Par hasard et pas rasé

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Par hasard et pas rasé, mise en scène de Camille Grandville.


Après avoir quitté les dorures du théâtre Marigny, Philippe Duquesne a rejoint la rive gauche chère à Serge Gainsbourg. Il vient de créer un spectacle-concert très émouvant autour de la mémoire poétique et musicale de l’artiste. Ancienne élève du Conservatoire National d’Art Dramatique, Camille Grandville qui a mis en scène Philippe Duquesne , l’avait croisé chez Christian Schiaretti, le directeur du Théâtre National Populaire, puis chez Jérôme Deschamps et Macha Makeieff qu’il l’avaient  fait débuté au théâtre avec Lapin Chasseur en 89. Il collaborera avec pendant plus de dix ans, tout en  commençant  une riche carrière au cinéma.
Au Montfort, il incarne Francky, un chanteur qu’on pourrait de croiser dans les galas de petites villes de France. A l’occasion de cette soirée au Montfort, Francky et son orchestre  ( piano, contrebasse et batterie et  deux choristes) décident de rendre hommage au répertoire de Serge Gainsbourg.
D’emblée, le public se trouve transposé  ailleurs. La salle du Montfort,  a été transformé e en  cabaret accueillant, avec tables et buvette.  Franky va assister à l’arrivée des artistes, à leurs répétitions puis enfin au concert, et la scène, digne d’un petit Olympia, est prête à les accueillir. Les trois musiciens sont crédibles dans leurs personnages un peu ringards, et,  en formation jazz, sont excellents. Excellentes aussi les balances musicales  de  Dominique Forestier. Les deux choristes ont, elles, parfois des difficultés à incarner de fausses Brigitte Bardot ou Jane Birkin mais, à leur décharge,  ce  double décalage de personnages n’est sans doute pas  facile à trouver.
Sur scène, juste une petite table avec une  bouteille de whisky et un tabouret  où est posée une lampe qui semble venir directement du bar du Lutetia:   tout est prêt à pour accueillir le vrai Serge Gainsbourg, au cas où !  Philippe Duquesne grâce à cette mise à distance par le personnage de Francky, évite l’imitation au premier degré, très réaliste et convaincant dans son rôle, il lui donne une belle sensibilité, une élégance et une fragilité touchante. On pense  à Gérard Depardieu qui incarnait un chanteur de bal de province dans le film de Xavier Giannoli, Quand j’étais chanteur en 2006.
Jamais on n’avait sans doute aussi bien entendu le texte des poèmes et des chansons  de Gainsbourg et ce concert est aussi l’occasion de découvrir des chansons rares comme Par hasard ou pas rasé qui donne son titre au spectacle ou l’ambiguë, La poupée qui fait… L’évolution du jeu de Philippe Duquesne est remarquable,  et dans les dernières chansons dont la longue, (huit minutes) et très belle chanson Variations sur Marilou, ce n’est plus le comédien qui joue Francky, ce n’est pas Serge Gainsbourg qui chante, c’est lui-même, jubilant, emporté par la poésie et la richesse des textes.
Le public, visiblement heureux  et en communion avec l’acteur, ne s’y trompe pas. Comme le disait Serge Gainsbourg avec  réalisme: « Je suis déjà mythique. Je le dis sans orgueil. Seul ma mort y mettra fin. Et encore. Je passerai à la postérité pour quelques années ».

Jean Couturier

Théâtre Montfort jusqu’au 19 janvier.


Archive pour 25 décembre, 2012

La face cachée de la lune

La Face cachée de la lune,  spectacle-concert conçu par Thierry Balasse synthétiseurs: Laurent Dailleau, Yannick Boudruche, chant: Élisabeth Gilly, Eric Groleau, batterie:  Éric Löhrer, guitare:  Cécile Maisonhaute, piano:  Julien Padovani, claviers et guitare basse: Olivier Lété.

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© Thibault Walter

Nous voici transportés en 1973, dans le studio d’Abbey road où les Pink Floyd enregistrèrent leur album culte The Dark Side of the Moon (La Face cachée de la Lune). Le spectacle  ne reconstitue pas le fameux studio, mais révèle la cuisine des sons inventés par le groupe pop et que les musiciens ne pouvaient pas tous jouer en live. De ce fait,  ils utilisaient alors des bandes play-back (elles-mêmes pas toujours fiables, et l’un de leurs premiers concerts avait  dû être annulé suite à une panne de magnétophone).
Aujourd’hui, la technologie numérique et certains nouveaux outils analogiques permettent de les produire en direct. Il n’est pas question ici de rejouer un concert des Pink Floyd mais de faire voir et entendre le processus de création à l’œuvre. La scène du théâtre devient un espace d’expérimentation, flanqué d’enceintes et occupé par des instruments d’époque ( Synthi A, Minimoog, cabine Leslie, chambres d’écho et chambres de réverbération à ressorts).
Une zone est consacrée au travail de création sonore, de restitution des voix, de synthèse. Une autre est dédiée aux percussions et aux bruitages. Une autre zone enfin aux instruments mélodiques, piano acoustique, orgues, guitares. De nombreux réveils, une horloge et une caisse enregistreuse viennent agrémenter  les bruitages… Deux écrans révèlent les manipulations effectuées en direct par les musiciens sur les instruments. Le public découvre les gestes de recherche et les outils de création  mais aussi  les sonorités des seventies. 80 minutes  de concert contre 45 minutes pour les deux faces du disque:  c’est dire combien les musiciens vont loin dans l’exploration du champ sonore des Pink Floyd et développent les parties expérimentales de cette musique foisonnante qui était  la 
pionnière d’un genre nouveau.

