Ennemi public
Ennemi public, d’après Un Ennemi du peuple d’Henrik Ibsen, texte français de Frédéric Révérend, mise en scène de Thierry Roisin.
Ce jour-là – car il faut bien qu’une pièce de théâtre commence « ce jour-là » – c’est , pour Tomas Stockmann, heureux au sein d’une famille heureuse et soutenu par ses amis, un jour décisif : il va tout simplement sauver la petite bourgade où, après de dures années comme médecin de campagne, il est revenu fonder avec son frère aîné, le maire du village, une station thermale.
Belles perspectives, mais le docteur Stockmann est un chercheur obstiné, et parfois les chercheurs obstinés trouvent. Et ce qu’il a trouvé est terrible : l’eau, la merveilleuse eau guérisseuse, est polluée. Accessoirement : par la tannerie de son riche beau-père… Et la solution qu’il trouve est grandiose : pour sauver les malades, sauver l’avenir, refaire intégralement les canalisation: la vérité avant tout…
Les révolutionnaires locaux sautent sur l’occasion pour chercher des crosses au maire, les « modérés » locaux sont momentanément soulagés que le danger soit connu, donc écarté, et la « majorité compacte » suit le scientifique triomphant.
Jusqu’à ce que le maire ramène tout ce petit monde à la « raison », ratio, le calcul : la ville n’a pas les moyens de refaire des dites canalisations, d’autres villes s’empareront de la manne thermale, et à qui les petits propriétaires loueront-ils leurs chambres meublées, si la panique s’empare des curistes ? Et puis, on exagère, ce n’est sûrement pas si grave.
Si, justement, c’est grave. Et les pressions de toutes sortes, revirements et trahisons n’y feront rien : Tomas Stockmann a dit la vérité et il ne cèdera pas. Le sauveur est devenu l’ « ennemi public », l’homme à intimider – par le biais de sa famille -, à abattre…Ibsen donne ici un modèle d’une précision diabolique aux futurs scénaristes hollywoodiens (voir le récent Les marches du pouvoir). Son analyse des liaisons dangereuses entre les pouvoirs locaux et les intérêts économiques est édifiante. Mais il va plus loin : l’homme pur, le héros de la vérité « dévisse » lui aussi, ivre de gloire et d’humiliation, il se prend à haïr le vulgum pecus et se voit en Saint-Just, en surhomme providentiel.
Mais les dieux aveuglent ceux qu’ils veulent perdre : le donneur d’alerte a raison, et il a tort d’avoir raison trop tôt. Double faute : l’hybris, l’excès d’orgueil que les dieux exècrent, et le fait d’avoir oublié le fameux ratio, de n’avoir pas penser à calculer. Ne nous moquons pas de lui, pourtant, écoutons-le : rappelons-nous l’amiante, le sang contaminé, le réchauffement de la planète et les prothèses mammaires…
La traduction est aussi directe que possible : pas de gras, pas de « dix-neuvièmismes », on est bien aujourd’hui. La représentation a la même force rapide, haletante, directe dans l’adresse au public, pris à témoin, « pris en otage », avec son consentement enthousiaste. Tiens, pourquoi les acteurs ont-ils servi de petits verres d’eau à quelques spectateurs ? On en frémit rétrospectivement. La représentation est encore musclée par d’excellentes interventions de percussions, confiées aux comédiens sous la direction de François Marillier.
Dans notre rubrique « ce serait encore mieux si… »: ce serait encore mieux avec quelques moments graves, davantage intériorisés. Nous serions alors plus que « pris en otage » : pieds et poings liés devant cette comédie tragique. Mais, telle quelle, elle nous embarque déjà bien…
Christine Friedel
Nouveau Théâtre de Montreuil jusqu’au 29 janvier T: 01 48 70 48 90
Bonsoir à tous,
Nous serions ravis de vous accueillir lors d’une représentation de notre dernière création tout public à partir de 15 ans,
ANAÏS NIN, À FLEUR DE MOTS
de et par Hervine De Boodt
mise en scène de Danielle Lopès
Du 7 janvier au 19 février 2012
Les samedis à 19h15 et les dimanches à 15h
Au Théâtre Darius Milhaud, 80, allée Darius Milhaud, Paris 19ème
Le teaser
http://www.youtube.com/watch?v=47Vcbj1omEk
Le débat
http://rencontres-et-debats-autrement.org/index.php?page=hervine-de-boodt
La presse
http://www.citylocalnews.com/festival-avignon/2011/07/10/anais-nin
Attention, la jauge est limitée…Il est donc indispensable de réserver par retour de mail.
En 2012, décidez d’être heureux, c’est bon pour la santé !
Hervine
LA CARAMBOLE MÛRE
http://www.lacarambolemure.fr
06 61 85 77 54