LA TEMPÊTE
La Tempête de William Shakespeare, mise en scène de Philippe Awat.
Cet étonnant spectacle qui a transporté d’enthousiasme le public très jeune de la Maison des Arts de Créteil. Une tempête terrifiante se déchaîne au sommet d’un immense bateau qui allonge une vertigineuse coque rouillée, langue brune qui envahit le plateau. Le calme revenu, Prospero, duc de Milan, avoue à sa fille Miranda la trahison dont il a été victime quand son frère l’a déchu , quinze auparavant, en s’alliant avec le duc de Naples. Banni de son duché, il a échoué dans cette île perdue avec ses livres et sa fille de trois ans. Caliban, enfant sauvage, né de la sorcière Sycorax. Ariel, un esprit qu’il a délivré d’un maléfice, l’aide à rassembler les survivants du naufrage que son pouvoir magique a déclenché.
Miranda rencontre Ferdinand, fils héritier du duc de Naples, et en tombe amoureuse: c’est le premier homme qu’elle voit sur son île. Prospero qui veut mettre leur amour à l’épreuve le charge de tâches ingrates, le transport épuisant des bûches qu’il doit hisser en haut de la coque du bateau. Pendant ce temps, les autres survivants de la cour de Naples et de Milan, (pas un n’a péri) sont en meilleur état qu’avant le naufrage, et vont à la recherche du fils héritier qu’ils croient noyé. Un régicide se prépare et échoue mais Prospéro les tient à l’œil, grâce au fidèle Ariel qui les surveille, et qui les endort au bon moment.
Les retrouvailles finales verront Prospero pardonner et abandonner sa magie pour retrouver son duché de Milan, qui sera gouverné par le jeune couple. Caliban s’est mis au service deux ivrognes et voudrait leur faire assassiner Prospero, et c’est un moment hilarant. L’espace sonore et visuel tient de la magie : les comédiens ne cessent d’escalader la coque vertigineuse du bateau avec une adresse de circassiens, Ariel, avec une voix sonorisée qui semble venir de l’au delà, sort d’un hologramme et son costume de moelleuse poupée nue en fait un personnage étrange.
Il faudrait citer toute la distribution de ce remarquable spectacle mais Jean-Pol Dubois campe un magistral Prospéro, tirant les ficelles de ce naufrage qu’il a provoqué, pour retrouver son duché avant de le léguer aux jeunes amoureux et s’abandonner à la mort qui est proche. Florent Guyot, campe un étonnant Caliban qui va rester seul sur son île… De la belle ouvrage d’une vraie compagnie née sous l’aile du Théâtre du Soleil, dont on avait pu apprécier Têtes rondes et Têtes pointues de Brecht , Pantagleize de Ghelderode et Le roi nu de Schwarz .
Edith Rappoport
Maison des arts de Créteil jusqu’au 26 novembre et Théâtre Romain Rolland de Villejuif du 9 au 20 janvier 2012; puis en tournée jusqu’en avril 2012.