Dance is a dirty job but somebody’s got to do it

Dance is a dirty job but somebody’s got to do it de Scali Delpeyrat.

photo.jpgLe spectacle avait obtenu le  Prix du Public au concours « Danse élargie » qui avait eu lieu en juin dernier au Théâtre de la Ville, avec 360 projets venus de 22 pays. Avec un principe simple:  le plateau conçu comme un espace expérimental.
Ce que nous donne à voir Scali Delpeyrat est un court spectacle d’une heure  avec l’actrice  Elizabeth Mazev,  et lui-même, Clément Landais à la basse électrique et à la guitare, et le danseur  Mathieu Calmemet,  où il rend hommage, avec de la danse, un peu de texte, des images projetées et de la musique bien sûr à deux mythes américains: le grand Fred Astaire qui, on le sait moins, avait aussi une sœur Adèle qui fut une remarquable danseuse  mais aussi à Michaël Jackson  qui, dit-il, est entré dans sa tête de manière définitive:   »Mon texte est entre autres, une tentative inconsciente de dire pourquoi. De montrer comment c’est son rapport à son propre corps qui a fait de lui l’emblème un peu tragique de son temps, qui en fait le génie aussi. On ne devient pas le le père de Moonwalks impunément. Michael Jackson a fait de son corps un monument dédié aux dérives industrielles du dernier quart du XXème siècle. Il a dansé toutes les maladies du siècle. C’est pourquoi il m’a inspiré ».
Il y a un grand canapé où un grand et énorme être bizarre de la même couleur que le tissu du canapé, sans visage identifiable mais aux formes humaines comme momifiées remarquablement imaginé par Sarah Lefèvre , passe par moments sur la scène, Elizabeth Mazev dit avec  Scali Delpeyrat un texte sur la danse qui est aussi et surtout une sorte d’hommage aux deux  grands danseurs américains;  Il y a aussi des extraits d’un film -il doit s’ agir d’un concours- où un chien copie les gestes de sa maîtresse, le musicien les accompagne; bref tout va bien…
Comme cela ne dure qu’une heure , on regarde sans s’ennuyer mais sans être vraiment concerné par ce qui voudrait être une création expérimentale mêlant théâtre et danse. On est un peu loin du compte , même, si,  et c’est souvent la même histoire, il y a une belle maîtrise de l’espace et  chaque artiste, chacun dans sa spécialité, fait un travail  très professionnel…
Alors à voir? A vous de juger,  mais cela quand même un petit côté bcbg  agaçant et l’on reste un peu sur sa faim.

 

Philippe du Vignal

 

Théâtre des Abbesses jusqu’au 23 septembre.


Archive pour septembre, 2011

Écrire

Écrire de Marguerite Duras, mise en scène de Jeanne Champagne.


ecrire.jpgUne chaise, une table de bureau avec sa jolie petite lampe qui veille dans la nuit, une rose dans un vase, un verre de vin rouge, des bruits lointains de la rue parfois, et en sourdine le téléphone qui sonne auquel on ne répond pas, voilà l’univers privé de Marguerite en train d’Écrire. Ses paroles sont enregistrées sur le plateau ; un magnéto est posé là sèchement sur le sol. La scène est jonchée de bobines de film abandonnées et emmêlées, tandis que se font entendre quelques notes de musique de Carlos d’Alessio dans India Song.
Ce lieu privilégié et ritualisé s’inscrit à Neauphle-le-Château, dans la maison près du parc, des arbres, des oiseaux et des écureuils, mais il peut tout aussi bien évoquer Paris ou bien Trouville, avec la mer non loin. Il suffit d’une fenêtre qui filtre la lumière à toute heure de la journée et d’une table suffisamment longue pour qu’on puisse y écrire, sans que les bras ne tombent dans le vide.
Pendant une heure, le spectateur a le plaisir d’entendre les pensées distillées de Duras, caractéristiques de ce regard féminin singulier et universel, à la fois poétique et philosophique : un point de vue sur le monde, une certitude à transmettre par le biais d’une expérience de la vie pleinement vécue, goûtée et subie, sentie et ressentie à fleur de peau et de larmes – dans la douleur comme dans la joie.
C’est une leçon de choses qui concerne chacun d’entre nous à partir du moment où l’on fait retour sur soi. La solitude existentielle, c’est une équation qui se résout soit par l’écriture, soit par la mort. Mais la solitude inviolable de l’écrit qui finit sur le livre – Le Ravissement de Lol. V. Stein, Le Vice-Consul- ou bien sur la mort, conduit aussi à l’alcool, quand le vertige de vivre devient trop grand. Et l’on découvre encore que « seule l’écriture vous sauvera ».
Contre l’angoisse, contre la violence d’être, contre les amants mêmes auxquels l’amante cache l’amour de son mari. L’écrivain avoue qu’elle ne saura jamais pourquoi on écrit ou pourquoi on n’écrit pas. Toujours est-il que tracer des lignes à l’encre de Chine noire pour rendre compte de sa présence au monde, c’est faire silence et laisser surgir les cris celés en soi : « Il faut être plus fort que soi pour aborder l’écriture, il faut être plus fort que ce qu’on écrit. C’est une drôle de chose, oui. C’est pas seulement l’écriture, l’écrit, c’est les cris des bêtes de la nuit, ceux de tous, ceux de vous et de moi, ceux des chiens. »
Quand Duras écrit, le temps ne compte pas – même lourd de solitude ; la femme de lettres dit n’avoir jamais compté le temps, si ce n’est l’attente du retour des camps de Robert Antelme, et de sa jeune sœur Marie-Louise.

