Héritages
Héritages de Bertrand Leclair, mise en scène d’ Emmanuelle Laborit.
Une réunion dans la maison familiale après le décès de la mère, le père autorité incontestée est mort depuis longtemps, et Julien l’aîné des enfants, sourd profond depuis sa naissance, retrouve après vingt cinq ans d’absence, Françoise, sa sœur et Xavier , son frère qui ont publié une petite annonce pour régler l’héritage.
Julien est accompagné de sa femme Hélène et de son fils Alex, tous deux sourds. Après des années de silence, les vieilles blessures d’enfance sont encore à vif: Julien a fui l’autorité d’un père despotique qui refusait la langue des signes et qui voulait le forcer à apprendre à parler d’une voix insupportable pour les étrangers à la famille.
Les retrouvailles sont tendues, heureusement une interprète les accompagne, qui traduit à une vitesse étonnante, Françoise a appris a langue des signes et parvient à communiquer mais Xavier qui a subi l’influence du despotisme paternel, crie sa jalousie : Julien n’avait-il pas bénéficié de toutes les attentions paternelles, alors que son jeune frère avait consacré sa vie à défendre l’oralité.Et l’on découvre la lutte acharnée entre défenseurs de l’oralité et ceux de la langue des signes, interdite en 1878 par le congrès de Milan.
Au-delà du dialogue qui parvient à se rétablir entre les trois sourds et les trois entendants, tous dotés d’une belle présence, on retrouve les mêmes blessures éprouvées dans le deuil des parents, quel que soit le langage utilisé. Que faire de la maison familiale, faut-il la vendre ? Le jeune Alex propose d’en faire une maison d’accueil pour les sourds, mais son oncle est réticent, pensant ainsi bafouer ainsi la mémoire de son père. On se sépare en promettant de s’écrire !
Cette création théâtrale est issue d’un travail de résidence sur la rencontre entre deux langues et deux cultures. IVT créé en 1976, est installé depuis 2007 dans l’ancien théâtre historique de Grand Guignol, sous la direction d’Emmanuelle Laborit. C’est une jolie salle de spectacle, un lieu de création artistique, une école de langue des signes qui reçoit 900 personnes par an, et une maison d’édition.
La langue des sourds conçue par l’Abbé de l’Épée à la fin du XVIII ème siècle, n’a été reconnue officiellement en France qu’en 2005…
Edith Rappoport
Jusqu’au 4 mars, 7 cité Chaptal, 75009 Paris
www.ivt.fr