La Guerre de Troie n’aura pas lieu
Festival d’Avignon
La Guerre de Troie n’aura pas lieu de Jean Giraudoux par la Compagnie des Fils d’Achinaos.
La Guerre de Troie n’aura pas lieu n’est pas souvent jouée, à cause surtout du nombre de personnages mais elle est sans doute la meilleure des pièces de cet auteur un peu oublié aujourd’hui et dont Jouvet monta la plupart du théâtre. Elle a de plus le don d’attirer les jeune comédiens ou ceux qui espèrent le devenir, sans doute grâce à quelques scènes-culte.
En l’occurrence, il s’agit ici d’un collectif formé d’actuels et anciens élèves du très fameux lycée parisien Louis-le-Grand qui est entré dans l’histoire du théâtre contemporain , puisque c’est là qu’ont débuté Patrice Chéreau, Jean-Pierre Vincent, Jérôme Deschamps, metteurs en scène et Yannick Mancel dramaturge. Et cela en quelques années…
On ne va pas vous faire l’affront de vous raconter l’histoire. Mais Jean Giraudoux, qui connaît actuellement une sorte de purgatoire, s’en est emparé avec un humour et l’a traité à sa façon dans une langue qui ne manque pas de qualités. Et cela dit plus de choses que l’on pourrait croire sur l’attirance sexuelle, la hantise de l’avenir, la guerre et la paix. Cela sent parfois le mot d’auteur dont Giraudoux ne se prive pas et qui éprouve un certain plaisir à frôler la parodie… » Une pièce pas contemporaine, pas classique, pas classable » ,dit avec raison ce collectif de comédiens qui n’en sont pas encore et dont presque tous ne le seront jamais…
L’interprétation est évidemment à la limite de ce que l’on peut attendre; le jeune homme qui joue Hector, presque parodique, n’est pas crédible une seconde, et les autres n’ont pas assez travaillé: diction parfois approximative, manque de rigueur dans le jeu, gestuelle pas très au point; seule, Cassandre impose, dans un rôle pas des plus faciles, une présence étonnante sur le plateau. Solide, imperturbable, même quand il y a des accros techniques; si les petits cochons ne la mangent pas, si elle en a encore la volonté, etc… , elle devrait faire partie un jour des très bonnes comédiennes françaises. Pour le reste, mieux vaut oublier les costumes disparates, les masques comedia del arte de certains personnages et la peinture affligeante qui figure sur les portes de la guerre. Mais la mise en scène,malgré des erreurs, tient quand même la route. Et c’est un des miracles qui arrivent au théâtre: on se surprend à écouter ce texte archi-connu avec un certain plaisir. Autre miracle pour le off, il y avait plus de 40 spectateurs qui regardaient cet ovni: quelque 16 jeunes gens capables de monter la pièce et de descendre la présenter à Avignon. Quand on a une volonté et une énergie aussi patente, on se dit qu’un jour il y aura bien quelques-uns de ce collectif qui ressurgiront.
Philippe du Vignal
Théâtre Le Célimène à 15h 30 25 bis rue des Remparts de l’Oulle; relâche les 15 et 25 juillet.