Ah ! Ah ! Ah ! (Rions trois fois)

 Ah ! Ah ! Ah ! (Rions trois fois) de Noëlle Renaude, Eugène Durif, mise en scène  de Michel Cerda  et Serge Valetti, mise en scène  de Laurent Joly et Sophie Rodriguès

 

 Vous sous souvenez ? «  Rions trois fois, d’un rire franc et gaulois… ». Avec trois auteurs et trois metteurs en scène, Le Théâtre du Forum du Blanc-Mesnil posait l’autre soir la question du rire. De quoi rit-on, et comment ?
Le premier texte est un « petit théâtre » enchâssé dans Ma Solange, comment t’écrire mon désastre, Axel Roux, inépuisable feuilleton théâtral de Noëlle Renaude. Il s’agit tout simplement de la vie des Mort, c’est leur nom : Roland Mort, Chichel Mort, Milou Mort,  Nelly Mort, François Mort. De leur langue décalée, un peu plus vivante que la langue vivante, les voix enregistrées des comédiens font ici une sorte de lente dégustation, tandis que le public est invité à contempler un aquarium tout en lisant le texte sur les parois, mémorial de la fiction.
Rit-on ? De petits « humf » par-ci, un sourire par là : l’attention prêtée à l’écoute interdit le rire « franc et gaulois ». L’application  des comédiens à articuler, à laisser des temps, n’est pas vraiment trempée dans la vitalité que semble pourtant demander cette écriture, alors… On se sent dans une digne, tendre et respectueuse cérémonie qui ne prête pas à rire.
Le second texte, extrait de Nefs et naufrages d’Eugène Durif, est présenté en oratorio : un groupe de comédiens et leurs metteurs en scène se disent les tourments, individuels et collectifs, de la création au théâtre. Naissent les rires de connivence pour quiconque a travaillé un jour  dans une salle de répétition. Et puis, comme chaque fois que l’on parle avec suffisamment de profondeur et d’obstination d’une chose singulière, ça monte d’un cran vers l’universel : on rit de l’humaine condition, où chacun cherche sa trajectoire individuelle dans le collectif, et réciproquement, sans réussir à raccrocher les wagons.   On se perd, on revient sur ses pas, et encore surpris que ça ne marche pas… Rire satirique. Coincés derrière leur pupitre, les comédiens, les vrais, ceux qui sont là ce soir ( la distribution change chaque soir), en rajoutent d’autant plus dans la voix et l’expressivité qu’ils ont le corps empêché.Rire du trait appuyé de la caricature, rire de s’y reconnaître.
Le troisième texte, Renseignements généraux, est une fantaisie de Serge Valetti, labyrinthique, toute en digressions, et qui retombe quand même sur ses pieds, avec la virtuosité – pas moins – d’un Diderot dans Jacques le fataliste. Quand on est suivi dans la rue par un petit homme qu’on ne connaît pas, qu’on se retrouve au bar chez Suzy, où il n’y a justement pas de Suzy (elle est morte), tout peut arriver, mais alors, vraiment tout. Y compris une rencontre avec un Raymond Devos,  presque aussi vrai que nature.
Y compris aussi des blagues douteuses d’après bière, dont on a un peu honte ensuite d’avoir ri. Mais surtout une réelle et admirable fantaisie, emportée, envolée, par la virtuosité de Laurent Joly. Et là, on excuse tout. Bilan : on finit par s’accorder sur le constat que le rire n’est pas seulement une libération, mais carrément le plaisir de la liberté.

Christine Friedel

Jusqu’au 29 janvier, au Forum de Blanc-Mesnil, 01 48 14 22 00

Ma Solange…, de Noëlle Renaude, Éditions Théâtrales – Nefs et naufrages, d’Eugène Durif, Éditions Actes Sud – Renseignements généraux, de Serge Valetti, Éditions L’Atalante.

 

 http://www.dailymotion.com/video/xg8dyi

 

 


Archive pour janvier, 2011

La duchesse de Malfi

La duchesse de Malfi de John Webster, traduction de Nigel Gearing et d’ Anne-Laure Liégeois, mise en scène d’Anne-Laure Liégeois.

