Le système de Ponzi
Le système de Ponzi texte, mise en scène et musique de David Lescot.
Le théâtre-récit consiste à faire d’un sujet à priori non théâtral l’objet d’une écriture pour la scène. Ce qui a été réalisé par Dario Fô, puis en France par Ariane Mnouchkine notamment avec L’ âge d’or , une création collective qui traitait de la réalité sociale en 1975. Presque quarante ans plus tard, David Lescot, artiste associé du Théâtre de la Ville, écrit une pièce sur Charles Ponzi, l’inventeur, dans les années 1920 du système dit de Ponzi, bien connu des étudiants en économie.
C’est une manipulation financière – déjà dénoncée par Charles Dickens en 1857 dans son roman Little Dorrit- et utilisée récemment par Bernard Madoff qui consiste à bâtir un système pyramidal d’escroquerie: on promet aux investisseurs des bénéfices mirobolants en un temps record, parfois même de l’ordre de 50 % par an! L’argent des nouveaux arrivants servant à payer les anciens. Jusqu’au jour où tout le monde veut retirer son argent en même temps, et il n’y a évidemment plus assez de fonds…Charles Ponzi, dont Lescot raconte la vie en détail, est le sujet central du spectacle.
Sa relation particulière avec les femmes, « toujours la même histoire, susciter l’envie ou pratiquer le harcèlement », son étonnante générosité lorsqu’il fait don de sa peau pour sauver une amie, et bien sûr, son lien à l’argent. Etait-il un flambeur naïf? Il apparaît ici plutôt comme un joueur compulsif, qui a un besoin vital de manipuler l’argent et les chiffres, sans réfléchir aux conséquences.
Les douze comédiens et les musiciens qui incarnent les quatre-vingt-sept personnages sont tous remarquables. Dans une esthétique de cabaret brechtien, des tables, des chaises sur roulettes et des potences où sont accrochés les costumes, définissent un espace de jeu modulable.
David Lescot ne donne pas de leçon de morale mais réalise un travail d’entomologiste en faisant revivre la vie des immigrés italiens aux Etats-Unis. Il décrit un mécanisme financier mis au point dans les années 20 qui a pu aussi nourrir les crises de notre société. Mais ce récit traîne en longueur et manquait de rythme le soir de la première. L’auteur parle d’ »opéra parlé » mais, comme à l’Opéra, il est arrivé de nous ennuyer.Le spectacle manque d’un peu de lyrisme et de baroque.
Et l’on imagine ce qu’aurait pu justement réaliser, Ariane Mnouchkine avec un personnage romanesque comme Ponzi…
Jean Couturier
Théâtre des Abbesses jusqu’au 10 février
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