LA DOUCE LÉNA

LA DOUCE LÉNA  Le regard du loup, de Catherine Benhamou d’après  Gertrud Stein, mise en scène de  Ghislaine Beaudout

Ghislaine Beaudout avait monté en 1997 La journée d’une rêveuse de Copi, joli spectacle pour comédiens, pantins, marionnettes à tringles et à fils, présenté, entre autres, aux Scènes ouvertes à l’insolite du Théâtre de la marionnette à Paris. Elle a fait son chemin avec d’autres spectacles d’objets , des lectures mises en espace.
La douce Lena
a été mise en chantier, à partir d’ateliers oralité/ écriture avec des groupes de femmes en alphabétisation, au croisement du théâtre et de la danse. Avec trois représentations  avant cette reprise.   Léna, jeune orpheline silencieuse a été placée dans une famille qui ne la considère pas autrement qu’une proie facile pour leur fils, qui doit l’épouser. A la veille du mariage, Lena s’enfuit, lui reviendra finalement pour lui faire des enfants, qu’elle met au monde, sans être capable de s’en occuper. Les tableaux se succèdent de façon linéaire, Léna se laisse manipuler sans jamais protester, et  semble dépourvue de vie.  Au Studio Berthelot, la distance n’était pas propice à la concentration sur ce spectacle conçu il y a six mois, dans la très petite salle du Hublot de Colombes.

Edith Rappoport

Spectacle joué au Théâtre Berthelot de Montreuil

 


Archive pour janvier, 2011

Harper Regan

Harper Regan de Simon Stephens,traduction de Dominique Hollier, mise en scène de Lukas Hemleb.

      harper.jpgSimon Stephens, quarante ans cette année, est un dramaturge anglais qui a déjà écrit une quinzaine de pièces parmi lesquelles One Minute qui  est sans doute la plus connue. Mais l’an passé, Laurent Gutman avait monté au Théâtre de la Colline Pornographie dont avait rendu compte Barbara Petit ( voir Le Théâtre du Blog 24 novembre 2010) qui était une sorte de plongée dans les actes terroristes qui avaient endeuillé Londres.
Ici, le propos est différent, puisqu’il s’agit  d’un moment de la vie d’Harper Regan.
C’est une femme de quarante ans, mariée, qui a une fille de seize ans en plein crise d’adolescence, et dont le quotidien va soudain basculer dans l’étrange réalité  d’un mone qui n’est pas du tout le sien. D’abord , son mari a été accusé de pédophilie- à tort ou a raison, on ne le saura jamais -parce qu’il a fait des photos  d’enfants dans un square , ce qui entraînera son licenciement. Elle  a donc la responsabilité d’entretenir seule sa famille Et son patron à elle, dans la première scène de la pièce, lui fait comprendre que ce ne serait pas du tout, mais pas du  tout dans l’axe , de prendre quelques jours de congé, vu la somme de travail à abattre. Même si son père est très gravement malade et,  semble-t-il, risque de mourir d’un jour à l’autre.
Harper va quand même partir mais ne reverra  jamais son père vivant. Son père qu’elle adorait mais que sa mère divorcée de lui depuis longtemps,  mais dont on comprend qu’il a été pour quelque chose dans le licenciement du  mari de  Harper,  quand elle reverra sa mère qu’elle n’avait pas rencontrée depuis deux ans. Harper est depuis le début dans une sorte d’errance, comme si elle avait absolument besoin de larguer les amarres et de quitter un temps, un patron dont les sentiments semblent assez ambigüs à son égard,  un mari qui ne fait rien,  et sa fille qu’elle ne comprend plus.
Elle rencontre ainsi un jeune collégien dans la rue pour lequel elle semble éprouver une sympathie réelle, puis un soi-disant journaliste, assez glauque  qui la drague dans  un bar minable; il lui offre sa veste de cuir noir mais, pour tout remerciement, elle lui casse un verre rempli d’alcool sur le crâne, dans une sorte de pulsion libératrice qui la pousse à affronter l’inconnu, elle, la brave employée et mère de famille. Puis ,elle rencontre à l’hôpital, la cadre de santé, comme on dit maintenant, qui lui parle des derniers moments de son père dans une salle d’attente un peu glauque comme seuls les hôpitaux en possèdent avec des rangées de sièges et un éclairage blafard. Et, pour ce faire, Simon Stephens ne s’attaque nullement à une peinture de la quotidienneté mais installe avec beaucoup d’intelligence scénique un univers où les mot sont d’une rare banalité mais où les silences, un peu comme chez Pinter , disent à peu près tout des personnages qu’il met en scène avec des dialogues parfois assez brefs mais chargé sd’une force émotionnelle incontestable. Et il y a une scène magnifique où Harper se retrouve dans la chambre d’un hôtel luxueux avec un homme beaucoup plus âgé qu’elle, qu’elle a trouvé par le bais d’Internet. Ils se parlent longuement, avec une tendresse évidente, se  découvrent avec beaucoup de pudeur, avant  de  se déshabiller pour faire l’amour.
Puis Harper regagnera la maison familiale où elle retrouve sa fille et son mari à qui elle racontera sa brève rencontre avec cet homme, comme s’il s’agissait de quelque chose de tout à fait anodin. Le petit déjeuner est servi sur la terrasse de la maison; l’adolescente arrive à moitié endormie, et se prépare son bol de  céréales sans dire un mot à ses parents. Ce n’est pas franchement drôle , même si la situation peut paraître comique; ce n’est pas non plus sordide ou glauque.
Harper  a simplement besoin de raconter ce voyage  de quelques jours au bout d’elle-même qui a sûrement duré  beaucoup plus longtemps dans sa conscience de femme déchirée par la mort  de son père, et ce concentré de vie . Le temps chez Stephens n’est pas le temps normal mais celui de séquences exceptionnelles qui marquent une vie à jamais.  Csaba Antal a conçu une tournette avec, à chaque nouvelle séquence, un élément de décor différent; c’est assez bien vu mais , comme les ses séquences sont quand même  nombreuses, et qu’à chaque fois, on installe un noir pour préparer le nouveau décor, il y a comme une rupture de rythme, ce qui est  dommageable. Malgré cela, Lucas Hemleb a su réunir et diriger de main de maître  une très solide  distribution : Caroline Chaniolleau, Alice et Louis-Do de Lencquesaing, Pierre Moure mais surtout Gérard Desarthe, absolument exceptionnel dans des petits rôles et surtout Marina Foïs qui reste sur le plateau pendant deux heures,  et qui possède une présence de tout premier ordre. Elle parait beaucoup plus jeune que son personnage mais pourtant elle elle en fait aujourd’hui l’âge exact de son personnage.. . Oui, vraiment exceptionnelle de charme et d’intelligence; elle irradie quelque chose à peine entrée en scène. Seul petit bémol: les comédiens ont un peu de mal à se faire entendre dans la grande salle du Rond-Point mais cela devrait s’améliorer.Alors à voir? Oui, absolument.
Philippe du Vignal

