La Dispute

La Dispute de Marivaux, mise en scène de Vincent Dussart.

 

ladispute.jpgCette pièce, une des dernières de Marivaux, apparaît plus que jamais comme un conte cruel sur les relations qui existent les êtres entre eux. Le Prince et Hermiane se demandent qui, de l’homme ou de la femme, fut le premier à être infidèle en amour. Pour répondre à cette  question, le Prince montre à Hermiane le résultat d’une expérience initiée par son père une vingtaine d’années auparavant. Deux filles et deux garçons ont été pris au berceau et élevés individuellement en lieu clos. Pour la première fois, ils vont se rencontrer et être confrontés les uns aux autres, dans une reconstitution artificielle des premières amours. Les intentions de Vincent Dussart, sont claires dès le début : pour lui, La  Dispute n’ est pas une pièce sur la fidélité mais sur l’identité.
Le Prince (interprété par Louis-Marie Audubert:  très juste), entraîne Hermiane (Sophie Torresi) et le public dans un univers étrange et sombre. Sa mise en scène ,comme la scénographie sont épurées : des éclairages latéraux, une cabine où Hermiane et le Prince peuvent voir sans être vus, des effets de caméras pour rendre les jeux de reflets, des disques de lumière rouge sur le sol  où les quatre personnages testés vont sagement se ranger une fois leur scène finie, comme dans les bocaux à taille humaine des  ouvrages de science fiction. On est loin des bosquets radieux aux ruisseaux chantants suggérés chez Marivaux!
Ces deux couples de
  personnages, qui n’ont jamais rencontré personne, (Fabrice Cals, Xavier Czapla, Anne de Rocquigny et Nathalie Yanoz), sont soudain poussés à la découverte d’eux-mêmes.L’attitude implacable et le regard ironique de leurs éducateurs (Chantal Garrigues et Jean-Pierre Bélissent) font froid dans le dos.
Les acteurs, bien dirigés par Vincent Dussart, sont très  à l’aise dans cette mise en scène ;  il insiste sur la froideur de l’expérience menée et joue avec les individualités naissantes des personnages. On assiste moins à la montée  du sentiment amoureux et des rivalités intérieures qu’il suscite, qu’à la construction de l’identité par le regard de l’autre et par le reflet qu’il renvoie. Vincent Dussart précise: « Ils apprennent tout d’abord à dire : « je ». Puis la rencontre avec l’autre: le » vous » fait vaciller leur conscience d’eux-mêmes, ils ne peuvent plus se définir, et disent: » on ». Enfin, ils fusionnent dans le « nous » et y perdent le « je ».et les personnages hésitent sur les pronoms. Et y correspond une gestuelle qui s’intègre peu à peu dans un véritable ballet de la rencontre et de la relation à soi et à l’autre.
L’atmosphère légèrement pesante s’en trouve  allégée. D’autant que cette gestuelle souligne la touchante innocence des deux couples et la maladresse due à leur inexpérience,  ce qui provoque le sourire, voire le rire du spectateur. La cruauté de cette mise en scène  a le mérite de nous montrer  une autre facette de ce que l’on  appelle  le “marivaudage”.
Replacée dans un univers contemporain , cette Dispute questionne plus que jamais le spectateur sur sa propre identité, à travers le reflet que lui renvoie la quête d’identité de ses  personnages.

 

Elise Blanc

 

La Dispute, de Marivaux, mise en scène de Vincent Dussart.
Au Lavoir Moderne Parisien, jusqu’au 11 février, le lundi à 19h, du mercredi au samedi à 20h30, relâche mardi et dimanche.

 

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