Le livre hurle sa raison d’être, cela même qui la sauvera. « Je suis seule pour écrire des livres encore inconnus de moi et jamais encore décidés par moi. » C’est l’espoir et l’amour – cet inconnu absolu – qui tiennent l’âme au plus profond d’elle-même, et c’est l’écriture qui sauve, comme une vie à préserver. Tania Torrens, très bien dirigée par Jeanne Champagne, est Marguerite, réfléchie, tendue et belle : on l’écoute. À l’affût de cette sensation de la vie qui coule inexorablement.

Véronique Hotte

Jusqu’au 7 octobre 2011. Théâtre de l’Atalante. Réservations : 01 46 06 11 90

CAFI de Vladia Merlet, mise en scène collective sous la houlette de Georges Bigot

Cafi de Vladia Merlet

« Je m’accroche aux racines qui sont sous la terre car au dessus le vent emporte tout » CAFI. Non , ce n’est pas le nom d’une déesse indienne, ni d’une ville exotique, mais un sigle: Centre d’accueil pour les Français d’ Indochine  qui nous renvoie à un pan inconnu de notre histoire. Ce centre qui s’est d’abord appelé CARI (pour les rapatriés d’Indochine – et la nuance est de taille!) existe toujours à Sainte-Livrade-sur-Lot et est aujourd’hui réhabilité. On y a construit des maisons où installer (mais trop tard!) ceux qui y vivent depuis cinquante ans et ne peuvent plus s’habituer au changement…
L’histoire de ce centre (en fait d’anciens baraquements militaires) et la vie de cette population, en majorité des femmes et enfants qui ont quitté en 1956 leur pays, le Vietnam, est le thème de ce spectacle écrit par Vladia Merlet, une comédienne qui interprète Louise, la fille d’une Vietnamienne et d’un Français qui prendra la fuite avant le grand départ de la famille pour Marseille, puis pour le Lot.  Louise a neuf ans quand le voyage commence sur un bateau où l’on peut si bien jouer quand on est enfant…
La comédienne, fine et précise, joue la fillette qui grandit mais aussi la mère digne qui va vieillir, le frère, les amies, les voisines dont elle dévoile les espoirs et les désillusions.  les mots claquent sur ses lèvres. Dans une mise en scène réalisée avec simplicité, invention, sensibilité et poésie. Des draps tendus, des ombres chinoises, de la musique sur scène et quelques voix enregistrées, des chapeaux, un masque vietnamien, un dragon agité, un coffret où la mère a enfermé des graines pour refaire au loin un jardin…. Du jeu, beaucoup; parfois de la lecture, ou des confessions les yeux dans les yeux.  L’émotion nous serre la gorge. Un spectacle-hommage à ces oubliés de l’Histoire, bouleversant qui évoque aussi tous les exils.  Il faut vite aller le voir.