Spectacle créé à la Maison de la Culture d’Amiens et au Théâtre du Rond-Point jusqu’au 19 février.

Le Jeu de l’amour et du hasard

Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux , mise en scène Michel Raskine.

 amour.jpgLe hall d’attente des Ateliers Berthier ressemble à celui de la Comédie-Française: ce soir, les spectateurs se saluent avec courtoisie et se souhaitent la bonne année…. L’écrivain Patrick Besson prédit: « Un Marivaux de 2H20 , c’est long ».
La scénographie de Stéphanie Mathieu est un plateau ouvert, faussement classique.Tous les éléments symboliques de Marivaux sont présents, mais pas à leurs places habituelles, ni aux bons moments.
Il y a des toiles de Watteau et Fragonard mais posées dans le fond,  et les rutilants costumes 18ème siècle accrochés sur les cintres ne serviront pas. Un rideau de scène rose -et non rouge -de trois mètres de large se lève après les trois coups de brigadier, comme il y a cinquante ans à la Comédie-Française, et cache une estrade éclairée par un double jeu de rampes lumineuses. Enfin, une dizaine de canapés de style 18 ème, recouverts de housses en plastique, délimitent l’espace de jeu.
Tous ces décalages font toujours (même inconsciemment) plaisir au public…tout heureux de pouvoir les repérer. Chacun des personnages, les serviteurs:  Lisette et Arlequin ou maîtres : Silvia et Dorante cherchent à se leurrer grâce à des déguisements. Michel Raskine qui joue, lui,  le frère de Silvia, met en scène ses comédiens du Théâtre du Point du jour à Lyon,  cinquantenaires, voire plus…. Ce qui donne d’emblée une tonalité différente à la représentation.
Mais rien à dire:la direction d’acteurs est rigoureuse, le jeu toujours juste, et la langue de Marivaux bien dite. Mais… il est bien difficile de croire en la flamme amoureuse de ces personnages, même s’ils vivent peut-être leurs derniers instants de passion. L’âge des comédiens et leurs propos peuvent rappeler la très belle joute oratoire à laquelle se livraient Jeanne Moreau et Sami Frey dans Quartett d’Heiner Muller; mais la cruauté du monde de Marivaux a disparu , et c’est ce qui manque le plus à cette mise en scène.
La représentation du Jeu de l’amour et du hasard dans les tonalités sombres de certaines mises en scène de Marivaux depuis La Dispute montée par Patrice Chéreau est sans doute honnête mais les intermèdes musicaux et un final muet ralentissent inutilement le rythme du spectacle. Les applaudissement furent polis comme c’est l’usage, quand la passion n’est pas vraiment au rendez-vous… Dommage!

