Pleine forêt sensible

Pleine forêt sensible par Les Souffleurs, commandos poétiques. Conception artistique d’Olivier Comte.

 Pleine forêt sensible souffleurLes Souffleurs sont maintenant bien connus; c’est un collectif d’artistes, comme on dit maintenant qui regroupe depuis 2001 un peu partout en France et à l’étranger, en langue originale, des acteurs,  danseurs,  écrivains, cinéastes, plasticiens, réunis autour d’un concept : « une tentative de ralentissement du monde ». Habillés de noir, toujours silencieux, ils chuchotent seulement à l’oreille des passants,  des phrases poétiques ou philosophiques.
Après une longue attente, le temps de faire réparer une panne de l’indispensable groupe électrogène, trois  cars nous emmènent  dans une forêt près de Roanne Sainte-Marie, à une vingtaine de minutes d’Aurillac. » L’imaginaire occidental, dit Olivier Comte, place la forêt au centre de sa culture en décidant d’en faire la frontière poreuse entre civilisation et nature, raison et pensée magique, vice et vertu, entre intérieur et extérieur. C’est une promenade hypnotique dans l’incessant va-et-vient de nos pensées ».
  On avait demandé aux quelque cent vingt spectateurs de garder le silence pendant le trajet et de mettre des tampons dans les oreilles pour se préparer à cette réception poétique. Mais, déception, le bruit ronronnant du groupe électrogène nous accueille sans ménagement à l’orée du bois… Nous suivons ensuite un parcours d’une centaine de mètres, balisé par de très minces guirlandes de douce lumière bleutée  posée à terre avant d’arriver dans une assez vaste clairière.
Apparition onirique: une quinzaine de « souffleurs », hommes et femmes, juchés à deux mètres sur des sortes de sculptures noires au pied des arbres et munis de longs et minces tuyaux dotés chacun de raies lumineuses du même bleu que les guirlandes de balisage. Les souffleurs chuchotent quelques phrases poétiques à qui veut bien se saisir du bout leurs longs tuyaux. Ce sont des phrases extraites des Nouveaux exercices et d’Au Secret de Franck André Jame, spécialiste des arts bruts, tantriques et tribaux de l’Inde contemporaine, et qui a publié depuis 1981 douze livres de poèmes et de fragments, ainsi que de nombreux tirages illustrés. Même si son œuvre a reçu en 2005 le grand prix de Poésie de la société des gens de lettres, la vérité oblige à dire que nous nous n’y avons pas du tout été sensibles.

 D’autant plus qu’une musique électro-accoustique (sic) de Nicolas Losson, avec des voix, des souffles,etc.., musique souvent planante ou bien restituant des chants d’oiseaux ou des vacarmes d’orage,  est des plus envahissantes et empêche de se plonger dans le mystère de cette belle forêt et de ses  étranges personnages qui, plusieurs fois, apparaissent torse nu et avec une tête de loup (en polyester et pas très réussie!).
Un homme en costume de chasseur avec un grand chapeau et le fusil en bandoulière passe entre les spectateurs et délivre, lui aussi, un message poétique. De beaux effets lumineux, sans couleurs, et d’une certaine poésie de Jaco Biderman et Bruno Austin donnent une touche poétique à cette Pleine Forêt sensible. Avec parfois un silence total et une obscurité presque complète que l’on apprécie.

Heureusement,  aucune narration, aucune explication: il suffit de bien vouloir se laisser emmener, si l’on y arrive, ce qui n’est pas évident, dans le grand rêve conçu par Olivier Comte, malgré la bêtise de certains spectateurs assez bof pour imposer aux autres la lumière de leurs appareils photo.
  Mais, de toute façon, le compte n’y est pas tout à fait: malgré de belles images- parfois un peu faciles-cette promenade poétique gagnerait à être revue et corrigée: trop d’effets répétitifs, trop de sons, des extraits de texte quand même pas très passionnants, et un spectacle qui n’en finit pas de finir. On se dit à la fin que cette promenade poétique en forêt aurait aussi beaucoup gagné à être dite sans aucune lumière électrique et sans univers sonore invasif.
Le dénuement, la pauvreté sont aussi de grandes valeurs théâtrales ( sans remonter au déluge voir Grotowski, etc..) qui peuvent servir au mieux la poésie, quand elle possède une vraie qualité, comme on l’a vu dimanche dernier à Mourjou, avec la Brigade d’intervention poétique haïtienne ( voir Le Théâtre du Blog).

