Les Jeunes

Les Jeunes, texte et mise en scène de David Lescot.

 

 

Les Jeunes les-jeunes-photoArtiste associé au Théâtre de la Ville, David Lescot présente actuellement, dans le cadre du parcours Enfance et Jeunesse, deux créations : Quarante-cinq tours(cf. Théâtre du Blog )et Les Jeunes.

Auteur, metteur en scène et musicien, Lescot, avec Les Jeunes,nous plonge dans l’univers des ados et de la musique. Il écrit un texte d’une grande liberté, déjanté juste ce qu’il faut, pour être compréhensible : l’histoire de trois garçons , Igor, Honoré et Jick, qui décident, à douze ans, de monter leur groupe rock, Les Schwartz, avec guitare, basse et batterie. La musique, pour eux ? ”Si le morceau était une voiture, la basse serait le moteur… La batterie ? Ça serait les roues, la guitare ? Ça serait le volant”, et les bons tuyaux qu’ils se passent, valent tous les contrats d’éducation artistique stockés dans les cartons :” Tu laisses la première corde à vide, tu appuies huit fois dessus avec ton pouce, tu mets ton doigt là, tu appuies huit fois dessus avec ton pouce, tu enlèves ton doigt, tu appuies huit fois sur la première corde avec ton pouce, tu mets ton doigt là, tu appuies huit fois dessus avec ton pouce”… etc.

Ils ont la niaque, ces garçons, et des idées ! Seule ombre au tableau et en concurrence directe, un groupe rock monté par trois filles, les Pinkettes, au moins aussi exotiques qu’eux, dans lequel la chanteuse chouine plutôt qu’elle ne chante, normal, “Y a pas de paroles”, justifie-t-elle. « Elles puent la mort !” disent-ils, en roulant des mécaniques, avant de leur rouler des pelles. Ils les observent, comme des entomologistes, et les voilà tous programmés dans un même Festival en Bourgogne, qui finit par tourner court.


Ce sont les mêmes actrices qui interprètent les garçons du groupe Schwartz et les filles des Pinkettes, avec un art du détail qui tue : coup de peigne balayage, petit gilet relooké, tee-shirt sur-ajouté, chaussettes qui relâchent sur les godasses : Jick joue Louna, Honoré devient Ouna et Igor se mute en Lou (Alexandra Castellon, Bagheera Poulin, Marion Verstraeten). Là est une clé du talent de l’auteur, qui nous entraîne, de simulacre en simulation, au rythme chaloupé du changement d’identité. La métamorphose est magique, on y croit à mort, et autant qu’elles : elles sont aussi spontanées en garçons qu’en filles et ont l’air, sur le plateau, de bien s’amuser. Les six jeunes, dans cette installation d’art brut, ressemblent à s’y méprendre, à ceux que vous rencontrez, au square, au collège, dans le métro ou au coin de votre rue, vous n’êtes pas dépaysé. On se croirait dans un studio de répétition ou une salle de concert et trois musiciens jouent in live, guitares, basse et batterie (David Lescot, Flavien Gaudon et Philippe Thibault).

Le texte livre le catalogue raisonné des catégories et marques de guitares électriques : la hollowbody et la solidbody, et vous prend à témoin des polémiques entre adeptes de la Gibson ou de la Fender.

Igor, Honoré et Jick, puis Louna, Ouna et Lou, racontent, chacun à sa manière, dans quel chaudron musical, ils sont tombés, à leur naissance, avec ou sans berceuse, de Led Zeppelin à Duerme negrito, prétexte aussi pour placer le décor, côté parents, petits croquis tendres mais bien has been, un autre monde (Martin Selze et Catherine Matisse sont les représentants du monde adulte) : “En ce temps-là, tout le monde veut être jeune. Et tout le monde veut être comme les adolescents. Tout le monde veut être adolescent. Aux adolescents, on donne tout. On prête tout. On vend tout. Mais aux adolescents, on prend tout. On vole tout ”.

Trapier, le manager propose ses services et propulse les Swartz du Printemps de Bourges à l’Olympia-première partie, puis au Zénith, les journalistes traquent. Une galerie de personnages défile de l’Ingé Son au chanteur de las Putas, du choeur du Public au chœur des Fanatiques. Les choses enflent, garçons et filles ne touchent plus terre, jusqu’à ce qu’aussi vite, tout se délite : ça parle d’absentéisme au collège, de défonce et de médicaments, d’extrêmes.

Le père d’Honoré fait une entrée remarquée et assène à son fils une râclée publique bien alignée, quoique tardive, avant de l’enfermer. On retrouve Louna, aphasique et anorexique, dans une clinique, après burn out, dépression et déconnexion… Le tableau s’assombrit et c’est un peu bâclé.

Le spectacle nous plonge dans le monde des ados, et de plein fouet, avec un texte rythmé où se côtoient l’humour et la violence, mais l’alphabet est codé : détournement, évitement, étanchéité entre générations, transgression, rites d’initiation, recherche d’appartenance, territoires symboliques, tel est ce temps des tribus, du clan, du pacte, des “riffs” sanglants, leur vérité, leur sociabilité.

