Discours sur le bonheur
Discours sur le bonheur d’Émilie du Châtelet, mise en scène de Béata Nilska.
Émilie du Châtelet est surtout connue pour sa relation avec Voltaire. Isolés dans son château de Cirey, les deux amants, en « philosophes voluptueux » amoureux des sciences physiques et métaphysique, alliaient sans relâche plaisirs des sens et travail acharné. La belle Émilie fut une compagne savante et passionnée, célèbre pour sa traduction des Principia de Newton. Délaissée par Voltaire, elle trouvera à se consoler entre d’autres bras, et n’en manquera pas d’écrire ce Discours sur le bonheur, texte qui fouille dans le cœur humain pour en tirer comme des lois de conduite, singulières d’évidence, et atteindre sans grande contrainte le but suprême de l’homme.
Le spectacle est ainsi l’occasion d’un voyage dans le temps pour redécouvrir la vie de cette femme unique en son genre. Au discours théorique viennent se tresser deux autres fils d’intrigue qui nous guident dans son intimité profonde. La relation qui l’unit à son domestique Longchamp, tout d’abord : et la présence humaine de Sylvain Begert nous renvoie à celle de la maîtresse de maison, allégeant le texte philosophique. Cet autre regard, ce spectateur interne comme un reflet humain, nous renvoie plus profondément à la femme qu’elle a du être et à la solitude qui fut la sienne après le départ de Voltaire. En voix off, des lettres livrent encore différents témoignages, plus ou moins élogieux. Ces trois pans-miroirs du spectacle tentent de faire revivre le souvenir d’une femme oubliée par les siècles, démarche peut être un peu maladroite. En effet, le choix de faire du discours théorique une image de la vie de son auteur éclipse parfois l’un et l’autre dans du presque illustratif, tandis que la relation entre les deux personnages crée une intrigue parallèle qui n’aboutit nulle part et laisse le spectateur dans l’expectative.
Malgré tout un tableau assez savoureux d’une époque, rendu par une très belle scénographie à l’ambiance parfumée, qui vous laisse captif de l’envoûtante Édith Vernes.
Élise Blanc.
Au Théâtre du Lucernaire jusqu’au 2 Juillet.