Cabaret Nono

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Cabaret Nono,  mise en scène de Marion Coutris et Serge Noyelle, textes de Marion Coutris, musiques de Marco Quesada.

 

  dsc3234.jpg Cela fait maintenant quelque quatre ans que Serge Noyelle a émigré et quitté son théâtre de Châtillon,  pour installer sa compagnie, à Marseille, au milieu des pins dans  la Campagne Pastré, une propriété de plusieurs hectares  de garrigue au pied des montagnes et à deux pas de la mer qui appartenait à Lily Pastré, grande amie marseillaise des arts et de la musique qui la légua à la municipalité, sous réserve qu’il n’y ait aucune construction en dur.
  Serge Noyelle a donc fait construire un grand chapiteau de 40 m de long sur  20 m de large et des annexes, en bois ou en toile pour accueillir le public, les artistes et techniciens de son équipe. Il vient d’y  présenter  à nouveau pour une série de représentations le Cabaret Nono qu’il avait créé dans une première version en 2004., puis rejoué ensuite .
Le cabaret est une forme de spectacle qui s’était comme greffée aux quartiers des théâtres, les Boulevards et le Palais-Royal; ces cabarets devinrent ensuite des caf’conc’, où comme leur nom l’indique, le public, sans doute plus hétérogène que celui des théâtres, pouvait à la fois consommer des boissons et regarder des numéros, des chansons et des danses.
Idée qu’a repris Serge Noyelle, avec une scénographie particulièrement bien adaptée: imaginez un ovale avec une piste qui l’entoure et à chaque extrémité, un orchestre  de quelques musiciens et une scène de quelques cinq  mètres d’ouverture. Au milieu, le public-190 personnes un peu serrées autour de tables rondes et convié à déguster un petit dîner de qualité, servi à l’assiette et avec beaucoup d’aisance, ce qui n’est pas évident avec tant de monde, par des garçons en smoking, comédiens de leur état.

  Il ne s’agit pas tout à fait d’un cabaret traditionnel mais plutôt de tableaux vivants avec quelques fragments de texte, des chansons et des numéros dansés en solo ou chœur, le tout dirigé par un maître de cérémonie en queue-de-pie aux couleurs chatoyantes. Les costumes et les maquillages  de chacun des quelque cinquante  personnages incarnés par une vingtaine d’acteurs/chanteurs/danseurs, souvent travestis: hommes/femmes (c’est plus drôle évidemment) et femmes/ hommes sont d’une rare invention, et rappellent le baroque de ceux du Ridiculous Theater new yorkais de John Vaccaro dans les années 70,avec ses strass, ses paillettes.
C’est , comme une galerie de personnages entraînés dans un délire poétique et comique où l’on perçoit parfois des bribes du texte écrit par Marion Coutris. Mais le cabaret Nono, c’est aussi  une suite de formidables images où l’on retrouve parfois l’influence du grand Kantor qui avait tant marqué Noyelle à ses débuts, comme  cette jeune femme au faux long nez , en robe noire qui tire une sorte de chariot où est étendue une autre jeune femme les seins dénudés; un homme au crâne rasé lui verse lentement l’eau d’un arrosoir  vert dans la bouche… Le tout dans la brume traversée de très belles lumières .
On est un peu dans Magritte et le plus souvent dans le surréalisme: Noyelle est autant  peintre, et bon peintre,  que metteur en scène, et il déguste en connaisseur la beauté sculpturale des corps nus ou habillés, filiformes ou obèses comme celui de certaines de ses actrices.

  Comme l’écrit Chantal Jaquet dans Le corps:  » La vue saisit l’existence matérielle des corps ne tant qu’ils se manifestent par la forme et la couleur. Elle est apte à percevoir le beau, non seulement pour des raisons internes à l’œil qui tiennent à la condition de possibilité de la perception visuelle, à savoir la lumière » .
Que le corps soit immobile ou en mouvement, comme dans cette formidable danse rythmée  sur la piste circulaire des acteurs-tous possèdent une maîtrise absolue de leurs corps- qui entrent les uns après les autres par une fente du rideau rouge. Rien que pour cette image fabuleuse à la Pina Bausch, le cabaret Nono mériterait d’être vu.

  Il y a aussi suspendu au milieu du public et éclairé des lumières bleues, et, au dessus d’un bac rond accueillant les bouteilles  de vin, un magnifique lustre de perles de glaces qui fond lentement. Saluons aussi les musiciens  qui sont là en permanence en osmose avec les comédiens, et la performance des serveurs et employés de cuisine qui arrivent à servir correctement une entrée, un plat et un dessert  en harmonie avec le spectacle.         Jacques Livchine, qui a pourtant la dent dure, ne tarissait pas d’éloges sur le spectacle.Le public marseillais, lui aussi est vite conquis , et a très longuement applaudi, après  deux heures et demi avec une petite pause pour seulement,  ceux,  prioritaires, qui ont envie de coke ou d’aller aux toilettes  rappelle Serge Noyelle.
  Des bémols? Pas beaucoup. Le spectacle a tendance à patiner un peu les vingt dernières minutes- fatigue des acteurs et/ou du public moins réceptif-quelques coupes ne seraient pas un luxe-et  même si Noyelle trouve que la place n’est pas chère puisque le repas (sans boissons!) est inclus dans le prix d’entrée: 45 euros(tarif réduit: 35 euros et il y a beaucoup de bénéficiaires).
Ce qui est vrai, mais n’est quand même pas à la portée de nombre de Marseillais, d’autant plus qu’il faut une voiture pour y aller…Et comme les transports en commun s’arrêtent à 21 heures… Sans doute pourrait-on revoir la formule?