Comme le dit Michel Serres : « Le monde a tellement changé que les jeunes doivent tout ré-inventer : une manière de vivre ensemble, des institutions, une manière d’être et de connaître…. Ils n’ont plus la même tête. Ils n’habitent plus le même espace. Ils n’ont plus le même monde mondial, ils n’ont plus le même monde humain  », dont acte.

Brigitte Rémer

 

Théâtre des Abbesses, du 8 au 24 novembre : 8, 9, 10, 24 novembre, à 15h – 13, 15, 16, 19, 20, 22, 23 novembre, à 14h30 – 13, 16, 17, 22, 23, 24 novembre, à 20h30, puis en tournée en France.


Archive pour novembre, 2012

La mouette

La mouette tous


La Mouette
d’Anton Tchekov, d’après les traductions d’André Markowicz et Françoise Morvan, mise en scène de Christian Benedetti.

Notre amie Christine Friedel vous avait dit ici tout le bien qu’elle pensait de cette mise en scène à bien des égards exemplaire, que Benedetti reprend aujourd’hui pour la troisième fois, avec une distribution légèrement différente. Mais avec le minimum de moyens exigé par la pièce: exit le samovar, les toiles peintes, la musique de cor, la grande terrasse de la maison, la  bibliothèque de salon, le jeu de dominos, les valises et les cartons d’Arkadina. Juste quelques chaises tubulaires d’école, c’est à dire probablement ce que le design français a produit de plus banal et de moins intéressant et à des millions d’exemplaires, une table, un drap blanc, une bouteille d’eau et deux verres.  et du côté costumes, plus  de grandes robes, chapeaux manteaux,parapluies, gants: tous les comédiens sont habillés avec des vêtements du quotidien d’aujourd’hui… Bref le strict  nécessaire au jeu.
img_9360C’est donc peu de dire que Christian Benedetti a fait le ménage dans les didascalies très précises laissées par Tchekov, mais c’est parfaitement cohérent avec le style de mise en scène qu’il a choisi: sobre, rigoureux, tout à fait crédible, avec pour seul décor, les murs nus de cet ancien entrepôt de vins. Tout est ici fondé sur la seule présence et l’art de l’acteur. Un peu dans la même ligne de cet Oncle Vania monté avec grand succès par Le Théâtre de l’Unité dans un pré ou devant une maison.
Oncle Vania joué  en alternance avec La Mouette au Théâtre-Studio par la même équipe. Et il y a bien longtemps que l’on n’avait aussi bien entendu le texte avec ces répliques fulgurantes et ces silences fabuleux où il se passe tellement de choses.

Même si Benedetti a parfois tiré un peu sur le texte (mais il a l’honnêteté de le préciser)qui est joué très vite, trop vite parfois, à tel point que l’on ne l’entend plus  bien  dans ce cas,les phrases à cause d’une diction  approximative. De ce côté-là, cela sent un peu le système et il faudrait arranger les choses.
Mais bon, on ne peut tout avoir et cela fonctionne quand même, en particulier dans les scènes à deux personnages: Macha/Trigorine, Nina/Trigorine, Arkadina/Trigorine, Arkadina/Treplev en privilégiant les gros plans. C’est d’une vérité indéniable et, jamais et depuis longtemps, on n’avait senti une pareille cristallisation des passions et des pulsions sexuelles, chez Tchekov (Arkadina fait même une pipe à Trigorine!Bon…
).
Et quand, par exemple,  Nina (Florence Janas) embrasse Trigorine (Christian Benedetti), comment ne pas y croire? Impressionnant de vérité et d’émotion! L’équipe de comédiens est des plus solides, même dans les petits rôles, entre autres, Marie-Laudes Emond (Macha) ou Stéphane Schoukroun (Medvédenko);  c’est une des bonnes pierres d’achoppement quand il s’agit d’apprécier une direction d’acteurs qui est ici tout à fait remarquable.
Après les approximations d’un Stéphane Valensi avec Le Ministre japonais du commerce extérieur, cette rigueur et cette intelligence scénique font  un bien fou!  » Tchekov, disait Stanislavski, est notre auteur pour l’éternité ». Rarement, en tout cas, depuis presque un siècle qu’il est joué en France, il n’a été mieux interprété . Nous vous rendrons compte très vite aussi d’Oncle Vania.
Mais le Théâtre-Studio est en  danger-sans doute Benedetti n’a pas tout réussi jusque là dans sa programmation-mais ses deux dernières mises en scène ont été saluées par le public comme par la critique.Alors que l’on sait depuis longtemps que ce type de recherche dans de petits lieux comme le Studio Théâtre, à l’écart des grandes institutions, est indispensable à la bonne santé du théâtre contemporain…

