CAFI de Vladia Merlet, mise en scène collective sous la houlette de Georges Bigot
Cafi de Vladia Merlet
« Je m’accroche aux racines qui sont sous la terre car au dessus le vent emporte tout » CAFI. Non , ce n’est pas le nom d’une déesse indienne, ni d’une ville exotique, mais un sigle: Centre d’accueil pour les Français d’ Indochine qui nous renvoie à un pan inconnu de notre histoire. Ce centre qui s’est d’abord appelé CARI (pour les rapatriés d’Indochine – et la nuance est de taille!) existe toujours à Sainte-Livrade-sur-Lot et est aujourd’hui réhabilité. On y a construit des maisons où installer (mais trop tard!) ceux qui y vivent depuis cinquante ans et ne peuvent plus s’habituer au changement…
L’histoire de ce centre (en fait d’anciens baraquements militaires) et la vie de cette population, en majorité des femmes et enfants qui ont quitté en 1956 leur pays, le Vietnam, est le thème de ce spectacle écrit par Vladia Merlet, une comédienne qui interprète Louise, la fille d’une Vietnamienne et d’un Français qui prendra la fuite avant le grand départ de la famille pour Marseille, puis pour le Lot. Louise a neuf ans quand le voyage commence sur un bateau où l’on peut si bien jouer quand on est enfant…
La comédienne, fine et précise, joue la fillette qui grandit mais aussi la mère digne qui va vieillir, le frère, les amies, les voisines dont elle dévoile les espoirs et les désillusions. les mots claquent sur ses lèvres. Dans une mise en scène réalisée avec simplicité, invention, sensibilité et poésie. Des draps tendus, des ombres chinoises, de la musique sur scène et quelques voix enregistrées, des chapeaux, un masque vietnamien, un dragon agité, un coffret où la mère a enfermé des graines pour refaire au loin un jardin…. Du jeu, beaucoup; parfois de la lecture, ou des confessions les yeux dans les yeux. L’émotion nous serre la gorge. Un spectacle-hommage à ces oubliés de l’Histoire, bouleversant qui évoque aussi tous les exils. Il faut vite aller le voir.
Béatrice Picon-Vallin
Théâtre de l’Opprimé, 78 rue du Charolais, Paris (X ème) jusqu‘au 2 octobre.