Un siècle d’industrie

Un siècle d’industrie  de Marc Dugowson, mise en scène d’ Hugo Malpeyre

C’est la septième édition du Prix du Théâtre 13, manifestation organisée par Colette Nucci sa directrice  qui s’attache à la découverte de jeunes talents. Six spectacles sélectionnés par un jury sont présentés au cours de ce mois de juin pour deux représentations. Le lauréat du prix du jury aura droit à une semaine d’exploitation au Théâtre 13, ainsi qu’un prix de 3000 €. Un prix du public décerné par les spectateurs ayant choisi le Festipass pour les six spectacles, sera attribué à une autre compagnie qui pourra bénéficier d’un accueil de deux semaines au Théâtre de l’Opprimé.
Un siècle d’industrie ouvre le festival. Nous avions pu découvrir ce texte troublant à Limoges, dans une belle mise en scène de Paul Golub, alors que nous avions  été chargée de la rédaction d’une fiche pour la fondation de la mémoire de la shoah.
Une grande entreprise de métallurgie allemande affronte la crise des années trente,  et est contrainte de procéder à des licenciements douloureux. Otto, un jeune ouvrier sur le point d’être licencié, séduit la femme du patron qui va persuader son mari de le garder. Devenu chef de fabrication, il réussit à conquérir les marchés vertigineux de la construction des camps de concentration. Chacun adhère au parti nazi, travaille avec application et  sans état d’âme, à  construire les bâtiments des camps de la mort,  et à procéder  à la destruction des cadavres qui s’amoncellent.. Un enfant nait  de cette  liaison adultère, et  le vieux patron aveugle se réjouira  d’avoir enfin une descendance.
Cette pièce remarquable est interprétée par une très jeune troupe, encore mal dégagée de l’amateurisme, sur un plateau nu où il y a  des piles de vêtements, qu’ils enfilent entre les tableaux lorsqu’ils changent de personnages. On regrette seulement que Mathieu Lourdel ,bon acteur au demeurant, qui interprète Hermann Kolb, le patron, revête une bedaine disgracieuse et se grime de blanc pour paraître l’âge de son rôle. Quelques acteurs s’affirment comme Tristan Gonzalez (l’amant Otto) et Naïs el Fassi (Gerta Kolb, la femme du patron).

Edith Rappoport

Théâtre 13


Archive pour 16 juin, 2012

Postsunen « P »

Postsunen « P » de Kentarô Kobayashi.

 Postsunen A la fois auteur, metteur en scène, comédien mais aussi créateur de mangas, il est diplômé en gravure de la Tama University, Kentarô Kobayashi, à 39 ans,  a déjà un solide passé artistique au Japon, où il est aussi connu pour la qualité de ses émissions télévisuelles d’information et de variété. Sur scène, un châssis gris en fond de scène  avec une porte, posé sur un plancher en pin et un cube pour s’asseoir. Cela rappelle furieusement l’esthétique du théâtre nô.
Kobayashi, silhouette mince en  pantalon, chemise, gilet, chaussures noirs et lunettes cerclées de noir- toujours la gravure!- entre en scène et va se livrer à une série de sketches pleins d’humour et de poésie, parfois un peu mélancoliques, avec une virtuosité et une précision gestuelle fabuleuses. Graphiste, il utilise les fameux tangram  « Les sept plaques de l’habileté », en raison des 7 plaques utilisées) qui remontent  à la haute antiquité, avec plusieurs triangles et un carré magnétisés qu’il colle en les combinant sur le mur gris. Mais le comédien joue aussi avec des images vidéo de lui-même en noir et blanc qu’il a filmés le plus souvent au bord de la mer. Comme, par exemple,  son double filmé le regarde d’un air ironique ou quand lui sur scène voit son double courir dans un carré projeté qui se déplace sur l’écran. Sans doute l’idée n’est pas nouvelle mais on est loin des interactions un peu faciles qu’utilisent Dominique Hervieu et José Montalvo dans leurs ballets.
Ici, pas de couleurs mais une rigueur, une poésie et une intelligence exceptionnelles. …Là encore, sans la lithographie, le spectacle n’aurait pas été celui-ci!  » J’ai appris, dit-il, à m’exprimer dans le contraintes. Cela m’a aidé à concevoir des scènes  en m’imposant certaines contraintes: la pénombre, l’immobilité, etc.. En passant au spectacle, je n’ai pas le sentiment d’avoir changé de voie. le matériel de lithographie est simplement remplacé par mon corps aujourd’hui ».
Ce que Kobaiashi ne dit pas, c’est la maîtrise de son corps et  l’adéquation parfaites  entre le son (bruits de porte, etc…) et la gestualité des séquences sur scène et à l’écran. « Si jusque dans l’emploi du corps qu’exige la démarche, l’on fait travailler le corps avec plus de réserve que l’esprit, le corps devenant substance et l’esprit, effet second, le spectateur éprouvera un sentiment d’intérêt » disait déjà le génial théoricien et auteur de nô, Zeami dans son Traité, il y a presque six siècles! L’art de Kobayashi en a sûrement pris de la graine et  s’est aussi  forgé à l’école des arts plastiques plus que dans les cours de théâtre. Et l’on n’est pas loin, cinquante ans après, des actions et performances du fameux groupe gutaï  » incarnation » Osaka, comme celles de Saburo Murakami où le corps devenait langage, au croisement de la danse contemporaine, du théâtre et des arts plastiques.  Comme nombre de créateurs de théâtre contemporain de Bob Wilson à Dominique Pitoiset
et bien d’autre metteurs en scène formés dans des écoles d’art.
 Il a rappelle aussi qu’il a été  impressionné  par les haïkus que son grand-père écrivait. . Et en effet,  on pourrait dire que chacun de ses sketches est un sorte d’haïku scénique muet où il utilise des petits trucages simples et quelques effets de magie  qu’il a aussi pratiquée autrefois. Simple mais  d’une rigueur et d’une intelligence exceptionnelle dans la maîtrise du temps et de l’espace. En une heure, et avec beaucoup d’élégance, Kobayashi, avec seulement quelques accessoires, nous emmène dans un petit voyage qui participe à la fois du pictural et du théâtral, où l’on peut découvrir un humour japonais qui a ici le grand mérite d’être universel…
 Seul bémol: Postsunen n’aura  eu que quelques représentations . On peut espérer que le Théâtre de la Ville ou un grand théâtre parisien invitera ce spectacle d’une rare qualité, dont on a l’impression de ressortir plus intelligent, loin, très loin  des logorrhées de Stanislas Nordey..Et cela fait un bien fou!