Philippe du Vignal

Théâtre Studio, en alternance avec Oncle Vania, jusqu’au 1er décembre.
Et, en tournée, du 11 au 14 décembre au Centre Dramatique National de Thionville Lorraine (57). Le 11 janvier,  au Théâtre Jean Marais à Saint-Fons (69).
Les 14 et 15 janvier,  au Théâtre Gérard Philipe à Champigny-sur-Marne (94). Du 22 au 25 janvier,  à La Scène Nationale de Cavaillon (84). Le 26 janvier , au Centre Culturel La Ferme des Communes à Serris (77).
Le 1er février,  aux Scènes d’ Ermont (95). Le 2 février, au Centre Culturel des Portes de l’Essonne à Juvisy-sur-Orge (91); du 5 au 9 février, au Théâtre des Deux-Rives, Centre Dramatique régional de Rouen (76). Le 12 mars, au Théâtre de La Place, à Andrézieux /Bothéon (44).
Le 12 février, au Théâtre de Lisieux (14). Le 15 février,  au Théâtre de Fontainebleau (77). Le 2 avril,  au Théâtre de Rungis (94). Le 4 avril, au Théâtre du Cormier. à Cormeilles-en-Parisis (95). Le 19 avril,  au Centre culturel Aragon-Triolet à  Orly (94). Et du 20 au 23 avril,  au Théâtre de l’Ouest Parisien à  Boulogne-Billancourt (92).

Le Journal d’une femme de chambre

Le Journal d’une femme de chambre d’Octave Mirbeau, mise  en scène de Jonathan Duverger.

 

Le Journal d’une femme de chambre journal-femme-de-chambre-11-victor-tonelli-artcomartExtase et amour, horreur et supplice, l’état de domesticité décrit par Mirbeau – même s’il conduit à la connaissance approfondie de l’être humain, via l’intimité des maîtres et la fréquentation de leurs obsessions charnelles – reste une condition non privilégiée.  Quand  on est  issu de la misère – un père marin disparu et une mère alcoolique, il faut à tout prix trouver du travail en ville, dans une » maison », et consentir aux caprices de la patronne,  tandis que le patron abuse de votre fragilité sociale et de votre soumission naturelle.
En fait, Célestine est portée sur la chose – elle aime ça – et si les humiliations pleuvent, elle s’en sort d’une autre façon, plutôt désinvolte et libre. Une observation en guise d’enseignement : les bourgeois puent , tout comme le faisait le lit de sa propre mère dépravée. Des rayons de soleil pourtant envahissent ses jours, même si une nuit profonde – celle de la mort – enserre un jeune amant, Monsieur Georges, qui trépasse dans le bonheur d’avoir connu l’amour dans les bras de Célestine. Émue, elle  apprécie la beauté du sentiment absolu et porte des fleurs mélancoliques sur la tombe de l’amant. La vie peut ainsi connaître des éblouissements salvateurs qui témoignent de la beauté pure de l’être.

L’existence pourtant ne fait pas l’impasse sur des situations plus inavouables et infiniment condamnables : Célestine pourrait se libérer de sa condition au prix d’une alliance avec un homme de peu de foi, violeur et assassin d’enfant qui l’attire, malgré cela ou bien à cause de cela. L’offre rêvée?  Se prostituer  dans un café du Havre : d’une servilité sociale face aux maîtres de ce monde, la jeune femme passerait  à l’aliénation du commerce avec la chair et le sexe. Qu’on soit pauvre ou riche, la même perte d’humanité et de conscience identifie tragiquement les êtres…
 Dans un décor soigné de Jean-Michel Appriou: la maquette d’une maison de maître avec ses petites fenêtres éclairées et un escalier en colimaçon, Natacha Amal incarne avec brio la femme de chambre, généreuse et plantureuse, telle une Hollandaise du bord de mer en sabots. Elle exprime avec sincérité et abandon les multiples états d’âme qui la traversent, douleur comme plaisir, amoureuse d’elle-même comme des hommes qui la satisfont dans sa chair.
Visage expressif, intense et varié: elle ne boude pas son bonheur d’être sur un plateau de scène. Une belle âme de comédienne dans un corps épanoui…

Véronique Hotte

Théâtre de l’Ouest Parisien, jusqu’ au 12 novembre.

Le Ministre japonais du commerce extérieur

Le Ministre japonais du commerce extérieur de Murray Schisgal, mise en scène de Stéphane Valensi.

Murray Schisgal est un auteur américain, par ailleurs scénariste de films, (86 ans ce mois-ci) que  Laurent Terzieff nous avait  fait connaître en France  il y a déjà un demi-siècle, avec des pièces comme Love ou Les Dactylos. Quant au Ministre japonais du commerce extérieur,  inspirée du célèbre Revizor de Gogol, il l’a située de nos jours à Dukpond dans le New-Jersey. On est dans la maison de Roger Eichelberry, le maire qui pense avoir raté sa vie et croit avoir trouvé un bon filon. Il a appris en effet que  le Ministre japonais du commerce extérieur allait  venir dans leur  ville et  il  a réuni  quelques-uns de ses  conseillers municipaux: le chef de la police, une juge ancienne alcoolo, un médecin directeur de clinique, personnages   en qui il a entièrement confiance, pour leur demander   de ne révéler la chose à  personne.
Il leur fait vite comprendre que cette visite peut être tout à fait providentielle pour leurs finances personnelles s’ils gardent le secret et s’ils savent investir à temps pour spéculer  sur des terrains à vendre: ils pourraient enfin réaliser le rêve américain que leur pays leur a refusés… Et la machine à fantasmer se met en marche chez ces petits-bourgeois, aussi cupides qu’aveugles, prêts à sauter dans le train fou de la corruption, au mépris de toute morale publique.

