Le Théâtre de la Ville: une nouvelle saison…
Le Théâtre de la Ville: une nouvelle saison…
Eh! Oui, cela va être déjà la quatrième saison d’ Emmanuel Demarcy-Motta. Aussi précis qu’énergique, il semble déjà avoir oublié les attaques néo-facistes dont le Théâtre de la Ville a été l’objet cet hiver et il voit l’avenir avec beaucoup de confiance, à l’image de celle qu’il place dans ses collaborateurs, notamment ses conseillers pour la danse, Claire Verlet et Christophe Lemaire pour le théâtre, et ceux qui travaillent à l’élaboration des programmes musicaux.
» Depuis que le Théâtre municipal est devenu en 68 le Théâtre de la Ville, dit-il, on essaye ici de travailler tous ensemble, surtout quand la gestion économique n’est pas des plus simples, et de faire en sorte qu’avec moins d’argent, l’activité principale ne soit pas fragilisée. Et cela, avec deux plateaux, celui du Théâtre de la Ville et celui des Abbesses. Il n’y a pas de crise du public, c’est sûr, mais, en ce qui concerne la musique dite classique, si le public -vieillissant-est stable, il n’a cependant pas augmenté comme ailleurs…
Nous avons, toutes catégories de spectacles confondues, 280.000 entrées, ce qui ne veut pas dire autant de spectateurs différents mais on ne va quand même pas s’en plaindre! Et nous avons vu avec beaucoup de plaisir une nette augmentation du public de moins de trente ans! Ce qui est sans doute aussi dû à la progression de nos relations avec les établissements de l’Education nationale. Du côté abonnés, nous arrivons au nombre de 15.000, ce qui n’est pas rien et qui, évidemment, facilite nos problèmes de trésorerie.
Cela dit, nous devons assurer du 10 septembre au 10 juillet quelque 90 premières, ce qui est lourd, et sans restriction par rapport au calendrier des vacances scolaires! Du côté de la programmation, nous avons choisi de favoriser aussi les reprises de spectacles créés par de jeunes compagnies comme, par exemple, récemment aux Abbesses, cette Vie de Robert Plankett créé au Théâtre de Vanves, puis joué au Théâtre de la Cité internationale, ou des reprises de spectacles comme Victor ou les enfants au pouvoir, créé chez nous, ou encore les Corneille mis en scène par Brigitte Jaques. Ces différentes reprises peuvent favoriser l’émergence d’un nouveau public… Mais je n’aime pas du tout le mot diffusion, pas plus que celui de maillage du territoire qui a une connotation militaire! J’avais besoin de le dire, maintenant cela va mieux!
La trilogie: danse, théâtre et musique est maintenue et équilibrée et nous visons de plus en plus l’ouverture aux écoles et collèges, et nous accordons une bonne place aux spectacles en langue étrangère que nous avons privilégiés et qui correspondent à une demande du public de plus en plus forte, comme, par exemple, ceux du Berliner Ensemble mais nous voulons développer aussi les tournées à l’étranger, cette année à Istanbul et les Etats-Unis.
Il est aussi important de prendre des risques et de favoriser le travail de grands metteurs en scène comme Claude Régy qui a obtenu un beau succès avec Ode maritime de Pessoa. Je voudrais aussi dire un mot sur les théâtres parisiens avec lesques le Théâtre de la Ville a établi un paternariat comme le Monfort , le Centquatre, le Grand Parquet que dirige François Grosjean, ou encore le Forum du Blanc-Mesnil: au-delà de la solidarité, cela va vers le partage de valeurs communes.
Il y a un autre moment fort chez nous ce sont les chantiers d’Europe où, cette année, des spectacles italiens et grecs seront mis en valeur, avec le soutien financier de la Grèce… ou plutôt celui de la fondation Onassis! Même si on rame un peu quant à la fréquentation du public (environ 30 %!)
Un mot aussi du parcours enfance très important à nos yeux: innovation, Bob Wilson créera un spectacle pour les enfants à partir de huit ans. C’est important que les enfants puissent voir des spectacles en langue allemande, arabe, anglaise ou italienne. Même si les enfants du 7ème arrondissement vont sans doute davantage au parc de Thoiry que chez nous! Notre théâtre doit aussi correspondre au changement du monde actuel. Et le développement des liens avec le Festival d’Automne permettra d’accueillir une création d’Heiner Goebbels et un concert de Gavin Bryars. C’est dire que la musique n’est nullement un parent pauvre de notre programmation…
Pour la programmation proprement dite, je ne peux tout citer et vous renvoie bien sûr au document que l’on va vous remettre. Pour le théâtre, cela va , par exemple, de La petite Douleur de Pinter , mise en scène de Marie Bischofberger, à trois pièces de Büchner par Ludovic Lagarde, ou pour la danse, le très fameux Kontakthof de Pina Bausch ou Le ballet de l’Opéra de Lyon avec Faces, une création de Maguy Marin. »
Les choix d’Emmanuel Demarcy-Motta sont tout à fait cohérents et correspondent bien aux 98 propositions artistiques réparties sur les trois axes héritées de son prédécesseur Gérard Violette: théâtre, musique et danse; quant à l’élargissement du public, c’est sans doute un des enjeux les plus importants pour ces prochaines années et qui concernent aussi tous les grands théâtres parisiens.
Cela voudrait dire aussi qu’ils doivent tous s’orienter davantage vers une relation solide et pérenne avec la banlieue. On en est encore loin! A quand Kontakthoff, Victor, Woyzeck, à Aubervilliers, au Blanc-Mesnil ou à Saint-Denis? C’est devenu une urgence absolue! Aurélie Filipetti ne s’est pas encore exprimée à ce sujet mais il faudrait prendre conscience que Paris ne s’arrête plus désormais au périphérique…
Philippe du Vignal