Le Jeu de l’île

Le Jeu de l’île, d’après L’Île des esclaves, L’Île de la raison et La Colonie, de Marivaux, adaptation et mise en scène de Gilberte Tsaï

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On est sidéré par la modernité de Marivaux dans cette dernière pièce où  il pose toutes les questions de l’égalité et de la mixité qu’un demi-siècle plus tard… les révolutionnaires oublieront. On voit déjà là la force du combat féministe, y compris, et de façon plaisante, dans ses contradictions entre les « pures et dures » et les féministes « lipstick » qui ont envie d’être coquettes pour elles-mêmes. La pièce finit sur le constat qu’une seule égalité est vivable, sans retour en arrière.
C’est peut-être parce qu’il y a là un réel enjeu pour aujourd’hui que la représentation s’anime vraiment quand on arrive à La Colonie. Féministes, rassurez-vous : le public jeune, filles et garçons, réagit joyeusement et positivement à la proposition de Marivaux. Il n’en est pas de même pour les deux autres pièces, dont l’enjeu est plus lointain : difficile d’assimiler l’opposition entre riches et pauvres d’aujourd’hui au couple maître-serviteur, la société industrielle et Marx étant depuis passés par là. Cela rend les pièces plus abstraites et plus moralisantes, même si on aime toujours l’humanisme de Marivaux. Peut-être, aussi, ces deux pièces manquent-elles de situations dramatiques,  même si  se dessine dans L’Île des esclaves, à côté du renversement de base, une coupable indulgence du président de cette république pour la coquette et tyrannique Euphrosyne…
Le spectacle est lent à démarrer, donc, avec de jeunes comédiens issus de l’école de Limoges qui peinent à se lâcher. En revanche, ils excellent dans la musique chorale composée pour eux par Olivier Dejours, et manipulent remarquablement, ce qui est rare parmi les comédiens, surtout débutants, les marionnettes de Pascale Blaison.
Toute l’affaire est placée sous le regard d’un philosophe un peu cynique et  ironique, un peu bohême et pas mal arrosé, qui passe heureusement, le temps de la représentation,  d’un regard misanthrope à un regard humaniste.
On en est heureux, mais on attendait quand même un peu plus de théâtre.

 

Christine Friedel

 

Nouveau Théâtre de Montreuil T:  01 48 70 48 90 , jusqu’au 15 mars

 

 


Archive pour 7 février, 2011

Le Cabaret des vanités

Le Cabaret des vanités , dramaturgie et mise en scène collective du Groupe Incognito.

Ecabaret.jpgn 2008, quelques jeunes comédiens et chanteurs , issu de l’Ecole du Théâtre National de Strasbourg avaient déjà monté Le Cabaret des Utopies où ils posaient la question d’une société meilleure; cette fois, ils s’amusent à à dresser une sorte de tableau des vanités tout à fait à l’honneur dans la société de consommation, avec un spectacle qui tient davantage du cabaret. Et ils citent les paroles fameuses de l’Ecclesiaste: Vanitas vanitatum et omnia vanitas… en prologue à ce spectacle qui use de collages de textes les plus inattendus et de nombreuses chansons qui, tous célèbrent la seule liberté que possède l’être humain: se moquer de sa propre disparition pour mieux jouir encore de la vie.
Avec en  vrac: une interview du très riche François Pinault assez lucide sur sa boulimie de collectionneur,  un discours des plus prétentieux de Blond-Blond, comme dirait Christophe Alévèque, l’héritier de Neuilly, un entretien avec Céline, Le Caca d’Antonin Artaud, un texte poétique: L’Oiseau bleu de Bukowski, une étonnante Proposition d’art à faire soi-même de Miranda July, écrivain et artiste américaine.
Côté chansons,  entre autres: Mon  Dieu,  de Nana Mouskouri, La mort me hante de Colette Magny sur des paroles d’Artaud; Que la vie est belle de Sheila… Ils sont sept, accompagnés de deux musiciens et de quelques amateurs,  à dire ces textes , à chanter, et danser ; les paillettes, le strass, les costumes criards  et un cadre de tubes fluo d’un blanc cru tout aussi criard, des gerbes de ballons rouges sont au rendez-vous pour mieux souligner cette joyeuse danse macabre que ce collectif de jeunes comédiens vient nous servir à chaud.
Il y a, aux meilleurs moments, l’héritage de la pensée de Deleuze qui avait consacré sa thèse au suicide et qui, malade, avait fini par se défenestrer, et  quelque chose aussi de ce burlesque flamand cher à Michel de Ghelderode, comme dans cette scène de grand repas ou, à la fin, cette grandes boîtes de bois blanc où ils s’allongent pour l’éternité, tout en continuant leurs espiègleries.
Les textes sont bien dits, et les chansons bien chantées, notamment par Olivia Côte et  par Emilie Incerti-Formentini, tout à fait juste et émouvante. On voit qu’ils ont tous été dans de bonnes écoles. Mais… regrets sur quoi l’enfer se fonde , comme dirait Guillaume Apollinaire: la mise en scène , comme c’est souvent le cas dans ces « collectifs » qui sont de nouveau très à la mode chez les jeunes  comédiens, histoire de mieux résister à la morosité ambiante, reste assez approximative. Tout semble se faire un peu à l’arrache, avec un peu d’impro pas vraiment maîtrisée; les textes, pourtant bien choisis, ne sont pas suffisamment mis en valeur et les chansons pourraient bénéficier d’une meilleure balance avec la musique. L’ensemble est sympathique, c’est sûr ,mais ce Cabaret des vanités manque singulièrement de rythme, comme d’unité, et il faudrait  que l’un des membres du Groupe Incognito prenne  en main ce qui ressemble  encore trop à une série de propositions qui exigerait une véritable mise en scène pour être plus convaincante…

 

Philippe du Vignal

Théâtre de la Commune, jusqu’au 11 février mardi et jeudi à 19h 30, mercredi, vendredi  à 20 h 30. T: 01-48-33-16-16

 

Un fil à la patte

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 Un fil à la patte de Georges Feydeau, mise en scène par Jérôme Deschamps et interprétée par la troupe de la Comédie-Française, (voir article du Théâtre du Blog de décembre 2010), captée en direct depuis la salle Richelieu, sera diffusée mardi 22 février à 20h 35 sur France 2.
L’occasion n’est pas si fréquente, alors, profitez-en , d’autant plus que la mise en scène, même très classique, est vraiment réussie, et il y a,  en plus, Christian Hecq  dans Bouzin, ce qui mériterait déjà le déplacement… Donc, on ne vous le redira pas trois fois. Même si vous n’êtes pas dans la salle mais devant votre écran magique bien au chaud ;de toute façon,  il n’y a plus de places jusqu’en juin. La comédie de Feydeau était entrée au répertoire en 1951 dans une mise en scène de Jacques Charon.

Ph. du V.

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