Billy Elliot the musical
Billy Elliot the musical, mise en scène de Stephen Daldry, chorégraphie de Peter Darling, scénario et texte de Lee Hall, musique d’Elton John.
Primé soixante-quinze fois par les critiques à travers le monde anglophone, Billy Elliot – The Musical, inspiré par le film du même nom (2000), a vu le jour à Londres en 2005. Le spectacle américain a débuté à New York en 2008 et la première au Canada (mais avec une nouvelle distribution) vient de commencer à Toronto dans une frénésie médiatique.
Ce soir-là, Elton John, son partenaire le producteur David Furnish et toutes les vedettes sont passées par le fameux « tapis rouge » à l’entrée du Canon Theatre, lieu réservé à Mirvish, qui a produit ce mégaspectacle. Toute la publicité faite autour de cet événement n’est pas exagérée…
C’est l’histoire d’un jeune homme -joué par quatre acteurs en alternance-originaire d’un milieu ouvrier au Nord de l’Angleterre, qui veut se consacrer à la danse, malgré les objections violentes de sa famille. Avec, en toile de fond, la grève des mineurs de charbon britanniques (1984-85), menacés de perdre leur emploi, à cause de la politique anti-charbon menée par Thatcher. Ce qui frappe surtout, c’est d’abord l’extraordinaire virtuosité des artistes, et la manière dont la chorégraphie, la musique, l’ orchestration, les chansons et la théâtralité générale marient les deux récits : les conséquences quasi tragique de cette grève et la passion du jeune Billy, joué par Cesar Corrales, acteur/danseur stupéfiant de 14 ans, qui lutte pour atteindre son rêve – intégrer la Royal Ballet School de Londres, pour sortir de la pauvreté de la classe ouvrière. Certains moments sont inoubliables comme la caricature farouche de Thatcher qui surgit derrière la foule de marionnettes, monstre prêt à dévorer les enfants venus assister à une fête de Noël; les confrontations dansées entre policiers et grévistes, ou entre Billy et les troupes anti-émeutes qui tapent en rythme sur leurs boucliers à la manière de Stomp, les classes de ballet où Billy révèle son talent insoupçonné devant un groupe de jeunes filles maladroites; Billy qui prépare son audition pour le Royal Ballet avec un pianiste du Boogie, et enfin cette audition où le jeune homme explique sa passion pour cet art dont son père ne veut pas entendre parler, de peur qu’on prenne son fils pour une « tante ».
L’un des thèmes récurrents du spectacle est en effet la légitimité de la « différence » représentée par les garçons qui osent assumer leurs désirs profonds et par son petit copain Michael qui aime s’habiller en tutus de ballet et jouer à la fille. Le jeune homme (Dillon Stevens 13 ans) qui interprète Michael, a une présence et une maturité étonnante.
Le spectacle plaide pour l’acceptation de tous les choix qui ne conforment pas à ceux de la majorité, et Elton John, dont la musique s’adapte parfaitement à une chorégraphie brillante, a sans doute orienté la pensée des créateurs qui , à la fin, créent un lien entre l’avenir possible de Billy et le dénouement du Lac des Cygnes , quand la jeune vedette danse un pas-de-deux « masculin » – version Matthew Bourne- avec un soliste adulte: c’est un moment de grande virtuosité pour affirmer la réussite du jeune homme qui rassemble toute la communauté autour de son projet, même si la grève finit mal.
Les Anglais ont l’habitude d’introduire des thèmes politiques dans un spectacle musical, ce qui enrichit les formes chorégraphiques, les personnages et le sens général. Il suffit de voir Fela, Blood Brothers, et combien d’autres ,pour en être convaincu.
Alvina Ruprecht
Billy Elliot, the Musical au Canon Theatre à Toronto jusqu’au mois de juillet.