A l’issue du spectacle, Thierry Balasse, maître d’œuvre de ce projet au long cours raconte comment, avec les musiciens, il a reconstitué les sons des Floyd après des heures et des heures d’écoute, et une quête patiente du matériel idoine.  Après le spectacle, Thierry Balasse a pris le temps de répondre  aux nombreuses questions d’un public conquis par cette démarche singulière..
Un spectacle à ne pas manquer.

Mireille Davidovici.

Spectacle vu en décembre au Théâtre de la Cité Internationale à Paris et au Théâtre du Kremlin-Bicètre le 11 janvier ;  Scène nationale de Mâcon le 15 janvier; scène nationale d’Angoulème les 18 et 19 janvier;  Théâtre de Cormeilles le  26 janvier; Théâtre de la Passerelle le 5 février, scène nationale  de Gap les 12 et 13 mars; Théâtre national de Bretagne à  Rennes le 12 avril;  La Filature, scène nationale de Mulhouse le 23 avril;  La Barbacane, Théâtre de Beynes (78) le 7 mai; Le Volcan, scène nationale du Havre 21 et 22 mai;  Odyssud à Blagnac.
compagnie Inouïe : http://inouie94.free.fr/

The second Woman

The second Woman mise en scène Guillaume Vincent, musique de Frédéric Verroère, direction musicale Jean Deroyer

 

 

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©Chantal D Palazon - Enguerand

Le théâtre des Bouffes du Nord, dont on ne sait s’il est en cours  de réfection ou  de démolition, était un décor tout désigné pour accueillir cet opéra décalé.
Le spectacle commence par des répétitions avec  une diva fantasque, un pianiste, un baryton, une colorature, une chanteuse et un metteur en scène.  Mais les incidents et les conflits se multiplient entre les interprètes, le metteur en scène, le décorateur…

Librement inspiré du film
Opening Night de John Cassavetes, où Gena Rowlands répète une pièce intitulée The Second Woman, le livret suit étape par étape une production, depuis les répétitions avec piano jusqu’à la première avec l’orchestre. Guillaume Vincent, le metteur en scène, parle d’un « opéra quasi pirandellien, où la réalité se frotte à la fiction, avec, comme personnage principal, la musique elle-même« . En effet, le compositeur,Frédéric Verrières, s’est amusé à revisiter le répertoire lyrique du XVIIIe au XXIe siècle ( Verdi, Puccini, Ravel, Debussy) tout en explorant le folklore (un chant des Balkans), la variété, via des imitations de Véronique Sanson ou Brigitte Bardot sans négliger l’usage du sampler.
Il a pour complice l’ensemble Court Circuit, familier de l’IRCAM et rompu aux expériences interdisciplinaires comme l’ »omni’ (objet musical non identifié) ; l’orchestre apparaît au dernier acte quand le rideau tombe en fond de scène : c’est alors que se remettent en place les pièces d’un puzzle musical réjouissant.
Pas seulement parodique,
The Second Woman envisage une véritable réflexion sur ce que peut être un opéra populaire et contemporain, et sonne ainsi le renouveau du genre.

Mireille Davidovici

Prochaine représentation:  le 3 janvier  au Blanc-Mesnil. A voir ou revoir sur Arte Web

 

 

 

S druge strane

S druge strane ( De l’autre côté) de Natasa Rajkovic et Bobo Jelcic En croate surtitré

 

 

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© Mara Bratoš

Ils sont quatre comédiens affalés sur un vieux canapé défraîchi qui attendent que le public s’installe pour commencer.
« Je devrais dire quelque chose sur ma mère », dit le fils qui n’a pas vraiment envie d’aborder le sujet ; le voisin en parle aussi, puis une amie fait état de cette femme en crise.
La pièce va se focaliser autour de ce personnage féminin. Des situations s’improvisent, quotidiennes mais tirées vers l’absurde ou la caricature. Les comédiens explorent la solitude de leurs quatre personnages, enfermés dans leur bulle, tentant maladroitement de communiquer, de s’aimer, de survivre dans un univers froid, voire hostile. Le plateau nu où surgissent quelques accessoires, une lumière crue qui ne varie jamais sauf pour passer au noir lors d’une panne, renforcent le minimalisme de cette théâtralité. Le théâtre est , comme en train de se fabriquer devant nous, sans artifice, brut, engendrant une certaine complicité avec le spectateur.
Cette incursion dans le théâtre croate que propose le Théâtre de la Colline ne convaincra pas tout le monde car le dispositif montre quelque faiblesse et a tendance à s’essouffler. Restent quelques scènes remarquables entre la mère et le fils ou la tentative de séduction du voisin.

Mireille Davidovici

 

 

Théâtre de la Colline jusqu’ au 20 décembre 2012

 

 

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