Jean Couturier

Aux Ateliers Berthier/ Odéon jusqu’au 6 février

FELA

FELA.

 Mise en scène et chorégraphie de Bill T. Jones.

fela.jpgLa création de FELA à New York en 2009 après une courte période off Broadway, a pris fin le 2 janvier,  alors que la reprise du spectacle était déjà en train de se préparer au National Theatre à Londres.
Pourtant tout a continué comme avant avec la chorégraphie et la mise en scène de Bill T. Jones ; avec le même acteur dans le rôle principal et beaucoup de danseuses et musicien ont poursuivi cette aventure artistique en Angleterre.
Nous avons pu le voir dans un cinéma d’ Ottawa, le 13 janvier lors d’une transmission en direct via satellite vers plusieurs villes du monde.  Le spectacle, un hommage au musicien, compositeur et activiste indépendantiste nigérian Fela Anikulapo-Kuti, mort en 1997, est d’une beauté extraordinaire mais est beaucoup plus que beau et divertissant. Il renouvelle le genre musical en le rapprochant de la danse moderne et de l’opéra populaire – un peu à la manière de Brecht, illuminée par les Orishas du panthéon Yoruba, le Jazz moderne, la musique, Bob Marley, les rythmes traditionnels africains et un récit politique violent et tragique. Fela , c’est tout cela…et bien plus encore.
Tout se passe dans le bas-monde du Shrine, la boîte de nuit de Lagos où Fela, ses danseurs, ses femmes, ses musiciens et ses acolytes se retranchent la nuit pour recréer le monde, crier leur frustration et créer leur musique. Sahr Ngaujah – un Fela d’une énergie et d’un talent inépuisables, à la fois le maître de cérémonies, narrateur  et directeur de sa bande. Avec les danseurs nigérians  et un groupe d’excellents musiciens :percussions, trombones, guitares, saxophones, claviers électroniques, et instruments traditionnels. Cet espace nocturne devient une république indépendante imaginaire où les artistes peuvent se défouler et rêver d’une autre vie.
Dans un premier temps, Fela explique l’évolution de sa musique par ses péripéties à travers le monde pour trouver un son tout à fait particulier. Ses rencontres avec Frank Sinatra, avec la musique afro cubaine, Bob Marley, et plus tard ,avec le jazz américain et le ‘High Life’ africain, illuminent sa quête musicale et nous aident à suivre sa démarche.  Etroitement associée à la chorégraphie de Bill T. Jones qui cherche aussi à créer des pas hybrides entre ballet jazz et  mouvements traditionnels africains.
Résultat époustouflant.  Les séquences sont menées comme des numéros de boîte de nuit où, dans l’ambiance glauque et sordide des nuits de Lagos, les drogues circulent à volonté entre les murs tapissés d’affiches politiques, et de photos d’ancêtres.Les danseurs s’adressent directement au public, captivé par ces fessiers tremblants, ces costumes bariolés, ces visages peints et les coiffes magnifiques.  Le spectacle évoque aussi la lutte de ces jeunes artistes contre le pouvoir colonial, grâce à l’influence du Black Power  aux Etats-Unis.
Ce rapprochement entre la révolte contre la dictature nigériane et l’esprit de cette nouvelle musique éclaire toute l’activité de contestation menée par Fela et les artistes de la boîte Le ‘Shrine’.  L’intégration de séquences filmées tirées des reportages télévisuels met en relief la réalité de la lutte politique alors que les séquences dansées et le recours aux éclairages magiques révèlent l’apparition des Orishas dans leurs habits traditionnels. Les ancêtres sont toujours prêts à intervenir pour appuyer la lutte et la magnifique Mélanie Marshall s’impose qui 
chante l’esprit de la mère de Fela, tuée par les soldats ; sa   formation classique donne à la soirée le ton d’une tragédie politique digne des opéras italiens du XIXe siècle, alors que les réactions violentes des soldats face aux jeunes révoltés nous ramènent vite à l’actualité africaine…
.Fela devient une fresque de l’histoire nigériane, où les corps festifs des danseurs, des chanteurs et des musiciens nous font vivre une réalité  bouleversante.   À quand un spectacle musical sur la quête politique de Ben Bella, ou de Lumumba? Les Français en seraient-ils capables?

