Cabaret de l’impossible, Premiers voyages

 Cabaret de l’impossible, Premiers voyages.

  Ils sont trois: un Breton, Achille Grimaud qui se revendique comme tel mais qui a, en fait, a un père pied-noir et une mère auvergnate,:  » Je suis un Breton, dit-il honnêtement, qui ne parle pas la langue ».  Sergio Grondin, un Réunionnais et François Lavallée, un Québécois., dont l’invention verbale et la langue font penser à celles  de Fred Pellerin, cet autre conteur québécois. Ce sont trois conteurs qui œuvrent chacun dans leur région, et ils ont eu l’idée de se  réunir et d’aller voir chacun ce qui se passait chez les deux autres. Loin des clichés habituels de cartes postales- Grondin rappelle que le Réunion est aussi pour beaucoup de ses habitants synonyme de pauvreté voire de misère.
  Mais les trois compères ont un dénominateur commun, celui d’être francophone,- et, avec juste raison, n’en sont pas peu fiers . Rappelons que l’Amérique du Nord n’en  compte que  six  millions sur quelque 250 millions d’anglophones! Et ils ont des histoires à raconter, de celles qui rappellent furieusement la fameuse collection des Contes et légendes qui ravissait notre enfance, avec des personnages hauts en couleurs, avec aussi  parfois des phrases magnifiques: « J’appartiens à la France, avertit Sergio Grondin-dont la chère province se trouve à des milliers de kilomètres de la métropole-mais, à partir du moment où elle est prête à m’appartenir ».
Et François Lavallée raconte le Québec  avec passion: » quatre fois la France et dix fois moins de monde », dit-il,  pays qui avait de quoi étonner Sergio Grondin, comme il fut étonné par La Bretagne quelques mois plus tard. Et François Lavallée est aussi allé en Bretagne à la recherche de ses origines, puisque ses ancêtres comme beaucoup de  Bretons émigrèrent au Canada. Mais, rappelle Sergio Grondin, il y a aussi des Bretons de Réunion…

  Ils communiquaient évidemment par internet pour préparer leur projet, et on les voit, dans l’obscurité  entre chaque évocation de voyage, en train de tripoter leur tablette, dont les phrases s’affichent sur un écran. Bref, la vidéo a encore frappé et ce n’est  sans doute  pas la meilleure idée du spectacle qui tourne parfois aux bavardages entre vieux potes heureux de se retrouver.
En fait ces Cabarets de l’impossible, par ailleurs attachants, font parfois un peu bricolage et auraient mérité qu’un metteur en scène exigeant leur donne une véritable unité.

  Alors à voir? Oui, quand même, ce n’est pas tous les jours qu’on peut avoir affaire  à une sorte d’ovni scénique qui fait entendre la langue française de trois régions du monde francophone, ici débarrassée de tout un fatras snobinard de mots anglais souvent chers aux Parisiens et à leurs journaux gratuits… On se demande comment la RATP … et le Ministère de la Culture tolèrent que certaines affiches publicitaires nous abreuvent de petits slogans  en anglais, traduits en petits caractères au  bas d’affiche en langue française! Si, si c’est vrai. Vérifiez à l’occasion…

Philippe du Vignal

Festival d’Avignon Chapelle du Verbe Incarné jusqu’au 28 juillet; ensuite en tournée du 8 au 30 novembre;  au Sénégal et en Roumanie en mars 2013.

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