Le ministre et son  » assistante » arrivent donc en kimono, avec des vieilles valises; en fait, ce sont deux comédiens minables qui ont trouvé un bon moyen de se faire loger et nourrir pendant quelques jours et, si possible, de se procurer un peu d’argent sur le dos de leurs victimes, à coup d’enveloppes qu’ils acceptent  sans aucun scrupule.  L’épouse snobinarde du maire qui rêve de voyages et leur fille, ado modèle américain, en salopette bleue,Le Ministre japonais du commerce extérieur ministre10  qui rêve au mariage proposé par le ministre, ne sont pas non plus les dernières à croire en ce père Noël nippon qui le permettrait  de fuir leur milieu petit bourgeois. Comme ces deux agents immobiliers sans scrupule qui font penser aux deux Dupont, tout heureux de réaliser une  affaire juteuse. Le maire lui-même croit dur comme fer qu’il va pouvoir aller se balader au Japon, grâce au ministre, pour  faire une conférence  sur sa minable collection de couvertures amérindiennes. Bref, tout le monde rêve, sur des airs américains populaires…
 Bien entendu, la chute inévitable de cette farce cruelle ne tardera pas,  quand, premier accroc, l’assistante du ministre verra son amant allongé sur le canapé avec la fille du maire et quittera aussitôt la maison. Le soi-disant ministre japonais, sentant les choses mal tourner, trouvera un prétexte pour la retrouver et pour  se rendre d’urgence à l’aéroport… Et il y a une très belle scène finale, absolument silencieuse, où le maire, son épouse et leur fille sont assis avec leurs valises, prêts à rejoindre le ministre pour aller avec lui à Tokyo, entourés de leurs amis. Commençant à réaliser mais un peu tard, qu’il se font fait avoir…
Aucun protagoniste de cette galerie de personnages assez naïfs pour  croire gagner de l’argent facilement n’attire la sympathie, et ce jeu de massacre où deux minables petits escrocs réussissent, du moins quelques jours, à tromper les autres par de belles paroles, est de tous les temps, et de tous les pays. Les hommes sont toujours prêts à croire en des placements miracles, au mépris de toute réalité, et de toute morale…
 Et la farce cruelle concoctée par Schisgal, avec les procédés comiques que cela suppose, pourrait fonctionner… Mais pour qu’elle soit  crédible, et elle peut l’être même si les effets sont parfois gros, elle exigerait, bien entendu, une mise en scène  de haut niveau. Mais là, on est vraiment très loin du compte!  D’abord, à cause d’une dramaturgie et d’une direction d’acteurs d’une faiblesse exemplaire: surjeu, diction souvent approximative, accent soi-disant japonais qui se perd en route, manque de rythme, costumes qui se veulent drôles mais qui ne sont que vulgaires, scénographie maladroite pourtant signée André Acquart!
Pourquoi avoir, par exemple, avoir affublé les deux escrocs de kimonos et de perruques ? Le début du spectacle qui a beaucoup de mal à démarrer, est particulièrement accablant et cette satire qui se voudrait féroce de la société américaine, devient, dans cette mise en scène, assez ennuyeuse et tombe souvent  dans le plus mauvais boulevard. Stéphane Vensi semble avoir oublié que farce ne signifie surtout pas n’importe quoiM et il y faut m^me encore plus  de rigueur. Même un comédien tout à fait exemplaire comme Marc Berman (le maire) semble ici avoir eu du mal à trouver ses marques, et Nathalie Lacroix (son épouse), au jeu tout à fait correct, se met  ensuite à cabotiner puis à crier sans raison. Et on lui fait changer de costumes plusieurs fois, ce qui n’arrange pas les choses et n’est pas sans rappeler là aussi le boulevard!
Que peut-on sauver du naufrage? Pas grand chose, si ce n’est cette dernière scène où les personnages, en silence, disent tout en quelques minutes à peine: leur confiance ébranlée puis très vite la découverte de leur crédulité et  leur désarroi: il y a alors comme une immense tristesse qui s’empare du plateau pendant que le lumière baisse. C’est tout à fait impressionnant de vérité. Mais la belle réussite  de cette fin ne saurait compenser la médiocrité et la vulgarité de l’ensemble.
Alors à voir? Oui, mais pour quelques minutes seulement.  Donc à vous de décider si l’enjeu en vaut la chandelle!

Philippe du Vignal

Théâtre 13 (jardin) jusqu’au 16 décembre.

Round’up

Round’up , écriture scénique collective de Victor Gauthier-Martin, Clémence Barbier, Maïa Sandoz, création et mise en scène de Victor Gauthier-Martin, musique  de Dayan Korolic.