Alvina Ruprecht

FELA au National Theatre de Londres jusqu’au 23 janvier. 020 7452 3000  www.nationaltheatre.org.uk

 

Trois folles journées ou la Trilogie de Beaumarchais

Trois folles journées ou la Trilogie de Beaumarchais, d’après Beaumarchais, adaptation de Frédéric Cherboeuf et Sophie Lecarpentier, mise en scène de Sophie Lecarpentier.

spectaclec2982.jpgPourquoi jouer Le Barbier de Séville, Le Mariage de Figaro et La Mère coupable dans une même soirée? Sophie Lecarpentier a eu l’idée de monter une adaptation de cette  épopée en trois épisodes, écrite sur quelque vingt ans ( 1775, 1785, et 1792) où l’on retrouve dans chacune de ces pièces le même et célèbre personnage de Figaro, d’abord dans sa jeunesse à 27 puis à 30 ans et enfin  à 50 ans, c’est à dire un âge pour l’époque beaucoup plus avancé que maintenant. La metteuse en scène s’appuie sur les mots mêmes de l’auteur qui, dans la préface de La Mère coupable, écrivait: « J’approuve l’idée de présenter, en trois séances consécutives, tout le roman de la famille Amalviva, dont les deux première époques ne semblent pas, dans leur gaieté légère, offrir de rapport bien sensible avec la profonde et touchante moralité de la dernière; mais elles ont , dans le plan de l’auteur, une connexion intime ».
Et c’est vrai qu’il y a quelque chose de tentant  à mettre en scène cette saga familiale  où l’on croise des hommes et femmes d’âge différent: jeunes , d’âge mur et à l’entrée de la vieillesse, dans deux comédies d’abord, dont Figaro  est sans doute la plus célèbre du répertoire français, qui convergent comme le dit  Beaumarchais vers cette ouvrage terrible qu’est La Mère Coupable. La dernière de ces pièces  étant la moins connue et rarement jouée,  qui a pour sous-titre L’autre Tartuffe et qui se passe cette fois en France et non plus du côté de Séville. Figaro et Suzanne sont toujours au service d’Almaviva  et de Rosine. Il n’aime guère Léon, le fils de Chérubin qui s’est tué. Par ailleurs, on apprend au cours de cette intrigue compliquée que  Florestine , la pupille du comte serait en réalité sa fille, et qu’elle ne pourra donc pas épouser Léon, le fils de Chérubin. .. Bref,  ce qui formait la trame des intrigues des deux premières pièces devient  d’un coup ici assez noir et  sordide. Seule petite note d’espérance, il se révèlera que Florestine n’est pas en fait la fille d’Almaviva… Mais le climat,  en vingt ans, s’est singulièrement alourdi.
Maintenant que fait-on, quand on veut  mettre en scène cette trilogie dans la même soirée, en quelque trois heures? Aucune autre solution possible: « faire le choix de l’intégrité et non de l’intégralité », comme le dit Sophie Lecarpentier. Plus facile à dire qu’à faire; il faut pratiquer des coupes draconiennes, et  si Le Barbier de Séville garde à peu près- et encore- sa cohérence, les raccourcis opérés dans le texte du Mariage de Figaro ont vite fait de le dénaturer et de lui faire perdre et sa fraîcheur et sa virulence. Et l’aspect politique de la célèbre pièce, avec  ce couple incroyable du maître et du serviteur, en est amoindri.
Reste une intrigue un peu squelettique où les acteurs ont du mal à trouver leur place… et on peut les comprendre…Seul, Frédéric Cherbœuf , qui est quand même le co-responsable de cette adaptation,réussit comme comédien, à tirer son épingle du jeu dans quelques scènes. Quant à La Mère coupable, qui a un côté préchi-précha  nous avouons avoir décroché assez vite. La pièce est peut-être la conclusion de cette trilogie mais, encore une fois, ce n’est pas parce que Beaumarchais l’a pensé qu’il faut le croire! Autrement, comment expliquer que cette trilogie n’ait été jouée qu’une seule fois depuis l’écriture de ces trois pièces?
Non, « cette adaptation n’invente pas un nouveau scénario, dont le sédiment est le souvenir » , comme le croit un peu naïvement Sophie Lecarpentier. Désolé, on n’ a jamais  construit un spectacle avec des sédiments, ou alors cela se saurait…Et là, très franchement, le compte n’y est pas!  Par ailleurs, mieux  vaudrait que Sophie Lecarpentier s’adresse à un( e) véritable scénographe. Ces châssis de bois à lamelles,  ce canapé blanc que l’on croirait sortis d’un  sous-Ikéa et qui veulent faire contemporain  sont d’une laideur proverbiale, encombrent l’espace au lieu de le servir et ne sont pas du tout efficaces. Ce qui n’arrange rien!
Alors à voir? Non, pas vraiment;cette contraction pâlichonne des  trois pièces ,mise en scène et jouée sans beaucoup de rythme n’a vraiment rien de séduisant. On a du mal à trouver des raisons de vous y envoyer…Sophie Lecarpentier s’est plantée: cela arrive, mais le grand Beaumarchais mérite mieux que cela.

