Testimony, récitatif
Testimony, récitatif, de Charles Reznikoff (traduit de l’anglais par Jacques Roubaud), mise en scène de Henri jules Julien.
Charles Reznikoff est un poète américain du siècle dernier, figure majeure de l’Objectivisme poétique qui prône une poésie laissant toute la parole au réel. « La poésie présente l’objet afin de susciter la sensation. Elle doit être très précise sur l’objet et réticente sur l’émotion », nous dit-il. Testimony, recitative est ainsi un recueil de témoignages et de paroles judiciaires, extraits de procès que le poète a remaniés mais, dans la seule mise en forme, sans en altérer les mots.
Instantanément, Henri Jules Julien a entendu pour ce texte la voix de Vitya Ponomarev, accompagnée par le piano à queue de Sophie Agnel où se triunet une mailloche, des boules de billard,etc..qui font vibrer les cordes d’une tonalité déchirante. En éliminant presque toute représentation, le metteur « sur » scène laisse l’acteur et la pianiste seuls, avec micro. Derrière la lecture, se dressent ainsi sous nos yeux toute une lignée de crimes ou de menaces, parfois trop elliptiques pour être clairement comprises. Les textes retrouvent leur oralité première, effleurée par le passage de l’artiste, l’air se charge de ces cruautés humaines et Sophie Agnel tire de son piano des sons insoupçonnés d’angoisse.
Pour autant, la présence vocale de Vitya Ponomarev est un peu étouffée par la violence du piano, parfois poussée trop loin, aux dépends de l’harmonie entre l’homme et l’instrument.
Un spectacle plutôt dur et prenant malgré tout.
Élise Blanc
Spectacle vu le 23 juin au Théâtre l’Échangeur.