Béatrice Picon-Vallin

Théâtre de l’Opprimé,  78 rue du Charolais, Paris (X ème) jusqu‘au 2 octobre.

Splendid’s

Splendid’s, de Jean Genet, mise en scène Cristèle Alves Meira

splendids.jpgRing sans cordes, à vos risques et périls, au milieu du parterre de l’Athénée. Portes dorées qui claquent. Irruption de voyous à kalachnikov, c’est tendu.
Le Splendid’s, c’est l’hôtel où s’est piégée une bande de gangsters, après un coup tordu et foireux. Leur otage, une Américaine, est morte, l’hôtel est assiégé, la radio leur renvoie minute par minute la progression de l’encerclement et l’annonce de leur défaite inéluctable.
Qu’est-ce qu’il reste ? Les délices quelques peu amères d’une mort annoncée, la saveur de la lâcheté, la trahison de ceux qu’on aime … Sinon, où serait la trahison ? Un policier passé de leur côté chante sa déception, entre l’image mythique des mauvais garçons et cette bande d’indécis violents. Pourtant, pourtant une autre mythologie se dessine, celle qui parcourt toute l’œuvre de Genêt : pas seulement l’adieu aux beaux corps virils voués à la pourriture, quelque chose de la merveilleuse intensité de l’instant, qui échappe au flic, même deux fois traître.
Cristèle Alves Mera s’était déjà mesurée à Genet, et vaillamment. Ici, elle a imaginé que ces gangsters pouvaient être des terroristes arabes : hommage à l’amour de l’auteur pour les jeunes Marocains et pour les Palestiniens, et puis, après tout, leur victime est américaine. Du coup, on entend beaucoup crier en arabe.
La fiction court ainsi après une réalité qui forcément se dérobe, pour le moins. Le jeu saturé, au premier degré, et, très vite, on n’y croit plus, et on n’en tire qu’un petit plaisir, celui du bourgeois qui aime se faire un peu bousculer.Pour la scénographie, elle a succombé à la tentation de faire du théâtre la scène même de l’enfermement, les
balcons de l’Athénée jouant le rôle du grand bordel de l’hôtel.
Ce qui nous rejette encore davantage à la place du bourgeois à peine choqué. Le huis-clos ne marche pas: au contraire, tout s’éparpille et s’éclate. Peut-être la pièce de Genet, qu’il a abandonnée de son vivant, devrait-elle  être finalement traitée en oratorio ?
Manque sans doute à
Splendid’s un  mode d’emploi et une marche à suivre , comme celles que Genet avait pris la peine d’écrire pour Les Bonnes et Les Nègres.

 

Christine Friedel

Théâtre de l’Athénée, jusqu’au 8 octobre T:  01 53 05 19 19

Roméo et Juliette

Roméo et Juliette de William Skakespeare, traduction , adaptation et mise en scène d’Oliver Py.

