La femme qui frappe
La femme qui frappe, texte et mise en scène de Victor Haïm.
Dans la petite salle du Ciné Théâtre 13, il y devant quelques rangées de sièges, quatre canapés deux places et neuf fauteuils club en cuir rouge où on peut se lover. Dehors, il fait encore presque chaud, la salle est fraîche mais pas climatisée: donc tout va bien pour la trentaine de spectateurs qui sont montés sur la butte Montmartre pour aller voir ce monologue.
Sur scène, le studio un peu minable avec des casiers où sont empilés des revues et des livres, et où sont accrochées des feuilles de manuscrit par dizaines il y a un panier de linge sale qui déborde, une table de cuisine qui accueille une machine à écrire mais sans doute aussi les repas. Dans l’angle droit, un lit avec un homme allongé, dont on ne voit que le jean et les grandes chaussures, mort sans doute puisqu’il ne bouge pas. On est le 22 juillet 1969, donc l’année d’après mai 68, et le lendemain du jour où deux astronautes, l’astronaute américain, Amstrong, chef de la mission Apollo 11, sort de la capsule spatiale et pose son pied gauche sur la lune, rejoint 19 minutes plus tard, par Aldrin. Tandis qu’ à Paris, une jeune femme s’escrime à taper le manuscrit d’un très épais roman, qui ne semble pas très passionnant si l’on en juge les morceaux qu’elle essaye de déchiffrer. Le roman lui est envoyé chaque jour par paquets envoyés par l’auteur qu’elle ne connaît pas du tout.
Bref, un travail épuisant- la jeune femme s’endort parfois sur sa machine-sans grand intérêt, payé avec un élastique mais il faut bien vivre et payer les obsèques de son compagnon comme elle le dira à l’auteur dont elle n’a pas encore reçu la moindre avance, et à qui elle téléphone pour une histoire de virgule qu’elle juge mal placée. Elle le rappellera plusieurs fois, et il y a aura donc un véritable dialogue entre cet écrivain amateur et la pauvre dactylo qu’il traite d’abord avec une certaine suffisance . On devinera seulement ce qu’il lui dit à l’autre bout du fil mais on n’entendra jamais sa voix, et c’est peut-être dommage…Puis, les choses évolueront et l’écrivain, assez pervers, la flattera jusqu’à avoir avec elle une conversation érotique. mais les affaires sont les affaires, et la jeune femme devra de nouveau subir ses sarcasmes, quand elle lui fera des remarques de style. Et cela finit comment? Vous le saurez si vous y allez mais pas très bien.
C’est Victor Haïm qui, en vieux routier du théâtre, a dirigé la comédienne et a mis en scène sa pièçette . Plutôt pas mal, et les 70 minutes passent vite, même cette femme qui frappe aurait pu frapper dix minutes de moins… Même si ce cadavre sur le lit a quelque chose de surréaliste qui n’a pas grand chose à voir avec le dialogue entre l’écrivain et la dactylo.
Mais Marianne Soumoy, tour à tour espiègle, drôle mais aussi parfois accablée par ce travail qui la mine, possède le métier nécessaire pour venir à bout de ce long monologue: diction et gestuelle impeccables, et maîtrise de l’espace tout à fait convaincante.. Bref, un vrai plaisir. Alors y aller? Pas nécessairement pour le texte qui reste quand même un peu mince pour une soirée, mais si vous avez envie de découvrir un vraie comédienne…
Philippe du Vignal
Ciné Théâtre 13 avenue Junot 75018 Paris, jusqu’au 15 octobre. T: 01-42-54-15-12