 

Théâtre de l’Ouest Parisien. Boulogne-Billancourt jusqu’au 26 janvier , puis au Théâtre des Deux Rives à Rouen du 1 er au 5 février.

 

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Chaillot nomade au musée du Louvre.

Chaillot nomade au musée du Louvre.

iuxznbourg006.jpgVoici une bonne initiative du théâtre National de Chaillot et du Musée du Louvre qui permet au public de découvrir des œuvres du patrimoine à travers le regard de Philippe Jamet, chorégraphe et metteur en scène de de Portraits dansés, proposés actuellement dans ce même théâtre. Sonia Brunel, conférencière et Philippe Jamet guident le public, dans quelques salles du musée pour y découvrir des peintures ou des sculptures . Et un danseur de la troupe y improvise un solo en résonance avec la ou les œuvres présentées dont le choix fait écho au travail du chorégraphe.

Ainsi, dans la salle des sculptures françaises du 18ème siècle, une danseuse guide pas à pas le spectateur afin de lui faire découvrir ce que le corps sculpté ou le corps dansé peut exprimer comme émotion. Dans Les Portraits dansés, Philippe Jamet demande aux personnes qu’il avait interrogées, pour préparer son spectacle, d’exprimer avec leurs corps, différents sentiments essentiels de la vie comme la peur, l’amour, le bonheur ou l’espoir.

Dans d’autres salles vouées à la peinture, deux autres danseurs, nous font découvrir la relation à l’intériorité de chaque personnage représenté, autour de différentes toiles dont le célèbre et énigmatique Pierrot de Watteau (1721).

Tout, comme pour Susan Sontag citée au Louvre: « Le tableau parlait une langue inconnue mais il la parlait clairement »; pour le chorégraphe «  le corps raconte ce que la parole ne peut raconter » et c’est à nous spectateur de le découvrir.

Ainsi, le public est invité à un beau voyage au croisement des différents arts que sont, la sculpture, la peinture et la danse.

Jean Couturier

Chaillot nomade au Musée du Louvre le 21 janvier à 19h30

Portraits dansés jusqu’au 20 janvier au théâtre National de Chaillot à partir de 19h.

