à propos de « Victor ou les enfants au pouvoir » de Roger Vitrac
Rencontre avec le public d’Emmanuel Demarcy-Mota à la bibliothèque Claude Lévi-Strauss, à propos de Victor ou les enfants au pouvoir de Roger Vitrac.
Le metteur en scène, qui poursuit sa démarche d’ouverture vers un plus vaste public, a rencontré des lycéens dont une partie avait déjà vu le spectacle, dans une bibliothèque municipale du 19ème arrondissement,
Le directeur du Théâtre de la Ville a, dans un premier temps, justifié le choix de cette œuvre, qui comme le dit l’auteur en 1946 dans Le Figaro: « J’entends déjà : cette reprise s’imposait-elle ? L’œuvre a-t-elle vieilli ? L’auteur a pris de l’âge. On dit que la vieillesse en impose. Sans doute. Mais La jeunesse dispose… ».
Pour Emmanuel Demarcy-Motta, cette pièce originale très peu montée depuis sa création par Antonin Artaud en 1928, est admirable à plusieurs points de vue. Et il souligne la liberté du thème : la place de l’enfant qui, comme chez Frank Wedekind, vient faire exploser le système familial bourgeois.Juste cause ou conséquence: le langage est, ici, déconstruit.
L’association des mots et des idées donnant une dimension poétique et surréaliste à la pièce écrite entre les deux guerres, et premier volet d’un triptyque de Roger Vitrac qui comporte aussi Le Coup de Trafalgar et Le Sabre de mon père . Victor est une œuvre qui, selon lui, questionne le rapport de l’homme à la société et à son histoire, dans un pays qui a une indéniable capacité à effacer les fractures qui saliraient la belle dimension française…
Par ailleurs, le metteur en scène a souligné l’indispensable évolution de son travail ,avec une même troupe d’acteurs mais au contact de différents publics, et s’est réjoui de la reprise de son Rhinocéros de Ionesco qui poursuit son exploitation aux États-Unis. C’est aussi dans un souci d’extension à un plus large public (14.000 spectateurs) que cette pièce a été présentée au Théâtre de la Ville, et non au Théâtre des Abbesses.
Enfin, comme il n’oublie pas ses nouvelles responsabilités de directeur du Festival d’Automne, il a défini une politique culturelle que ne renierait pas Jean Vilar, avec la quête d’un public de tout âge et de toute origine sociale, (grâce à des programmations au 104 ou au Théâtre Monfort), et dont les ambitions artistiques sont comparables à celles du mythique théâtre des Nations qui, dans les années 60, avait permis de découvrir des créations étrangères et des spectacles où régnait parfois le mélange des genres: danse, théâtre et musique.
Jean Couturier