  malfi.jpgLa pièce écrite par John Webster  (1580-1624), et donc contemporain de Shakespeare, est l’histoire d’une duchesse qui épouse secrètement son intendant, homme intègre mais non noble, Antonio Bologna,  bien que ses frères, un  Cardinal et Ferdinand d’Aragon, jumeau de la Duchesse,  qui ont introduit chez elle un de leurs espions, Daniel de Bosola, l’aient mis en garde contre un éventuel remariage dont ils ne veulent à aucun prix.
Elle va accoucher bientôt d’un fils dont Antonio fait établir l’horoscope qu’il perd en chemin et que Bosola va ramasser et qui, bien entendu, avertira tout de suite les deux frères  de la situation. Deux autres enfants vont naître de ce couple secret mais Ferdinand surprendra la duchesse qui va alors organiser la fuite d’Antonio et de leur fils aîné  pour Ancône.
Sur le conseil de Bosola, à qui elle a avoué  ce  mariage secret, elle va rejoindre son époux sous prétexte d’un pèlerinage à Notre Dame de Lorette. Mais elle est arrêtée et mise en résidence surveillée par ses deux frères qui vont lui faire croire, en lui montrant une main coupée et des cadavres en cire  que son époux et ses enfants sont morts, de façon à lui faire perdre la raison…Et, sur leur ordre,  les fous d’un asile voisin  vont aussi lui donner un spectacle parodique; Bosola va entrer masqué, sur ordre de Ferdinand,  pour étrangler la duchesse!
Mais ému par sa dignité, Bosola va vouloir la venger; Ferdinand , lui, est déjà mentalement atteint et se prend pour un loup; quant à son frère, le Cardinal, il avoue à sa maîtresse Julia qu’il vient de faire tuer la Duchesse et ses deux enfants, puis il la supprime elle aussi pour qu’elle ne parle pas. Mais Bosola, caché, écoutait la conversation et il va tuer par mégarde Antonio en voulant le protéger du Cardinal mais exécute les deux frères, avant de mourir du coup de dague que vient de lui donner Ferdinand. Le dernier fils survivant d’Antonio,  arrive sous protection armée pour faire valoir ses droits sur le duché de Malfi…
La pièce est rarement montée; elle l’avait été par Peter Zadek en costumes contemporains, et, il y a déjà vingt ans, Mathias Langhoff avait recréé cette tragédie dans une traduction de Claude Duneton qui s’était efforcé de retrouver toute la verdeur de la langue de Webster, notamment de  nombreuses allusions sexuelles,  le plus souvent avec bonheur.
Ce qu’a choisi aussi de faire Anne-Laure Liégeois et l’on retrouve des phrases étonnantes comme: « Le ciel ou l’enfer, il n’existe pas de troisième lieu »; « la toile de notre vie est de fil mélangé, bon et mauvais ensemble, ou bien encore: « Les gloires d’ici bas, comme des vers luisants jettent des feux brillants mais à les regarder de plus près, ils n’ont ni chaleur ni clarté ».
Le dispositif scénique de Langhoff était comme d’habitude, assez complexe mais d’une beauté baroque, mêlant temps présent ( un écran de télévision) et temps passé avec une galerie,  lieu de production d’une musique rock en direct et, à la fin de la pièce de nombreux cercueils  et  des cierges de cire qui rythmaient l’espace. Avec un mélange tout à fait sophistiqué de premier et de second degré.
C’est un peu aussi le choix d’Anne-Laure Liégeois : la scénographie est d’une simplicité et d’une rigueur exemplaire:  une salle aux murs gris avec au fond, une petite scène, encadrée d’une série d’ampoules blanches. Pas de portes apparentes qui semblent se fondre dans les parois et qui s’ouvrent dans un silence total pour laisser entrer et et sortir les personnages comme des ombres qui s’enfuient rapidement de ce lieu clos insupportable. 

Assez bien vu ! Ces entrées et sorties adroitement mises en scène par Anne-Laure Liégeois, contribuent à donner un  sentiment de malaise et de cruauté qui parcourt toute la pièce, où ne règne aucun espoir et où domine en permanence la vengeance et la mort. Avec des éclairages exceptionnels de beauté, souvent en lumière  rasante latérale: Anne-Laure Liégeois sait incontestablement réaliser des tableaux plastiques d’une vérité et d’une poésie, à la fois belles et justes.
Au-dessus de la petite scène, est accrochée une pendule de gare, (aimablement prêtée par la gare de Montluçon dit le programme) et bloquée à 6 heures vingt sept ??? . Mais l’aiguille rouge des secondes continue à tourner inlassablement pendant tout le spectacle. Pour une fois que quelque chose fonctionne sans à-coup à la SNCF, autant profiter de cette vision surréaliste! La mise en scène reste d’une grande sobriété et Anne-laure Liégeois défend assez bien  ce droit à l’amour, revendication déjà féministe de cette duchesse qui s’oppose à la cupidité de ses frères.
Le spectacle n’a sans doute ni l’ampleur ni les inventions de celui de Langhoff mais a une belle tenue, du moins dans les quatre premiers actes, grâce à la beauté des images et à la poésie intense du texte que l’on a quand même rendu parfois un peu racoleur.
Mais dans cette noirceur baroque,  ce qui est  très décevant en revanche, c’est le manque de rythme, le côté mou de la mise en scène  et la faiblesse de la direction d’acteurs!  La diction est souvent approximative chez la plupart des comédiens qui semblent manquer singulièrement de souffle (le spectacle dure quand même trois heures!) et dont nombre de spectateurs se plaignaient à l’entracte.
Et ce n’est pas dû à l’acoustique de la belle salle du Théâtre 71 mais devrait encore pouvoir être rectifié, puisqu’il y a déjà un net progrès dans la seconde partie où a lieu cette série de meurtres,  avec ce théâtre dans le théâtre une fois de plus où l’on nous montre les poches de faux sang suspendues au cou….
Seconde partie dont le texte est moins convaincant, en grande partie à cause d’une conclusion qui fait long feu. Il aurait sans aucun doute fallu pratiquer des coupes sévères, ce qui n’aurait pas nui au scénario et  donné un rythme indispensable qui continue à faire cruellement défaut. Alors à voir? C’est selon; oui, si vous avez envie de découvrir un texte étonnant de vie et d’une rare fraîcheur quatre siècles après, même si la pièce est inégale et dont la vision plastique a été privilégiée par Anne-Laure Liégeois, aux dépens d’une réelle dramaturgie et d’une direction d’acteurs qui  reste un peu approximative.

