Au bord de la route

Au bord de la route, conception, mise en scène et chorégraphies de Patrice Bigel.

Au bord de la route AUBORDDELAROUTE-300x177Le dernier  spectacle de Patrice Bigel se situait autour de l’œuvre d’Henry Monnier  et  sur le langage employé par ses personnages (Voir Le Théâtre du Blog). Mais, cette fois, Patrice Bigel présente un travail tout à fait singulier  où, dit-il avec raison, » les chorégraphies, le texte, le son, la lumière et la scénographie participent au même titre au sens du spectacle ».
L’espace de jeu  de l’Usine Hollander-ancienne tannerie/maroquinerie- est plus profond que large mais avec un décrochement sur le côté cour. Sol nu recouvert d’un carrelage plastique à petits carreaux. Une vingtaine de petits cubes blancs où l’on peut s’asseoir et à sur le côté, une sorte de cabine éclairée d’un rouge violent où les comédiens parlent à tour de rôle devant une caméra et  dont l’image est reproduite sur le mur du fond.. Dix jeunes  comédiens (cinq filles cinq garçons habillés en voir et blanc) dansent, même si ce ne sont pas des danseurs, et maîtrisent parfaitement le temps (une petite heure) et l’espace.

Le point de départ de ce travail-aussi plastique que théâtral,  on l’aura compris- est une  œuvre du photographe brésilien Fernando Montiel Klint , actes-de-foi-300x238où une jeune femme- on peut supposer que c’est une femme vu la minceur des doigts- a la tête couverte de la terre d’une plante verte qui se serait renversée sur elle dans un appartement vide.
Curieuse sensation d’espace et de temps bousculés: aucun repère, aucune orientation possible: on peut simplement dire que le grand appartement se situe dans l’immeuble d’une ville et sans doute au Brésil…
Patrice Bigel cite aussi  Baudrillard:  » Tous les événements qui  n’ont pas eu  lieu, ceux qui se sont perdus en route, ceux qui sont trop lents pour être jamais arrivés et d’autres silencieux qui n’auront jamais l’occasion de se produire- tout cela constitue l’anti-matière de notre histoire, la « masse manquante » des événements absents qui infléchit le cours des événements réels ».

Les jeunes comédiens formés par Bigel:  Samih Arbib, Mara Bijeljac, Adrien Casalis, Sophie Chauvet, Anthony Duarte, Elsa Macaret, Yasminn Nagid, Anna Perrin, Pierre Possien, Erwin Sailly font tous un travail remarquable; ils forment une équipe soudée, ont une  gestuelle et  une  diction parfaite et sont  capables de donner rythme et puissance à cet essai où s’est élaboré une  synthèse de l’image,  du geste, mais aussi du texte qu’Alisson Corson, élève à l’ENSATT, a  écrit au cours des répétitions. Mais, loin d’être vraiment convaincant, trop « littéraire » ,  il  a du mal à s’intégrer à cette proposition.
 Mais qu’importe, Au Bord de  la route est un spectacle plus visuel et sonore que parlé, presque onirique. Il y a  un court moment un peu flou vers la fin mais on est vite subjugué par  ces visages  filmés en gros plan et par la beauté parfaite  des cubes blancs que les acteurs manient avec virtuosité, tout en dansant. On pense, bien sûr, à Cunningham mais aussi au minimal art et aux sculptures d’un Carl André ou d’un Don Judd. Et  à la fin-Bigel s’est fait plaisir mais pourquoi pas-il y a une courte mais belle vidéo en noir et blanc, réalisée  en images de synthèse avec un paysage de collines assez fabuleux.
  On peut toujours faire la fine bouche et dire que cela ne fait pas vraiment sens, mais, pour nous,  si justement, c’est grâce à ce genre d’expérimentations que le théâtre contemporain peut évoluer,  loin de la centième revisitation de La Noce chez les petits bourgeois de Brecht ou  de textes non théâtraux monologués; qui sont trop souvent  notre lot quotidien … Le s jeunes spectateurs qui  assistaient en majorité au spectacle était  réjoui, ce qui est toujours fort bon signe.
 D’accord,  l’Usine Hollander est à Choisy-le-Roi mais le RER est juste à côté; d’accord, cela ne se joue que les vendredis, samedis et dimanche, mais que cela ne vous  dissuade surtout pas d’aller voir cet étonnant Au Bord de la route; ce n’est pas un luxe par les temps qui courent…et le théâtre français a bien besoin de gens comme Patrice Bigel.
Vous avez aussi le droit d’aller au bar du premier étage; vous ne devriez pas être déçus: il y a une  grande salle d’une rare poésie avec  quelques  dizaines de bustes de plâtre alignés sur un étagère et de très belles plantes vertes devant une grande verrière, soigneusement entretenues par le scénographe et régisseur général…

Philippe du Vignal

Usine Hollander 1 rue du Docteur Roux Choisy-le-roi jusqu’au 12 février. Réservations: 01-46-82-19-63


Archive pour 10 janvier, 2012

Au bord de la route

Au bord de la route, conception, mise en scène et chorégraphies de Patrice Bigel.

