendra pour assister à une attraction de fête foraine. Mais s’il va à l’école , c’est aussi pour gagner beaucoup d’argent et délivrer son père de la misère. C’est un conte mais qui reste, à chaque minute absolument crédible. Que dire des images qui avec les lumières et la scénographie admirable d’Eric Soyer sont d’une telle qualité poétique qu’on entre dans ce conte comme un enfant: nous avons eu même un peu peur ( eh! oui) dans cet univers souvent assez noir où François , Grégoire Leymarie et Yann Priest ont créé un univers sonore à la fois précis et envoûtant . Il y a une belle citation de Kantor avec ses petits enfants/ mannequins assis en rang, et ces rangées d’êtres hybrides à têtes d’animaux absolument fabuleuses. Rine n’est jamais laissé au hasard et il n’y pas la moindre petite hésitation , que ce soit dans le jeu comme dans la mise en scène. Sans doute le meilleur spectacle depuis la rentrée 2010, et le meilleur aussi du théâtre pour enfants souvent  si approximatif. En fait, ce qui fait la beauté et l’unité de ce spectacle, servi par toute une équipe c’est sans doute l’engagement profond du metteur en scène qui ne triche jamais; on retrouve les figures les plus connues du conte que le petit garçon va rencontrer dans cette sorte de quête initiatique mais qu’il a su replacer à l’époque contemporaine avec une sensibilité et une intelligence exceptionnelle

Vraiment, on ne vous le dire pas trois fois, courez y et emmenez-y les enfants  comme les adultes qui vous sont proches) car c’est des grandes qualités de ce spectacle de pouvoir être lu par des spectateurs de tout âge ( mais pas avant huit ans précise le programme et c’est une bonne recommandation). Un dernier mot: il faut signaler que c’est Dominique Goudal, la directrice du centre culturel de Brétigny qui, la première , a tout fait, pour aider Joël Pommerat à ses débuts et on ne peut que la remercier pour sa lucidité et son engagement.

 

Philippe du Vignal

(1)http://theatredublog.unblog.fr/2009/01/23/pinocchio/

Théâtre de l’Odéon-Ateliers Berthier jusqu’au 19 décembre

 

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