La grande et fabuleuse histoire du commerce
La grande et fabuleuse Histoire du commerce, texte et mise en scène de Joël Pommerat.
On se souvient avec émotion des Marchands, superbe spectacle sans paroles présenté à l’opéra d’Avignon en 2006, où seule une voix off commentait le calvaire d’une ouvrière privée de son travail, qui avait précipité son fils par la fenêtre pour attirer l’attention de la presse…Le petit Chaperon rouge mettait en scène une petite fille et sa mère face aux peurs contemporaines.
Joël Pommerat a un vrai talent pour aborder les impasses des petites gens luttant pour leur survie et cette fabuleuse Histoire du commerce met en scène cinq vendeurs au porte -à- porte dans des cités ouvrières de petites villes; l’un d’eux est en formation, et ils se retrouvent chaque soir dans leur chambre d’hôtel pour faire le point sur les ventes.
Le jeune Franck ne vend rien pendant une semaine, alors qu’il a emprunté de l’argent pour s’installer avec sa compagne, et ses camarades lui expliquent qu’il doit faire rêver les clients en réussissant à pénétrer dans l’appartement et à lier conversation sur tout autre chose que la vente.
Chaque soir, Franck doit avouer qu’il n’a rien vendu de la journée, alors que ses collègues, eux, rompus aux techniques de vente, ont su arracher à de pauvres gens des contrats pour acheter à crédit leur “bon produit”, un pistolet d’alarme ! Puis la situation s’inverse, c’est Franck qui triomphe avec deux, trois, quatre, cinq contrats, et les autres reviennent bredouilles.
Il est alors promu chef et donc chargé de former de nouveaux collègues, il les encourage puis les sermonne quand ils reviennent les mains vides. Ensuite, il part rejoindre sa femme. Mais , à son tour, il va s’écrouler lorsqu’elle le plaque. Il ne peut plus faire rêver des prolétaires au chômage en leur vantant les mérites d’un guide pour leurs droits sociaux.
Interprété par cinq acteurs massifs qui ont la tête de leur emploi, dans un décor suggestif de chambre d’hôtel sinistre, ce spectacle décapant a bizarrement quelque chose de revigorant.
Edith Rappoport
Du 18 au 21 janvier Théâtre national de Bordeaux Aquitaine; les 27 et 28 janvier au Rayon Vert de Saint Valéry en Caux, et les 1, 2 et 3 février Théâtre de l’Union à Limoges.