Festival d’Avignon
Le petit Violon de Jean-Claude Grumberg, d’après un conte de Charles Dickens, mise en scène d’Antoine Chalard. Spectacle tout public à partir de 5 ans.
Cela y est: le in comme le off d’Avignon ont vraiment commencé; nous serons six critiques du Théâtre du Blog : Elise Blanc, Jean Couturier, Christine Friedel, Véronique Hotte, Edith Rappoport et moi-même à essayer de vous rendre compte au maximum de l’édition de ce festival et de vous en signaler les moments forts. Le plus tout jeune événement international ( 65 ans ) affiche une excellente santé, malgré les vieilles querelles et polémiques qui resurgissent avant l’arrivée d’Olivier Py à sa direction. Et malgré la crise économique, les réservations d’hotel comme de spectacles vont bon train, même si le public ne rajeunit guère…
Avec quelques têtes d’affiche: Jeanne Moreau et Etienne Daho, Angelica Liddell ( voir le Théâtre du Blog de 2011), Wajdi Mouawad, Guy Cassiers, Chéreau avec I am the Wind ( voir notre article de juin dernier) , et dans le off: beaucoup de solos comme entre autres de Richard Bohringer, Sophia Aram , Didier Porte viré pour la deuxième fois de France Inter…
Pour commencer un spectacle tout public . C’est une histoire simple empruntée à Dickens et qui tient de la fable. Léo est un jeune et pauvre camelot; installé dans une roulotte, il vend des assiettes et de petits ustensiles de cuisine. Il a un ami, un géant qui travaille dans le cirque de Monsieur Univers. Ensemble, ils vont décidé d’enlever la petite Sarah, une enfant sourde et muette que martyrise Monsieur Univers qui la trouve incapable de rien faire. Léo va donc s’occuper d’elle avec beaucoup de générosité et de tendresse. Il lui apprend à jouer du violon, et avec des dessins , arrive à communiquer avec elle et à lui donner une éducation, en ne la considérant pas du tout comme handicapée. D’autant plus qu’elle se montre très douée pour l’acrobatie.
Puis, Sarah grandira, deviendra une belle jeune fille, et, parce que c’est comme ça, parce que c’est la vie, elle tombera amoureuse d’un beau jeune homme et quittera Léo qui en sera évidemment bien triste. Il enlèvera alors de son enseigne de camelot la petite pancarte qui ajoutait à Léo : et Sarah et il n’aura plus de nouvelles d’elle… Jusqu’au jour où, miracle, voici Sarah qui réapparaît, avec son amoureux et leur petite fille…
Le spectacle créé en 2009 et qui avait eu le prix du off cette année là, bien rôdé, est parcouru par des mélodies au violon de Paganini- parfois un peu trop envahissantes- et joué par quatre comédiens au métier solide, Alexandra Nicolaïdis, David Laborie, Antoine Chalard et Laurent Malburet qui réussissent à nous emmener très vite dans l’univers de Dickens revu par Grumberg; Antoine Chalard a conçu une mise en scène intelligente et peine de nuances à l’opposé de tout réalisme, et c’était la meilleure solution pour traduire toute la poésie de cette pièce qui dit beaucoup de choses auxquelles les les enfants peuvent être tout fait sensibles, comme la pauvreté de Léo le camelot, l’exclusion provoquée par son handicap que subit Sarah au quotidien, l’exclusion aussi du géant qui ne sera jamais comme les autres, le droit à différence, l’ordre moral, l’amitié sans failles qui le lie à Léo, les accusations calomnieuses, la séparation avec ceux que l’on aime.
Et comme, pour une fois, ce qui est rare dans les spectacles tout public, la scénographie d’ Emmanuel Briand est tout à fait intelligente et pleine d’idées, avec cette petite roulotte qui se transforme selon la face tournée vers le public en cirque, tribunal ou prison… dont les barreaux sont juste représentés par une projection. On ne dira jamais assez combien est important l’aspect plastique-formes, couleurss et lumières- d’un spectacle destiné en priorité aux enfants.
Il y a aussi de beaux masques pour les personnages du géant, de Monsieur Univers et deux gendarmes, et des marionnettes signés Galina Molotov et Vladimir Kantor d’excellente facture.Comme souvent chez Grumberg, il y a d’excellents moments et d’autres plus …inégaux. Mais nous avons vu la générale donc sans pratiquement de public, et c’est un test de qualité. Là, pas de doute possible: dans les 1.400 spectacles du festival off ( si, si! C’est du moins ce qui est indiqué !), et dont un petite proportion est tout public, ce Petit violon mérite de figurer en haut de la liste des spectacles à recommander.
La suite à demain…
Philippe du Vignal
Théâtre de l’Alizé, 15 rue du 58ème Régiment d’Infanterie, Avignon (à deux cent mètres de la gare contre les remparts à droite dos à la gare) t: 04-90-14-68-70