Philippe du Vignal

Théâtre 71 de Malakoff jusqu’au 5 février puis en tournée.

 

Une banale histoire

Une banale histoire d’après la nouvelle de Tchekhov, libre adaptation  et mise en scène de Marc Dugain.

jeanpierredarroussinalicecareletmichelbompoildiaporama.jpg Cette nouvelle fait partie des quelques centaines que le jeune Tchekhov écrira après ses études de médecine à partir de 1884… Cette » banale histoire » est celle de Nikolaï Stepanovitch, un vieux professeur à l’Université de médecine qui a perdu  toutes ses illusions. Malade, pas bien riche, il a juste de quoi vivre et il ne supporte plus sa femme qu’il a autrefois tant aimée, ni sa fille et son amoureux qui a tendance à s’incruster chez lui.
 Seuls comptent encore , à peu près intacts, sa passion d’enseigner et ses étudiants, même s’il se se sent las et s’il voit bien que  l’usure du temps finit par tout emporter, les croyances profondes et la foi dans les êtres. Il y a aussi Katia , une jeune femme qu’il a recueillie à la mort de son père qui était un vieil ami à lui ; il l’a vu grandir heureuse et elle voudrait qu’il se soigne et  lui propose de l’aider financièrement. Elle a la franchise d’une véritable amie qui l’aime, jusqu’à lui faire sentir qu’il n’y a de solution à son malheur que venant de lui, et de lui seul.
Elle a même aménagé une chambre chez elle pour qu’il puisse y travailler en paix, puisqu’il se sent exclu de sa maison. Mais il reste désespérément seul,  en proie à la nostalgie, à la tristesse et  à l’absence de tout projet, persuadé qu’il va bientôt mourir… Ils forment, malgré la différence d’âge, comme une sorte de couple très uni, qui peut tout se dire et tout s’avouer.

Nikolaï va accepter, à la demande son épouse, de faire un long voyage  jusqu’en Ukraine,à Kharkov,  prendre des renseignements sur leur futur gendre mais le  valet de l’ hôtel qu’il a chargé d’enquêter, lui annonce que le jeune homme ne possède aucune famille dans la la ville… Peu après, nouveau coup dur: un télégramme de sa femme  lui apprend que les deux jeunes gens se sont mariés. Résigné,  seul, prêt à mourir,  il s’allonge sur le petit lit de sa chambre d’hôtel,  quand Katia surgit brusquement…
 La nouvelle de Tchekhov est écrite comme en écho à celle de Tolstoï: La mort d’Ivanovitch qui, on le sait, l’ a beaucoup influencé, et qui traite d’un thème similaire. Marc Dugain, l’auteur du roman La Chambre des Officiers et le cinéaste du film très moyen sur Staline qu’est Une exécution ordinaire sorti l’an passé, a entrepris d’adapter cette nouvelle  mais aussi de la mettre en scène.
Avec dans le rôle du vieux médecin , ce formidable acteur de théâtre  qu’est Jean-Pierre Darroussin qu’on a souvent vu dans la Compagnie du Chapeau rouge de Pierre Pradinas mais aussi dans de très nombreux films dont Un air  de famille de Cédric Klapisch. Il est là discret, sobre, efficace, très à l’aise dans ce rôle de vieux prof qui a dû tout de suite le séduire; il est presque tout le temps en scène, monologuant sur l’art, la vie, l’amour et la science, impeccable de vérité ,et  c’est lui en fait qui porte sur ses épaules tout le spectacle avec une belle humilité …

  Et pour le reste? Pas grand chose à dire! L’adaptation fait la part belle, semble-t-il ,aux  facilités d’écriture et aux mots d’auteur comme dans n’importe quelle pièce de boulevard. Quant à la mise en scène ,la scénographie et la direction d’acteurs, elles  flirtent avec le degré zéro de l’écriture théâtrale ; ni Alice Carel ni Gabrielle Forest ne semblent vraiment à l’aise dans cette Russie de pacotille et  on ne croit pas un instant à leurs personnages bien conventionnels…
Reste le texte écrit avec cette merveilleuse sobriété, cette concision et cette simplicité qui font tout le charme de la langue de Tchekov-même librement adapté! – et la magnifique présence de Jean-Pierre Darroussin.
Mais cela ne suffit évidemment pas et le spectacle se traîne.
Alors à voir? Pas vraiment… Mieux vaut relire Tchekhov chez soi et attendre une meilleure occasion d’ aller voir Darroussin au théâtre!

