Pour un oui ou pour un non, et Cahin-Caha
Pour un oui ou pour un non, de Nathalie Sarraute, et Cahin-Caha, de Serge Valetti, mise en scène de David Géry.
Le Théâtre du Blog avait rendu compte de ces deux spectacles en leur temps, saluons leur retour. Jacques Brücher et Yedwart Ingey, dans la mise en scène de René Loyon, ont encore, si c’est possible, aiguisé leur interprétation sensible de Nathalie Sarraute. Deux virtuoses pour une partition diabolique. Car il faut bien que le Diable – le « diviseur » – s’en mêle, pour qu’un tout petit malaise, « ce qui s’appelle rien », sépare deux amis de longue date. Dire l’indicible, sans faiblir, et avec une parfaite exactitude : le travail de l’écriture est repris au scalpel, et au mot, par les comédiens, avec toutes les émotions et les maux qui s’ensuivent. Accouchement difficile du malaise, écorchures à l’ego, vertige jusqu’à l’absurde des abîmes intérieurs, jusqu’au rire, parfois, jailli du fond d’une horreur minuscule et incalculable : le spectateur, pris à témoin, souffre délicieusement avec les deux protagonistes, et en redemande.
Le duo de Valetti, dans un tout autre registre, parle bien de la même chose : comment dire. Comment dire ? Ces deux-là – Olivier Cruveiller, Claude Guyonnet (en alternance) et Christine Drillaud – sont pires que deux doigts de la main : deux moitiés du cerveau, celui qui dit oui et celui qui dit non, le plus et le moins, le j’y-vas-t-y et le j’y-vas-t-y pas, Cahin et Caha. Mais il ne s’agit pas que des tourments d’un auteur : les mots agissent, construisent, détruisent, et peuvent même tuer, si l’on veut. Du coq à l’âne, nous voici renvoyés à l’humain, et là… Voilà un spectacle totalement libre, terriblement drôle, qui n’élude pas le problème : être ou ne pas être… D’ailleurs, jadis ou naguère, Serge Valetti avait joué le rôle d’Hamlet.
Donc à voir, on l’aura compris. À ne pas oublier, toujours au Théâtre du Lucernaire, à 19h Lover letters, d’A.E. Gurney, avec Isa Mercure et Gilles Guillot : toute une vie d’amour, avec ses hauts et ses bas. L’interprétation est du côté des hauts.
Christine Friedel
Théâtre du Lucernaire T: 01 45 44 57 34
Pour un oui… du mercredi au samedi 18h30 et Cahin-Caha du mardi au samedi à 21h jusqu’au 24 novembre.