Après la Comédie de Reims et le Forum du Blanc-Mesnil, la compagnie Microsystème,  s’est installée pour trois ans au Théâtre de Chelles,  avec Round’up, sa dernière création. Round’up, c’est aussi le nom du trop fameux  désherbant  de la firme Monsanto. On se souvient peut-être de ce spot télévisé où un chien enterrait puis déterrait son os  que l’on avait enduit  de Round’up, sans aucun risque pour lui, nous annonçait-on! Mais on apprend  dans le spectacle que la firme avait été ensuite condamnée pour publicité mensongère …

C’est ici une sorte de cabaret autour des questions écologiques et de manipulation du vivant, où  Victor Gauthier-Martin retrouve ses complices Clémence Barbier, le musicien Dayan Korolic et  Maïa Sandoz, que l’on a vue aussi dans le collectif DRAO. Le spectacle dénonçe les abus des grandes firmes agro-alimentaires et on pouvait craindre que ce ne soit un  piège tendu par des comédiens parisiens style bobos mangeurs de tofu; et dès la première scène, il y a une  reconstitution d’ émission télé (ce qui est souvent incongru au théâtre),  où  débattent un pro et un anti OGM, à la suite d’un reportage sur Monsanto.
Mais, peu à peu, un vent de folie parcourt le plateau; aucun manichéisme  dans le spectacle. Le public est installé sur le plateau du théâtre, avec, en fond de scène, quelques  centaines de fauteuils vides, dispositif qui favorise  de belles images. Nous devenons ainsi des membres d’un groupe de rock, ou assistons une déclaration d’amour aux légumes du marché faite au loin  dans les rangées de fauteuils.
 Cette forme de théâtre quelque peu hybride, où l’on passe  d’une séquence à l’autre sans fil rouge dramaturgique peut décevoir mais ces 75 minutes  passent très vite! Les comédiens font un travail de qualité et Maïa Sandoz est  tout à fait juste dans la dernière scène où elle dit  ne plus savoir quoi manger depuis qu’elle joue dans ce spectacle, partagée entre sa faim et sa conscience.
C’est  d’ailleurs  à ce moment-là que tout explose: le cake d’amour de Peau d’Âne est  revisité, grâce  aux images  vidéo atroces d’un rat blanc enkysté, l’un de ceux qui ont « subi » la fameuse étude sur les OGM du professeur Gilles-Eric Séralini.

On ressort de là, quand même curieusement assez joyeux, et  le  spectacle, bien documenté, n’est pas anxiogène. Et, même si on a  appris beaucoup de choses, cela  reste du théâtre!

 

Julien Barsan

 

Théâtre de Chelles, les 9,  13 et 14 novembre.

Quarante cinq tours

Quarante cinq tours, texte et musique de David Lescot.

David Lescot est allé  voir travailler le chorégraphe et danseur Delavallet  Bidiefono à Brazzaville et a décidé de monter un spectacle avec lui. « Soit, dit-il, quinze pièces de trois minutes, comme « quinze morceaux sur un disque vinyle, avec entre elles aussi peu ou autant de liens ».
Il y a donc comme cela,  sur la scène nue, quinze duos ou simili duos qui sont les uns,  dits, les autres  presque murmurés, ou scandés, voire dansés, et accompagnés par David Lescot à la guitare électrique ou à la trompette. Il y a un petite scène  qui a trait à un épisode de la colonisation du Congo par la France, où David Lescot joue un roi congolais et Delavallet Bidiefono,  Savorgnan de Brazza. Et une autre scène où Delavallet Bidiefono se lance dans un monologue en langue kituba. Ce sont les deux seuls et courts moments où il se passe un un peu quelque chose…
Les petites pièces se succèdent, annoncées chacune par une jeune femme qui précise qui fait quoi, comme un sorte de litanie…Cela dure cinquante minutes mais l’ensemble, qui n’aurait jamais dû sortir d’un studio de travail, est à  peu près sans intérêt. On se demande bien pourquoi Emmanuel Demarcy-Motta a programmé ce genre de choses.
La jeune personne de huit ans qui nous accompagnait, regardait, très perplexe… Son commentaire a été des plus concis et des plus clairs: « Bof! » Qui a dit que la vérité sortait  de la bouche des enfants…

Philippe du Vignal

Théâtre des Abbesses jusqu’au 21 novembre.

L’Education populaire, Monsieur, ils n’en ont pas voulu

L’Education populaire, Monsieur, ils n’en ont pas voulu, conférence gesticulée de Franck Lepage.