Identité

Identité, texte et mise en scène Gérard Watkins

02identitel1000398.jpgJusqu’où serions-nous prêts à aller si les circonstances l’exigeaient ? À quelles trahisons envers nous-mêmes et nos proches pourrions-nous nous livrer ? C’est la question fondamentale sur cette part d’humanité que chacun porte en soi que pose avec talent Gérard Watkins dans sa troublante pièce Identité. (voir Le Théâtre du Blog pour la première version).Une question hautement d’actualité en cette période de crise, où les fins de mois difficiles nécessitent pour beaucoup, ruse autant que courage pour s’en sortir. C’est  ce qui arrive à Marion et André Klein. Un charmant couple moderne qui a des problèmes d’argent. Pour gagner quelques euros, ils acceptent de répondre à un questionnaire des plus ambigus, qui s’apparente d’ailleurs de plus en plus à un test d’identité avec recherche des ancêtres et surtout traçabilité des origines. Un bien lugubre rappel à d’autres atroces recherches qui ont eu lieu par le passé, notamment pour ceux qui, comme Marion et André, avaient un nom à la résonance aussi « juive » que « Klein ». Le couple va donc vivre une expérience des plus fondatrices et des plus étourdissantes. Chacun va apprendre à se connaître lui-même et à découvrir en l’autre une part d’inconnu qu’il ne soupçonnait peut-être pas. L’amour qui lie André et Marion survivra-t-il à cette terrible épreuve ? Nous vous laissons le loisir de le découvrir.
L’auteur et metteur en scène Gérard Watkins a choisi un décor dont la blancheur immaculée renvoie d’emblée à cette question de la « transparence », corollaire à celle du test et de l’identité, pour illustrer concrètement cette notion de pureté. Ainsi, de cet épais tapis de laine moelleux et ces murs où est suspendu un imperméable jusqu’à la robe de dentelle de Marion : le blanc est partout. L’intérieur de l’ appartement , tel qu’il s’offre à nos yeux,  nous plonge  au cœur d’une intimité. Là où le bât blesse si fort…
Pour incarner Marion et André, Gérard Watkins s’est entouré de deux comédiens exceptionnels, Anne-Lise Heimburger et Fabien Orcier. Exceptionnels d’abord par leur physique et leur élocution, aussi rares et originaux qu’ils sont loin d’être interchangeables, ils incarnent idéalement cette question identitaire. Ils ont ces physiques qui gravent une marque indélébile dans la mémoire, comme ceux que l’on trouve dans les films de Ken Loach ou des frères Dardenne.   Typés, racés, ces jeunes comédiens ont du caractère. Elle, femme-enfant, est belle à croquer, et sa blondeur candide n’est qu’une apparence, car elle se révélera l’opposée d’une ingénue. D’ailleurs, elle a entamé une grève de la faim, une expérience qui l’affaiblira tout au long de la pièce, mais qui requiert une immense force morale. Lui a parfois le regard attendrissant d’un cocker et un côté débonnaire, un masque lui aussi prêt à tomber. Et il éprouve une réelle appétence pour l’alcool… Un couple déprimé, sur le fil du rasoir, prêt à s’adonner à des actes horribles pour s’en sortir. Un thème vertigineux qui a de l’avenir, et une pièce convaincante que nous vous encourageons à découvrir d’urgence.

Barbara Petit

Au Théâtre de la Bastille jusqu’au 11 février.

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Oreste

Oreste d’Euripide, mise en scène de Christian Esnay.