Philippe du Vignal

 

Théâtre de l’Atelier.

Benito Cereno ou Blanc & Noir, la racine du mal

Benito Cereno ou Blanc & Noir, la racine du mal, d’après une nouvelle d’Herman Melville, mise en scène et adaptation de Jaime Lorca

  benitocereno.jpgDans son cabinet, un dentiste triture avec ferveur une maquette de bateau avec ses instruments. Alors qu’il a expressément demandé à sa secrétaire de n’être dérangé sous aucun prétexte, un couple surgit en urgence : leur fils de 10 ans, Vincent (une marionnette), s’est cassé une dent. Il faut la réparer en hâte. Mais quand l’enfant ouvre la bouche en grand (un zoom est fait sur le dentier, dont l’image est projetée sur un paravent), c’est quelque chose d’extraordinaire qu’y voit le dentiste. Telle une bouche d’ombre, le gosier de la marionnette va nous révéler une incroyable fable.
Le passé vient alors pénétrer le présent : nous assistons au récit de la mutinerie d’esclaves sénégalais contre le capitaine Benito Cereno, qui les transportait avec une cargaison de thé de Buenos Aires à Lima. Mais au niveau du Cap Horn, les esclaves se sont révoltés et ont pris la direction du navire.
Une bonne partie de l’équipage est alors assassinée. Or l’eau vient à manquer. Par chance, ils croisent un baleinier, celui du capitaine américain Delano. Les révoltés forcent Cereno à raconter à Delano un mensonge afin qu’il leur viennent en secours. Ce stratagème réussira-t-il ou non ?
Nous vous laissons le soin de le découvrir par vous-même, en compagnie d’enfants car c’est à eux avant tout que ce spectacle est destiné. Si le résumé vous semble un peu macabre, sachez que la mise en scène ne l’est en rien. Certes les jeux de lumière qui composent de beaux clairs-obscurs, et la petite musique haletante créent une ambiance énigmatique et tiennent en haleine.
Mais rien d’effrayant toutefois. Les marionnettes de Jaime Lorca : celle de Vincent, du petit esclave noir et de Cereno, sont manipulées avec soin, et la grâce et la magie tournent à plein régime. Le merveilleux est un tour de passe-passe : le dentiste est alternativement le capitaine Delano selon qu’il revêt sa blouse ou son tricorne, et le paravent du cabinet se transforme en voile de navire, quand ce ne sont pas les tiroirs du bureau qui figurent les cales de l’embarcation… Conçu comme un divertissement baroque, ce spectacle joue la carte du renversement, et pas seulement en faisant se télescoper la fiction et la réalité. Ici, un enfant nègre sait lire, parle plusieurs langues et se prétend libre ; les esclaves prennent le dessus et manipulent les Blancs à leur fin.
Allons plus loin : quand les esclaves sont libérés, c’est le petit Vincent qui est délivré de son mal. Au final, un astucieux voyage dans le temps sur les concepts d’identité, de liberté et sur le destin.

 

Barbara Petit

À noter que Benito Cereno ou Blanc & Noir, la racine du mal, est le spectacle d’ouverture de la 8e édition d’Odyssées en Yvelines, une biennale de création théâtrale (soutenue par le conseil général des Yvelines) qui se déroulera du 25 janvier au 2 avril. L’objectif, outre celui d’encourager la création artistique, est d’offrir aux Yvelinois un accès à la culture quel que soit leur lieu de résidence, ainsi qu’une ouverture sur le monde. De ce fait, sept créations permettront de s’immerger dans les cultures de neuf pays différents, représentant au total les cinq continents.
Le festival a convoqué en effet acteurs, auteurs et metteurs en scène d’Algérie, du Burkina Faso, du Chili, de Cuba, du Japon, de Palestine, du Togo ou de Suède. D’où des spectacles dans des bibliothèques, gymnases, centre d’art, collèges, IUFM ou médiathèque… de Mantes-la-Jolie à Buc, de Montesson aux Mureaux… Pour les dates, les lieux et le calendrier complet d’Odyssées en Yvelines, voir www.theatre-sartrouville.com

Les lundi 24 et mardi 25 janvier à 10h00 et 14h30. Puis en tournée du 2 février au 22 avril dans les salles partenaires de la biennale Odyssées en Yvelines. Calendrier complet d’Odyssées en Yvelines : www.theatre-sartrouville.com

HIVER

HIVER de ZINNIE HARRIS, mise en scène: Guy- Pierre Couleau.