 Sur la piste du retour, il y avait un très beau concert d’oiseaux de nuit mais, trop tard, le car nous attendait. En tout cas, stop à tout ce  bordel technologique comme celui du groupe électrogène qui crache ses saloperies de  gaz d’échappement dans les bois de la Châtaignerie  deux heures durant et  dont entend le lointain ronronnement pendant le spectacle et qui, en plus, se permet de tomber en panne! Toute une électricité dépensée pour quelques effets lumineux réussis et une bande-son pas très convaincante!
Poésie peut rimer avec écologie… et  » le ralentissement du monde » que revendiquent Les Souffleurs qui feraient donc bien d’y réfléchir à deux fois… Autant être cohérent quand on fait des spectacle!  Du Vignal, vous êtres un sacré emmerdeur! Eh! Bien, oui! Je persiste et je signe…

 Et, ce n’est pas pour dire, mais disons-le quand même: il nous souvient de ce très bel Oncle Vania monté par le Théâtre de l’Unité joué dans un champ à la lumière naturelle et qui se finissait juste quand la nuit tombait. Et L’Unité s’apprête à monter Macbeth dans la forêt vosgienne, justement sans éclairage électrique…
 Alors à voir? Oui, peut-être si vous ne connaissez pas Les Souffleurs mais vous risquez fort d’être déçu. Au moins, on vous aura prévenu!

Philippe du Vignal

Festival d’Aurillac jusqu’au 25 août.


Archive pour 22 août, 2012

Pleine forêt sensible

Pleine forêt sensible par Les Souffleurs, commandos poétiques. Conception artistique d’Olivier Comte.

 Pleine forêt sensible souffleurLes Souffleurs sont maintenant bien connus; c’est un collectif d’artistes, comme on dit maintenant qui regroupe depuis 2001 un peu partout en France et à l’étranger, en langue originale, des acteurs,  danseurs,  écrivains, cinéastes, plasticiens, réunis autour d’un concept : « une tentative de ralentissement du monde ». Habillés de noir, toujours silencieux, ils chuchotent seulement à l’oreille des passants,  des phrases poétiques ou philosophiques.
Après une longue attente, le temps de faire réparer une panne de l’indispensable groupe électrogène, trois  cars nous emmènent  dans une forêt près de Roanne Sainte-Marie, à une vingtaine de minutes d’Aurillac. » L’imaginaire occidental, dit Olivier Comte, place la forêt au centre de sa culture en décidant d’en faire la frontière poreuse entre civilisation et nature, raison et pensée magique, vice et vertu, entre intérieur et extérieur. C’est une promenade hypnotique dans l’incessant va-et-vient de nos pensées ».
  On avait demandé aux quelque cent vingt spectateurs de garder le silence pendant le trajet et de mettre des tampons dans les oreilles pour se préparer à cette réception poétique. Mais, déception, le bruit ronronnant du groupe électrogène nous accueille sans ménagement à l’orée du bois… Nous suivons ensuite un parcours d’une centaine de mètres, balisé par de très minces guirlandes de douce lumière bleutée  posée à terre avant d’arriver dans une assez vaste clairière.
Apparition onirique: une quinzaine de « souffleurs », hommes et femmes, juchés à deux mètres sur des sortes de sculptures noires au pied des arbres et munis de longs et minces tuyaux dotés chacun de raies lumineuses du même bleu que les guirlandes de balisage. Les souffleurs chuchotent quelques phrases poétiques à qui veut bien se saisir du bout leurs longs tuyaux. Ce sont des phrases extraites des Nouveaux exercices et d’Au Secret de Franck André Jame, spécialiste des arts bruts, tantriques et tribaux de l’Inde contemporaine, et qui a publié depuis 1981 douze livres de poèmes et de fragments, ainsi que de nombreux tirages illustrés. Même si son œuvre a reçu en 2005 le grand prix de Poésie de la société des gens de lettres, la vérité oblige à dire que nous nous n’y avons pas du tout été sensibles.