Il y  dans la trilogie d’Eschyle, après l‘Agammenon où Egisthe tue Agamemnon ,  Les Choéphores et les Euménides qui correspondent à  la vengeance d’Oreste qui tue sa mère et son amant Egisthe, avant de s’enfuir,  puis son jugement par un tribunal démocratique quand il revient à Athènes. C’est  de ce moment où Oreste se retrouve seul, dont nous parle Euripide,  où le meurtrier abandonné par les Dieux , n’en finit pas de subir psychologiquement les effets de ce meurtre sur sa conscience. Et au tout début de la pièce , l’on voit Oreste en plein désarroi mental, qui se sait passible de la peine de mort, prostré sur une couverture, et  veillé par  sa sœur Electre. Mais arrive le frère d’Agamemnon, son oncle, le fameux Ménélas et Tyndare son grand-père qui lui condamne son acte criminel. Ménélas lui aurait  plutôt tendance à le défendre mais ne fait pas grand chose de concret pour le sauver. Seul, son ami Pylade l’accompagnera devant l’assemblée du peuple d’Argos, réuni en tribunal. Après discussions, le tribunal  accordera seulement pour sa sœur et lui d’échapper à la lapidation en se suicidant . Et Pylade décidera, par tendresse, décidera lors aussi de se tuer avec eux…
Mais revirement soudain: Pylade, pour se venger de la lâcheté de Ménélas décide de tuer son épouse, la très fameuse Hélène, et Electre propose alors de prendre en otage Hermione , la fille d’Hélène… Comme dans un bon polar, il y a un grain de sable non prévu qui va enrayer la machine et c’est Hermione qui risque donc d’être égorgée.Tandis qu’Oreste et Pylade veulent incendier le palais.
Deuxième coup de théâtre,  ou plutôt arrivée réelle du deus ex machina en la personne du grand Apollon et décide d’arrêter cette série de violences, un peu comme Athéna chez Eschyle à la fin de la trilogie: Oreste va devoir épouser Hermione, Pylade se mariera avec Electre et quand à Hélène, elle, partira, sur ordre d’Apollon pour le domaine des cieux. Ainsi, finira la fuite d’Oreste qui pourra échapper au verdict qui le menaçait et l’ordre sera enfin rétabli.  La pièce qui commence par une véritable tragédie, visiblement influencée par Eschyle , puisque ce double meurtre pas encore jugé , risque fort de déboucher sur une double exécution capitale finit plutôt comme une comédie. Et le dénouement , comme Aristophane, fin scénariste comme Euripide, avait déjà trouvé à l’époque  que ce revirement de l’action avec cette différence de ton entre le début et la fin de la pièce avait quelque chose de comique. L’Oreste d’Euripide est une pièce où si le drame de la mort et de la vengeance sont constamment en filigrane,a aussi quelque chose à voir avec le débat d’idées cher aux Grecs, comme celui sur l’opposition entre la vie des Grecs pieux, intelligents et courageux et celui des non-Grecs dits « barbares » plus enclins au luxe et à la peur d’agir mais non au sens où nous l’entendons aujourd’hui, , ou bien encore l’idée de démocratie opposée à celle de pouvoir absolu.
Christian Esnay, après un premier compagnonnage avec Euritpide ( Hélène puis Le Cyclope a décidé de s’attaquer à cette pièce rarement montée qu’il a eu l’opportunité de réaliser sur la magnifique scène de La Faïencerie de Creil dont les dimensions doivent être proches de celles de Chaillot. Il n’a pas voulu tomber dans le piège de l’illusionnisme et du vérisme psychologique. La scène est nue, les changement de costumes se font à vue, et les comédiens ne sont pas toujours du sexe de leur personnage.
Dans une intention , on l’aura compris, de mettre en exergue le texte, grâce à l’immensité du plateau et à des éclairages de toute beauté, avec juste quelques accessoires et une direction d’acteurs exemplaire. Le spectacle a été monté en quinze jours, ce qui relève de l’exploit, d’autant plus qu’ à cause de la défaillance d’un comédien, Esnay a dû reprendre le rôle d’Oreste. Ce qui explique en partie, un côté brut de décoffrage, avec un chœur qui ne chante pas juste, soutenu par une accordéoniste,  un texte maladroit qui sent trop la traduction et a parfois un ton inutilement racoleur, ce qui est toujours, et déplacé, et énervant. Mais reste ce sens exceptionnel de l’espace où évoluent les comédiens et cette beauté plastique faite avec quelques projecteurs et quelques mètres de tissu noir. On sait bien que les tombeaux  ne sont que des praticables à roulettes enrobés de tissu, mais quelle force, quelle vison tragique! Les comédiens s’en sortent magnifiquement,: tout est à côté d’une interprétation plus traditionnelle , juste avec une petite cuiller  de brechtisme, et l’ on sent que c’est bourré d’intelligence.La mise en scène d’Esnay ne triche jamais et ils parviennent à capter l’attention d’un public très jeune, qui est resté attentif pendant les quelque deux heures de la pièce, ce qui n’était pas évident au début où le spectacle a un peu de mal démarrer. C’est en fait à une sorte de travail en cours auquel nous assistons, puisque le spectacle ne s’est joué que deux fois… Si jamais Esnay trouve les moyens de continuer ce travail, n’hésitez pas, vous découvrirez à la fois une pièce méconnue mais assez passionnante et  aussi une une grande mise en scène. Reste aux directeurs de grands théâtres à l’inviter: jouer ce beau spectacle deux fois seulement serait absurde.

Philippe du Vignal

Le spectacle a été joué à La Faïencerie de Creil les 12 et 13 janvier.

Oreste: voir la vidéo

LA CONFERENCE

LA CONFERENCE de Christophe Pellet, spectacle conçu et interprété par Stanislas Nordey.

conference.jpgUn écrivain, un dramaturge plus précisément, Thomas Blanguernon, qui a fui la France, l’esprit français symbolisé par l’attachement de ce pays à ses plats en sauce, les institutions théâtrales françaises et ses représentants étrangers à la beauté, est sollicité par Marijo, qu’on imagine bien secrétaire générale d’une de ces institutions, pour faire une conférence dans le lieu où elle officie.

