Les 4 morts du Président Petit
Les 4 morts du Président Petit par la compagnie Délices Dada
Le Président Petit est un petit président (tant en taille qu’en importance) qui serait mort de quatre manières différentes, à en croire les journaux de l’époque : mort accidentelle, suicide, assassinat, enlèvement céleste ! À quelle version devons-nous porter crédit ? À vrai dire, peu importe : il ne s’agit pas, pour nous spectateurs, de démêler le vrai du faux dans ces histoires loufoques. Mais d’assister aux reconstitutions burlesques de ces quatre hypothèses. Le sous-directeur temporaire de l’office du tourisme d’Aurillac (excusez du peu !), après avoir convoqué des experts en psychologie, accidentologie, criminologie, fait appel à une compagnie de théâtre qui aura pour mission de mettre en scène les différentes morts du Président Petit, ce qu’elle fait sous forme de tableaux d’une dizaine de minutes.
Dans ce théâtre dans le théâtre, s’installe un jeu entre deux niveaux de fiction : celui de la mort du Président, et celui des comédiens et du présentateur (le très crédible Jeff Thiébaut, également créateur du projet). Le procédé-classique -porté avec simplicité et humour, est efficace , non sans clin d’œil politique et satirique à notre petit président national, d’autant plus que les dates concordes, à cent ans près ! Le spectacle s’inscrit dans les rues d’Aurillac. La compagnie « Délices Dada » utilise l’espace, les perspectives des ruelles, la lumière naturelle, mais non pas de manière fortuite : tout est pensé et repensé en fonction de l’espace, confie une comédienne de la troupe. Notre regard se trouve ainsi canalisé par un cadre métallique, cadre d’une peinture urbaine et vivante. Les comédiens arrivent par une longue ruelle qui nous fait face : cette marche, du lointain jusqu’au proche, en musique et en costumes du début XXème, produit son petit effet, comique et ludique ! Un second ancrage dans la rue consiste à ne pas nous proposer les quatre épisodes à la suite et en un même lieu, mais à des heures et en des endroits différents dont le dernier lieu ne nous est d’ailleurs révélé qu’à la suite du troisième épisode, ce qui, au suspens occasionné, ajoute un effet de fidélisation et de fédération de la communauté des spectateurs : nous étions de nombreux complices à nous retrouver pour cette quatrième mort du Président Petit. Cette itinérance est le témoin d’une volonté : celle de ne pas créer, dans la rue, un espace figé. Il s’agit donc d’un spectacle pensé avec et pour la rue ; drôle, tout en simplicité et subtilité, et gentiment sarcastique.
Nicolas Arribat