  rome769oetjuliette2alainfonteray300x199.jpgQuand Skakespeare écrivit à la toute fin du 16ème siècle sa première comédie dramatique, à partir d’un poème d’Arthur Brooke. Même si ce n’est sans doute pas la meilleure (il devait faire beaucoup mieux par la suite….), la création connut un beau succès.Mais le célèbre dramaturge ne se doutait  pas que cette histoire de vendetta véronaise deviendrait le mythe de l’amour véritable entre  deux très jeunes gens, mis à mal par la faute de leurs deux familles respectives, celle de Juliette, les Capulet comme celle de Roméo, les Montaigu. Et la comédie basculant dans le drame et la mort, deviendra célébrissime au point d’ inspirer nombre de films plus ou moins fidèles, et d’avoir créé deux personnages cultes.
Roméo est  en effet obligé d’intervenir quand son ami Mercutio se fait  tuer d’un coup d’épée par Tybalt, proche des Capulet, ce méchant Tybalt que Roméo essayera en vain de séparer de Mercutio et qu’il tuera pour venger son  ami. Mais le frère Laurent réussira à  marier les deux amoureux dans le secret absolu.. Et comme Roméo, pour sauver son amour avec Juliette se verra obligé de fuir Vérone pour se réfugier à Mantoue, la pièce basculera encore quand le bon frère Laurent se mêlera de l’affaire. Pas très doué pour ce genre d’aventures et trop sûr de lui,  le moine ne réussira pas son coup, à cause d’un contre-temps:  Juliette avale un poison  qui lui donnera l’apparence d’une morte afin d’éviter d’être mariée une seconde fois , puisque son papa veut la marier au beau comte Paris. Enterrée  dans le caveau de famille, elle devait en être délivrée par Roméo …
Mais il n’aura pas la lettre qui l’avertissait de cette pseudo-mort provoquée .Roméo  se procure donc du poison pour se suicider près de sa jeune femme. Juliette se réveillant découvre alors  son Roméo mort et se tue avec son épée. Moralité: il ne faut pas jouer aux apprentis-sorciers et le frère Laurent a tout faux. Mais l’on trouve déjà dans la pièce des thèmes comme la mort et le sommeil qui sont des thèmes récurrents chez Shakespeare et souvent liés, ou le danger des querelles familiales qui peuvent mettre en danger le corps même de la cité.  Cela dit , que peut-on faire de cette pièce qui a souvent , et surtout dans la deuxième partie des allures de  mélo.? La tâche n’est pas des plus faciles mais Olivier Py qui n’en est quand même pas à son coup d’essai quand il s’agit de monter des classiques pas très faciles comme par exemple L’Orestie, ne s’en sort pas très bien, là non plus, même s’il fait les choses avec beaucoup de professionnalisme.
Etait-il indispensable d’abord de nous livrer un dit texte intégral, relu, « adapté » et augmenté par lui-même parfois selon ses fantasmes, c’est à dire souvent vulgaire et racoleur? Sans doute pas. Au fait, quel montant de  droits d’auteur pour cette  ovni?
Côté mise en scène, on se demande aussi ce qu’a voulu faire Olivier Py en cherchant constamment à mettre la pièce à distance: plateau nu encombré d’escaliers et de praticables du genre encombrants et pas  beaux, que 
l’on déplace sans arrêt et qui ne servent pas à grand chose,avec, en fond de scène, une trentaine de barres fluo blanc très art contemporain,  et un pianiste dont on déplace l’estrade où on l’a juché, accompagne de nombreuses scènes. Et trois palmiers pour bien montrer que l’on est au théâtre-enfin pour une fois on a échappé à la « servante »  de service…
Costumes de ville, masques d’animaux pour plusieurs personnages, et de tête de mort, par moments, pour Roméo , passages fréquents de comédiens dans la salle, pianiste qui sort quand Roméo veut faire ses confidences à Juliette, installation d’un long praticable plusieurs fois de suite composé de plusieurs tables de style différent, palmiers en plastique que l’on fait déplacer sans raison par deux comédiens en prenant
m110906m110902romoetjuliette.jpgun escalier , scène de baise homosexuelle, criailleries injustifiées, Tybalte devenant  la mère de Juliette grâce à un voile noir vite jeté sur le visage du comédien, et parfois lumières allumées dans la salle  ensuite violemment éclairée par des projos de la scène, nounou de Juliette  s’envoyant des coups d’eau-de-vie pour tenir le coup: tout cela n’est pas du genre léger , léger et  fait quand même un peu vieux théâtre, comme du Vitez qui aurait été mal digéré! Mille regrets, Olivier Py, on vous a connu mieux inspiré et on a déjà vu cette provoc à trois centimes d’euro et ces gadgets  inefficaces des centaines de fois…
Un jeune comédienne, à l’entrée,  nous disait qu’elle allait sans doute,  comme à chaque fois qu’elle voyait la pièce, pleurer  sur le sort du bon Mercutio et sur celui des jeunes amants mais, retrouvée par hasard à l’entracte, elle avouait sa déception: « tout est distancié, disait-elle  et je n’ai pas ressenti la moindre émotion »… Bien vu!
Effectivement,  tout est sec comme un coup de cravache et bien démonstratif, sans aucune nécessité. Qu’a voulu nous prouver Olivier Py? Qu’il pouvait s’emparer d’un texte, même pas très bon, de Shakespeare et lui donner un air  » contemporain »?   Mais là, même quand on a d’excellents  acteurs comme Mireille Herbstmeyer (la nourrice de Juliette), ou Philippe Girard, toujours aussi impeccable (Frère Laurent) qui savent gérer ce genre de   tour de passe-passe -ils pratiquent Olivier Py depuis longtemps- cela ne fonctionne pas  du tout  et  manque singulièrement de grâce et de séduction, d’autant que les jeunes comédiens issus majoritairement du Conservatoire national ne semblent pas très à l’aise, un peu perdus sur ce grand plateau où ils ne cessent de crier. Rien n’est vraiment dans l’axe dans cette mise en scène. Où allez-vous Oliver Py?
Comme la seconde partie après l’entracte aux allures de mélo  a tendance à sérieusement patiner, les deux heures annoncées par Shakespeare au début de la pièce (qui en deviennent trois 
dans le prologue!), n’en finissent pas de finir!
Alors à voir? A vous de juger… De toute façon,  même pas très bien montée comme par Irina Brook, il y a quelques années à Chaillot, la pièce a toujours du succès auprès des ados, alors, si ados vous êtes restés, tentez votre chance  sinon vous pouvez vous abstenir, à moins de vouloir aller au théâtre pour vous envoyer une bonne dose d’ennui pendant trois heures…