Un pays entre deux guerres, quelque part dans le monde.

La guerre, ce qu’elle provoque chez ceux qui la font, ce qu’elle fait subir à ceux qui ne la font pas mais qu’elle affame et jette aussi dans la barbarie. La guerre comme décor de l’histoire que nous conte Zinnie Harris. Au coeur de l’histoire, un enfant muet que l’on troque, séduit, brutalise, sauve. Et enveloppant le tout le mensonge qui travestit la réalité des hommes et des évènements.

Dans un village assiégé, libéré au moment où commence la pièce, une femme, Maud, qui ne sait pas encore que la guerre est finie, échange une carcasse de cheval contre un enfant » qui remplacera celui qu’elle a perdu », dit-elle au grand-père de Sirin, l’enfant affamé. Le grand-père lui laisse l’enfant pour le sauver.

Un homme apparaît, un soldat que tout le monde croyait mort , surtout Maud sa femme, qui avait reçu pour preuve de sa mort, sa montre et l’alliance de sa mère qu’il portait au cou. L’homme est infecté, comme tous ses camarades, par un parasite qui le rend presque aveugle. Il reconnaît cependant Maud comme sa femme et l’enfant qu’elle a rebaptisé Isaac comme son fils.

Mais Maud n’est pas Maud, elle est Magda soeur jumelle de celle qui était la femme véritable de l’homme, morte pendant cette guerre avec son enfant, Isaac. L’homme découvre la vérité. Il veut cependant éduquer l’enfant, mais bientôt la violence le submerge et il brutalise l’enfant. Maud/Magda ne supporte pas cette violence, elle chasse l’homme après l’avoir rendu aveugle définitivement, elle choisit l’enfant, la paix, sa maison.

Cette pièce énigmatique est écrite dans une langue économe, brutale, qui convient à cette histoire de guerre et de mensonge, de trouble des identités. On pense au très beau roman de Sofi Oksanen « Purge ». On pense surtout à ce que doit Zinnie Harris à son grand aîné Edward Bond, qui n’imagine pas l’écrivain autrement qu’engagé contre tout ce qui oppresse l’homme. Mais cette pièce nous emmène aussi du côté de David Harrower dont Claude Régy avait monté magistralement » Des couteaux dans les poules », où une femme découvrait le pouvoir des mots. »Hiver » fait partie d’une trilogie écrite pour la Royal Shakespeare Company .
Guy-Pierre Couleau a choisi le versant optimiste de cette pièce barbare, il a mis au centre de la pièce l’enfant malmené mais finalement sauvé. Anne Le Guernec est Maud, elle donne à son personnage une douceur têtue qui éclate parfois et devient révolte contre la dictature de la violence. Son corps raconte la vie plus forte que la mort. Philippe Cousin, le soldat, l’ homme perdu incapable de résister à la violence est tout en force blessée.. Philippe Mercier , grand-père déroutant, tantôt attaché à son petit fils, tantôt prêt à l’oublier, lui donne une cocasserie inattendue . Et l’enfant, David Boissel, est vraiment le coeur de la pièce par sa présence silencieuse et toujours juste.
La pièce garde cependant ses mystères comme ses personnages dont la guerre a brouillé les identités .

Françoise du Chaxel.

 Théâtre de La Tempête, jusqu’au 13 Février.

Image de prévisualisation YouTube

 

 

 

 

Périphérique, arts mêlés 7e édition

Périphérique, arts mêlés 7e édition

Du 18 janvier au 4 février, la 7e édition de Périphérique Arts Mêlés invite à découvrir des formes qui réunissent théâtre et danse, et relient entre elles plusieurs scènes départementales. Cette manifestation, soutenue par le conseil général du Val d’Oise, met l’Italie à l’honneur pour cette édition 2011.

Ce 22 janvier, la scène nationale de Cergy-Pontoise proposait trois spectacles au cours d’une même soirée intitulée « Périphérique futé ! ». Premier moment : Cursus, par la compagnie RC2. Comme le sous-titre l’indique, il s’agit d’une conférence dansée sur la vie du danseur interprète. Durant une heure, Raphaël Cottin et Corinne Lopez s’appliquent à nous détailler la journée type du danseur (au chômage, en création ou en représentation). Drôle et plein d’humour, ce spectacle aussi pédagogique que décalé,  fait la part belle à l’autodérision et au second degré. Cette conférence est aussi participative, puisqu’elle fait  intervenir le public au début et durant son cours, soit par de petits exercices de gymnastique (très légers, rassurez-vous !) soit par un petit questionnaire à remplir …
Nous voici changé en jury ! Pour rire, naturellement. Les deux acolytes n’hésitent pas par ailleurs à nous raconter force anecdotes et souvenirs. Cette petite représentation est au final touchante, fine et bien ficelée. En guise de clôture, Corinne Lopez, lors d’un solo mémorable (dans l’esprit d’un examen de fin d’année) , nous captive par sa présence envoûtante et son physique des plus subjuguants.