Franck Lepage a mené la première partie de sa carrière dans la Culture, » la Culture avec un grand Cul « . Il y a renoncé depuis plusieurs années, ayant compris  » que la culture, ça sert à reproduire les pauvres, pas à les supprimer. On dit aussi que la culture, ça sert à reproduire les rapports sociaux. Moi, j’en ai eu marre de les reproduire « .
Nous sommes quelque 200 spectateurs-il y a beaucoup de militants de l’Éducation populaire-dans une  grande salle « rien-valente » comme dirait Ariane Mnouchkine, dans le quartier de la Petite Hollande  de Montbéliard, de plus en plus déserté par ses commerçants et ses habitants, malgré une architecture d’ensemble plutôt réussie, des services sociaux et un campus universitaire.
La conférence est annoncée pour un durée de quatre heures avec un entracte et un buffet ! Franck Lepage nous attend en bermuda, une chemise à fleurs, chaussé de bottes, un poireau à la main. Et il retrace son parcours avec une verve et un humour surprenants:  » Il m’est arrivé cette chose terrible, dit-il,  j’ai arrêté de croire à la Culture, alors, j’ai quitté Paris. Quand vous êtes dans la Culture, vous habitez Paris. C’est là que sont tous les cultivateurs chez nous.
Je ne le souhaite à personne…Vraiment, c’est une expérience terrible. À sept ans, j’avais déjà perdu le Père Noël. À dix-huit ans, j’avais arrêté de croire en Dieu. Déjà vous devenez beaucoup plus seul, puis à quarante-sept ans (…) je suis devenu athée culturel (…)j’avais fini par me dire que c’était une vraie religion…la religion de gauche, en somme. Une nouvelle forme de sacré: l’Art !
Quand je dis, j’ai arrêté de croire à la culture, c’est idiot comme phrase ! Non, j’ai arrêté de croire, pour être très précis, en cette chose qu’on appelle chez nous la démocratisation culturelle. C’est l’idée qu’en balançant du fumier culturel sur la tête des pauvres, ça va les faire pousser, et  qu’ils vont rattraper les riches ! ».
On n’en finirait pas de citer des extraits de cette épopée hilarante de Franck Lepage qui semble improvisée, mais dont le texte des plus savoureux a été édité par les éditions du Cerisier en 2006 à Bruxelles, à l’occasion du soixantième anniversaire des Centres d’Entraînement aux Méthodes Actives (CEMEA).
Franck Lepage s’était installé en Bretagne pour rompre avec les colloques qu’il devait animer et auxquels il avait cessé de croire, mais ses tentatives pour  faire pousser des tomates, des oignons et des poireaux  furent un échec. Il se cassa une jambe après une chute en parapente, ce qui lui fit annuler plusieurs conférences gesticulées (il en a donné plusieurs centaines). Le spectacle, disait-il n’avait toujours pas commencé…
Le spectacle : Franck Lepage s’était mis en tête de retrouver quelques grands anciens, qui avaient commencé à construire un ministère jusqu’alors partagé entre l’Éducation et les Beaux-Arts. et c’est la rencontre avec Christiane Faure qui avait joué un rôle important en 1944.  Après l’échec d’un premier contact téléphonique-il l’avait appelée Monsieur- elle lui donne enfin rendez-vous et lui raconte l’avortement de ce ministère rêvé, confié à Malraux qui plane dans de grands rêves de grandeur  mais qui abandonne rapidement l’Éducation populaire qui sera reléguée et oubliée par le ministère de la Jeunesse et des Sports.
Mais Christiane Faure refusa tout enregistrement et prise de notes… Franck Lepage s’est donc adonné à une série de portraits de personnages plus vrais que nature,  qui entouraient  Mademoiselle Faure quand elle permit la création du ministère de l’Éducation Nationale dans la France libre en Algérie avec le recrutement d’instructeurs d’éducation populaire avec  entre autres,  Chris Marker, Pierre Schaeffer… jusqu’à l’abandon de ce rêve populaire du ministère sous Malraux.
Cette conférence gesticulée hilarante est une œuvre de salubrité publique!

Edith Rappoport

Au centre  Jules Verne, Montbéliard, le  6 novembre. Coopérative d’Éducation populaire Le Pavé

www.scoplepave.org/

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Pour un oui ou pour un non, et Cahin-Caha

Pour un oui ou pour un non, de Nathalie Sarraute, et Cahin-Caha, de Serge Valetti, mise en scène de David Géry.

Le Théâtre du Blog avait rendu compte de ces deux spectacles en leur temps, saluons leur retour. Jacques Brücher et Yedwart Ingey, dans la mise en scène de René Loyon, ont encore, si c’est possible, aiguisé leur interprétation sensible de Nathalie Sarraute. Deux virtuoses pour une partition diabolique. Car il faut bien que le Diable – le « diviseur » – s’en mêle, pour qu’un tout petit malaise, « ce qui s’appelle rien », sépare deux amis de longue date. Dire l’indicible, sans faiblir, et avec une parfaite exactitude : le travail de l’écriture est repris au scalpel, et au mot, par les comédiens, avec toutes les émotions et les maux qui s’ensuivent. Accouchement difficile du malaise, écorchures à l’ego, vertige jusqu’à l’absurde des abîmes intérieurs, jusqu’au rire, parfois, jailli du fond d’une horreur minuscule et incalculable : le spectateur, pris à témoin, souffre délicieusement avec les deux protagonistes, et en redemande.
Le duo de Valetti, dans un tout autre registre, parle bien de la même chose : comment dire. Comment dire ? Ces deux-là – Olivier Cruveiller, Claude Guyonnet (en alternance) et Christine Drillaud – sont pires que deux doigts de la main : deux moitiés du cerveau, celui qui dit oui et celui qui dit non, le plus et le moins, le j’y-vas-t-y et le j’y-vas-t-y pas, Cahin et Caha. Mais il ne s’agit pas que des tourments d’un auteur : les mots agissent, construisent, détruisent, et peuvent même tuer, si l’on veut. Du coq à l’âne, nous voici renvoyés à l’humain, et là… Voilà un spectacle totalement libre, terriblement drôle, qui n’élude pas le problème : être ou ne pas être… D’ailleurs, jadis ou naguère, Serge Valetti avait joué le rôle d’Hamlet.
Donc à  voir, on l’aura compris. À ne pas oublier,  toujours au Théâtre du Lucernaire, à 19h Lover letters, d’A.E. Gurney, avec Isa Mercure et Gilles Guillot : toute une vie d’amour, avec ses hauts et ses bas. L’interprétation est du côté des hauts.