Philippe du Vignal

Théâtre de l’Odéon jusqu’au 29 octobre

Et du  3 au 10 novembre 2011 – Comédie de Saint – Etienne / 15 au 17 novembre 2011 -La coursive, La Rochelle / 22 novembre au 10 décembre 2011 – TNS, Strasbourg / 14 au 17 décembre 2011 – Comédie de Caen / 21 et 22 décembre 2011 Schauspielhaus Zurich / 6 au 13 janvier 2012 – TNP, Villeurbanne /17 au 26 janvier 2012 – Le Grand T, Nantes / 31 janvier au 2 février – Maison de la Culture de Bourges / 7 au 9 février 2012 – Maison de la culture d’Amiens / 14 au 17 février 2012 – Comédie de Reims / 22 et 23 février2012- La Comète, Châlons en Champagne / 29 février et 1er mars – Théâtre de Cornouailles, Quimper / 7 au 9 mars 2012- Comédie de Valence / 13 au 15 mars 2012 – Comédie de Clermont-Ferrand / 20 au 23 mars 2012-Le Quartz de Brest / 4 et 5vril 2012- Théâtre Musical de Besançon / 10 au 13 avril 2012 – Théâtre Liberté de Toulon / 18 et 19 avril 2012 – Théâtre de Louviers, Scène Nationale D’Evreux / 25 au 28 avril 2012 – TNT,Toulouse / 16 au 19 mai 2012- TNN , Nice / 26 et 27 mai 2012 – Festival d’Istanbul

Une fois, deux fois, trois fois…Adjugé

Festival Mondial du Théâtre de marionnettes de Charleville Mézières

 Une fois, deux fois, trois foisAdjugé ! de Luk De Bruyker

cm012.jpg C’est à un spectacle singulier auquel le public a assisté . Un comédien, créateur du Taptoe de Gand, décide d’organiser une vente aux enchères de ses propres marionnettes. Ce théâtre a 42 ans d’existence et,  au fil des enchères, nous découvrons des extraits de son  répertoire.
Le spectacle débute avec humour et avec  une certaine distanciation. Entre deux lots à vendre, le comédien Luk De Bruyker nous conte son parcours personnel, y compris les déboires des dernières années et ses démêlés avec les autorités culturelles de Flandre qui trouvent son théâtre vieillissant.
Progressivement, le marionnettiste perd toute distance avec son sujet, et comme il l’a toujours fait, et embrasse sa marionnette avant de lui donner vie. La fiction du jeu rejoint alors  la réalité. Le théâtre Taptoe n’a plus aujourd’hui ni lieu, ni  subventions, il lui reste une adresse électronique,  quelques cartons, éphémères demeures de ses marionnettes et deux spectacles au répertoire dont celui-ci.
Le régisseur et le marionnettiste attendent de pouvoir continuer de rêver et de faire rêver, pour combien de temps encore ? Il ne faut pas s’étonner que le jeune public ne fréquente plus les théâtres, puisque de tels lieux ne sont plus aidés. Alors qu’ils ont une fonction d’éveil à d’autres scènes que l’on découvre à l’âge adulte. Les aides de l’Etat (en l’occurrence la Flandre)  favorisent  sans doute les arts numériques et virtuels, qui touchent un plus grand nombre de gens aujourd’hui.
Mais le sourire d’un enfant devant une marionnette n’est pas aisément quantifiable…