 

Image de prévisualisation YouTube

Deuxième temps, Not about everything. Le danseur et chorégraphe américain Daniel Linehan propose une performance des plus insolites : pendant 35 minutes, il va tourner sur lui-même, en modulant le rythme, en changeant l’allure et les mouvements (il va se déshabiller, boire, et même signer un chèque, sans jamais cesser de tourner), et en récitant un texte appris par cœur, sorte de manifeste pour sa proposition.
Proposition  pour un danseur qui évolue au centre d’un double cercle, le premier suggéré au sol par des livres disposés en rond, le second figuré par les spectateurs assis sur des chaises disposées en cercle. C’est une prestation très impressionnante, qui évoque la pratique des derviches-tourneurs. On ne peut s’empêcher de se demander dans quelle espèce de transe est Daniel Linehan au cours et à la fin de l’exercice. D’autant qu’après avoir terminé, il semble à peine essoufflé, brandissant un sourire des plus charmeurs…

Troisième et dernière représentation de cette soirée, un spectacle en deux temps de la chorégraphe italienne Ambra Senatore, l’artiste « coup de cœur » de cette édition de Périphérique, Altro piccolo progretto domestico et Trio, étude d’une création 2011. Une proposition hybride qui mêle mime, théâtre, arts plastiques et clown. Nous vous laissons le soin de découvrir à Gonesse l’humour et le détournement de situations dont sont capables ces interprètes.  Avis aux adeptes des coups de théâtre et des effets de surprise !

Barbara Petit

Périphérique futé ! le 22 janvier 2011 à l’Apostrophe, scène nationale de Cergy-Pontoise. D’autres spectacles à découvrir du 18 janvier au 4 février à l’Apostrophe, (wwww.lapostrophe.net), au théâtre Paul-Éluard de Bezons (www.tpebezons.fr), et à Gonesse (www.ville-gonesse.fr).

 

Conversations avec ma mère

Conversations avec ma mère, d’après le film Conversaciones con Mama de Santiago Carlos Oves, adaptation théâtrale de Jordi Galeran, traduction de Dyssia Laubatière, espace et mise  en scène de Didier Bezace, Laurent Caillon et Dyssia Laubatière.

