Swan
Swan de Luc Petton
Konrad Lorenz, fondateur de l’éthologie, quand il travaillait avec des oisillons et des canetons, décrit en 1930 le phénomène dit d’empreinte ou d’imprégnation. Au moment de sa naissance, en l’absence de sa mère naturelle et grâce à des stimuli sonores et visuels, l’oiseau prend comme mère de substitution tout être vivant à proximité de son œuf.
On peut voir dans les films tournés par le zoologue, le montrant avec des oisillons qui le suivent comme une mère. Ce phénomène s’estompe quand l’animal devient mature sexuellement. C’est ce que Jacques Perrin a montré dans Le Peuple migrateur, et que Luc Petton nous montre aussi dans Swan. Il a réuni six danseuses et sept cygnes, chacune des danseuses a suivi la naissance et la croissance des jeunes cygnes.
Une belle aventure qui, malheureusement, sur scène est un peu décevante. Il faut attendre 45 minutes avant que cinq cygnes blancs, accompagnés des danseuses occupent le plateau avec une relative liberté. Auparavant, sur une musique électronique et avec, au saxophone, en direct, le compositeur Xavier Roselle, se succèdent des danses qui peuvent rappeler les mouvements naturels des cygnes.
Au début du spectacle, un cygne noir batifole sur l’eau avec une des danseuses dans une vasque assez laide. Puis, dans le fond de scène, un plan d’eau illuminé accueille deux cygnes noirs et des danseuses qui glissent dans l’eau comme Ophélie après son suicide. Bien sûr, le travail avec un animal sur le plateau est difficile, mais on peut s’étonner de la nécessité pour les danseuses de devoir nourrir en permanence ces oiseaux “ imprégnés”, comme le ferait n’importe quel dresseur de cirque ! L’ensemble casse l’harmonie naturelle qui pourrait exister entre danseuses et cygnes.
Malgré ces réserves, c’est un spectacle audacieux et on peut rendre hommage au travail de Luc Petton et des danseuses qui seront, elles, imprégnées à vie par cette expérience.
Jean Couturier
Théâtre National de Chaillot jusqu’au 14 juin.
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