Philippe du Vignal

Maison de la culture du Japon à Paris 101 bis quai Branly 7015 Paris. Encore aujourd’hui samedi juin à 16h et à 20 heures.

L’EUROPE DES THEÂTRES

L’Europe des théâtres  aux mardis midi du Théâtre du Rond Point.

Chaque mois Louise Doutreligne organise des lectures mises en espace  au Théâtre du Rond-Point. La dernière séance de la saison est consacrée à la présentation d’extraits de pièces des Balkans qui seront présentées par la minuscule Maison d’Europe et d’Orient, dès la semaine prochaine,  à l’occasion du dixième anniversaire des éditions L’Espace d’un instant par Dominique Dolmieu, dans le cadre d’un festival européen de traduction théâtrale.
Dominique Dolmieu, infatigable découvreur de textes a édité près de 150 pièces , il en a monté plusieurs avec une belle efficacité compte tenu de ses moyens limités. Il anime un comité de lecture  au 105 bd Daumesnil, où l’on peut trouver nombre de livres rares venus de l’Est. Il y accueille le public autour d’un bar ouvrant sur une petite salle où sont présentées des expositions, des lectures et même des représentations de certaines pièces. Il est parfois accueilli au Théâtre de l’Opprimé son voisin de la rue du Charolais et tourne en Europe de l’Est.
Une équipe rodée d’une dizaine d’acteurs, pour la plupart venus de sa compagnie le Théâtre National de Syldavie (Bonjour Tintin !) comme Franck Lacroix, Céline Barcq, Cyril Lévi-Provençal lisent des extraits des pièces  présentées ensuite en  intégrale à partir de la semaine prochaine à la MEO. Dominique Dolmieu introduit les lectures dont il a mis la plupart en espace.

Meuh ! de Zourab Kikodzé et Gaga Nakhoutsrivili, traduit du géorgien.

Un troupeau de huit vaches géorgiennes broute dans un pré suisse sous la conduite d’un loup. Venues des ruines de l’Union soviétique où l’on se chauffait au bois, elles ne donnent à elles toutes que cinq litres de lait. Un chance pour elles,  car il y a surproduction de lait,  et ces bonnes laitières seront emmenées à l’abattoir pour la viande…

Ascension de Gaghik Gazareh, traduit de l’arménien.

La dramaturgie arménienne est obsédée par le génocide. C’est un oratorio autour de la cavalerie des gueules cassées. “Ils éjaculent aussi vite qu’ils tuent !”.


Le cinquième Evangile
de Slobodan Snajder, traduit du croate.

Deux des trois lecteurs sont assis dans la salle, ce qui empêche les durs d’oreilles de bien entendre ce texte terrifiant sur un camp de concentration où sont internés des enfants. On réussit à capter quelques phrases comme “Dans cette baraque, les enfants boivent du Zylon B en guise de lait !”

Les Vrais d’Andreï Kouretchik, traduit du russe.

Neuf invités sont forcés à jouer les gorilles. “Il brûlent les passeports et l’argent ! (…) La milice vient chercher les réfractaires…”

Edith Rappoport

Ces textes sont édités par l’Espace d’un instant, dirigé par Dominique Dolmieu. Le prochain mardi midi aura lieu le 25 septembre avec Chronique du Mur-de-de Barrez de Jérémie Fabre, mise en lecture par Christine Gagnepain, avec la Maison d’Europe et d’Orient site www.sildav.org
à mots découverts, salle Topor.  Attention: réservation obligatoire

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