638445sanstitre.jpg  Cela se passe en Argentine en 2002; qui  ne peut absolument  faire face à sa dette extérieure; et  la situation devient   d’autant plus explosive, que le F.M.I. ne veut pas accorder une nouvelle aide et que la Banque Mondiale refuse aussi d’aider le pays considéré comme peu fiable. Cela ira des émeutes urbaines aux pillages, jusqu’à l’attaque de la mairie de Cordoba… Bref, l’Argentine connaît une explosion sociale sans précédent.
 C’est dans  ce contexte qui va bouleverser les rapports humains que se situent ces Conversations avec ma mère. Mama, elle,  a 82 ans mais a le verbe haut et la répartie facile; son fils Jaime, qui a toujours été son petit garçon… en a déjà quand même 55 ! Elle est veuve depuis un bout de temps,  et vit seule dans un appartement qui appartient à Jaime et à son épouse. Lui, avait  sans doute une bonne situation comme on dit, et possède une grande maison où il habite avec ses enfants , sa femme et et sa belle-mère que Mama n’a jamais supportée.
  Quant à ses petits-enfants, elle voit bien qu’elle ne fait pas partie de leur univers et ils ne viennent pas souvent la voir… Son fils, lui,  passe, mais ne reste jamais déjeuner. Situation rien de plus banale, oui, mais voilà dans cette Argentine exsangue, tout a basculé:  Jaime a été licencié et voudrait revendre l’appartement pour faire face aux dépenses de la vie quotidienne  et propose à Mama, pour résoudre la question, de venir habiter avec eux. Refus calme mais déterminé de la vieille dame qui ne voit pas pourquoi elle irait habiter ailleurs. D’autant plus qu’elle finira par avouer à Jaime qu’elle s’est trouvé un amoureux en la personne de Gregorio, d’une bonne dizaine d’années plus jeune qu’elle! Elle l’a recueilli alors qu’il vivait dans la rue… La situation se complique puisque Jaime avouera aussi à sa mère qu’il ne s’entend plus du tout avec son épouse…
 Il y a comme cela six séquences/ conversations, à la fois émouvantes et souvent drôles, où cette mère et son fils se parlent comme s’ils ne s’étaient pas parlés depuis bien longtemps. Mama n’a pas la langue dans sa poche, rudoie parfois Jaime qui doit encore avoir quinze ans pour elle, jusqu’à lui faire reconnaître qu’il ne fait plus jamais l’amour avec sa femme! Et, dans la dernière  et très belle séquence, Mama qui a fini par décéder, se prépare pour son enterrement et   continue à parler calmement des détails de la cérémonie avec Jaime. Et Gregorio,  finalement, restera dans l’appartement…
 Il y a juste sur le plateau, une grande table et deux chaises et c’est mis en scène avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité par Didier Bezace qui incarne Jaime. Et c’est la grande Isabelle Sadoyan que l’on beaucoup vue chez Planchon avec cet autre grand acteur qu’était son mari Jean Bouise, qui joue Mama ; c’est un spectacle  extrêmement raffiné dans la moindre expression des sentiments, dans le moindre geste, et d’une extrême pudeur : pas de cris, pas de grandes tirades mais des phrases toutes simples qui parlent à  chacun.
  Didier Bezace et Isabelle Sadoyan sont vraiment exceptionnels  de vérité dans ce spectacle d’une heure et quart, tout à fait passionnant et qui appartient vraiment  à un théâtre populaire. Ce jeudi soir était celui de la centième représentation de Conversations avec ma mère, fait rarissime dans le théâtre public et peu fréquent dans le théâtre dit privé, après une longue tournée qui va reprendre après Aubervilliers.  » Jouer longtemps, dit Didier Bezace, ce que le public aime, c’est assurément un enjeu de la démocratisation culturelle et un gage de respect des moyens publics mis à notre disposition pour la création ».
Cette centième  fut ensuite simplement et amicalement fêtée… N’oublions jamais que sans ces pionniers de la décentralisation  comme Jack Ralite, ancien maire  et Gabriel Garran, ancien directeur du Théâtre qui étaient là, le Théâtre de la Commune n’aurait peut-être jamais existé. Cela fait du bien de voir aujourd’hui la grande salle bourrée rire à un Labiche mis en scène par Jean-Louis Benoist, et, en même temps, dans la petite salle ces merveilleuses Conversations avec ma mère. Ces acquis,  qui furent souvent arrachés et conquis de haute lutte, devront, à tout prix, être préservés.

Philippe du Vignal

Théâtre de la Commune d’ Aubervilliers

La dernière leçon

La dernière leçon, de Noëlle Châtelet, adaptation et mise en scène Gérald Chatelain.


    dernierelecon310copie.jpg« Quand l’inéluctable vague et silencieux se change en inéluctable sonnant et tictaquant … »
Le texte magnifique de Noëlle Châtelet est d’abord un roman-essai-témoignage, qui est plein d’émotion et de dignité, sur un sujet absolument terrible mais cher  au cœur de l’auteur.
Il s’agit du compte à rebours d’un suicide annoncé. La mère de Noëlle Châtelet, une femme pleine de charme, forte tête, ancienne sage-femme, annonce à ses enfants qu’elle va mettre fin à ses jours à une  date précise, avant d’être atteinte par la faiblesse ou la maladie.  A quatre-vingt-douze ans, elle estime que « ça suffit comme ça ».
Elle va donc faire ses adieux, mettre en ordre, ranger, et disparaître. C’est décidé. Le texte, écrit après coup,  est  la chronique de ces derniers mois. Comment sa fille va devoir accepter la décision de sa mère, -à son corps  et à son cœur défendant-puis l’accompagner. ..Il y  a alors une sorte de précipité de sentiments, d’émotions, de réminiscences.   Effectivement,  c’est une leçon contre-nature peut-être, en tout cas inhabituelle,  puisque  la mère enseigne, non pas à vivre, mais à mourir, comme le ferait un sage de l’Antiquité avant de boire la ciguë.
L’œuvre de Noëlle Châtelet (essais, romans) est importante, et reconnue internationalement. Souvent, elle magnifie des personnages féminins. Plusieurs de ses romans, comme, entre autres, La Femme coquelicot, ont fait l’objet d’adaptations au théâtre et à la télévision. La dernière leçon, éditée aux Editions du  Seuil, a reçu le prix Renaudot des lycéens 2004.   L’adaptation de Gérald Chatelain est forte,  et vraiment à la hauteur.  Malgré cette tragédie, la dramaturgie intègre  heureusement de splendides visions : ombres et marionnettes créées par Jean-Pierre Lescot, avec la collaboration de Stéphane Couturier et  de Jean Massard. Maison brisée, jardin d’enfance, pluie: de véritables petits poèmes en images animées, tout à fait merveilleuses, ponctuent le récit.
Le personnage de la mère, en version marionnette, s’enrichit de multiples visages : un envol inattendu et fantasque à la manière de Chagall: les pirouettes sont particulièrement drôles. Elle est angoissante, rêveuse,  autoritaire, tendre, souriante, 
courageuse, mais aussi triviale,   quand il s’agit de choisir la tenue du grand soir.
Les souvenirs d’enfance se glissent avec la fluidité du rêve entre ces rendez-vous pour préparer ce « suprême » rendez-vous. Musique , son,  lumière:  tout est impeccable. Le travail de mise en scène est tenu avec force et élégance. Il fallait une comédienne 
d’une authenticité et d’une sincérité absolue pour accomplir ce parcours intense, en solo, durant une heure vingt.  Catherine Rétoré , dans ce rôle difficile,est absolument parfaite. On reste suspendu à sa parole, à son souffle, elle a une tenue d’une grande noblesse. Telle une danseuse, elle habite le plateau  incliné, espace spirituel, dont les trappes permettent apparitions et disparitions.
Cet « accompagnement » sur le chemin de la mort annoncée se dessine dans un bel élan, et une tendre compréhension, pour finalement laisser flotter un apaisement, et un timide apprivoisement des plus grandes angoisses.   Sur un thème fort, une grande intelligence et subtilité d’interprétation, un style net. Le spectacle va à l’essentiel et on ne saurait trop le recommander.