 

Jean Couturier

 

Joué le 18 et 19 septembre

contact : lukdebruyker@scarlet.be

Plus ou moins zéro

Plus ou moins zéro, spectacle en allemand, groenlandais,français et anglais surtitré de Christof Marthaler, mis en scène de Christof Marthaler. 


    mathaler.jpg Imaginez un gymnase dont le sol est zébré de marques jaunes , rouges ou bleues suivant le sport, avec, à un mur,  un filet de baskett. Il y a des téléphones portables dispersés par terre qui sonnent parfois sans que personne ne réponde; dans un coin,  un grand tableau noir couvert de colonnes de chiffres,et un autre qui descendra où une jeune femme écrira Climate summi avec , à côté un rétroprojecteur qui ne servira qu’à dispenser une fausse image, et un  pupitre en bois style conférencier, un haut- parleur par terre et une table pliante en stratifié, avec des livres  et quelques chaises autour , et des fenêtres sans vitres mais protégées par de solides grillages.  Sur le mur en planches de tôles vert pâle, une petite pancarte comme on en voit dans les pays nordiques indiquant la capacité maximum du lieu: 700 personnes , et au-dessous, une autre précisant en anglais que les chaussures de ville comme de gymnastique doivent être utilisées dehors, et non à l’intérieur.  Il y a un éclairage zénithal blanc qui tombe en douche et qui ne réchauffe pas l’atmosphère de cet endroit un peu dans le style de celui qu’inventait autrefois Jérôme Deschamps. Plastiquement, c’est comme une belle installation et  Anne Viebrock, qui a réalisé costumes et décors, a réussi son coup. Personne sur scène mais on entend des bruits de pas, puis des notes de piano dans le lointain, derrière une des fenêtres grillagées, et  dix hommes et femmes couverts de très épaisses parkas; ils vont se déshabiller en mettre des tenues de ville.  Il ne se passe pas grand chose mais c’est tout à fait impressionnant: pas de vrais dialogues mais  l’on reste là fascinés à écouter en allemand surtout, et en ce que l’on suppose être du groenlandais, des textes sur le changement climatique, et une femme chante une chanson, accompagnée au piano bientôt repris  à voix basse par les autres personnages. Quelqu’un qui ressemble à un pasteur essaye de faire chanter à une jeune femme inuït une chanson mais c’est en vain et elle finit par danser seule Il y a dans l’air comme une certaine mélancolie, le silence que l’on trouve dans la campagne en hiver, surtout quand il a neigé. Un haut parleur diffuse une voix un peu caverneuse.

Tout semble normal et à la fois absolument étrange, d’autant que l’on ne saura jamais  rien de ces étranges visiteurs. Ils chantent beaucoup ,comme chez Marthaler, le plus souvent en chœur, entre autre du Schubert, du Mozart et à la fin, un morceau de la 7 ème de Beethoven, et ce sont des  moments, pleins d’intelligence et de grâce. Et les comédiens,de plusieurs nationalités, en particulier le Français Marc Bodenar ont tous une belle présence sur scène.  Marthaler a conçu son spectacle comme un poème après être allé faire des repérages à Nuk, la petite capitale du Groenland avec ses comédiens à lui et en a recruté deux autres  sur place, et l’on sent qu’il a dû être très impressionné par ce pays-autrefois colonisé par les Danois-et par ses habitants.
Comme la mise en scène de Marthaler  est toute en précision et en rigueur, on se laisse embarquer, du moins…les quarante premières minutes, mais, comme les scènes et les images ont tendance à se répéter, et que le surtitrage est petit et pas facile à lire de loin, un ennui aussi pesant qu’irrésistible commence à s’installer, et l’hémorragie ne va pas cesser, comme l’an passé dans la grande Cour à Avignon ( voir le Théâtre du Blog  de juillet 2010)… Une bonne centaine de spectateurs  s’en va  donc discrètement ( sans doute des nuls qui n’ont rien compris  au grand génie de Marthaler), ce qui ne facilite pas la concentration du public qui ne cesse de toussoter.
Le spectacle,  au bout de deux heures dix ;se termine plutôt qu’il ne finit  après  un petit ballet assez drôle où les personnages shootent dans  les téléphones portables qui traînent par terre… Vraiment dommage! Ce qui aurait pu être un happening/performance/spectacle qui aurait duré 50 minutes maximum devient ici ennuyeux, assez bcbg, et finalement  prétentieux dans ses intentions, où Marthaler a bien du mal à nous restituer l’expérience, sans doute aussi passionnante que fabuleuse qu’il a pu vivre.
Désolé, quitte à nous répéter, n’est pas Angelica Liddell qui veut, et le gestion du temps fait ici mauvais ménage avec celle des images, même si, techniquement, les choses sont  irréprochables. On ressort de là donc très déçu.
Alors à voir? Nous n’y avons trouvé notre compte mais que cela ne vous empêche pas d’y aller, si vous êtes un inconditionnel de Marthaler et il y en a (une partie du public a quand même applaudi),  ou si vous supportez l’ennui au théâtre, sinon vous pouvez vous abstenir…

