La Farce de Maître Pathelin

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La Farce de Maître Pathelin, adaptation et mise en scène de Richard Demarcy.

Le Grand Parquet a déménagé mais est resté identique à lui-même; il accueille cette pièce, très connue mais  rarement jouée et qui aurait été écrite en  vers octosyllabiques  et en dialecte d’Ile-de-France, par un certain Guillaume Alecis, moine bénédictin , écrivain et poète normand vers 1470. Cette satire féroce, possède déjà un  véritable scénario à rebondissement, avec à la fin, un renversement de situation assez malin. Très vite populaire, elle fut même imprimée plusieurs fois et jouée à l’étranger!
C’est sans doute la première comédie française,  satire féroce dont les cinq personnages sont tous de belles canailles, et  du côté du manche: un avocat sans scrupules, sa femme menteuse et roublarde, un  juge  incompétent, et un commerçant aisé mauvais employeur; mais aussi  un pauvre  berger d’un troupeau de moutons,  voleur  patenté.

Pathelin, un avocat assez glauque,  n’a guère de clientèle  donc pas d’argent mais va quand même acheter une grande pièce de tissu  nécessaire à la confection d’une nouvelle robe chez  Guillaume Joceaulme, drapier. Grâce à  des flatteries, et de fausses promesses, il se débrouillera  pour emporter son achat en lui disant qu’il  le payera plus tard.
Mais quand  Joceaulme  ira chez lui pour réclamer son dû, il tombera sur un Pathelin presque à l’agonie et  veillé par  sa femme Guillemette, en pleurs, alors qu’il était le matin encore en excellente santé. Plus que surpris, écœuré mais, mis devant le fait accompli, le drapier repartira sans avoir été payé!

Suite du feuilleton: Thibault l’Agnelet,  employé par le drapier mais très peu payé, n’a pas hésité, pour compenser, à prélever des dizaines d’agneaux  pour se faire quelques sous.  Joceaulme a donc  porté plainte et a choisi Maître Pathelin comme défenseur; il  lui conseille de passer pour un débile, juste capable  d’émettre des bêlements quand le juge l’interrogera. Le drapier  explique au juge  que Thibault l’agnelet l’a escroqué. Mais il reconnaît  vite en Pathelin son client soi-disant  mourant, il  l’accuse de l’avoir roulé, si bien que le juge commence à s’impatienter devant ces deux affaires qui  se téléscopent et prononce alors  la plus célèbre réplique du théâtre français:  » Revenons à ces moutons ».
 Le juge compatissant, absout  le pauvre  berger  mais  refuse de s’occuper  de la plainte déposée par Joceaulme contre Pathelin qui veut alors se faire payer par le berger qui  a  vite appris le leçon et qui lui répondra aussi par des bêlements répétés… Riche contre pauvre, errements de la justice, pouvoir du langage au début de la pièce quand il s’agit de rouler quelqu’un, et ruse finale du pauvre contre un escroc: tous les ingrédients d’un comédie grinçante, à la fois lucide et virulente sur les travers de la société étaient déjà là, plus d’un siècle avant Molière…
Mais reste à savoir comment on peut la mettre en scène aujourd’hui. Richard Demarcy, lui, l’a adaptée en farce clownesque avec des comédiens-musiciens  d’origine très diverse, comme il dit:  un normand, un québécois, une franco-sénégalaise, un portuguais, et un franco-camerounais. Avec des costumes déjantés, assez clownesques et quelques accessoires, ils arrivent à  nous entraîner dans un délire poétique d’assez belle facture, en jouant de temps à autre  de l’accordéon, de la guimbarde, de l’ukulélé, des petites cymbales, etc… Et ce théâtre de foire  fonctionne bien-Demarcy  est passé maître dans ce genre d’exercice- du moins pendant les vingt premières minutes.
 Mais le système Demarcy semble  s’être quelque peu essoufflé et on ne retrouve pas la poésie folle du Songe d’une nuit d’été qu’il avait mis en scène  dans ce même Grand Parquet… La faute à quoi:  d’abord à une adaptation  approximative d’un texte qu’il a souvent truffé, pour faire « moderne » sans doute d’inventions, voire d’ajouts personnels pas toujours très heureux et on se demande bien pourquoi il n’a pas tenté d’en faire une véritable  version contemporaine, à partir du même scénario… Par ailleurs, la distribution est par trop inégale: Antonio da Silva (Pathelin)et Guy Lafrance (le drapier) sont  excellents mais Léontina Fall (Guillemette) semble être  ailleurs.
 Bref, c’est un spectacle sympathique mais  trop long, qui a du mal à trouver un véritable rythme, alors qu’il ne dure que 75 minutes! C’est d’autant plus dommage qu’aux meilleurs moments, cette petite  comédie passe  très bien… Surtout auprès des enfants.

Philippe du Vignal

Théâtre du Grand Parquet 35 rue d’Aubervilliers, jusqu’au 28 octobre, et ensuite en tournée, notamment en Algérie.


Archive pour 27 octobre, 2012

Cirque en capitales

Cirque en capitales, dans le cadre de Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture – Compagnie L’Entreprise et El Warsha Théâtre. 