Christine Friedel

Théâtre du Lucernaire T:  01 45 44 57 34

Pour un oui… du mercredi au samedi 18h30 et Cahin-Caha du mardi au samedi à 21h jusqu’au 24 novembre. 

Le Chapeau de paille d’Italie

Le Chapeau de paille d’Italie d’Eugène Labiche et Marc Michel, mise en scène de Giorgio Barberio Corsetti.

 

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@ Christophe Raynaud de Lage

Ce Chapeau de paille (1851)est la première grande pièce de Labiche, créée au Théâtre du Palais-Royal   qui en avait déjà  écrit une bonne vingtaine, parmi les quelque 176 pièces  dont il fut l’auteur (dont quatre  seul). Les relations avec la Comédie- Française furent  assez houleuses et il ne réussit pas à faire jouer de son vivant Le Voyage de M. Perrichon qui ne fut monté qu’en 1906! Mais, depuis,  Labiche est l’un des auteurs les plus joués de la maison. Quant au Chapeau de paille,  ce n’est qu’en 1938 que le génial Gaston Baty la fera entrer au répertoire donc plus de 80 ans après! Depuis la pièce a été remontée en 86 à la Comédie-Française par Bruno Bayen, et un peu partout ailleurs, en particulier par Lavaudant au T.N.P. en 93, et très médiocrement par Jean-Baptiste Sastre à Chaillot. Et que Gilles Bouillon vient de créer à Tours, et que l’on pourra voir bientôt au Théâtre de la Tempête.
 Cette satire féroce de la bourgeoisie est donc historiquement datée. C’est tout un autre monde que le nôtre: 1863,  c’est encore le règne de Napoléon III; la France établit son protectorat sur le Cambodge et s’empare de Mexico, et l’année où la Pologne se soulève contre la Russie. C’est aussi la redoutable arrivée d’Amérique du phylloxéra qui ravage les vignes, et de la  fondation du Crédit Lyonnais. Manet peint son célèbre Déjeuner sur l’herbe. Bref, plus de cent cinquante ans après, et deux guerres mondiales, et une autre plus récente qui ne dit pas son nom mais qui s’appelle aussi curieusement  mondialisation, cette satire féroce de la bourgeoisie de l’époque, sur le thème du mariage, avec ses enchaînements de faits  qu’aucun des protagonistes ne contrôle plus,  garde une virulence peu commune. Et où les dialogues de Labiche préfigurent déjà le surréalisme et Ionesco: du genre: « Vous me dites: « Attends- moi, je vais chercher un parapluie ».-J’attends, et vous revenez au bout de six mois sans parapluie- Tu exagères! D’abord, il n’y a que cinq mois et demi… Quant au parapluie, c’est un oubli, je vais le chercher ». ou:  » Elle est  en deuil. -En robe rose? – Oui, c’est de son mari. »
Reste donc à savoir comment on peut monter aujourd’hui  ce vaudeville qui dérape sans arrêt sur  le thème fameux du trio infernal: mari, femme, amant autour  d’un voyage dans Paris à la recherche du double d’un chapeau. On est en effet au matin du jour J, où le le jeune Fadinard va se marier alors que le cheval de son fiacre a dévoré le chapeau de paille d’une jeune femme Anaïs, très occupée avec son amant militaire qui le poursuivra jusque chez lui, tant que  le futur marié  n’aura pas réussi à remplacer ce foutu chapeau. En effet, Anaïs a un mari particulièrement jaloux mais Fadinard est aussi suivi par tous les invités de son mariage, dont il n’arrive pas à se débarrasser.
Cette course-poursuite commence dans le salon de Fadinard, puis dans la boutique d’une modiste, ancienne amoureuse de Fadinard qu’il a plaquée sans ménagement puis dans le salon de la baronne de Champigny puis dans le salon de Bauperthuis dont « la femme est sortie acheter des gants de Suède à neuf heures moins sept minutes et n’est pas encore rentrée à neuf heures moins trois quarts du soir »- On ne fera pas croire qu’il faille douze heures cinquante deux minutes pour acheter des gants de Suède… à moins d’aller les chercher dans leur pays natal! « 
Quant au dernier et cinquième acte, il  se déroule dans la rue devant la maison de Fadinard.
  Cela fait donc beaucoup de lieux à traiter. Giorgio Barberio Corsetti, metteur en scène dont le travail  très soigné a toujours été initié par une envie de réécriture théâtrale, notamment des textes de Kafka,et sa mise en scène est fondée sur une scénographie  au vocabulaire comportant nombre d’élément plastiques. On n’échappe même pas à quelques nuages en vidéo… Ce qui pouvait paraître neuf quand on voyait ses spectacles il y une vingtaines d’années, a pris un coup de vieux.
Et quand il s’attaque à Labiche, il ne s’en sort pas très bien.  » J’ai eu envie, dit-il, d’articuler et de décliner les objets et des meubles directement liés à l’atmosphère du vaudeville et, à ses conventions, à ses thèmes: un canapé, un fauteuil des chaises. Dans mes spectacles, les décors sont toujours un autre langage. Ils ne sont pas là pour raconter mais pour évoquer ce qu’il ne faut pas raconter… ».
On a ainsi droit à des toiles plastiques transparentes couvertes de peinture blanche pour évoquer les travaux dans la maison de Fadinard, avec des chaises aux pieds chromés qu’on lance sur des murs magnétiques où ils restent évidemment collés. Il y a aussi un canapé  moderne dont on change la housse selon les actes et qui, monté sur vérins, qui fait basculer les personnages.
La boutique de Lara la modiste, a un décor très marqué  des références  à l’op’art  des années 70, (Soto, Morellet, Briget Riley, Vasarely) ou encore des  toiles peintes qui se déroulent pour évoquer le salon de la baronne de Champigny avec un cadre où  les protagoniste prennent la pose comme dans un véritable tableau, ce qui est assez drôle.