 

Philippe du Vignal

 

Théâtre de la Ville, jusqu’au 24 septembre.

Signaux

Festival mondial de Théâtre de Marionnettes de Charleville-Mézières

Signaux conception d’après un recueil de nouvelles de Bjarte Breiteig et mise en scène d’Yngvild Aspeli

signauxchristopheloiseaure769duit.jpgCe spectacle, soutenu par l’Institut International de la Marionnette et créé par cette ancienne élève de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts de la Marionnette. Avec  juste  trois  comédiens manipulateurs, il a envoûté le public. On y sent le fruit d’une longue maturation et un travail en profondeur sur le thème du manque et de la notion de membre fantôme à partir de textes d’un jeune auteur norvégien. Un homme seul dans sa maison, manipulé tour à tour par trois comédiens de manière fine et juste, vit dans son corps les perturbations psychologiques induites par la perte de sa main droite sectionnée accidentellement.
Il ressent les douleurs de ce membre fantôme, phénomène bien connu en médecine et encore mal expliqué. Et matérialisé ici par une main bleue et bien vivant, semble-t-il, pour le personnage qui souffre aussi d’acouphènes peuplant ses nuits, reviviscences cruelles du bruit de la scie circulaire qui a bouleversé sa vie… Le seul lien de cet homme avec l’extérieur est une fenêtre couverte de neige à travers laquelle il voit se dérouler la vie quotidienne. Parfois, une jeune femme habillée en bleu et dont il est secrètement amoureux, apparaît dans l’axe de son regard. La scénographie nous transporte dans cet univers nordique et le public partage intensément les douleurs de ce personnage. Si ce spectacle trouve des coproducteurs qui le fassent jouer en France  et à l’étranger, ne le manquez surtout pas.

Jean Couturier

Spectacle vu le 19 septembre à Charleville-Mézières.

