Je me numérise
Je me numérise de Nicolas Ancion, lecture/mise en espace de Mustapha Aouar, musique d’Éric Recordier et Aurélien Rozo
Nicolas Ancion a écrit une pièce d’une actualité brûlante. Au moment où nous sommes nombreux à subir l’ angoisse d’une disparition subite de nos blogs ou de nos téléphones portables, autant de pertes irréparables et incompréhensibles. Les chercheurs du CNRS sont eux aussi confrontés à la difficulté de conserver la mémoire du passé !
Il s’agit ici d’un homme soumis à un interrogatoire dans un commissariat de police. C’est d’actualité: (lire la critique de Blanches d’Armel Veilhan dans le Théâtre du Blog). Accusé d’avoir volé dans le métro cinq téléphones portables et un ordinateur puis de les avoir brisés, l’homme ne perd pas contenance, il se proclame super-héros, et affirme que les injustices sont le moteur de notre système. “Les barbares n’ont plus besoin d’armes pour franchir nos frontières, il n’y a plus de sens (…).Même aux toilettes, il faut péter en silence, on a mal au travail comme on a mal au ventre. Au boulot, c’est déjà trop tard, tout se fait sur ordinateur. Vous êtes libre, notre monde disparaît peu à peu (…) L’ordinateur nous livre des visions appauvries de notre monde, il classe tout mais ne comprend rien (…) Nous sommes à bord du Titanic ! (…) moi je suis un Robin des bois”…
La jeune psychologue qui l’interroge est étonnée d’avoir affaire à un homme qui possède un telle assurance: il s’avère être un informaticien qui a réussi à effacer toute l’ affaire de l’ ordinateur et à se faire libérer dès le lendemain. On les retrouve à nouveau face à face pour un entretien psychanalytique cette fois, l’analyste habituel est en congé de maladie et leur conversation dérive peu à peu dans des longueurs entrecoupées par des intermèdes musicaux de deux excellents musiciens qui animent souvent les soirées cabarets de Gare au Théâtre.
Mustapha Aouar, grand mâcheur de verbe poétique, avait déjà collaboré avec Nicolas Ancion pour Monsieur Delagare dans les cafés de Vitry. Quand il en aura livré la version définitive, Je me numérise sera présenté à Gare au théâtre à la rentrée 2012.
Edith Rappoport
Gare au théâtre de Vitry.