Jungles
Jungles, spectacle de Patrice Thibaud, co-mise en scène de Suzy Firth, Michèle Guigon et Patrice Thibaud.
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Il y a trois ans, Patrice Thibaud que l’on avait vu dans les derniers spectacles de Jérôme Deschamps, avait créé Cocorico avec mime et musique, et deux personnages qui inventaient des numéros sur le thème du Far-west, du ventre d’un lion ou d’un défilé militaire du 14 juillet. Jungles, qu’il avait créé en janvier dernier à Chaillot, c’est aussi bien sûr, un spectacle burlesque, » pour montrer, dit Patrice Thibaud, l’animalité plus ou moins refoulée qui peut, à tout moment, prendre le pas sur l’homme civilisé » . Bon, on veut bien…
Sur le plateau, deux petites baraques qui font penser à celles des Pieds dans l’eau que Jérôme Deschamps et Macha Makeieff avaient monté, il y a quelque quinze ans, sur cette même scène: l’une qui fait office de maison, avec un affreux papier mural, l’autre de scène/castelet dotée d’un piano, avec une porte sur chaque côté dont l’une se prolonge par une passerelle.
Un homme et sa femme(?) cherchent à défendre leur portion de territoire contre un chien au comportement des plus humains joué par un comédien acrobate et pianiste (Philippe Leygnac) qui s’insinue dans le couple.Il y a aussi un autre homme/chien que l’on verra peu. Aucune parole, sinon des borborygmes, chuintements, voire au bout d’un moment quelques pauvres phrases. Il y a, de toute évidence, une sorte de conflit amoureux entre le bonhomme (Patrice Thibaud) et le chien qui voudrait bien goûter aux charmes de sa compagne, la belle Marie Parouty qui reprend le rôle de Lorella Cravoty.
Les coups de matraque (en mousse rouge) et les gags/poursuites se succèdent, et c’est souvent drôle, comme, entre autres, le début quand le bonhomme mange des craque-pains en rythme: c’est la vieille histoire du comique qui naît d’un comportement humain calqué sur du mécanique, bien analysé par Bergson au début du siècle dernier. Il y a aussi une scène remarquable, tout à fait dans la ligne du burlesque américain, où la leçon de piano tourne à l’avantage du chien plus fort que le maître: le spectacle prend alors tout son sens.
Mais tout n’est pas de cette qualité Patrice Thibaud, constamment en scène, en fait beaucoup, trop sans doute, et trop souvent: gesticulations,grimaces, roulements d’yeux, rictus et il y a souvent comme du Louis de Funès dans l’air auquel le comédien ressemble étonnamment, même s’il est plus grand, mais le public est ravi.
Marie Parouty a, elle, un jeu plus discret mais singulièrement efficace, même si on a souvent l’impression qu’elle sert parfois de faire-valoir à Patrice Thibaud. Mais, comme les gags sur le thème animal/humain se succèdent, comme en témoignent les rires en cascade de la plus grande partie du public, le spectacle fonctionne quand même.
Mais la mise en scène- signée à trois, et ceci explique sans doute cela- reste peu convaincante: le rythme reste souvent lent, voire cahotant, les quelques petits dialogues qui ne sont pas en harmonie avec l’intrigue, tombent à plat, et les poursuites ne sont pas toujours vraiment maîtrisées.
C’est un spectacle qui manque d’un fil rouge, d’une dramaturgie et d’une véritable direction d’acteurs. Qui dirige qui?
Alors à voir? Oui, si vous n’êtes pas trop exigeant, mais on reste quand un peu sur sa faim pendant ces 80 minutes, et le spectacle se termine plus qu’il ne finit, comme s’il était encore en rodage… Mais, encore une fois, le public rit de bon cœur…
Philippe du Vignal
Théâtre national de Chaillot, salle Gémier jusqu’au 18 juillet.
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