Les vagues

Les vagues, de Virginia Woolf, adaptation et mis en scène Marie-Christine Soma

0603640001306743354.jpgOn pourrait parler, avant la lettre, de « l’ère du soupçon ». Le roman de Virginia Woolf ne relate pas le parcours de ses six personnages, ou figures, mais explore les diverses épaisseurs du temps, son élasticité, son émiettement, temps qui constitue, défait et refait ce que nous appelons personnages ou personnalités.
Cela paraît très abstrait, mais  il n’y a rien de plus concret, de plus vécu, pour peu que l’on veuille bien être attentif à sa propre expérience du temps. Le groupe aussi nous fait et nous défait. On ne peut s’empêcher de penser au « groupe de Bloomsbury », brève et intense expérience, avant et après la première guerre mondiale, de communauté d’artistes et écrivains passionnément modernes, inventifs, amoureux les uns des autres, dont firent partie Virginia Stephen et son futur époux Leonard Woolf. Un, personne, cent mille, dirait leur contemporain Pirandello des éclats du « moi ».
Le roman met en regard l’évolution de la lumière sur les vagues de la mer et celle de ses six figures. Sur scène, les images de la mer sont renvoyées à un discret écran vidéo et c’est la théâtralité du monologue intérieur qui est mise en avant. Les moments de dialogues, émergés du souvenir, faisant du reste partie du même flux de pensées et de sensations. Disons, du sens, à tous les sens du terme.
Tout cela paraît bien abstrait, encore une fois, et ça ne l’est pas. Marie-Christine Soma a choisi de donner au temps qui passe la figure la plus concrète qui soit, en distribuant Susan, Rhoda, Jinny, Neville, Bernard et Louis à deux générations d’acteurs. Elle a posé comme axe dramatique la mort accidentelle et lointaine de Perceval : il faut de l’absence, du manque pour que naisse la parole.
Les plus jeunes construisent les personnages, les sortent par petites touches du flou, les plus âgés commencent par de courtes effractions dans leur jeu, avec parfois une note d’humour, les regardent, leur font une ombre bienveillante du fond du plateau et progressivement en viennent au monologue rétrospectif : voilà comment nous avons vécu, voilà comment tout cela a toujours existé, mais pas toujours avec la même valeur.
Peu d’objets, des tables et des chaises pour jouer le repas de la bande au restaurant, quelques pétales en arrière plan, un jeu de miroir qui ouvre sur une brume indéfinie le petit plateau de la Colline. Il y a de l’enfance là-dedans, et de la gravité.
C’est parfois long (presque trois heures), avec flux et reflux. C’est toujours beau, et vrai. L’adaptation de Marie-Christine Soma est une vraie re-création contemporaine des Vagues, sans trahir jamais Virginia Woolf. Les chefs-d’œuvre ont cette force : on se sent porté en même temps que notre vision s’élargit et s’approfondit.
Qui dira que le théâtre est inutile ?

Christine Friedel

Théâtre de la Colline  01 44 62 52 52, jusqu’au 15 octobre.

« Chance » de Christian Boltanski

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« Chance » de Christian Boltanski

 Biennale de Venise

« Nous ne sommes pas remplaçables, mais nous serons remplacés »  a déclaré Christian Boltanski,  qui représente la France à la 54éme exposition internationale d’art de la  Biennale de Venise et offre au public une mise en scène inattendue et cinématographique  « Chance ». Installation gigantesque et spectaculaire  qui aborde   ses thèmes favoris : le hasard et le destin, la chance et la malchance.
Quatre chambres: dans  la première La roue de la chance , défile un ruban de photographies de nouveau-nés, quand la sonnette retentit, un portrait, choisi au hasard ,apparaît sur un écran:  sa destinée sera faite de bien ou de mal….tout est à écrire ou à subir. Les chambres numérotées 2 et 4,Dernières nouvelles des humains, sur  un cadran , un chiffre géant représente  soit en vert le nombre de naissances dans le monde, soit en rouge le nombre de tous ceux qui meurent. Et enfin, dans la  la troisième chambre Être à nouveau,  il y a une projection de photos de soixante nouveau-nés polonais et de cinquante deux Suisses décédés qui  défilent sur un écran à grande vitesse et vont se recomposer pour former une multitude de visages hybrides.
Boltanski nous propose alors un jeu: un bouton est à disposition,  et nous pouvons appuyer dessus, et si, par chance,  un visage se forme et que les trois parties appartiennent à la même personne, une musique est jouée et on gagne l »œuvre… Autour du pavillon français, des chaises magiques sont disposées, si on s’asseoit dessus la chaise nous pose une question: « est-ce la dernière fois? ».
A  chaque moment de notre vie, la question peut se poser…. et le destin décide.  Christian Boltanski nous rappelle que l’important , ce n’est pas « nous » en tant qu’individu mais la continuation de la vie. Il cite avec humour cette phrase de Napoléon regardant des milliers de morts sur le champ de bataille à Austerlitz: « Quelle importance ! Une nuit d’amour à Paris va réparer tout cela! »  Si vous le pouvez, allez à Venise pour ce conte universel sur le déroulement de la vie.

 

Nathalie Markovics.

 

54éme Biennale de Venise jusqu’au au 27 novembre 2011.

 

Pendant toute la durée de la Biennale vous pouvez jouer avec Boltanski sur : www.boltanski-chance.com si vous gagnez,  une surprise vous sera envoyée par le maître lui-même!!!

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