« Les objets dit- il, n’étant pas l’exacte reproduction exacte des choses, créent et favorisent des allers-retours dans l’imaginaire du spectateur ». Même s’il y a des trouvailles sur comme  un  échange de chaussures, cet exercice d’auto-satisfaction n’a rien de bien convaincant. Et ces étranges décors compliqués et pas vraiment réussis,  qui se succèdent sans unité scénographique  font un peu gadget et ne fonctionnent  pas plus que ces costumes  eux aussi sans beaucoup d’unité, dont Corsetti qualifie modestement leur créateur (Renato Bianchi) de génial (sic), plutôt inspirés des années 70,  comme cette mini-robe de mariée avec chaussettes blanches. Mais ce mélange fait un peu contre-sens: décidément vouloir moderniser des costumes relèves de la haute voltige!
La musique (guitares sèche et électrique, et violon), est, elle, assez envahissante, d’autant plus que les les trois musiciens- avec des des costumes rayés ou écossais,  sont toujours sur scène, ce qui n’est sans doute pas l’idée du siècle, si bien que les comédiens quand ils chantent, ont recours aux micros HF pour être entendus.
Ces petits couplets – et on en chante beaucoup!- qui cassent le rythme, et qui ne prennent  pas vraiment le relais de la parole étaient-ils bien nécessaires? Après tout, Labiche  ne les avait pas toujours utilisés…
Quant à la direction d’acteurs, elle est peu fluctuante, surtout au début et l’ensemble manque de rythme, alors que les acteurs s’agitent beaucoup et criaillent sans raison. Mais Pierre Niney (Fadinard), à l’impeccable diction,  dit bien  Labiche, et Christian Hecq (Nonancourt) reste drôle, même s’il  en fait des tonnes, surtout gestuellement (il était beaucoup mieux dirigé par Jérôme Deschamps dans Le Fil à la patte).

Malgré des effets clownesques faciles, et une  accumulation inutile d’éléments scéniques,  et le texte aux dialogues ciselés de  ce Chapeau de paille qui demanderait à être mis en scène avec beaucoup plus de nuances, résiste quand même au traitement de choc  de  Corsetti qui est passé à côté de Labiche qui  n’est pas rancunier. Les dialogues gardent leur  merveilleux poétique, si bien que l’on rit souvent et de bonne grâce.
Alors à voir? Oui, à condition de ne pas être trop exigeant- la première partie est souvent laborieuse-et on a connu Corsetti mieux inspiré! Et comment ne pas rire à ces répliques-cultes? C’est au moins le bon côté des choses… dans une période théâtrale de vaches maigres côté comique.

Philippe du Vignal

Comédie-Française ( en alternance) jusqu’au 7 janvier.

Saltbush

Saltbush par la compagnie TPO et Insite Arts

Saltbush ccc-saltbush2Prendre un enfant par la main est une réalité qui résume bien le spectacle présenté par l’union de deux groupes australien et italien, en coproduction avec le Teatro Metastasio Stabile de Toscan, à l’invitation du Musée du quai Branly, dans le cadre des manifestations autour de l’exposition Aux sources de la peinture Aborigène. Deux danseuses et un danseur emportent le jeune public dans les esthétiques du monde aborigène, aidé en cela par la musique de Lou Bennett, un artiste de la même origine .
Une traduction simultanée permet  de comprendre le récit, qui nous fait traverser une Australie imaginaire.Mais le principal élément de jeu est un « tapis magique », composé d’une projection au sol de 40 dessins mobiles conçus par un autre artiste aborigène Delwyn Mannix. Les enfants sont invités à explorer, à jouer et à danser avec les acteurs, au fur et à mesure que le paysage évolue autour d’eux. Ils rencontrent le trafic d’une ville, des animaux inconnus, et découvrent le boomerang. Ils jouent sous un ciel étoilé, grâce à une simple toile tendue au-dessus d’eux.
L’ensemble est esthétiquement très réussi, développant un monde fictif qui adhère aux propositions au-delà des mots. Il est rare de trouver un spectacle qui,  avec un langage commun aux parents et aux enfants, emporte autant l’adhésion, et de manière intelligente en cinquante minutes.

Jean Couturier

Spectacle joué au théâtre Claude Lévi-Strauss du 31 octobre au 4 novembre au théâtre Claude Lévi-Strauss. »

www.quaibranly.fr

www.insitearts.com.au

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