Van Gogh, Autoportrait
Van Gogh, Autoportrait par Jean 0′Cottrell
D’après des textes tirés de la correspondance de Vincent Van Gogh et de Van Gogh le suicidé de la société, le comédien vif et inspiré Jean O’Cottrell campe sur la scène à la fois l’homme en souffrance et l’artiste en quête d’absolu. Le spectateur attentif est convié à un chemin de croix, une recherche ardue de tous les instants à travers laquelle l’être infiniment fragile et profondément humain qu’est Vincent, s’exprime pour vivre et survivre. Habité par sa passion de peindre et un désir d’expression forcené, il ne cesse en même temps de questionner le monde et son frère Théo, un autre lui-même aux antipodes de sa propre posture sociale, tous deux à l’écoute sincère l’un de l’autre. Tout concourt à blesser Vincent : la solitude insupportable et douloureuse, le rejet des siens et de Kate – la femme aimée -à Amsterdam, la recherche dans l’errance urbaine – à la façon de Baudelaire et de ses Fleurs du Mal - d’une figure féminine de substitution choisie pour connaître enfin l’illumination à travers la sensualité ou le partage d’un corps. Faire l’épreuve de sa solitude encore dans sa chambre, et se sentir bien avec quelques meubles et accessoires comme un lit, une chaise, une table, une tenue rustique de peintre, la paire de fameux croquenots de Van Gogh, un bouquet d’iris bleus et violets jetés sur le fond d’une toile jaune, rien ne manque de l’imaginaire solaire diffusé par l’icône picturale attachante. Prennent alors vie ,délicatement l’évocation du café à Arles et les lumières des étoiles célestes dans le firmament noir: O’Cottrell est plus Van Gogh que nature, méditatif, inquiet, torturé, assailli par la voix qui l’habite et le contrôle aussi, dans l’exigence d’un art tyrannique jamais assouvi.
Le peintre prend conscience de son hypersensibilité et tente, ce faisant, de la juguler à travers le travail et une obsession de la perfection : « J’ai une fièvre de travail continuelle et j’en jouis comme une cigale. On remplit sa toile à la diable. Alors pourtant on attrape le vrai et l’essentiel, et celui qui assiste à cela en est parfois tout saisi et même emballé. » La lumière estivale, les bougies installées sur le chapeau de rêve de l’artiste qui peint dans la nuit pour mieux capter nuances et couleurs et en saisir l’esprit, rien ne manque au souvenir magistral d’un artiste injustement méconnu en son temps et devenu une référence artistique d’envergure en notre époque d’indécision et d’incertitude.
Un beau travail précis et concret qui fraie en même temps avec la beauté et l’onirisme qui jamais ne lasse.
Véronique Hotte
Van Gogh, Autoportrait, de et par Jean O’Cottrell. Jusqu’au 5 novembre 2011, du mardi au samedi à 21h au Lucernaire. Réservations : 01 45 44 57 34