Au bord de la route AUBORDDELAROUTE-300x177Le dernier  spectacle de Patrice Bigel se situait autour de l’œuvre d’Henry Monnier  et  sur le langage employé par ses personnages (Voir Le Théâtre du Blog). Mais, cette fois, Patrice Bigel présente un travail tout à fait singulier  où, dit-il avec raison, » les chorégraphies, le texte, le son, la lumière et la scénographie participent au même titre au sens du spectacle ».
L’espace de jeu  de l’Usine Hollander-ancienne tannerie/maroquinerie- est plus profond que large mais avec un décrochement sur le côté cour. Sol nu recouvert d’un carrelage plastique à petits carreaux. Une vingtaine de petits cubes blancs où l’on peut s’asseoir et à sur le côté, une sorte de cabine éclairée d’un rouge violent où les comédiens parlent à tour de rôle devant une caméra et  dont l’image est reproduite sur le mur du fond.. Dix jeunes  comédiens (cinq filles cinq garçons habillés en voir et blanc) dansent, même si ce ne sont pas des danseurs, et maîtrisent parfaitement le temps (une petite heure) et l’espace.

Le point de départ de ce travail-aussi plastique que théâtral,  on l’aura compris- est une  œuvre du photographe brésilien Fernando Montiel Klint , actes-de-foi-300x238où une jeune femme- on peut supposer que c’est une femme vu la minceur des doigts- a la tête couverte de la terre d’une plante verte qui se serait renversée sur elle dans un appartement vide.
Curieuse sensation d’espace et de temps bousculés: aucun repère, aucune orientation possible: on peut simplement dire que le grand appartement se situe dans l’immeuble d’une ville et sans doute au Brésil…
Patrice Bigel cite aussi  Baudrillard:  » Tous les événements qui  n’ont pas eu  lieu, ceux qui se sont perdus en route, ceux qui sont trop lents pour être jamais arrivés et d’autres silencieux qui n’auront jamais l’occasion de se produire- tout cela constitue l’anti-matière de notre histoire, la « masse manquante » des événements absents qui infléchit le cours des événements réels ».

Les jeunes comédiens formés par Bigel:  Samih Arbib, Mara Bijeljac, Adrien Casalis, Sophie Chauvet, Anthony Duarte, Elsa Macaret, Yasminn Nagid, Anna Perrin, Pierre Possien, Erwin Sailly font tous un travail remarquable; ils forment une équipe soudée, ont une  gestuelle et  une  diction parfaite et sont  capables de donner rythme et puissance à cet essai où s’est élaboré une  synthèse de l’image,  du geste, mais aussi du texte qu’Alisson Corson, élève à l’ENSATT, a  écrit au cours des répétitions. Mais, loin d’être vraiment convaincant, trop « littéraire » ,  il  a du mal à s’intégrer à cette proposition.
 Mais qu’importe, Au Bord de  la route est un spectacle plus visuel et sonore que parlé, presque onirique. Il y a  un court moment un peu flou vers la fin mais on est vite subjugué par  ces visages  filmés en gros plan et par la beauté parfaite  des cubes blancs que les acteurs manient avec virtuosité, tout en dansant. On pense, bien sûr, à Cunningham mais aussi au minimal art et aux sculptures d’un Carl André ou d’un Don Judd. Et  à la fin-Bigel s’est fait plaisir mais pourquoi pas-il y a une courte mais belle vidéo en noir et blanc, réalisée  en images de synthèse avec un paysage de collines assez fabuleux.
  On peut toujours faire la fine bouche et dire que cela ne fait pas vraiment sens, mais, pour nous,  si justement, c’est grâce à ce genre d’expérimentations que le théâtre contemporain peut évoluer,  loin de la centième revisitation de La Noce chez les petits bourgeois de Brecht ou  de textes non théâtraux monologués; qui sont trop souvent  notre lot quotidien … Le s jeunes spectateurs qui  assistaient en majorité au spectacle était  réjoui, ce qui est toujours fort bon signe.
 D’accord,  l’Usine Hollander est à Choisy-le-Roi mais le RER est juste à côté; d’accord, cela ne se joue que les vendredis, samedis et dimanche, mais que cela ne vous  dissuade surtout pas d’aller voir cet étonnant Au Bord de la route; ce n’est pas un luxe par les temps qui courent…et le théâtre français a bien besoin de gens comme Patrice Bigel.
Vous avez aussi le droit d’aller au bar du premier étage; vous ne devriez pas être déçus: il y a une  grande salle d’une rare poésie avec  quelques  dizaines de bustes de plâtre alignés sur un étagère et de très belles plantes vertes devant une grande verrière, soigneusement entretenues par le scénographe et régisseur général…

Philippe du Vignal

Usine Hollander 1 rue du Docteur Roux Choisy-le-roi jusqu’au 12 février. Réservations: 01-46-82-19-63

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