L’histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk
L’histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk roi du Cambodge d’Hélène Cixous, direction historique et textuelle d’Ashley Thomson, mise en scène de Georges Bigot et Delphine Cottu avec l’École des Arts Phare Ponleu Selpak, recréation d’après la mise en scène d’Ariane Mnouchkine
Nous avions pu découvrir les dernières séquences de cette étonnante épopée, au Théâtre des Célestins à Lyon, programmée par le Festival Sens Interdits . Norodom Sihanouk a été créé au Cambodge, puis repris en tournée dans la région Rhône-Alpes et pour dix représentations au Théâtre du Soleil. Au terme de plusieurs sessions d’ateliers menés au Cambodge par Ariane Mnouchkine à Battembong (Cambodge), Georges Bigot l’inoubliable interprète du Sihanouk du Théâtre du Soleil (1985) a été chargé de monter avec Delphine Cottu le spectacle en langue khmer avec une trentaine de jeunes artistes circassiens issus de milieux défavorisés, rescapés du génocide perpétré par les Khmers rouges qui a fait disparaître la moitié de la population du Cambodge.
Hélène Cixous s’était inspirée des travaux d’une jeune chercheuse américaine Ashley Thomson pour décrire la destinée de ce petit pays voisin du Viet-Nam déchiré par un cyclone politique mondial, piétiné, bombardé par les puissances occidentales puis asiatiques. Georges Bigot, appelé par Ariane Mnouchkine qui travaillait sur ce projet depuis 2007, a réalisé son rêve de monter la pièce au Cambodge; les répétitions ont commencé en avril 2010 et après deux nouveaux cycles de travail, L’histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk roi du Cambodge a été créé à Battambang le 25 juin 2011, à la veille de l’ouverture du procès des Khmers rouges à Phnom Penh.
Cette tragique épopée retrace la première époque de la destruction du Cambodge de 1970 à 1979, le dialogue du prince Sihanouk avec son défunt père, son départ pour Moscou puis la Chine après avoir confié le gouvernement au général Lon Nol et son royaume à sa mère, ses échecs diplomatiques pendant son absence, sa méfiance des Occidentaux comme du Viet Nam voisin qui finira par l’envahir…
On retrouve la splendide écriture épique du Théâtre du Soleil: un orchestre rythme les entrées et les sorties des protagonistes derrière un beau voile de soie orange , les acteurs solistes arrivant à la cour sur un petit pont de bois pour donner des nouvelles, s’inclinant les mains jointes devant la royauté, les groupes pénétrant par le jardin ou le fond du grand plateau. Sihanouk est interprété avec une belle autorité rageuse par une jeune femme San Marady, d’autres personnages masculins sont aussi pris en charge par des femmes.
C’est interprété avec une belle rigueur par une troupe soudée, on souhaiterait que le spectacle puisse être diffusé plus largement en France, au delà de la vingtaine de représentions qui vient de se terminer. On attend aussi la deuxième époque…
Edith Rappoport
Théâtre du Soleil
L’École des arts Phare Ponleu Selpak et le Collectif des clowns d’ici et d’ailleurs présentera Royaumes, projet de coopération pour un développement durable, au Théâtre du Soleil du 11 au 31 décembre.
www.theatre-du-soleil.fr