 D’autant plus qu’une musique électro-accoustique (sic) de Nicolas Losson, avec des voix, des souffles,etc.., musique souvent planante ou bien restituant des chants d’oiseaux ou des vacarmes d’orage,  est des plus envahissantes et empêche de se plonger dans le mystère de cette belle forêt et de ses  étranges personnages qui, plusieurs fois, apparaissent torse nu et avec une tête de loup (en polyester et pas très réussie!).
Un homme en costume de chasseur avec un grand chapeau et le fusil en bandoulière passe entre les spectateurs et délivre, lui aussi, un message poétique. De beaux effets lumineux, sans couleurs, et d’une certaine poésie de Jaco Biderman et Bruno Austin donnent une touche poétique à cette Pleine Forêt sensible. Avec parfois un silence total et une obscurité presque complète que l’on apprécie.

Heureusement,  aucune narration, aucune explication: il suffit de bien vouloir se laisser emmener, si l’on y arrive, ce qui n’est pas évident, dans le grand rêve conçu par Olivier Comte, malgré la bêtise de certains spectateurs assez bof pour imposer aux autres la lumière de leurs appareils photo.
  Mais, de toute façon, le compte n’y est pas tout à fait: malgré de belles images- parfois un peu faciles-cette promenade poétique gagnerait à être revue et corrigée: trop d’effets répétitifs, trop de sons, des extraits de texte quand même pas très passionnants, et un spectacle qui n’en finit pas de finir. On se dit à la fin que cette promenade poétique en forêt aurait aussi beaucoup gagné à être dite sans aucune lumière électrique et sans univers sonore invasif.
Le dénuement, la pauvreté sont aussi de grandes valeurs théâtrales ( sans remonter au déluge voir Grotowski, etc..) qui peuvent servir au mieux la poésie, quand elle possède une vraie qualité, comme on l’a vu dimanche dernier à Mourjou, avec la Brigade d’intervention poétique haïtienne ( voir Le Théâtre du Blog).

 Sur la piste du retour, il y avait un très beau concert d’oiseaux de nuit mais, trop tard, le car nous attendait. En tout cas, stop à tout ce  bordel technologique comme celui du groupe électrogène qui crache ses saloperies de  gaz d’échappement dans les bois de la Châtaignerie  deux heures durant et  dont entend le lointain ronronnement pendant le spectacle et qui, en plus, se permet de tomber en panne! Toute une électricité dépensée pour quelques effets lumineux réussis et une bande-son pas très convaincante!
Poésie peut rimer avec écologie… et  » le ralentissement du monde » que revendiquent Les Souffleurs qui feraient donc bien d’y réfléchir à deux fois… Autant être cohérent quand on fait des spectacle!  Du Vignal, vous êtres un sacré emmerdeur! Eh! Bien, oui! Je persiste et je signe…

 Et, ce n’est pas pour dire, mais disons-le quand même: il nous souvient de ce très bel Oncle Vania monté par le Théâtre de l’Unité joué dans un champ à la lumière naturelle et qui se finissait juste quand la nuit tombait. Et L’Unité s’apprête à monter Macbeth dans la forêt vosgienne, justement sans éclairage électrique…
 Alors à voir? Oui, peut-être si vous ne connaissez pas Les Souffleurs mais vous risquez fort d’être déçu. Au moins, on vous aura prévenu!

Philippe du Vignal

Festival d’Aurillac jusqu’au 25 août.

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