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©Christophe Raynaud de Lage

Le centre culturel Aragon-Triolet d’Orly lance sa saison 2012-2013 avec fanfare et images sur grand écran. La salle est pleine de familles et de jeunes,attentifs à la proposition de programmation. Le ludique est à l’affiche et attend Le 6ème jour, inspiré de la Genèse et extrait du livre, Le clown Arletti, vingt ans de ravissement, de François Cervantès et Catherine Germain, que cette dernière interprète avec brio, subtilité et poésie, depuis une quinzaine d’années et dont ils signent ensemble scénographie et mise en scène.
L’actrice n’en est pas à son coup d’essai; en 1987, elle présentait, avec Dominique Chevallier, La curiosité des anges tous deux s’étant ralliés à la Compagnie L’Entreprise créée par François Cervantès, dès le commencement. Elle récidive en 2005 dans sa recherche sur le clown avec Arletti, son personnage, qu’elle enrichit cette fois de musique, travaillant avec Philippe Foch aux percussions, pour Le concert. En 2006 vient ensuite le spectacle, Les clowns, pour trois personnages, Arletti, Zig et Boudu, où ils s’attaquent au Roi Lear.

Auteur, metteur en scène et acteur, François Cervantès, fondateur en 1986, de la Compagnie L’entreprise,pose ses valises à la Friche Belle-de-Mai de Marseille avec un collectif composé d’une dizaine d’artistes, après dix-huit ans de nomadisme. Il y mène un projet de permanence artistique et développe un répertoire, en relation avec le public local, mettant l’accent, avec ténacité, sur la diffusion, dans et hors l’Hexagone. Il signe écriture et mise en scène des spectacles présentés et étend ses recherches au-delà des mots, vers d’autres langages qui racontent le monde d’aujourd’hui, expérimente les arts du cirque, de la marionnette, du masque, du clown.
Il confronte aussi ses travaux dans d’autres espaces culturels, s’imprègne, d’Asie et, entre art et rituel, interroge la notion de représentation.

En 2010, François Cervantès se rend au Caire et rencontre le Warsha Théâtre, fondé il y a vingt-cinq ans par Hassan El Geretly, qui donnait ainsi le coup d’envoi au théâtre indépendant égyptien. De discussions en échanges, la figure du clown se dégage comme un territoire de travail possible, dans un pays, l’Egypte, où cette figure n’existe pas. Un projet commun s’élabore et Hassan El Geretly, accompagné de Boutros Raouf Boutros-Ghali, complice artistique de longue date, francophone comme lui, relève le défi. Invités en résidence à Marseille, ce duo  se glisse dans l’exigeante technique du clown, qu’ils ajustent à leurs imaginaires, sous le regard de François Cervantès, qui écrit pour eux Le Prince séquestré et le met en scène, assisté de Catherine Germain.

Ce spectacle sera présenté en début d ‘année, dans le cadre de Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture, ainsi qu’un second spectacle réalisé par le collectif de L’Entreprise : Carnages, autre déclinaison de la figure du clown, une fête collective à partir du répertoire laissé par les célèbres clowns du XXème siècle : Pipo et Rhum, Dario et Bario, les frères Fratellini.
Rendez-vous est pris à Marseille, pour une rencontre sensible et festive entre la Compagnie L’entreprise et le Warsha Théâtre, qui lance des ponts de part et d’autre de la Méditerranée, à travers le clown, ce poète.

Brigitte Rémer

Prochaines représentations : Le 6ème jour, 23 et 24 novembre 2012, à 21h, salle des fêtes de Juzet d’Izaut – 8 décembre 2012, à 18h15, Arc en Scènes, La Chaux de Fonds – 30 et 31 mai 2013, à 20h30, Salle des Fêtes de Marvejols –  5 juin 2013, Théâtre de la Criée, Marseille – 27 au 30 juin 2013, Théâtre des Célestins, Lyon.

Dans le cadre de Marseille Provence 2013 : Carnages, 29 janvier au 23 février 2013, Théâtre Massalia I Friche la Belle de Mai et Le Prince séquestré, spectacle franco-égyptien, même lieu, du 5 au 10 février (htpp://compagnie-entreprise.fr/)

J’habite une blessure sacrée

J’habite une blessure sacrée d’après La Haine de l’Occident de  Jean Ziegler, mise en scène de Mireille Perrier.

J’habite une Blessure sacrée reprend le titre d’un poème de  Calendrier lagunaire d’Aimé Césaire.Le spectacle est adapté  du livre de  Jean Ziegler, étonnant sociologue suisse, homme de terrain, dont le combat à l’Unesco et au Conseil des droits de l’homme de l’O.N.U. a été récemment couronné par le prix littéraire des Droits de l’Homme…
Son  livre condense les souffrances passées et présentes des peuples du Sud et en révèle toute la dignité à venir. Mireille Perrier, formée à l’école du Théâtre National de Chaillot auprès d’Antoine Vitez, avait commencé un parcours dans le cinéma auprès de Claire Denis, Philippe Garrel et Amos Gitaï,  entre autres.
En 2008, elle avait réalisé un premier documentaire La scandaleuse Force du passé et nous avions pu voir  d’elle en 2010, déjà aux Métallos, Anna Politovskaïa non rééducable, une pièce  sur cette invincible journaliste russe,  assassinée par le pouvoir russe.
Les quatre comédiens  jouent  différents personnages qu’ils endossent rapidement et dépeignent avec un beau lyrisme dépourvu de pathos le combat inégal des peuples du Sud contre les puissances d’argent, et  leur mise en esclavage, le pillage de leurs terres et les moments-clefs de leur asservissement dont ils n’ont pas fini de se libérer…
Aucune simplification primaire dans la mise en scène de Mireille Perrier, et  le beau livre de Ziegler vit sous nos yeux, et le public  retient son souffle! Mais  les scènes finales sont sous-éclairées.Même si  la lumière de la libération des peuples du Sud n’est pas pour demain..

Edith Rappoport

Maison des Métallos de Paris jusqu’au 31 octobre. Théâtre de Fontenay-sous-bois, le 1 er  février 2013; Maison du Théâtre à Amiens, le  7 février; Théâtre Paul Scarron au Mans les 18, 19 février et Théâtre d’Evron le 21 février.

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