   En tout cas, si vous le pouvez, n’hésitez pas: une autre édition de ce Cabaret sortira la saison prochaine à Marseille.

 

Philippe du Vignal

 

 

Théâtre Nono – Campagne Pastré  35 Traverse de Carthage 13008 Marseille.


Archive pour 14 octobre, 2011

Jungles


Jungles,
spectacle de Patrice Thibaud, co-mise en scène de Suzy Firth, Michèle Guigon et Patrice Thibaud.

 VOIR LA VIDEO↓

Il y a trois ans, Patrice Thibaud que l’on avait vu dans les derniers spectacles de Jérôme Deschamps, avait créé Cocorico  avec mime et musique, et deux personnages qui inventaient des numéros sur le thème du  Far-west, du ventre d’un lion ou d’un défilé militaire du 14 juillet. Jungles, qu’il avait créé en janvier dernier à Chaillot, c’est aussi bien sûr, un spectacle burlesque,  » pour montrer, dit Patrice Thibaud, l’animalité plus ou moins refoulée qui peut, à tout moment,  prendre le pas sur l’homme civilisé » . Bon, on veut bien…
Sur le plateau, deux  petites baraques qui font penser à celles  des Pieds dans l’eau que Jérôme Deschamps et Macha Makeieff avaient monté, il y a quelque quinze ans, sur cette même scène: l’une qui fait office de maison, avec un  affreux papier mural, l’autre de scène/castelet dotée d’un piano, avec une  porte sur chaque côté dont l’une se prolonge par une passerelle.
Un homme  et sa femme(?) cherchent à défendre leur portion de territoire contre un chien au comportement des plus humains joué par un comédien acrobate et pianiste (Philippe Leygnac) qui s’insinue dans le couple.Il y a aussi un autre homme/chien que l’on verra peu. Aucune parole,   sinon des  borborygmes, chuintements, voire au bout d’un moment quelques pauvres phrases. Il y a, de toute évidence, une sorte de conflit amoureux entre le bonhomme (Patrice Thibaud) et le chien qui voudrait bien goûter aux charmes de sa compagne, la belle Marie Parouty qui reprend le rôle de Lorella Cravoty.
Les coups de matraque (en mousse rouge) et les gags/poursuites se succèdent, et c’est souvent drôle, comme, entre autres, le début quand le bonhomme mange des craque-pains en rythme: c’est la vieille histoire du comique qui naît d’un comportement humain calqué sur du mécanique, bien analysé par Bergson au début du siècle dernier. Il y a aussi une scène remarquable, tout à fait dans la ligne du burlesque américain, où la leçon de piano tourne à l’avantage du chien plus fort que le maître: le spectacle prend alors tout son sens.
Mais tout n’est pas de cette qualité Patrice Thibaud, constamment en scène, en fait beaucoup, trop sans doute, et trop souvent: gesticulations,grimaces, roulements d’yeux, rictus et il y a souvent comme du  Louis de Funès dans l’air auquel le comédien ressemble étonnamment, même s’il est plus grand, mais  le public est ravi.
Marie Parouty  a, elle,  un jeu plus  discret mais singulièrement efficace, même si on a souvent l’impression qu’elle sert parfois de faire-valoir à Patrice Thibaud. Mais, comme les gags sur le thème animal/humain se succèdent, comme en témoignent les rires en cascade de la plus grande partie du public, le spectacle fonctionne quand même.
Mais la  mise en scène- signée à trois, et ceci explique sans doute cela- reste peu convaincante: le rythme  reste souvent lent, voire cahotant, les quelques petits dialogues qui ne sont pas en harmonie avec  l’intrigue, tombent à plat, et les poursuites ne sont pas toujours vraiment maîtrisées.
C’est un spectacle qui manque d’un fil rouge, d’une dramaturgie et d’une véritable direction d’acteurs. Qui dirige qui?
Alors à voir? Oui, si vous n’êtes pas trop exigeant, mais  on reste quand un peu sur sa faim pendant ces 80 minutes, et le spectacle se termine plus qu’il ne finit, comme s’il était encore en rodage… Mais,  encore une fois, le public rit de bon cœur…

 

Philippe du Vignal

Théâtre national de Chaillot, salle Gémier jusqu’au 18 juillet.

http://www.dailymotion.com/video/xix6zi

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