Evelyne Loew

Spectacle vu à la création au Théâtre de l’Apostrophe, Scène Nationale de Cergy-Pontoise et du Val-d’Oise.
Puis au Théâtre des Sources de Fontenay-aux-Roses les 1er et 2 février; au Théâtre Victor Hugo de Bagneux le 4 février, à la  Salle Jacques Brel à Gonesse le 11 février,; puis, en mars à Noisy-le-sec, Guyancourt, Auxerre, Nogent-sur-Marne, Fontenay-sous-Bois, Les Ulis. Et enfin à  Paris, au Théâtre Artistic Athévains, du 7 au 31 mai.

UN DE LA CANEBIÈRE

UN DE LA CANEBIÈRE ,opérette marseillaise de Vincent Scotto, Henri Alibert et René Sarvil, adaptation et mise en scène de  Frédéric Muhl Valentin, adaptation musicale de  Mathieu Becquerelle et Stéphane Bouba Lopez.

  Les Carboni, compagnie marseillaise itinérante, avaient remporté un prix de l’ADAMI au Festival off d’Avignon en 2008 et 2010. Ils viennent de reprendre cette opérette populaire qui a connu un grand succès depuis 1935, pour une série au Théâtre 14, avant de partir en tournée avec les Tréteaux de France jusqu’en juin prochain.
L’argument de la pièce peut sembler quelque peu désuet , plus de 80 ans après sa création, il est en fait étrangement contemporain, car il y est question d’une grosse escroquerie financière. Trois jeunes pêcheurs de Marseille, Toinet, Girelle et Pénible, se disent propriétaires d’une usine de sardines pour séduire leurs belles sensibles à la richesse.
Mais l’une d’elles, Margot, jalouse de Girelle qui l’a repoussée pour une autre, leur tend un piège: elle persuade le vieux et riche Bienaimé des Acoules de leur passer commande de plusieurs milliers de boîtes de sardines, qu’ils sont incapables de livrer. L’un des trois compères va se déguiser en Tante Clarisse qui doit régler les problèmes financiers, on décide de la faire disparaître mais  là on perd le fil… Les histoires d’amour se termineront bien dans un cabanon marseillais.
Interprétée avec enthousiasme par douze comédiens très investis, bons chanteurs au demeurant, cette opérette reste obscure et d’un autre âge. On a l’impression d’avoir perdu la clef de lecture du texte.

Edith Rappoport

Théâtre 14, jusqu’au 5 mars T: 01 45 45 48 77,  et en tournée dans toute la France jusqu’en juin.

FAIRE DANSER LES ALLIGATORS

FAIRE DANSER LES ALLIGATORS… Texte d’ Émile Brami à partir de la correspondance de Louis-Ferdinand Céline, mise en scène d’Ivan Morane.

Denis Lavant nous prend par la main pour nous faire pénétrer dans l’univers de cet écrivain solitaire et atrabilaire,  antisémite, mais d’une lucidité et d’un humour effrayants. Cinquante ans après sa mort, nous pénétrons dans la chambre où il soliloque et vocifère contre la terre entière avec un humour ravageur.
Denis Lavant se livre à un magnifique numéro d’acteur , avec une belle apothéose , quand il met  en pièces les gloires littéraires de ses contemporains où nul ne trouve grâce à ses yeux. Il prend les livres dans une caisse, les jette autour de lui, en énumérant avec lucidité les faiblesses, jetant les célébrités aux orties, c’est Jean-Paul Sartre qui porte à ses yeux la palme de la déchéance !

Edith Rappoport

Spectacle vu au Théâtre de Montbéliard

12345

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...