Nous ne saurons pas grand chose de cette conférence, sauf qu’elle a beaucoup impressionné Leo Fraticelli, jeune dramaturge, fils d’un fabricant de bouchons de bouteille, dont les textes sont publiés chez un éditeur « qui a pignon sur rue », son double naïf.
Ce que nous entendrons, c’est la colère de ce Thomas Blanguernon contre l’esprit français, l’Etat français, la société théâtrale française symbolisée par ces « figures » de la société théâtrale française en qui il avait placé beaucoup d’espoir avant de constater leur faillite. Dans le hall bétonné de ce centre dramatique où il attend Marijo qui n’assistera même pas à la conférence, il croise Didier Pallanquet le directeur du lieu, qui lui lance: « Encore là, Blanguernon? Toujours dans le circuit! »
Il est dans le circuit en effet, il s’est précipité dans le piège la tête la première, il est à nouveau prisonnier de cet état français qui n’a jamais pu renouveler » le coup de génie du 4 Août 1789″, de cet esprit français dont les quatre principes- vexation, dénonciation, collaboration, dissimulation- sont toujours actifs, et d’une « figure » représentative de la société théâtrale française, au sein de laquelle le théâtre est un « enfant de pierre », un foetus minéralisé.
Il a en tête le souvenir de son amie belge, Esther Cohen, qui fut nommée à la direction d’une de ces institutions françaises et qui s’est suicidée après seulement quelques mois de « vexations ».Heureusement, il sait que l’attend à Berlin son ami, le professeur de philosophie, Moritz Guttenberg dont les conversations l’ont souvent retenu au bord du vide.Il lui faut fuir à nouveau, disparaître, retrouver Berlin pour ne pas être surinfecté, mais en a t’il les moyens lui qui vient de dépenser une partie de son cachet au bistrot?
Christophe Pellet a eu le Grand Prix de Littérature Dramatique en 2009 pour ce texte, cri de colère très « Bernhardien » contre l’esprit français fossoyeur de la beauté et ces institutions théâtrales qui n’ont pas voulu de ses textes , par ailleurs reconnus, publiés, soutenus par des aides à la création dont personne ne profitait. Il se veut un héritier d’Ibsen, l’explorateur des âmes, et est à l’affût dans les souterrains de l’esprit, et il a donc  a ramassé sa colère d’auteur mal aimé dans ce texte virtuose, drôle et dénonciateur. Le texte est joué dans une de ces institutions théâtrales françaises par un de ses enfants gâtés. Et c’est magnifique et dérangeant.
Dans un espace qui traduit la démesure inhumaine et la froideur de ces bâtiments pourtant prévus pour séduire le public, Stanislas Nordey nous fait parvenir ce texte, sans doute redoutable à mémoriser, tant il revient toujours au même endroit de la colère, avec une précision et une densité étonnantes. Nous ne perdons pas un mot de ce cri de colère à la saveur amère mais tonique.

 Françoise du Chaxel, 14 janvier 2011

 Au Théâtre du Rond Point, jusqu’au 30 Janvier, 01 44 95 98 21.

 

STRIPTEASE

STRIPTEASE de Cédric Orain 

« La sublime séduction » avec Céline Milliat-Baumgartner,

Cédric Orain, on avait pu découvrir sa plume au Théâtre du Peuple de Bussang dans son Cabaret Gilles, une biographie imaginaire de Gilles Defacque, le clown magnifique du Théâtre du Prato de Lille (voir théâtre du blog du 9 août 2009).
Ce Striptease insolite se déploie étrangement sur le plateau du Théâtre 71, devant une centaine de spectateurs fascinés, rassemblés sur des gradins. Mutine, aguichante, pleine d’humour, Céline Millat-Baumgartner effeuille son corps, avec une malice et un plaisir émouvants.
Aucune gêne, aucune obscénité, le simple plaisir d’un dévoilement joyeux, apprécié sans honte par le public. Elle décline les noms de célèbres stripteaseuses: Rita Renoir, Linda Romeo, Foufoune Darling, Lily Saint Cyr… et nous dit sa fascination pour Mae Dix, chanteuse de cabaret des années 20. Le final où on  la voit se trémousser autour d’une barre métallique, énumérant tous ces noms,  est tout  simplement beau.

Edith Rappoport

Théâtre 71 de Malakoff

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