PORTRAIT ANNA SEGHERS

Portrait Anna Seghers

Lauréate du programme Villa Medicis hors les murs de CULTURESFRANCE, Françoise Lepoix a résidé à Berlin de septembre 2009 à janvier 2010.

Probité : de ce voyage, de ce séjour, il faut rapporter ce qui s’est passé, ce qui s’est produit. Berlin, pour Françoise Lepoix, c’est une figure, une figure bien nette, des photos, des textes, une biographie connue, un parcours d’Allemagne au Mexique, et puis de nouveau en Allemagne, à l’Est. Cette figure, c’est celle d’Anna Seghers. Faire son portrait : quand ? Quand elle publie son premier texte et qu’elle prend le pseudonyme de Seghers ? Quand elle quitte l’Allemagne nazie ? Dès qu’on s’y attache, le portrait vous échappe. Reste celui qui travaille à le faire.

Dans un décor de bric et de broc qui renvoie à ce voyage – quelques chaises de plastique vivement colorées, un vieux haut-parleur, d’autres objets figés dans le style “cinquante“ de l’Est, d’autres d’aujourd’hui – , Françoise Lepoix, avec la complicité sur scène de Stan Valette (à la guitare ) et d’Aurelie Youlia (à tous les rôles de “réplique“), nous dresse son propre portrait. Sans aucun égotisme, mais dans la transparence d’une recherche authentique : qu’est-ce que j’ai pu trouver d’Anna Seghers au coin de la rue Anna Seghers et de la rue Silberberger ? En même temps que la grande Anna lui échappe des mains dans les lieux qui lui sont consacrés, elle lui revient par surprise dans la maison où elle a vécu où elle vivrait encore ? Qu’est-ce qu’elle cherche ? Une idée du communisme héroïque et trahi ? De la place de l’artiste dans une société bloquée ? Le sens de cet étrange masochisme qui pousse de grands écrivains comme Anna Seghers et Heiner Müller (exclu de l’Union des écrivains !) à choisir l’Est quand celui-ci se débarrasserait bien d’eux dans les bras du capitalisme ? Bonnes questions, et ce ne sont pas les seules. Organisons le scandale, dirait Brecht.

Les réponses sont fragiles, droites. On assiste à une sorte de journal intime, déroulé au fil des pages, des écrivains qui font une ville. Et aussi des passants, et de cette langue que la promeneuse de Berlin connaît mal et qui dit Wendung (tournant) là où l’Ouest dit sans états d’âme, puisqu’il est définitivement du côté du Bien : chute (du mur). Il y a là un théâtre minimal, généreux, un jeu de transformations à vue : on ne vous dira pas « je est un autre », c’est déjà pris, et très impressionnant. Mais : je suis traversé(e) par ceux que je rencontre, vivants et morts, et ils me transforment, et je les transforme.
C’est ce qui se passe, là. C’est important.
À lire : tout Anna Seghers

Christine Friedel

Vu à l’Échangeur, 01 43 62 71 20


Archive pour 14 décembre, 2011

Le Précepteur de J. Lenz, mise en scène de Mirabelle Rousseau

Le Précepteur de J. Lenz, adaptation du T.O.C., mise en scène de Mirabelle Rousseau

Après un premier essai  en 2010 au Théâtre des Quartiers d’Ivry dans le cadre d’une série d’accueils de collectifs,  Le Théâtre Obsessionnel Compulsif présente une mise en scène de ce mélodrame familial  écrit  par Lenz à la fin du XVIII ème siècle. Le jeune Laüfer, issu d’une famille bourgeoise est contraint d’accepter une place de précepteur dans une famille noble pour instruire un bambin réticent. Considéré comme un domestique, il a un salaire sans cesse rogné par un patron noble et avare et est aussi chargé d’instruire la jeune Gustine qui s’ennuie.

  Elle tombe dans ses bras mais le fruit de leurs amours va la contraindre à s’échapper de la maison familiale; quant à son amant, il  doit s’enfuir pour se réfugier chez le maître d’école du village. Gustine accouche puis confie son enfant à une vieille femme aveugle et elle part à la recherche de son père qui la sauve de la noyade. Laüfer, devenu assistant du maître d’école qui le rabroue amicalement, finit par se castrer puis  épousera une jeune fille du village amoureuse de lui…
  Il y a autres personnages comme ce jeune noble ruiné qui dilapide la bourse envoyée par son père pour ses études; mis en prison, relayé par un ami qui prend sa place… On n’en finirait plus d’énumérer les épisodes de ce drame qui finit bien. Après une première partie jouée dans un décor bourgeois, les onze comédiens se déchaînent, abattant et remontant les éléments du décor dans un joyeux désordre, mettant en lumière des passages de répétitions, allant jusqu’à souffler à vue des passages que les acteurs auraient oublié.

Frédéric Fachena, en père noble et juste, Richard Sammut  (son frère désespéré) par la recherche de sa fille (Estelle Lesage), Étienne Parc,  jeune étudiant volage et dilapidateur et surtout Marc Berman, en instituteur sévère et généreux, sont remarquables. La morale bourgeoise de ce mélodrame est mise en question avec finesse, en particulier quant au  traitement des femmes, par une vraie troupe qui s’affirme depuis une dizaine d’années.

Edith Rappoport

Théâtre de Vanves jusqu’au 14 décembre.

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